Le sens ultime de la nature émerge comme une clé pour comprendre la crise écologique actuelle. En remettant en question l’anthropocentrisme, cette recherche propose des approches théologiques novatrices, inspirées par Saint François d’Assise, pour rétablir l’harmonie entre l’homme, la nature et le Créateur.
Le paradigme eschatologique chez John Haught
Pour John F. Haught,354 la crise écologique à laquelle notre planète est confrontée est une occasion offerte à la théologie pour se remettre en question. Pour lui, il serait difficile d’imaginer comment une transformation en profondeur peut se produire sans identifier un point de repère commun.
Celui-ci doit être fondé sur « la conviction que l’univers est porteur d’un sens ultime ou que c’est un déploiement d’une promesse »355.
Une pensée communément admise « que le cosmos est un processus significatif, est selon Haught un préalable indispensable à un engagement mondial et intergénérationnel en faveur du bien-être de la terre ».356 Il considère ainsi la nature sacrée non seulement parce qu’elle a été créée par Dieu, mais principalement à cause de sa destinée ; elle est une promesse.
C’est cette dimension eschatologique de la nature qui permettra à l’homme de gérer intelligemment la crise actuelle.
Critique du matérialisme scientifique et du pessimisme cosmique
L’auteur commence sont investigations théologique en réagissant à la thèse des matérialistes et des pessimistes cosmiques357 qui soutiennent entre autre que le cosmos est dépourvu de sens.
John Haut trouve le propos de ces matérialistes contradictoire. « D’une part, ils considère le processus cosmique comme un non-sens, d’autre part, ils considèrent notre environnement terrestre digne de notre attention et de notre préservation »358.
L’auteur soutient que d’une manière entièrement compatible avec la science, « la nature peut vraisemblablement être interprétée comme ayant une signification, dans le sens qu’elle est porteuse d’une promesse de sens ultime et de beauté ».359 Haught doit son raisonnement à Alfred Whitehead, qui affirme que « nous valorisons la vie non pas pour sa fragilité, mais pour sa beauté ».360 « Ainsi, notre respect pour la nature et ses modèles écologiques est à situer dans une vision esthétique ».361
John Haught accuse les matérialistes scientifiques d’être à la base de l’aliénation fondamentale de l’esprit humain par rapport au monde naturel. L’esprit humain séparé du monde est alors supposé d’être capable de prendre le contrôle de l’univers auquel il n’appartient plus.
Son sens de domination lui permet de soumettre la nature à ses propres intentions. Comme conséquence, « c’est un mythe radicalement anti-écologique qui se met en place ainsi qu’une discontinuité nette entre le sujet humain isolé et l’univers insensé étudié par la science ».362
La vision théologique alternative
L’auteur formule aussi sa critique à l’égard d’une certaine vision théologique qui ne présente pas une réelle alternative écologique au pessimisme cosmique. Pour lui, « les religions sont souvent tellement concentrés sur l’ordre surnaturel qu’elles ont tendance à discréditer l’ordre naturel ».363
Toutefois, il trouve dans la théologie du process, une tentative plausible de recherche d’équilibre. Cette théologie propose une perspective théologique sur le cosmos qui, « d’une part, s’éloigne de l’anthropocentrisme excessif et de l’évasion religieuse, et d’autre part, se présente comme une alternative scientifique au matérialisme et au pessimisme cosmique ».364
________________________
354 Note biographique : John F. Haught est un théologien américain né le 12 novembre 1942. Il est diplômé du séminaire et de l’université St. Mary’s à Baltimore en 1964, puis d’un doctorat en théologie de l’Université Catholique d’Amérique à Washington DC en 1968 (Thèse: Foundations of the Hermeneutics of Eschatology). Il est distingué professeur de recherche à l’université de Georgetown. Il se spécialise dans la théologie systématique catholique romaine, avec un intérêt particulier pour les questions relatives à la cosmologie physique, à la biologie de l’évolution, à la géologie et au christianisme. De 1969 à 2005, Haught a enseigné au Département de théologie de l’Université de Georgetown à Washington, dont il était doyen entre 1990 et 1995. En outre, il a été professeur distingué de Landegger et de Thomas Healey, et, il a été professeur invité à l’Université pontificale grégorienne de Rome (2010). En 2002, J ohn Haught a reçu le prix Owen Garrigan pour la science et la religion, en 2004 le prix Sophia pour l’excellence théologique et, en 2008, le prix «Friend of Darwin» du National Center for Science Education. Il est auteur de plus de cinquante articles et nombreux ouvrages, notamment Science and Faith: A New Introduction (2012), Making Sense of Evolution. Darwin, God, and The Drama of Life (2010), Christianity and Science: Toward a Theology of Nature (2007), God after Darwin: A Theology of Evolution (2000, 2nd ed. 2007), Science and Religion: From Conflict to Conversation (1995), The Promise of Nature: Ecology and Cosmic Purpose (1993, 2nd ed. 2004), The Cosmique adventure, Science, Religion and the Quest for Purpose (1984). Consulté sur https://en.wikipedia.org/wiki/John_F._Haught le 30 avril 2019 ↑
355 J-F, HAUGHT, op.cit., p. 7. ↑
357 L’auteur mentionne surtout trois éminents sceptiques scientifiques, à savoir ; Carl Sagan, E.O. Wilson et Stephen Jey Gould. Ils ont très critique par rapport à l’interprétation religieuse et théologique du cosmos mais au contraire ils sont favorables quant au rôle de la religion dans l’atténuation de la crise écologique. Pour John Haut, cela est une contradiction grave. Cf. Ibidem p. 8. ↑
360 Cf. A-N, WHITEHEAD, Adventures of Ideas, New York, The Free Press, 1967. p. 252 cite par, J-F. The Cosmic Adventure, New York, Paulist Press, 1984, p. 97. ↑
361 J-F HAUGHT, op.cit., p. 28. ↑
Questions Fréquemment Posées
Quelle est la thèse de John Haught sur la crise écologique?
Pour John F. Haught, la crise écologique est une occasion pour la théologie de se remettre en question, et il soutient que la nature est porteuse d’un sens ultime.
Comment John Haught critique-t-il le matérialisme scientifique?
Haught accuse les matérialistes scientifiques d’être à la base de l’aliénation de l’esprit humain par rapport au monde naturel, créant une discontinuité entre le sujet humain et l’univers.
Quelle alternative théologique propose John Haught face au pessimisme cosmique?
Haught trouve dans la théologie du process une alternative qui s’éloigne de l’anthropocentrisme et propose une perspective équilibrée sur le cosmos.