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Comment l’analyse de cas révèle l’impact de l’instabilité des microsatellites dans le cancer colorectal ?

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🏫 Université Mostefa Ben Boulaïd- Batna 2 - Faculté des Sciences de la Nature et de la Vie - DEPARTEMENT DE MICROBIOLOGIE ET DE BIOCHIMIE
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de MASTER - 2019/2020
🎓 Auteur·trice·s
MAZOUZI Radja, MAAREF Chaima, BOUHENTALA Rania, SOUAHI Fatima Elzahra
MAZOUZI Radja, MAAREF Chaima, BOUHENTALA Rania, SOUAHI Fatima Elzahra

L’analyse de cas sur le cancer colorectal révèle que 15 % des tumeurs présentent une instabilité des microsatellites, un facteur clé pour le pronostic et le traitement. Cette recherche met en lumière des implications cruciales pour la détection précoce et la classification des cancers colorectaux, transformant ainsi notre compréhension de cette maladie.


Différentes voies de signalisation

Le développement du CCR implique diverses voies de signalisation qui régulent la prolifération, la différenciation et l’immortalisation cellulaires (Pandurangan et al., 2018). Des études récentes de séquençage ont identifiés plus de 80 mutations somatiques dans les exons des tumeurs colorectales. Cependant, un nombre limité de ces mutations se retrouvent dans un pourcentage important de tumeurs. Les gènes dont l’altération contribue à l’oncogenèse colorectale appartiennent principalement à cinq voies de signalisation (Roper and Hung, 2013).

La voie WNT/APC/β-caténine

La voie WNT joue des rôles biologiques divergents, tels que la régulation de l’homéostasie cellulaire et le maintien de l’auto-renouvellement cellulaire de l’embryogenèse à l’âge adulte. Cette voie favorise notamment la prolifération épithéliale intestinale et la différenciation de la crypte intestinale (Pandurangan et al., 2018). Par conséquent l’altération de cette voie est dans 90 % des cas l’élément initiateur du processus de cancérisation des muqueuses colique et rectale, et correspond à l’apparition d’un adénome précoce (Olivier et al., 2011).

Les mutations génomiques dans le CCR liée à la voie du WNT sont constituées de mutations du gène suppresseur de tumeur APC, qui est localisé dans la région chromosomique 5q21-q22 (Laurent-Puig, Agostini and Maley, 2010; Mármol et al., 2017). Ces mutations sont fréquemment des délétions ou des insertions de quelques bases, conduisent à la synthèse d’une protéine tronquée.

Elles inactivent une des deux copies du gène APC. L’autre événement est soit la perte de l’autre bras long du chromosome 5, soit la présence d’une seconde mutation sur l’autre allèle du gène APC. Le contrôle négatif du gène APC sur le cycle cellulaire se fait à travers l’interaction de la protéine APC avec la β-caténine.

La restauration de l’expression de la protéine APC dans les cellules du CCR qui manquent d’expression d’APC favorise l’apoptose. En l’absence de signalisation du ligand Wnt, l’APC se lie à la protéine d’échafaudage Axin pour favoriser la phosphorylation séquentielle de la région N-terminale de la β-caténine par la caséine kinase 1 et la glycogène synthase kinase-3β (GSK3β), ciblant ainsi la β-caténine phosphorylée pour ubiquitination et dégradation protéasomique subséquente.

Dans le contexte du CCR dans

lequel les deux allèles APC sont mutés, la perte de la protéine APC permet une accumulation cytoplasmique de β-caténine, qui se complexe ensuite avec les protéines de liaison à l’ADN de la famille TCF/LEF (facteur T-cell/activateur lymphoïde), et se déplace vers le noyau, où il entraîne la transcription de plusieurs gènes avec des sites de liaison à l’ADN TCF impliqués dans la croissance tumorale et l’invasion (Fig. 5) (Laurent-Puig, Agostini and Maley, 2010; Prossomariti et al., 2020).

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Figure 5 : Représentation schématique de la régulation de la voie de signalisation WNT (Pai et al., 2017).

La voie du TGF-β

Le facteur de croissance transformant β (TGF-β) agit comme un suppresseur de tumeur via l’arrêt de la prolifération cellulaire et l’induction de l’apoptose au cours des premiers stades de la progression tumorale (Abbaszadegan and Moghbeli, 2018). En général, le TGF-β est sécrété sous une forme inactivée par sa fixation à une protéine latente de liaison au TGF-β.

La régulation en aval de la signalisation TGFβ est activée lors de la liaison du ligand aux récepteurs de type Ⅱ (TGf-βRII) qui phosphoryle le récepteur de type Ⅰ (TGF-βRI), ce dernier fonctionne comme un propagateur pour transduire le signal en aval vers les protéines cytoplasmiques (SMADs 2 et 3). Une fois ces protéines sont phosphorylées, elles forment un complexe hétérodimérique avec SMAD4 et translocaliser vers le noyau et se lier à l’ADN via leur site de liaison à l’ADN (SBE) directement et réguler la

transcription des gènes impliqués dans l’arrêt de la croissance et l’apoptose (Fig. 6 ) (Zhao, Mishra and Deng, 2018). Cette voie de signalisation est activée dans

20 à 30% des CCR de phénotype CIN par mutations inactivatrices des gènes SMAD2 et

SMAD4, également elle est impliquée dans les CCR de phénotype MSI où le gène du TGFβRII est inactivé de manière biallélique dans 60 à 80% des cas (Laurent-Puig, Agostini and Maley, 2010). Cependant, selon plusieurs études, la mutation du TGFβRII a le potentiel de transformer des cellules épithéliales coliques normales en cellules malignes et elle entraîne la libération de néo-antigènes tumoraux et l’activation de l’immunité tumorale (Itatani, Kawada and Sakai, 2019).

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Figure 6 : Représentation schématique de la régulation de la voie de signalisation TGF-β

(Tecalco-Cruz et al., 2018).

La voie RAS/RAF/MAPK

La voie RAS/MAPK (Mitogen Activated Protein Kinase) est une voie de signalisation intracellulaire qui joue un rôle important dans la régulation de la prolifération, de la survie, de la différenciation et de la migration cellulaire, ainsi que de l’angiogenèse (Koveitypour et al., 2019). En général elle est activée par le biais d’un récepteur membranaire, lui-même stimulé par un facteur de croissance ou une cytokine qui va transmettre le signal extracellulaire à l’intérieur de la cellule (Martinelli et al., 2017).

Parmi les récepteurs des facteurs de croissance capables d’activer la voie RAS/MAPK ; l’EGFR (Epidermal Growth Factor Receptor) et les autres membres de la famille HER, le FGFR (FibroblastGrowth Factor Receptor), l’IGFR (Insulin-like Growth Factor Receptor) et le PDGFR (Platelet Derived Growth Factor Receptor) (Astrid Lièvre (1), 2010). Les récepteurs membranaires de ces facteurs de croissance ont la particularité d’avoir une activité enzymatique de phosphorylation de résidus tyrosine, appelée «activité tyrosine-kinase» permettant l’activation du récepteur par autophosphorylation (Koveitypour et al., 2019).

Les récepteurs activés du facteur de croissance de la tyrosine kinase de la membrane cellulaire, se produisent par le recrutement des protéines adaptatrices telles que Grb2 qui à son tour engage des facteurs d’échange de nucléotides guanine (GEF) comme SOS à la membrane cellulaire. Bien que les protéines RAS (K-RAS, N-RAS et H-RAS) possèdent activité GTP-ase intrinsèque, les GEF activés sont capables d’interagir avec les protéines RAS favorisant la formation de RAS-GTP en catalysant le remplacement du PIB en GTP, tandis que les GTPase stimulent

l’hydrolyse du GTP en RAS inactivant le PIB (Martinelli et al., 2017). Le GTP-RAS actif est capable de recruter les protéines RAF (A-RAF, B-RAF et C-RAF) à la surface cellulaire. Les protéines RAF sont normalement liées et donc inhibées par les protéines 14-3-3 du cytosol. Cependant, après la liaison au GTP-RAS, les protéines RAF sont libérées des protéines 14-3-3 et sont donc activées ; ils s’associent entre eux et forment des hétérodimères, qui sont ensuite capables de se lier et d’activer l’enzyme KSR1.

L’enzyme KSR1 relie les hétérodimères RAF à la protéine MEK. Par conséquent, les protéines RAF sont capables de phosphoryler et d’activer MEK, qui à son tour phosphoryle et active ERK. ERK pénètre ensuite dans le noyau cellulaire pour activer une gamme de facteurs de transcription, tels que Jun et Fos; ceux-ci se lient au domaine d’ADN AP-1 du noyau et transcrivent les gènes impliqués dans la prolifération cellulaire (Fig.

7) (Zenonos, 2013).

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Figure 7 : Représentation schématique de la voie Ras / Raf / MAP kinase (Frémin and Meloche, 2010)

Plusieurs éléments de preuve suggèrent que la voie ERK MAPK est un régulateur majeur de la prolifération cellulaire dans le cancer colorectal. La cascade Ras/Raf/MEK/ERK comprend plusieurs proto-oncogènes et des déréglementations, de plus la protéine Ras est mutée dans environ 36% des cancers colorectaux (Fang and Richardson, 2005).

La voie PI3K/AKT/mTOR

La voiePI3K/AKT/mTOR est une voie de signalisation intracellulaire importante responsable d’une variété d’activités cellulaires telles que la régulation de la croissance cellulaire, la prolifération cellulaire et l’angiogenèse (Zhao, Mishra and Deng, 2018). En effet, la plupart des protéines la constituant, sont des gènes suppresseurs de tumeurs ou des proto-oncogènes, dont la mutation peut favoriser le développement d’un processus tumoral (Dreyer, Raymond and Faivre, 2009).

La voie PI3K/AKT/mTOR est généralement activée par un récepteur membranaire, lui- même stimulé par un facteur de croissance membranaire (IGF, PDGF, EGF) ou une cytokine (interleukines 1, 2, 3, 4, 6…). La fixation d’un ligand sur le récepteur entraîne le rapprochement de 2 récepteurs (RTK), leur dimérisation, et l’activation par transphosphorylation de leur partie intracellulaire, par le biais de modifications conformationnelles, correspondant à l’activation du domaine tyrosine-kinase (Brotelle and Bay, 2016).

Le récepteur activé se lie alors à la sous unité régulatrice p85 de la PI3K qui a la possibilité de se fixer directement par son domaine SH2 sur les résidus tyrosine phosphorylés du récepteur. La sous-unité p110 catalytique de la PI3K, recrutée à la membrane, permet ainsi la génération de phosphatidylinositol 3, 4,5-triphosphate (PIP3) à partir du phosphatidylinositoldiphosphate (PIP2).

PIP3 recrute à son tour deux protéines kinases solubles, PDK1 et PDK2 (3-phosphoinositide dépendant kinase). PDK1 phosphoryle l’AKT sur la thréonine-308.Une deuxième phosphorylation catalysée par le complexe mTOR 2 (mTORC 2) sur la sérine-473 active complètement l’AKT (Danielsen et al., 2015). L’AKT entièrement phosphorylé active une multitude de cibles en aval.

Parmi ceux-ci, sans doute les plus importants sont le complexe mTOR 1 qui inhibe 4EBP1 (eIF4E binding protein-1) et active le facteur de transduction eIf-4E, favorisant la transcription de nombreux gènes intervenant dans la prolifération. PTEN est une molécule suppressive de tumeur, régule à la baisse la voie PI3K par déphosphorylation de PIP3.

Globalement, il a été signalé que la signalisation PI3K voie joue un rôle oncogène dans l’initiation et progression du CCR (Koveitypour et al., 2019).

La voie p53

La protéine p53 a été décrit comme le gardien du génome en raison de son rôle dans la conservation de la stabilité en empêchant la mutation des gènes. Le gène p53 (également connu sous le nom de TP53) est un gène suppresseur de tumeur (Laurent-Puig, Agostini and Maley, 2010). Dans les conditions homéostatiques ; l’activité de p53 dans les cellules est contrôlée par ses régulateurs négatifs MDM2 et MDM4 (murine/humaine double minute2/4), ces derniers régulent l’ubiquitination de p53 qui conduit à sa dégradation afin de maintenir ces concentrations cellulaires à des faibles niveaux inefficaces (Fig. 8) (Slattery et al., 2019).

En présence de stress cellulaire, la protéine p53 est activé. Elle se lie à l’ADN d’une manière spécifique pour transactiver une variété de cibles géniques ; la plus importante est l’inhibiteur de la kinase dépendante de la cycline (CDK) p21, qui inhibe le cycle cellulaire en bloquant la transition de la phase G1 à la phase S et de la phase G2 à la phase M afin de permettre aux cellules de réparer les dommages à l’ADN et de survivre.

De plus, p53 peut induire l’apoptose en activant la protéine Bax qui est un membre de la famille des protéines Bcl-2 et en augmentant l’expression des gènes Noxa et PUMA (Farooqi et al., 2019). L’expression de p53 peut également induire la mort en stimulant directement les mitochondries pour produire un excès d’espèces réactives d’oxygène hautement toxiques.

Aussi il induit l’expression de certains DR (récepteurs de la mort), tels que Fas, DR5 et PIDD, qui forment un complexe signifiant induisant la mort avec la caspase-8 (Li et al., 2019). La mutation p53 se retrouve dans environ 60% des cancers colorectaux, et une majorité de mutations sont de type faux-sens aux, suggérant un rôle oncogène du mutant p53 par des mécanismes de gain de fonction.

C’est l’étape clé de la transition de l’adénome à l’adénocarcinome (Nakayama and Oshima, 2019).

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Figure 8 : Régulation du niveau et de l’activité de la protéine p53 dans les cellules non stressées et stressées (Aubrey et al., 2018).

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2 Définition donnée par l’article 62 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001.

3 Auchan Les 4 Temps, La Défense.


Questions Fréquemment Posées

Qu’est-ce que l’instabilité des microsatellites dans le cancer colorectal?

L’instabilité des microsatellites est un phénotype hypermutable causé par la perte de l’activité de réparation des mésappariements d’ADN, présent dans environ 15% des cancers colorectaux.

Comment la voie WNT est-elle impliquée dans le cancer colorectal?

La voie WNT est impliquée dans la prolifération épithéliale intestinale et la différenciation de la crypte intestinale, et son altération est dans 90 % des cas l’élément initiateur du processus de cancérisation des muqueuses colique et rectale.

Quel est le rôle du facteur de croissance transformant β (TGF-β) dans le cancer colorectal?

Le TGF-β agit comme un suppresseur de tumeur en arrêtant la prolifération cellulaire et en induisant l’apoptose au cours des premiers stades de la progression tumorale.

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