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Analyse approfondie des systèmes de gestion des déchets en Europe : Quelles différences clés ?

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🏫 Ecole Nationale du Génie de l’Eau et de l’Environnement de Strasbourg
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Ingénieur - 2008
🎓 Auteur·trice·s
Delphine TASCONE
Delphine TASCONE

L’analyse des systèmes de gestion des déchets révèle des disparités surprenantes entre six pays européens, notamment en matière de responsabilité des producteurs. Ces différences essentielles soulignent l’importance cruciale de l’implication des acteurs, comme Eco-Emballages en France, pour une gestion efficace des emballages ménagers.


III. Éléments de comparaison

Objectif : comparer le fonctionnement et les performances des systèmes, en s’intéressant aux relations qu’ils entretiennent avec les différents acteurs impliqués dans la gestion des emballages ménagers.

NB : il s’agit bien ici d’aborder les principaux éléments de comparaison ; le volume de ce mémoire ne permettant pas de présenter tous les thèmes étudiés, ni même tous les systèmes étudiés.

A. Généralités sur les pays

Nous avons déjà vu dans la partie précédente que la législation sur les emballages est variable d’un pays à l’autre, aboutissant à un cadre différent pour les systèmes Point Vert. Le cadre légal n’est cependant pas la seule spécificité nationale à prendre en compte pour analyser les systèmes, il convient également de s’intéresser aux conditions économiques, démographiques… des pays.

1. Données générales

Le tableau ci-dessous fournit quelques données (source : Eurostat2) concernant la population et la situation économique dans les pays étudiés :

Tableau 4 : données générales sur les pays

France

Allemagne

Belgique

Espagne

Portugal

Tchéquie

population 2007

61.9

82.3

10.5

44.5

10.6

10.3

densité

115

230

340

90

115

130

taux d’urbanisation

77%

88%

97%

77%

66%

75%

PIB/hab (en SPA1)

27 600

28 100

29 300

26 500

18 600

18 400

On constate que les contextes démographiques et économique ne sont pas les mêmes entre les pays, justifiant certaines différences observées dans le fonctionnement des systèmes. On peut ainsi comprendre qu’un système desservant plus de 80 millions d’habitants comme en Allemagne, n’a pas la même ampleur qu’un système desservant 10 millions d’habitants comme en Belgique ; ou que la comparaison des coûts de gestion devra prendre en compte la différence de richesse entre les pays. La densité de population ainsi que le type d’habitat (rural, urbain) a également une influence directe sur la gestion de la collecte sélective.

1 SPA : Standards de Pouvoir d’Achat

2 Voir bibliographie pour adresse internet du site d’Eurostat

(organisation, moyens et coûts). La structure politique du pays (état fédéral comme en Allemagne, en Belgique ou unitaire comme en France, au Portugal) conditionne aussi les relations qu’entretiennent les systèmes avec les autorités publiques.

2. Consommation d’emballages

Le mode de vie des populations, les habitudes de consommation, conditionnent fortement la production de déchets, et donc de déchets d’emballages. Si la consommation d’emballages par les ménages est variable, en tout cas la proportion d’emballages dans les ordures ménagères semble être assez homogène dans les différents pays étudiés. Il ressort des entretiens avec les membres des organismes que la part des emballages dans les déchets ménagers est estimée à 20-30% en poids et environ 50% en volume.

Le tableau ci-dessous donne des estimations de la consommation d’emballages par les ménages, d’après les discussions avec les organismes :

Tableau 5 : consommation d’emballages ménagers

France

Allemagne

Belgique

Espagne

Portugal

Tchéquie

consommation

d’emballages par les ménages (en kg/hab.an)

86

85

75

82

85

55

La comparaison de ces chiffres est délicate car le périmètre d’emballages considéré n’est pas forcément le même (emballages consommés par les ménages ou emballages potentiellement récupérables par le circuit municipal), ni la méthode d’estimation. Il n’existe malheureusement pas à l’échelle européenne de données sur les emballages ménagers seulement. On peut trouver seulement des informations sur les déchets municipaux générés et sur les déchets d’emballages produits (industriels et ménagers), voir Annexe 4.

On peut par s’étonner de la consommation portugaise annoncée qui est très élevée alors que le Portugal n’est pas un pays par ailleurs considéré comme un gros producteur de déchets. En tout cas la consommation en Tchéquie est nettement plus faible que dans les autres pays, et cela est plus cohérent avec d’autres données sur la production de déchets et déchets d’emballages que l’on peut trouver. La France, de l’Allemagne, et l’Espagne ont des consommations élevées, qui sont comparables. La Belgique affiche une consommation un peu plus faible.

B. Relations avec les pouvoirs publics

1. Agrément

Création des organismes

Comme nous l’avons vu, tous les organismes ont été créés à l’initiative des industriels de l’emballage (qui constituent aujourd’hui la grande majorité des actionnaires des organismes) pour répondre à leurs obligations légales. Cependant, ils n’ont pas tous été mis en place au même moment :

pays

France

Allemagne

Belgique

Espagne

Portugal

Tchéquie

nom organisme

Eco-Emballages

DSD

Fost Plus

Ecoembes

SPV

Eko-Kom

date de création

1992

1991

1994

1996

1996

1997

Tableau 6 : date de création des organismes

Eco-Emballages et DSD ont été créés avant la directive européenne alors que dans les autres pays, les systèmes se sont mis en place après. Du point de vue du statut juridique, tous les organismes ont été créés sous forme de sociétés à but non-lucratif. Cependant en Allemagne, après contestation de la situation de monopole de DSD, le marché a été ouvert à la concurrence et DSD est devenu une société privée à but lucratif.

Agrément

La majorité des pays européens exigent des organismes qu’ils soient reconnus officiellement, et ce le plus souvent via un agrément écrit, délivré par les autorités publiques ou leurs représentants. Ce document autorise officiellement l’organisme à exercer et précise les conditions de son fonctionnement (mission, relations avec les différents acteurs, contrôle de l’organisme). Ce ne sont pas les mêmes entités qui délivrent l’agrément :

Tableau 7 : autorité délivrant l’agrément

Eco-

Emballages

DSD

Fost Plus

Ecoembes

SPV

Eko-Kom

Niveau

autorisation

national

régional

national

régional

national

national

Organisme

autorisant l’exercice

ministère environnement

Länder

(16)

CIE*

communautés autonomes (17)

ministère environnement

ministère environnement

Source : entretiens avec les organismes

CIE : Commission Interrégionale de l’Emballage

L’échelle à laquelle est établie l’autorisation reflète assez bien l’organisation politique des pays :

– Dans les états ou le pouvoir est fortement décentralisé, comme en Allemagne ou en Espagne, c’est chaque région qui autorise l’organisme à exercer sur son territoire ;

– Dans les autres pays, l’agrément est établi au niveau national par le ministère de l’Environnement.

La Belgique, bien qu’étant un état fédéral, a traité la question des déchets de manière homogène dans les trois régions, en créant au niveau national la Commission Interrégionale de l’Emballage (CIE), une institution publique veillant à la gestion harmonisée des emballages sur l’ensemble du territoire belge.

L’agrément doit être renouvelé régulièrement, environ tous les 5 ans pour tous les systèmes. En Espagne et en Allemagne, ces renouvellements représentent donc un travail beaucoup plus important, puisque chaque autorisation doit être négociée localement, et à des moments différents.

2. Périmètre d’action

L’agrément précise notamment les types d’emballages dont la responsabilité peut être transférée à l’organisme. Nous avons déjà vu grossièrement la répartition entre emballages ménagers et industriels, mais voici dans le tableau ci-dessous les définitions précises1 (ou tout au moins leurs traductions) des emballages pouvant être pris en charge par les systèmes :

Tableau 8 : types d’emballages pris en charge par les systèmes

système

définition du périmètre d’emballages

Eco-

Emballages

emballages dont les détenteurs finaux sont les ménages

DSD

emballages de ventes dont les détenteurs finaux sont des particuliers (à domicile ou en des points comparables)

Fost-Plus

emballages ménagers selon la « liste grise », à usage unique ou réutilisables

Ecoembes

emballages susceptibles d’être acquis par les particuliers (sauf les emballages en verre)

emballages industriels et commerciaux si collectés par la municipalité

SPV

emballages non-réutilisables

Eko-Kom

tous emballages

Cette comparaison de terminologie est intéressante car d’une part elle permet de voir que chaque système a en fait sa propre définition de son périmètre d’emballages, et d’autre part elle permet de prendre conscience que la dualité « emballages ménagers vs emballages industriels » est finalement bien plus complexe qu’il n’y paraît.

Eco-Emballages, DSD et Fost Plus n’ont clairement pas en charge les emballages industriels, alors que SPV et Eko-kom les ont ; mais le cas d’Ecoembes est en revanche plus ambigu. Afin de ne pas être équivoque, le système belge a défini une « liste grise » d’emballages, recensant la totalité des emballages susceptibles d’être mis sur le marché belge, avec pour chacun son appartenance à la catégorie « ménager » ou « industriel ». La différence n’est pas aussi marquée dans les autres pays.

Mais c’est encore la notion d’emballages ménagers qui reste la plus difficile à cerner1 :

Tableau 9 : définition des emballages ménagers

système

définition du périmètre « emballages ménagers »

Eco- Emballages

emballages des produits consommés ou utilisés par les ménages à domicile

DSD

emballages de ventes dont les détenteurs finaux sont des consommateurs

privés (à domicile ou en des points comparables)

Fost-Plus

emballages de produits considérés comme ménagers selon la liste grise

Ecoembes

emballage dont le produit est susceptible d’être utilisé ou consommé par un

particulier, indépendamment du lieu d’utilisation ou de consommation

(NB : verre exclu)

SPV

emballages urbains non réutilisables

Eko-Kom

emballages de ventes

La définition d’Eco-Emballages est en fait la plus restrictive puisqu’elle se limite aux emballages des produits consommés par les ménages à domicile seulement. Ainsi par exemple les emballages de produits consommés/utilisés par les particuliers au bureau, aux restaurants, au café… ne font théoriquement pas partie du périmètre d’Eco-Emballages.

Selon la définition belge, le caractère ménager ou industriel de l’emballage ne dépend en fait pas, comme en France, du destinataire du produit emballé ou de son lieu de consommation, mais dépend de la nature même du produit. Certains produits sont clairement industriels ou ménagers, mais lorsque ce n’est pas le cas, des limites de quantités ou de volumes permettent de trancher. Ainsi, une caisse de 3 bouteilles de vin est-elle un emballage ménager alors qu’une caisse de 6 bouteilles est un emballage industriel. De même, un pot de confiture de 500g est un emballage ménager alors qu’un pot de 1kg est un emballage industriel.

Les définitions espagnoles, allemande, portugaise et tchèque, bien que n’utilisant pas la même terminologie, désignent en fait quasiment le même périmètre, celui que nous appellerions en français les déchets ménagers et assimilés. C’est-à-dire que sont inclus dans le périmètre d’agrément tous les emballages dont les déchets se retrouvent a priori dans le circuit de collecte municipal. Aux emballages ménagers au sens strict (à domicile) se rajoutent donc les emballages des bureaux, des petits commerces, des cafés et restaurants…

A noter que les tchèques et les allemands utilisent la notion de « sales packaging », emballages de ventes, mais leur définition est en fait plus large que celle de la directive européenne qui normalement se limite à l’emballage primaire et ne prend pas en compte l’emballage de groupe (film autour de 6 bouteilles d’eau ou carton autour de pots de yaourts), ce qui est le cas de leur définition.

Pour le système belge il est plus difficile d’évaluer l’étendue du périmètre des emballages concernés, mais il semblerait après étude de la liste grise (disponible sur le site internet de Fost Plus) que la situation soit plus proche de celle des autres pays que de la France. Les emballages des produits consommés/utilisés dans les bureaux, les cafés, restaurants… peuvent pour la plupart être déclarés comme ménagers.

La France semble donc être le seul pays où seuls les emballages ménagers consommés à domicile sont déclarés.

3. Contrôle, Reporting

Comme les organismes ont une mission d’intérêt général, ils sont contrôlés par l’Etat, ou des organismes dérivés :

Tableau 10 : organismes de contrôle

Eco-

Emballages

DSD

Fost

Plus

Ecoembes

SPV

Eko-Kom

organisme

de contrôle

ADEME*

Bundeskartellammt

Gemeinsame Stelle

CIE

CA**

APA***

ministère environnement

Source : entretiens avec les organismes

ADEME : Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie

CA : Communauté autonome

APA : Agência Portuguesa do Ambiente

Le contrôle des organismes consiste essentiellement en deux objectifs : contrôler

l’activité générale (ce sont en effet tous à l’exception de DSD des sociétés qui ne doivent pas faire de profit) ainsi que vérifier l’atteinte des objectifs de recyclage, valorisation fixé dans l’agrément.

Eko-Kom dépend directement du ministère de l’environnement. Eco-Emballages, Fost Plus et SPV sont contrôlés par des organismes publics responsables de la problématique des déchets (uniquement des emballages dans le cas de la Belgique).

L’Agência Portuguesa do Ambiente (APA) est l’équivalent portugais de l’ADEME, qui dépend directement du ministère de l’environnement.

Ecoembes, du fait de ses agréments régionaux différents, confie le contrôle de l’activité de l’organisme à chaque communauté autonome.

La situation de l’Allemagne du fait de la mise en concurrence est notoirement différente. Le Bundeskartellammt est l’organisme chargé de veiller au respect de la concurrence. La Gemeinsame Stelle est la chambre de répartition qui partage la responsabilité des coûts entre les différents systèmes concurrents, selon leur part de marché. DSD doit rapporter toutes ses données à ces deux organismes.

En dehors de l’Allemagne, le contrôle se fait par la transmission du rapport d’activité annuel et si besoin d’un rapport sur d’autres données. D’après les échanges avec les responsables des différents pays, il semblerait que DSD soit très contrôlé (mais la situation est différente). Eco-Emballages et Fost Plus travaillent en collaboration étroite avec l’organisme qui les contrôle : contacts réguliers, études et projets communs.

SPV et Eko-Kom semblent en revanche avoir un contrôle plus souple : ils doivent simplement communiquer leur rapport d’activité annuel.

________________________

2 Définition donnée par l’article 62 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001.


Questions Fréquemment Posées

Quels sont les principaux éléments de comparaison des systèmes de gestion des déchets en Europe?

L’analyse se concentre sur le fonctionnement et les performances des systèmes, ainsi que sur les relations qu’ils entretiennent avec les différents acteurs impliqués dans la gestion des emballages ménagers.

Comment la législation sur les emballages varie-t-elle d’un pays à l’autre en Europe?

La législation sur les emballages est variable d’un pays à l’autre, ce qui aboutit à un cadre différent pour les systèmes Point Vert.

Quelle est la consommation d’emballages par les ménages dans les pays étudiés?

La consommation d’emballages par les ménages est estimée à 86 kg en France, 75 kg en Allemagne, 82 kg en Belgique, 85 kg en Espagne, 55 kg au Portugal et 55 kg en Tchéquie.

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