La méthodologie d’étude sur le paludisme révèle que seulement 52% de l’incidence de cette maladie à N’Djamena est expliquée par des facteurs climatiques. Cette recherche met en lumière l’importance cruciale des éléments socio-économiques et environnementaux dans la dynamique du paludisme, redéfinissant ainsi notre compréhension de cette problématique.
Université de Bangui
Faculté des Lettres et Sciences Humaines
Département de Géographie
Laboratoire de Climatologie, de Cartographie et d’Études Géographiques (LACCEG)
Mémoire de Master
Géographie et Dynamique des Milieux Physiques (GDMP)
Spécialité :
Climatologie et Changements Globaux (CCG)
Présentation de projet
« Rythmes climatiques saisonniers et paludisme dans la ville de N’Djamena, Tchad »
Bichara About Brahim
Matricule: BRAB041095/42020
Sous la direction de :
Prof. Jean-Claude Bomba
Année académique :
2022
Résumé
L’objectif de cette étude est de déterminer l’impact du climat sur le paludisme dans la ville de N’Djaména. Il s’agit de démontrer les effets des rythmes et régimes climatiques sur les pulsations saisonnières de l’incidence du paludisme. Une approche déterministe et une méthode descriptive essentiellement quantitative a permis de comprendre d’abord le climat dans sa normale, ses variations et ses tendances.
Puis la mise en relation des différentes variables climatiques (pluviométrie, hygrométrie et température) avec l’incidence du paludisme, et c’est à travers le coefficient de corrélation de Pearson. Il ressort de cette étude que le paludisme dépend faiblement de la pluviométrie (0,46), fortement de l’hygrométrie (0,67) et présente une faible variation négative avec la température (-0, 27).
Ce qui fait qu’en tout, le coefficient de détermination est de 0,52, d’où le climat n’explique qu’à 52% l’incidence du paludisme dans la ville de N’Djaména. Les résultats de l’enquête de terrain démontrent que certains facteurs socioéconomiques et environnementales notamment la mobilité des populations, l’accessibilité aux centres de santé et la disposition des gites larvaires agissent en déphasage du climat et peuvent expliquer les 48% des causes de l’incidence du paludisme non déterminées par les calculs de corrélations.
Mots clés : Rythmes climatiques, paludisme, saison, N’Djaména.
ABSTRACT
The objective of this study is to determine the impact of climate on malaria in the city of N’Djamena. The aim is to show the effects of climatic rhythms and regimes on the pulsations of the incidence of malaria. A deterministic approach and an essentially quantitative descriptive method made it possible at first to understand the climate in its normal, its variations and its trends.
Then the linking of the different climatic variables (rainfall, hygrometry and temperature) with the incidence of malaria, and this is through the Pearson correlation coefficient. It emerges from this study that malaria depends weakly on rainfall (0.46), strongly on hygrometry (0.67) and presents a weak negative variation with temperature (-0.27). This means that in all, the coefficient of determination is 0.52, hence the climate only explains 52% of the incidence of malaria in the city of N’Djamena.
The results of the field survey show that certain socio-economic and environmental factors, in particular population mobility, accessibility to health centers and the layout of breeding sites, act out of phase with the climate and can explain 48% of the causes of the Malaria incidence not determined by correlation calculations.
Key words: climatic rhythms, malaria, season, N’Djaména.
SOMMAIRE
SOMMAIRE iii
SIGLE ET ABREVIATION iv
REMERCIEMENTS vii
CONTEXTE 1
JUSTIFICATION 3
Délimitation spatiale de l’étude 6
CHAPITRE 1 : POINTS DE CONNAISSANCES ET APPROCHE METHODOLOGIQUE 8
Revue de littérature 8
Définition Concepts 11
Données et méthodes 12
CHAPITRE 2 : PRESENTATION DU PALUDISME 22
Origine, propagation et géographie du paludisme 22
Faciès palustres dans le monde 25
Vecteurs du paludisme 28
Cycle du plasmodium 29
Facteurs de transmission et déterminants du paludisme 32
CHAPITRE 3 : CARACTERISATION DU CLIMAT 34
Dispositions climatiques du Tchad 34
Rythmes et régimes pluviométriques de la ville de N’Djaména 36
Humidité relative 46
Régime et rythme thermométrique. 47
CHAPITRE 5 : RYTHMES CLIMATIQUES ET RYTHMES DU PALUDISME 50
Corrélation pluviométrie et incidence du paludisme 50
Corrélation hygrométrie et incidence du paludisme 53
Corrélation température et incidence du paludisme 56
CHAPITRE 5 : IMPACT DES FACTEURS SOCIO-ENVIRONNEMENTAUX SUR LE PALUDISME 60
Aspects sociodémographiques 60
Facteurs environnementaux 64
Perceptions individuel de l’impact du climat sur le paludisme 68
RESULTATS 70
DISCUSSION 71
CONCLUSION 74
BIBLIOGRAPHIE 75
ANNEXES 83
RESUME iii
CONTEXTE
Le paludisme, premier fléau parasitaire mondial, a marqué l’histoire de l’homme de manière constante et grave. Aujourd’hui, c’est à la fois l’une des maladies les plus répandus à travers le monde et l’une des plus sensibles aux conditions ambiantes. Selon le dernier rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS, 2020), le taux de mortalité dû au paludisme est le plus élevé dans le monde avec 409 000 décès pour 229 millions des cas enregistrés (2020). Mais, ce nombre de décès semble bien loin de la réalité car de nombreux cas d’infections échappent à la comptabilité sanitaire. On évoque au bas mot plus de 2 millions de morts, ce qui parait plus proche de la réalité.
La Région Africaine de l’OMS supporte une part disproportionnée de la charge mondiale du paludisme car en 2020, 92 % des cas de paludisme et 93 % des décès qui lui sont liés sont survenus en Afrique. Ces chiffres qui placent l’Afrique loin devant l’Asie du Sud-Est (5 %) et la région de Méditerranée orientale (2 %).
Sur ce continent, un enfant meurt toutes les 45 secondes du paludisme et cette maladie est à l’origine de près de 20% de l’ensemble des décès infantiles. Étant donné que le paludisme est à l’origine de tant de cas de maladies et de décès, il constitue une ponction importante sur la plupart des économies nationales.
Et dans ce contexte, on reconnait également la situation du Tchad.
La carte de répartition géographique du paludisme de l’OMS (2020) place le Tchad et la ville de N’Djaména dans la zone où les conséquences sanitaires de la maladie sont graves du fait de sa persistance. La persistance du paludisme semble être déterminée par les conditions climatiques régnantes dans cet espace. La distribution de l’endémie palustre dans le monde semble se calquer à la disposition des domaines ou des zones climatiques, ce qui forme les faciès climatiques à risque palustre.
En effet, il y a risque pathologique chaque fois que, du fait du climat, une altération de l’état de santé a une certaine probabilité de se produire1. Le terme de risque inclut la double connotation d’un évènement aléatoire et d’un phénomène dommageable sous l’influence du climat.
Annuellement, les services des statistiques sanitaires du Tchad enregistrent, et ce, de manière récurrente, des nombreux cas de maladies endémiques et épidémiques telles que la rougeole, la méningite, la fièvre jaune ou le choléra.
1 J-C BOMBA & al (2019), « Réflexion sur la bioclimatologie humaine en Centrafrique au regard des changements climatiques » (article). Annales de l’Université de Bangui, série A, n°8. p2
A partir de 2020, des maladies émergentes se sont introduites dans le paysage épidémiologique tchadien, il s’agit de la maladie à coronavirus (COVID-19), maladie qui a ébranlé la planète et dont les soubresauts se font encore sentir. Au Tchad, la COVID-19 a affecté 6556 personnes avec 185 décès (janvier 2022). En plus de la COVID-19, on enregistre la leishmaniose dans les provinces septentrionales du Tibesti et du Borkou, affectant principalement les orpailleurs. Le chikungunya à l’Est du pays a affecté près de 30 000 personnes (MSP, 2020). De toutes ces affections répertoriées dans le paysage épidémiologique tchadien, le paludisme demeure la maladie la plus préoccupante.
En effet, il existe un lien étroit entre les dispositions climatiques d’un pays et l’état de la santé de sa population. Le climat peut indifféremment agir comme véritable facteur causal, comme facteur précipitant ou comme simple facteur déclenchant de l’indisposition ou de la maladie.
Depuis Hippocrate, l’homme attribue au climat une bonne part de ses ennuis de santé. De telles accusations ont longtemps reposé sur la seule intuition. Même au début des années 90, le monde n’avait pas encore totalement pris conscience des risques que pouvait représenter le climat pour la santé humaine. Au niveau de la recherche universitaire, dans les années 1980, l’étude des interactions entre le climat et les pathologies avait été délaissée en faveur des thématiques considérées plus modernes, plus valorisantes comme les variabilités climatiques, les
téléconnexions ou encore la modélisation. Cela s’est traduit par le manque général de connaissances concernant cette thématique. C’est pour cela qu’on retrouve très peu de publication qui, en général, ne sont que des articles de position et très peu vont jusqu’à la quantification des impacts2.
Grâce aux résultats de recherches récentes et notamment à l’élan donné par les travaux du GIEC, les connaissances en matière des liens climat – pathologies se sont grandement accrues. Dans son deuxième Rapport d’évaluation (1996, p63), le GIEC a consacré un chapitre entier aux risques potentiels du climat pour la santé3. Il en va de même du troisième Rapport d’évaluation (2001, p21) qui comprend un examen de certaines conséquences avérées du climat sur la santé humaine ainsi qu’une évaluation des conséquences futures possibles. C’est seulement, depuis les années 1990 que les scientifiques sont en mesure de démontrer clairement l’existence de ce lien grâce à des études épidémiologiques et aux nouveaux moyens techniques qui permettent de mesurer des effets dans le temps du climat sur la santé humaine.
2 J-P BESANCENOT (2000), « Réchauffement climatique et santé » (article), Les cahiers de MURS. N° 39, 3ème trimestre. pp37-47
3 Bilan 2001 des changements climatiques : Conséquences, adaptation et vulnérabilité – Rapport du Groupe de travail I du GIEC – PNUE, p101
Aujourd’hui, de multiples travaux confirment qu’à travers ses métamorphoses de chaque jour, le temps qu’il fait joue un rôle dans la survenue de nombreuses maladies. Il est donc admis que le climat entretient une relation très étroite avec la santé humaine.4
Dans son rapport sur l’écologie des vecteurs responsables des pathologies en Afrique tropicale, l’Organisation Mondiale de la Santé (2017, p36) indique que les vecteurs du paludisme sont très sensibles aux variations des paramètres météorologiques (température, pluie et humidité). Le paludisme est donc une maladie très sensible au climat (météorosensible). Comme écrit Y.
SANNI5 : « La relation entre les variations annuelles du climat et des maladies infectieuses est particulièrement évidente et surtout lorsque les variations climatiques sont marquées ». Cette sensibilité provient du fait que le parasite (plasmodium) et le vecteur (anophèle) ne peuvent naitre, croitre et être actif que lorsque trois éléments du climat conjuguent leurs effets : la pluie, la température et l’hygrométrie6 Ce qui est le cas de Ndjamena, au Tchad, où les variations climatiques sont assez marquées.
C’est dans ce contexte que le paludisme constitue le premier problème de santé publique et donc le levier de ce travail.
4 J-P BESANCENOT (2001), « Climat et santé », (livre). PUF, Médecine et société. p4
5 Yaya SANNI (2013), « Le paludisme : repères historiques, climatiques et anthropiques », (article).
Presses de l’Université Laval-Science de la santé. p19.
6 Jean DELMONT (1982), « Paludisme et variations climatiques saisonnières en savane soudanienne d’Afrique de l’Ouest » (article), In : Cahier d’études africaines, Epidémiologie et approche géo. des maladies en Afrique, vol. 22, n°85-86, pp117-133
Questions Fréquemment Posées
Quel est l’objectif de l’étude sur le paludisme à N’Djamena ?
L’objectif de cette étude est de déterminer l’impact du climat sur le paludisme dans la ville de N’Djamena.
Comment le climat influence-t-il l’incidence du paludisme à N’Djamena ?
Le climat n’explique qu’à 52% l’incidence du paludisme dans la ville de N’Djamena, les autres facteurs étant socio-économiques et environnementaux.
Quelles variables climatiques ont été analysées dans l’étude sur le paludisme ?
Les variables climatiques analysées sont la pluviométrie, l’hygrométrie et la température.