Les stratégies de mise en œuvre des associations sportives tunisiennes révèlent une réalité préoccupante : face à des ressources financières limitées, comment transformer ces entités en sociétés performantes ? Cette recherche offre des solutions innovantes et des leçons précieuses tirées d’expériences internationales, essentielles pour l’avenir du sport en Tunisie.
Section 2 :
Des ressources financières limitées
Le financement des associations sportives est devenu l’une des préoccupations majeures des dirigeants. Les ressources financières étant assez limitées par rapport aux besoins. Les clubs se financent principalement par le biais des subventions, des dons, et depuis quelques années, par la vente des joueurs.
L’association sportive dispose de plusieurs sources de financement par rapport à la société. Cette diversité devrait normalement garantir une gestion efficace de l’association avec une trésorerie équilibrée. Or, la plupart des associations sportives en Tunisie souffrent d’un déficit, parfois chronique, de leur trésorerie. Ce qui perturbe le cours normal de l’exploitation et l’empêche de réaliser les investissements escomptés.
Les principales ressources financières de l’association sportive sont :
- Les subventions publiques ;
- Les dons et subventions des personnes morales et physiques ;
- Les droits de retransmission télévisée ;
- La vente de billets ;
- Les cotisations des adhérents ;
- Les revenus de vente de joueurs ;
- Le sponsoring et le mécénat ;
- Les galas, spectacles et autres manifestations ;
- Les revenus des ventes d’articles de sport et divers à l’effigie du club, communément appelé Merchandising.
Cette section sera consacrée à l’étude des différentes sources de financement des associations sportives en Tunisie. Nous commencerons par les modalités d’attribution des subventions publiques. Ensuite, nous analyserons la part de ces subventions dans les recettes globales des clubs sportifs. Nous allons également étudier les autres sources de financement, à savoir les recettes provenant des sponsors, des médias et les recettes propres à l’association.
Subventions publiques : désengagement progressif de l’Etat
L’Etat alloue chaque année au ministère un fonds destiné à financer les activités sportives, scindé en deux :
- Le titre I pour le fonctionnement ;
- Le titre II pour les investissements.
Il revient alors au ministère de gérer ce budget selon les attributions nécessaires et prévues pour la réalisation des projets et des programmes envisagés. 1
Depuis longtemps, nos associations sportives comptent beaucoup sur l’Etat et les collectivités publiques locales pour subvenir à leurs besoins financiers qui augmentent d’une année à une autre.
« Longtemps, le financement exclusif public du sport fut défendu au nom de l’intérêt général. Il est motivé par la volonté de permettre un large et égal accès à la pratique sportive, par le souci de rationaliser l’offre sportive et la volonté de promouvoir l’image d’une collectivité ou une ville. »2
L’Etat, et dans une optique protectionniste et interventionniste, voulait préserver la pratique des activités sportives dont l’objectif est la constitution d’une pépinière de sportifs de haut niveau capables de réaliser des performances lors des compétitions nationales et internationales.
En effet, »si l’on peut s’interroger sur l’appartenance du sport professionnel au service public du sport, il ne fait aucun doute que les particularismes qui le caractérisent nécessitent des règles sensiblement différentes de celles qui existent pour le sport amateur. »3
Les clubs sportifs sollicitent toutes sortes d’aides, que ce soient en numéraire ou en nature. En effet, les pouvoirs publics aux différents niveaux peuvent subventionner les associations soit en numéraire (un certain montant lié par exemple au volume d’activité et ou au nombre des membres), soit en
1 Selon les responsables financiers du ministère des sports.
2 François Asensi : Rapport et propositions pour une réforme des statuts des fédérations sportives (France). Page 14. Avril 2000
3 Jean Christophe Lapouble : Droit du sport. Page 39. Editions LGDJ. 1999
nature (mise à la disposition d’un local, d’équipement, prestation de service). « Les critères d’octroi ne sont pas toujours clairement définis et des influences peuvent s’exercer. »1
En Tunisie, le volet relationnel intervient souvent lors de l’octroi des subventions, ce qui pourrait induire une allocation inéquitable des dons et subventions.
En effet, deux clubs assez semblables au niveau des moyens, des effectifs, des résultats pourraient ne pas avoir les mêmes subventions, et ce suite à quelques interventions qui favorisent un club par rapport à un autre.
Modalités d’attribution des subventions publiques
L’article 6 de la loi n° 95-112 a cité les subventions parmi d’autres moyens de financement des associations sportives. Les subventions sont souvent octroyées par l’Etat et les collectivités locales qui prennent en compte dans leurs budgets annuels le nombre d’associations sportives à subventionner ainsi que les montants correspondants.
L’Etat accorde son aide généralement par l’intermédiaire des comités issus des conseils municipaux du gouvernorat ainsi que des institutions relevant du ministère chargé du sport telles que les fédérations sportives.
Les entreprises publiques contribuent également au financement des associations sportives et procèdent souvent à l’octroi d’aides monétaires plus ou moins importantes.
Les orientations de l’Etat en matière de sport sont la consolidation des disciplines jugées cibles et les plus performantes, et la promotion des sports prometteurs.
Il revient au ministère de tutelle de gérer son budget selon les attributions nécessaires et prévues pour la réalisation des projets et des programmes en cours.
Les subventions sont attribuées aux clubs sportifs selon les critères suivants :3
- Nombre de licenciés de chaque club ;
- Contribution des clubs à l’équipe nationale ;
- Résultats obtenus sur le plan national et international ;
- Fair play de chaque club ;
- Sport ciblé ou non ciblé.
- Les subventions de l’Etat peuvent être en numéraire ou en nature :
- Des subventions d’exploitation sous forme d’argent frais servant à combler les déficits de trésorerie ;
- Des subventions d’investissement affectées à l’acquisition d’équipements.
Les subventions constituent une mesure conjoncturelle et transitoire et non pas un droit acquis par l’association sportive. En effet, elles ne sont pas fixes et leur montant peut sensiblement varier d’une année à une autre selon les prévisions de l’Etat et par conséquent du ministère chargé des sports.
Les subventions constituent un encouragement et un appui pour assister financièrement le club sportif afin qu’il ne rencontre pas de difficultés de trésorerie. Notons à ce point que le fait d’avoir bénéficié d’une subvention ne garantit jamais son renouvellement automatique.
Afin d’aider davantage les clubs sportifs à faire face aux dépenses accrues de fonctionnement, l’Etat a créé le Fonds National de la Promotion des Sports et de la Jeunesse connu sous la dénomination PROMOSPORT.
Ce fonds est financé par les ventes périodiques de billets de pronostic du championnat non amateur de football. En effet, les recettes sont réparties entre les divers intervenants comme suit :4
1 Francis Bonnet & Olivier Degryse : Le management associatif. Page 80. Editions De Boeck Université 1997
2 Loi organique n° 95-11 du 6 Février 1995 relative aux structures sportives.
3 Selon les responsables du ministère des sports.
4 Selon les responsables financiers de la société PROMOSPORT
- 50% destinés aux clubs sportifs ;
- 40% au gagnant du concours ;
- 10% reviennent à la société qui gère l’organisation de ces concours.
Cependant, depuis 5 ans, les revenus du PROMOSPORT ont chuté de prés de 25%1. Ceci est dû principalement au désintéressement des habitués des stades et des compétitions nationales. En effet, les matchs ne motivent plus les spectateurs pour se déplacer et assister aux matchs. Si on compare avec les championnats européens, nous pouvons constater qu’en Angleterre, Allemagne, Italie et Espagne, le nombre moyen de spectateurs par match dépasse les 30 000, ce qui montre le dévouement et l’intérêt constant des spectateurs envers leurs équipes favorites. En Tunisie, le nombre moyen de spectateurs par match ne dépasse 8000.
Avec l’augmentation continue du nombre d’associations sportives2, l’Etat, les collectivités locales ainsi que les établissements publics sont contraints de limiter le montant des subventions qui sont alloués à chaque club.
En effet, l’Etat, dans le cadre de la politique de désengagement économique et de limite du déficit budgétaire, a tendance à limiter les subventions de façon générale.
En réalité, les subventions publiques, si importantes soient elles, ne sont pas suffisantes pour résoudre tous les problèmes financiers des associations sportives d’autant plus qu’elles ne sont pas reconduites automatiquement.
Les associations doivent alors chercher d’autres moyens de financement pour pouvoir substituer les subventions de l’Etat qui ont tendance à diminuer.
C’est dans ce sens que le recours aux sources privées de financement pourrait offrir aux associations les fonds nécessaires à la réalisation de leurs investissements.
Analyse de la part des subventions publiques dans les recettes globales
Nous allons à travers le tableau suivant présenter la part des subventions publiques dans les recettes globales de quelques clubs professionnels tunisiens en prenant en considération des clubs de tailles différentes.
Tableau 1 : Part des subventions publiques dans les recettes globales des clubs sportifs tunisiens (1991-2002)
Tableau 1 : Part des subventions publiques dans les recettes globales des clubs sportifs tunisiens (1991-2002) | |
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Paramètre/Critères | Description/Valeur |
Stabilité des subventions | Les subventions publiques ne sont pas stables, et leur montant dépend souvent des budgets alloués par l’Etat et les collectivités locales ainsi que des performances réalisés par les clubs et leurs programmes d’investissements. |
Comparaison entre clubs | La part des subventions publiques pour les petits et moyens clubs sont nettement supérieures aux grands clubs. |
Dépendance des petits clubs | Les petits et moyens clubs (budgets inférieurs à 4 000 000 DT) sont toujours dépendants de ces subventions qui conditionnent dans la plupart des cas leur survie et la continuité de leur exploitation. |
1 Ces chiffres ont été avancés par la société PROMOSPORT lors des débats organisés par le ministère des sports dans le cadre de la consultation sportive réalisée en 2003.
2 Nous n’avons pas pu obtenir le nombre exact des associations sportives déclarées en Tunisie ou son évolution, ni de la part du ministère des sports, ni la fédération tunisienne, ni encore l’Institut National des Statistiques.
- Ce tableau nous permet de relever que les subventions publiques ne sont pas stables, et leur montant dépend souvent des budgets alloués par l’Etat et les collectivités locales ainsi que des performances réalisés par les clubs et leurs programmes d’investissements.
- Nous pouvons également remarquer que la part des subventions publiques pour les petits et moyens clubs sont nettement supérieures aux grands clubs. Ceci pourrait notamment s’expliquer par le désengagement de l’Etat et par le fait que les grands clubs présentent des budgets beaucoup plus importants que les petits, et par conséquent, un même montant représente un pourcentage élevé pour le petit club, tandis qu’il peut être dérisoire pour le club ayant un budgets en millions de dinars.
- Depuis le début des années 90 et jusqu’à l’année 2002, la part des subventions publiques a considérablement chuté pour les grands clubs (dont les budgets dépassent 4 000 000 DT) dont les ressources financières se sont diversifiées. Cependant, les petits et moyens clubs (budgets inférieurs à 4 000 000 DT) sont toujours dépendants de ces subventions qui conditionnent dans la plupart des cas leur survie et la continuité de leur exploitation.
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1 Fédération Tunisienne de Football : Règlements du football non amateur. ↑
2 Fédération Tunisienne de Football : Contrat type entre club sportif et joueur non amateur. ↑
3 Notons que cet avantage a été reconduit ensuite pour une nouvelle période de cinq ans. ↑
4 Fédération Tunisienne de Football : Contrat type entre club sportif et joueur non amateur. ↑
Questions Fréquemment Posées
Quelles sont les principales sources de financement des associations sportives en Tunisie ?
Les principales ressources financières de l’association sportive sont : les subventions publiques, les dons et subventions des personnes morales et physiques, les droits de retransmission télévisée, la vente de billets, les cotisations des adhérents, les revenus de vente de joueurs, le sponsoring et le mécénat, ainsi que les revenus des ventes d’articles de sport.
Comment l’Etat finance-t-il les activités sportives en Tunisie ?
L’Etat alloue chaque année au ministère un fonds destiné à financer les activités sportives, scindé en deux : le titre I pour le fonctionnement et le titre II pour les investissements.
Pourquoi les associations sportives tunisiennes souffrent-elles de déficits budgétaires ?
La plupart des associations sportives en Tunisie souffrent d’un déficit, parfois chronique, de leur trésorerie, ce qui perturbe le cours normal de l’exploitation et les empêche de réaliser les investissements escomptés.