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Comment les réformes administratives peuvent-elles transformer le Cameroun ?

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🏫 UNIVERSITÉ DE YAOUNDÉ - CENTRE DE RECHERCHE ET FORMATION DOCTORALE EN SCIENCES HUMAINES, SOCIALES ET ÉDUCATIVES - DÉPARTEMENT D’HISTOIRE
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - Mars 2023
🎓 Auteur·trice·s
Abdougani YOUMENI
Abdougani YOUMENI

Les réformes administratives au Cameroun ont profondément modifié le paysage social, révélant des inégalités croissantes et des défis persistants. Cette étude met en lumière des solutions innovantes pour humaniser ces ajustements, essentielles pour restaurer l’équilibre social et améliorer les conditions de vie des Camerounais.


HUMANISER LES MESURES D’AJUSTEMENT STRUCTUREL AU CAMEROUN : UNE TENTATIVE D’AMÉLIORATION DES

CONDITIONS SOCIALES

Humaniser les mesures d’ajustement structurel au Cameroun c’est penser, proposer des mesures à prendre pour corriger les séquelles laissées par les PAS au Cameroun, dans l’optique d’éviter une décadence totale de la société. Il faut rappeler que l’environnement post-ajustement structurel est le règne des inégalités sociales et du malaise social. Où la précarité, le vol et toute autre malversation se veulent être les choses les mieux partagées. Pour résoudre cette complexité, des idées plurielles ont été développées. S’inscrivant dans la même logique de tentatives de solution, cette partie se donne en toute humilité le privilège de proposer quelques pistes de solution à ces problèmes.

L’urgence d’une refondation du circuit administratif et financier

Les circuits administratif et financier camerounais se sont avérés être fragilisés avec l’ajustement structurel. Il faut dire qu’ils sont devenus le foyer de développement de toute forme de contrebande et d’attentat à l’économie. Il y faut donc une restructuration de la fonction publique et une rationalisation des dépenses.

51 Médard Lieugomg, Les livres du « poteau » à Douala et Yaoundé. Stratégies des acteurs et impacts socio- économiques et culturels, Paris, L’Harmattan, 2009, p.9.

La restructuration de la fonction publique

D’emblée, il faut constater que la fonction publique camerounaise souffre d’un laxisme de la part des agents de l’État dans la mesure où ces derniers vont au travail quand ils veulent et partent de là à leur heure voulue. Ceci est dû à une absence d’un système de contrôle d’assiduité et l’insuffisance de la répression des absences et incompétences52.

Dans ce sens, le rendement, l’efficacité et la rigueur semblent avoir perdu leurs lettres de noblesse. Il y existe donc une certaine nonchalance administrative. Il faut dire que cette situation s’est aggravée avec l’ajustement structurel, car la dévaluation du CFA et le gel des salaires ont laissé paraitre dans la fonction publique, un manque de volonté de s’appliquer dans l’exercice des fonctions des agents de l’État.

L’urgence d’un système de contrôle serait alors efficace et augmenterait la productivité de l’administration. L’État pourrait alors procéder à la mise sur pied d’un système identique à celui des entreprises privées, qui consiste à l’installation d’un dispositif de pointage (exemple photo 6), ayant pour but d’enregistrer automatiquement les heures d’arrivée et de départ des agents. Ajouté à ce dispositif, un système de débit sur le salaire formant une certaine contrainte de régularité et de ponctualité au service peut être adopté53. Cette solution pourrait rendre efficiente la bonne conduite et par ricochet un rendement satisfaisant de la part des agents de l’État.

Photo 7 : Contrôleur d’accès biométrique

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Source: https://m.french.alibaba.com/p-detail/Zk-Hot-Sale-F18-Biometric-Fingerprint60799451122.html?language=french&redirect=1, consulté le 27 juillet 2022, à 6 h 53 min.

52 Mbatsogo Nkolo, « Endoscopie du fonctionnariat… », p.65.

53 Ceci est une observation faite auprès des entreprises privées au Cameroun telles que les centre de santé, les supermarchés, les entreprises d’impression. Elle améliore le rendement et la régularité des agents y travaillant.

L’image ci-dessus représente un contrôleur d’accès biométrique, un dispositif utilisé dans les entreprises à vocation privée qui permet de mettre en évidence les heures d’arrivée et de départ des employés de la structure. Ainsi, dès le recrutement d’une personne en qualité d’employé, ses informations y compris son empreinte sont enregistrés dans le système.

Ce qu’il a à faire chaque matin dès son arrivée c’est de se signaler en pressant son empreinte sur le capteur ; et le soir, faire le même procédé. Ainsi, à la fin du mois une évaluation de régularité est faite et les retards sont débités sur le salaire mensuel. Ce système pousse l’employé à être le plus régulier et ponctuel possible.

L’État pourrait donc s’en servir aussi pour au moins gérer le problème de ponctualité et de régularité de la part de ses agents.

L’administration camerounaise apparait comme étant une structure d’assistance sociale d’une population nécessiteuse et dans cette logique elle a toujours eu à apporter sa pierre à l’édifice de la lutte contre le chômage d’une jeunesse sans autre issue que de s’orienter vers elle54. Il faut dire que le recrutement dans la fonction publique ne se fait plus par compétence mais par assistance et favoritisme, la méritocratie prend ainsi du recul. Dans ce sens, la qualité du service de cette dernière est à revoir. Le plus important n’est plus ce qu’on sait faire ou ce qu’on peut faire, il suffit d’avoir une connexion pour pouvoir bénéficier d’un poste dans l’administration.

Aussi, il faut noter qu’en réponse à la crise des ressources humaines au Cameroun et le souci de satisfaire l’ensemble des populations du triangle national, le gouvernement instaura un système de recrutement basé sur le principe de l’équilibre régional. Il consiste pour l’État lors d’un concours de recrutement de partager le nombre de places requises par le nombre de régions que compte le pays.

Dans ce sens, les meilleurs de chaque région sont promus. Il est donc clair que si pour un concours de 30 places, on repartit sur les 10 régions, chaque région a droit à trois places, réservées aux meilleurs. Ainsi, quelle que soit la moyenne des candidats, on retient juste les meilleurs de chaque région.

Il est donc possible de voir le premier d’une région avoir une moyenne plus faible que celle du quatrième d’une autre région. Mais dans le système d’équilibre régional, il est recruté au détriment de l’autre. Il faut dire qu’en réalité l’équilibre régional est garant de la paix et la stabilité, mais son application fait preuve de beaucoup de polémiques, dans la persuasion de ce phénomène.

Ces polémiques sont souvent à l’origine du repli identitaire ayant pour corolaire le tribalisme dans ce sens que beaucoup de Camerounais se considèrent plus appartenant à leur région d’origine qu’à l’État. Ce principe apparait ainsi

54 Mbatsogo Nkolo, « Endoscopie du fonctionnariat… », p.66.

comme une tare à la méritocratie55. Les différents scandales survenus au Concours d’entrée à l’Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC) en sont un parfait exemple de la fracture sociale que peut engendrer ce principe de l’équilibre régional. En effet, en 2015 l’IRIC organisait le concours d’entrée en Master professionnel option diplomatie prévu pour 15 places. Avec la loi de l’équilibre régional qui était d’ailleurs mal ficelée, il y eut la publication en trois temps des admissibilités avec trois listes différentes. Il fallut donc, pour calmer les tensions des troubles sociaux, le recours à l’arbitrage du Chef de l’État56.

Pour résoudre ce problème de recrutement à la fonction publique, il faudrait donc pour l’État du Cameroun une instauration d’un système de recrutement sur la base pas des liens de parenté ou des liens amicaux bref, du réseau mais, sur la base de la compétence, la qualification mieux la méritocratie. Les concours d’entrée à la fonction publique ne doivent être dans ce cas que destinés aux méritants, aux plus intelligents, plus besoin d’équilibre ou de connexion. Aussi, un système de stage pré-emploi dans le but d’évaluer les compétences du demandeur d’emploi peut être promu.

Aussi, le processus de restructuration de la fonction publique peut dans une moindre mesure lutter contre la corruption. Il est démontré que la corruption ne s’éradique pas par simple décret mais par l’application pure et simple de la loi57. Certes, cette procédure s’avère dangereuse car la campagne de lutte contre la corruption consiste pour la plupart des membres du gouvernement camerounais à scier la branche sur laquelle ils sont assis.

Ces derniers sont propriétaires des sociétés fictives qui sont chargées de gagner des marchés et de faire des livraisons dans les départements ministériels à leur charge58. Il convient donc de démanteler ces structures en imposant un système de contrôle systémique de la légalité des entreprises, de la transparence des traitants et sous-traitants des marchés publics camerounais.

Dans le même contexte, l’État devrait procéder à une rationalisation de ses dépenses.

La rationalisation des dépenses de l’État

La rationalisation des dépenses de l’État comme perspective d’amélioration sociale, est tirée de la politique d’ajustement autonome que le gouvernement camerounais avait mis en place pour faire face au problème de la crise économique avant le recours au FMI. L’État devait

55 Sosthène Nga Efouba, La crise des ressources humaines et l’échec des politiques publiques au Cameroun. Vers la construction d’une administration moderne, Paris, L’Harmattan, 2017, p.14.

56 Ibid., p.16.

57 Nyom, La crise économique…, p.129.

58 Ibid., p.132.

cesser d’être une vache de lait59. Il fallait systématique réduire les dépenses des ministères pour accroitre la capacité d’investissement c’est-à-dire, réduire les dépenses de matériel, revoir l’utilisation du téléphone et du fonctionnement des caisses d’avance, faire la vente des véhicules administratifs, refondre la politique de gratuité de l’eau et de l’électricité, promouvoir une politique de limitation des locations administratives60.

Cela permit de ramener le déficit fiscal du PIB à 4 % en 1988-1989 et facilita de ce fait sa croissance à 7,8 % en 1989-199061. Le Cameroun avait donc réussi à réduire le déficit de 508 milliards F CFA en 1986-1987 à 256 milliards F CFA en 1988-198962. L’application encore plus rude de cette politique pourrait faciliter la gestion des déficits.

Et permettre à l’État d’avoir des ressources pour mieux orienter et organiser ses investissements.

Dans la même vision de la rationalisation des dépenses, l’État peut avec ses ressources présentes, faire une sorte de retour en arrière et cibler des domaines précis sur lesquels investir peut être rentable, l’exemple du secteur agricole qui a été la base du développement du pays avant la crise. En effet, l’économie en cette période reposait essentiellement sur l’agriculture qui représentait 85 à 90 % du total des exportations63.

Ce secteur employait près de 75 % de la population active et participait à 24 % du PIB et évalué à 15 % des ressources budgétaires64. Voilà une base sur laquelle le Cameroun peut consentir ses efforts d’investissement, car son efficacité est possible avec la croissance des TIC et l’émergence des nouvelles techniques agricoles.

Il serait donc judicieux de recréer des organismes semblables à ceux du passé tels que le FONADER, l’ONCPB, l’OCB, pour réguler l’activité et accroitre le rendement. En gros, l’État doit réorienter ses investissements vers le secteur primaire.

Au total, la refondation du circuit administratif comme solution palliative aux problèmes nés de l’ajustement consiste à mettre sur pied des mécanismes de contrôle de régularité des agents étatiques, de réorientation des préférences d’investissements dont la visée est l’invite à plus de responsabilités nationales et une probante évolution de la société.

59 Remi Bonguino, « Production et commercialisation du cacao à Bafia 1960-2006, Approche historique », Mémoire de Master en Histoire, Université de Yaoundé I, 2009, p.98.

60 Touna Mama, L’économie camerounaise…, p.284.

61 Javier Herrera, « La nature de la crise financière camerounaise et les mesures prises pour la combattre : faut-il ajuster le programme d’ajustement structurel ? », in Georges Courade (sd), Le village camerounais à l’heure de l’ajustement, Paris, Karthala, 1994, p.49.

62 Ibid., p.50.

63 AMINEPAT, 3C21, Économie : Relance, 1984-1993, Projet de Relance de L’économie camerounaise, Cadre minimum de relance de L’économie camerounaise, Avant-projet, 1993, p.1.

64 Nyom, La crise économique…, p.23.


Questions Fréquemment Posées

Comment les réformes administratives peuvent-elles améliorer la fonction publique au Cameroun ?

Il faut une restructuration de la fonction publique et une rationalisation des dépenses pour améliorer l’efficacité et la rigueur des agents de l’État.

Pourquoi est-il urgent de contrôler l’assiduité des agents de l’État au Cameroun ?

Un système de contrôle d’assiduité est nécessaire pour augmenter la productivité de l’administration et éviter la nonchalance administrative.

Quelles solutions peuvent être proposées pour humaniser les mesures d’ajustement structurel au Cameroun ?

Des mesures doivent être prises pour corriger les séquelles laissées par les PAS, notamment en proposant des idées plurielles pour résoudre les inégalités sociales.

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