Accueil / Droit Bancaire / Les problèmes de contentieux liés au non remboursement des crédits / Comment le recouvrement judiciaire des créances transforme le paysage bancaire en Algérie ?

Comment le recouvrement judiciaire des créances transforme le paysage bancaire en Algérie ?

Pour citer ce mémoire et accéder à toutes ses pages
🏫 Ecole supérieure de banque
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Diplôme supérieur des études bancaires - 23ème Promotion Mars 2022
🎓 Auteur·trice·s
M. Yanis SAADI
M. Yanis SAADI

Le recouvrement judiciaire des créances est un enjeu majeur pour les banques, avec des taux d’impayés atteignant des niveaux alarmants. Cette étude révèle les procédures judiciaires essentielles à connaître, transformant notre compréhension des défis liés au non remboursement des crédits en Algérie.


3. Les voies judiciaires de recouvrement des créances

Une fois le règlement à l’amiable échoué, et après avoir épuisé toutes les tentatives qui devaient, en tous les cas, permettre de déboucher sur un terrain d’entente entre les deux parties (banquier et débiteur) et qui, malheureusement, s’est soldé par un échec, il ne reste pour le banquier, à cet instant, qu’un seul et dernier recours à savoir les voies judiciaires pour récupérer sa créance. Dans ce cas, nous distinguons deux procédures judiciaires qui permettent à la banque de recouvrer sa créance et qui sont :

– l’injonction de payer ;

– l’action au fond.

3.1. L’injonction de payer

L’injonction de payer est une procédure simple et dérogatoire du droit commun. Elle permet au créancier d’obtenir rapidement un titre exécutoire pour assurer le paiement de sa créance. Cette procédure est régie par les articles 174 à 182 du code procédure civile. Ainsi, l’article 174 du code de procédure civile définit l’injonction de payer comme suit : « Par dérogation aux règles établies pour l’introduction des instances devant les juridictions compétentes, toute demande en paiement d’une créance, échue, liquide et exigible constatée par écrit, pourra être soumise à la procédure d’injonction de payer ». En vertu de cette définition, l’injonction de payer représente une demande de paiement d’une créance sur décision de justice.

3.1.1. Conditions de recevabilité

– Comme nous l’avons déjà vu à la première section de ce chapitre, le banquier est tenu d’établir l’existence de sa créance et qui doit être certaine, liquide et exigible.

– créance certaine : elle doit être indiscutable dans son existence ;

– créance liquide : obligation à réaliser en argent ;

– créance exigible : elle doit être échue, une créance à terme ne peut être demandée par l’injonction de payer.

3.1.2. Procédures d’introduction

Ce type d’affaires relève du droit commun ; ainsi, par dérogation aux règles de droit commun, la requête est adressée au président du tribunal du lieu de domicile du débiteur, que l’affaire soit d’ordre civil ou commercial.

La requête est rédigée, à peine d’irrecevabilité, sur un imprimé spécial et doit être déposée auprès du greffe du tribunal compétent. Cette requête doit contenir les noms, professions et domiciles des parties concernées (créancier et débiteur). A l’appui de la requête, il sera joint tous les documents de nature à justifier de l’existence et du montant de la créance. (Art 175 du CPC)

Le juge (ou le président du tribunal) par une simple mention au bas de la requête autorisera la notification de l’injonction de payer si la demande lui parait fondée au vu des documents produits. Un avis de l’injonction de payer devra être notifié au débiteur par les soins d’un huissier de justice avec sommation d’avoir à satisfaire à la demande du créancier dans un délai de quinze (15) jours. (Art 176 et 178 du CPC)

En cas de rejet de la requête par le juge, cette décision n’est susceptible d’aucun recours et la banque sera alors tenue de saisir le juge de fond par la procédure de droit commun.

Pour le recours, la loi investit pleinement le débiteur à introduire un recours. Ainsi, le débiteur devra, dans les quinze jours qui suivent la date de la notification, formuler une opposition. Lorsque l’injonction de payer est frappée de contredit dans les délais qu’ils lui sont impartis, le banquier est convoqué à se présenter à la première audience du tribunal pour répondre aux allégations du débiteur. (Art 179 du CPC)

Au cas où le juge rejette le contredit, la décision est susceptible d’appel, le délai court à partir de l’expiration du délai du contredit ou à partir du prononcé du jugement rejetant le contredit. (Art 181 du CPC)

3.1.3. Validation de l’injonction de payer

Si aucun recours n’a été introduit ou en cas de rejet par le juge du contredit formulé par le débiteur, la banque devra, à cet instant, solliciter la validation. Cette validation est matérialisée par une requête adressée au président du tribunal accompagnée du procès-verbal de notification et éventuellement de l’attestation de non appel et de non opposition. L’injonction de payer produira alors tous les effets d’un jugement contradictoire. (Art 180 du CPC).

Enfin, l’article 182 du code de procédure civile stipule que si l’ordonnance contenant l’injonction de payer est non frappée de contredit et qui n’a pas été avisée pour être exécutée, dans un délai de six mois, est périmée et ne produit aucun effet.

3.2. L’action au fond

Si pour une raison ou une autre l’injonction de payer n’a pas été retenue, c’est-à-dire qu’elle a fait l’objet d’un rejet de la part du juge, ou bien l’action introduite ne remplit pas les conditions requises par l’injonction de payer, la banque doit agir au fond. L’action au fond n’est qu’une procédure judiciaire, c’est une action judiciaire civile, engagée souvent dans le cadre du recouvrement de créances nées des crédits accordés aux clients.

La banque doit agir au fond afin d’obtenir du tribunal une condamnation obligeant le débiteur à payer sa dette. Le banquier devra introduire une action en déposant auprès du greffe du tribunal compétent une requête introductive d’instance conformément à l’article 12 du code de procédure civile et selon l’article 13 du code de procédure civile, cette requête doit contenir obligatoirement les mentions suivantes :

  • la raison sociale et l’adresse du siège social du créancier ;
  • les noms, prénoms, profession et domicile du débiteur ;
  • la désignation du tribunal qui devra statuer sur le litige ;
  • un exposé de l’objet, des moyens et de la demande.

En outre, il y a lieu de verser au dossier toutes les pièces justificatives de la créance, telles que la convention de prêt, l’autorisation de crédit, les effets escomptés, et les garanties recueillies, car le juge se prononce au vu du dossier et que les pièces versées doivent lui permettre de s’assurer que les sommes sollicitées sont justifiées.

Le montant de la créance sollicitée doit être arrêté en intérêt à la date de l’introduction de l’action, la banque pourra également solliciter du tribunal le paiement des intérêts à échoir à la date d’exécution effective.

3.2.1. Le tribunal compétent

La compétence territoriale ne pose pas réellement de problème, selon l’article 8 du code de procédure civile. La juridiction compétente est celle du défendeur, si ce dernier n’a pas de domicile connu, celle de sa résidence et s’il n’a pas de résidence connue, celle de son dernier domicile. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue qu’il est impératif de faire attention à la compétence matérielle, car cette dernière est déterminée en fonction de la qualité du débiteur.

Ainsi, la section commerciale est compétente pour les commerçants et les sociétés immatriculées au registre de commerce, et la section civile est compétente pour les particuliers, les agriculteurs et les coopératives agricoles.

3.2.2. Les voies de recours

Les jugements et les arrêts, rendus par les tribunaux, sont susceptibles de faire l’objet, de la part des deux parties concernées que ce soit le banquier ou le débiteur, d’appel et de cassation devant les juridictions hiérarchiques. Toutefois, il y a lieu de signaler que les jugements rendus par les juges et qui sont revêtus de la formule exécutoire ne sont aucunement concernés par le recours.

Si le premier jugement rendu est défavorable à la banque, celle-ci est en mesure de casser le jugement en introduisant un recours devant les juridictions compétentes. A cet effet, en optant pour le recours, la banque doit faire attention et accorder une importance particulière aux délais d’introduction, sous peine d’irrecevabilité et de nullité de la procédure.

Dans ce cas nous distinguons deux voies de recours judiciaires à savoir : le recours ordinaire et le recours extraordinaire.

a. Les voies de recours ordinaires

_ L’appel : lorsque le jugement rendu est en défaveur de la banque, cette dernière peut faire appel du jugement devant la même juridiction. Ainsi, l’appel doit être formulé dans un délai d’un mois. Ce délai court à compter de la notification lorsque le jugement a été rendu contradictoirement, et de quarante (40) jours à compter de la même date pour les jugements rendus par défaut. (Art 102 du CPC)

_ L’opposition : concerne les jugements par défaut, c’est-à-dire en l’absence de la partie défenderesse. Ainsi et selon l’article 98 du code de procédure civile, les jugements par défaut peuvent être attaqués par la voie de l’opposition dans les dix (10) jours qui suivent la date de leur notification.

_ Le pourvoi en cassation : ce type de recours est exclusivement du ressort de la cour suprême conformément à l’article 231 du code de procédure civile. Le pourvoi en cassation est formulé par une requête écrite et signée par un avocat agréé près de la cour suprême dans les deux mois (60 jours) qui suivent la notification de l’arrêt attaqué. (Art 235, 239 du CPC)

Le pourvoi en cassation devant la cour suprême tend à obtenir l’annulation des décisions contradictoires rendues en dernier ressort (qui ne sont ni susceptible de faire appel ni d’opposition). La cour suprême ne statue pas sur les faits, bien au contraire, le pourvoi en cassation, selon l’article 233 du code de procédure civile, ne peut être fondé que sur les moyens suivants :

– incompétence ou excès de pouvoirs ;

– violation ou omission des formes substantielles de procédés ;

– manque de base légale ;

– défaut, insuffisance ou contrariété de motifs ;

– violation ou fausse application de la loi interne ou d’une loi étrangère de statut personnel ;

– contrariété de décisions émanant de tribunaux différents et rendues en dernier ressort.

b. Les voies extraordinaires de recours

_ La rétraction : représente une voie de recours extraordinaire. Selon l’article 194 du code de procédure civile, la rétraction donne la possibilité aux jugements et arrêts qui ne sont pas susceptibles d’être attaqués, soit par voie d’opposition, soit par voie d’appel, d’être examinés à la demande des parties concernées (banquier et débiteur), dans les cas suivants :

– si les formes substantielles de procéder ont été violées, soit avant, soit lors des jugements ou arrêts, pourvu que la nullité n’ait pas été couverte par les parties ;

– s’il a été statué sur choses non demandées, ou adjugées plus qu’il n’a été demandé ou s’il a été omis de statuer sur un chef de demande ;

– s’il y a eu dol personnel ;

– s’il a été jugé sur des pièces reconnues ou déclarées fausses depuis le jugement ;

– si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives et qui avaient été retenues par la partie adverse ;

– si, dans un même jugement, il y a dispositions contraires ;

– s’il y a contrariété des jugements en dernier ressort entre les mêmes parties et sur les mêmes moyens, devant les mêmes juridictions ;

– si des incapables n’ont pas été défendus.

Le délai pour introduire la demande de rétraction est de deux (02) mois à dater de la notification de la décision de justice attaquée. Si les motifs de la demande de rétraction sont le faux, le dol ou la découverte de pièces nouvelles, le délai ne court qu’à dater du jour, où, soit le faux, soit le dol, auront été reconnus ou les pièces découvertes, pourvu que, dans les deux derniers cas, il y ait preuve par écrit de cette date. (Art 196, 197 du CPC)

_ La tierce opposition : selon l’article 191 du code de procédure civile, toute personne qui a intérêt peut formuler une tierce opposition à un jugement ou arrêt auquel elle n’a pas été partie.

Toutefois, aucune tierce opposition n’est recevable si elle n’est accompagnée d’une quittance constatant la consignation au greffe d’une somme d’argent égale au minimum de l’amende qui peut être prononcée. (Art 192 du CPC)

Le délai de la tierce opposition n’est pas limité, mais elle doit être formulée avant toute prescription acquisitive.


Questions Fréquemment Posées

Qu’est-ce que l’injonction de payer dans le recouvrement judiciaire des créances?

L’injonction de payer est une procédure simple et dérogatoire du droit commun qui permet au créancier d’obtenir rapidement un titre exécutoire pour assurer le paiement de sa créance.

Quelles sont les conditions de recevabilité pour une injonction de payer?

Le banquier doit établir l’existence de sa créance qui doit être certaine, liquide et exigible.

Comment introduire une demande d’injonction de payer?

La requête doit être adressée au président du tribunal du lieu de domicile du débiteur et rédigée sur un imprimé spécial, accompagnée de documents justifiant l’existence et le montant de la créance.

Rechercher
Télécharger ce mémoire en ligne PDF (gratuit)

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top