Comment les meilleures pratiques transforment la lutte contre la cybercriminalité en 2023 ?

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🏫 Université Officielle de Mbujimayi - Faculté de Droit - Département de Droit privé et judiciaire
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Licencié - 2023-2024
🎓 Auteur·trice·s
Henri Thomas LUPANTSHIA KANGOMBA
Henri Thomas LUPANTSHIA KANGOMBA

Les meilleures pratiques en cybercriminalité révèlent des lacunes surprenantes dans l’application du Code congolais du numérique. Cette étude comparative entre les droits français et congolais met en lumière des défis critiques, offrant des solutions innovantes pour renforcer la lutte contre la cybercriminalité.


Section 2:

LE PRINCIPE DE LA LÉGALITÉ DES INCRIMINATIONS, PEINES ET PROCÉDURE

Dans la présente section, nous allons étudier tour à tour : l’énoncé du principe de la légalité criminelle (paragraphe 1er) ; la justification du principe (paragraphe 2) ; et, le contenu du principe (paragraphe 3.

§1er. Enoncé du principe

Dans le droit pénal moderne, il n’y a pas d’infraction ni de peine sans un texte légal : Nullum crimen, nulla poena sine lege. C’est le principe de la légalité des délits et des peines.126

En effet, le principe de la légalité criminelle est sans doute le principe le plus important de droit pénal, car celle-ci est la règle cardinale, la clé devoute du droit criminel.127 Il s’en suit que « Nul ne sera condamné pour des actions ou omissions qui, au moment ou elles ont été commises, ne constituaient pas un acte délictueux d’après le droit national ou international. De même, il ne sera infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment ou l’acte délictueux a été commis ».128

Il ressort de cette disposition légale que, seuls peuvent faire l’objet d’une condamnation pénale, les faits déjà définis et sanctionnés par le législateur au moment où l’accusé a commis son acte, et seules

125 Raymond De Bouillon MANASI NKUSU KALEBA (et Al), Cybercriminalité, mode de formation, op.cit, pp. 7 ;

126 Bernard BOULOC, Droit pénal général, 25ème édition, Dalloz, Paris, 2017, p. 101 ;

127 Raphael NYABIRUNGU MWENE NSONGA, Traité de droit pénal général congolais,

2ème édition, éd. Universitaires africaines, Coll. D.E.S., KINSHASA, 2007, p.50 ;

128 Article 11 de la D.U.D.H. du 10 décembre 1948, voire aussi : l’article 15 point 1 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, l’article 7 point 1 de la charte africaine des droits de l’homme et des peuples et les alinéas 3, 4 et 5 de l’article 17 de la constitution du 18 Février 2006 telle que révisée en 2011 ;

peuvent leur être appliquées, les peines édictées déjà à ce moment par le législateur. D’où la maxime : Nullum crimen, nulla poena, sine lege.

La doctrine relève toutefois que le principe légaliste ne se limite pas au droit pénal de fond mais, concerne aussi la procédure.129

A ce sujet, nous nous alignons derrière Michèle Laure Rassat, lorsqu’avec raison, elle va plus loin pour considérer que « ce principe concerne les incriminations, les peines, la procédure et les conditions d’exécution des peines et mesures de sureté. Bref, le principe concernerait l’ensemble de la répression.130

En ce qui concerne la légalité de la procédure, le prescrit de l’article 17 alinéa 2 de la constitution du 18 Févier 2006 telle que révisée en 2011 est clair :« Nul ne peut être poursuivi, arrêté, détenu ou condamné qu’en vertu de la loi et dans les formes qu’elle prescrit ».

Au regard de la doctrine soulevée et du droit positif congolais, nous pouvons considérer avec Raphael Nyabirungu Mwene Nsonga que, la légalité concerne les incriminations, les sanctions et la procédure répressive. En conséquence, la formule ci-dessus reprise est insuffisante, et devrait être complétée pour donner ce qui suit : Nullum crimen, nulla poena, nullum judicium sine lege.131

§2. Justification de principe

Le principe de la légalité des incriminations, peines et procédure se justifie en ce qu’il constitue : une limitation au droit de punir, un rempart contre l’arbitraire du juge et une exigence d’une meilleure politique criminelle.

Limitation de droit de punir

La société ne peut punir sans borne ou sans mesure. Il importe que la collectivité n’abuse pas de prérogative qu’elle possède sur les êtres

129 Jean PRADEL, cité par Raphael NYABIRUNGU MWENE NSONGA, Op. cit. p.52 ;

130 Michèle Laure RASSAT, cité par Raphael NYABIRUNGU MWENE NSONGA, Idem ;

131 Montesquieu, Esprit des lois, Livre XI, chapitre VI, 1746 ; César BECCARIA BONESANA, Traité des delits et des peines, chapitre III, 1764,

qui la composent : son pouvoir de maintenir l’ordre doit être contenu dans certaines limites, qui garantissent la liberté et l’indépendance de chacun.

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Cette opposition d’intérêt du pouvoir et des individus ne trouve pas sa solution que dans la loi : seule celle-ci écarte les inégalités et l’arbitraire.

Rempart contre l’arbitraire du juge

Il ne convient pas que le juge soit seul à décider de la punissabilité des faits. Une loi écrite met les citoyens à l’abris de deux dangers :

      • Le juge, loin de faire prédominer les exigences de justice et de vérité, risque de soumettre sa démarche à son émotion, à son tempérament, à ses intérêts de classe, voire à son zèle. Aucun juge, sur le moment, évitera de se laisser fléchir par des sentiments de sympathie, d’amour et de haine pour l’une ou l’autre des parties. Et son jugement sera faussé.
      • L’incertitude quant à la façon dont le juge dira en définitive le droit,

est de nature à créer l’insécurité juridique au sein de la population.

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Exigence d’une meilleure politique criminelle

Il est de meilleure politique criminelle que la loi avertisse avant de frapper134, afin que dans son comportement l’agent sache à quoi s’en tenir. Cette désignation des actes incriminés est nécessaire.135 Par cet avertissement à l’avance, la loi pénale exerce une influence sur la

132 Valerie MALABAT, Faut-il repenser le principe de la légalité ? in RSC, 1999, n°921, cité par Raphael NYABIRUNGU MWENE NSONGA, Ibidem, 2007, p.52.

133 M. VILLEY, Philosophie du droit, II, Les moyens du droit, 2e édition, Dalloz, Paris,1979,

p. 224, cité par Raphael NYABIRUNGU MWENE NSONGA, op.cit.,p. 52 ;

134 C’est l’équivalent de la maxime latine : moneat lex priusquam feriat ;

135 Chris HENNAU et J. VERHEAGEN, Droit pénal général, Bruxelles, Bruylant, 2e édition, 1995, cité par Raphael NYABIRUNGU MWENE NSONGA, idem.

psychologie de l’agent qu’elle informe de l’interdit et de la menace qui pèsent sur lui en cas de transgression.

Elle joue un rôle à la fois éducatif et préventif. Lequel sera d’autant mieux d’assurer que, dans l’intérêt de la norme et de la valeur protégée, du justiciable et du juge, la loi aura été claire, précise et sans ambigüité.

Le juge, loin de faire prédominer les exigences de justice et de vérité, risque de soumettre sa démarche à son émotion, à son tempérament, à ses intérêts de classe, voire à son zèle. Aucun juge, sur le moment, évitera de se laisser fléchir par des sentiments de sympathie, d’amour et de haine pour l’une ou l’autre des parties. Et son jugement sera faussé.

L’incertitude quant à la façon dont le juge dira en définitive le droit, est de nature à créer l’insécurité juridique au sein de la population.

§3. Le contenu du principe

Nous allons dans ce troisième paragraphe de cette section, étudier le contenu du principe légaliste à trois niveaux : au niveau des incriminations, au niveau des peines et à celui de la procédure.

La légalité des infractions

Les incriminations ne sont établies que par la loi. Seuls tombent sous la loi, les faits qui, au moment de leur perpétration, sont déjà définis comme constituant une infraction par le législateur. Nous nous accordons à ce sujet avec Michèle Laure Rassat lorsqu’elle considère avec raison que, « le principe de la textualité (légalité) peut être subdivisé en deux propositions, à savoir :

  1. Nul ne peut être poursuivi qu’en vertu d’une règle de droit pénal préexistant à son action ;
  2. Cette règle préalable doit être une loi au sens formel, c’est-à-dire un acte émanant du législateur, la seule autorité nationale sensée exprimer la volonté nationale.136

Ce principe de l’antériorité obligatoire des définitions des infractions est une garantie de la liberté et de la sécurité juridique, car on peut valablement supposer que, dans ce cas, ces définitions ont été élaborées sans parti pris, dans l’ignorance des personnes qui tomberont éventuellement sous leur application.

La légalité des incriminations ainsi comprise a des conséquences aussi bien pour le législateur que pour le juge.

Pour le législateur

Il a le monopole d’établir les normes pénales ;

Il doit édicter les textes précis quant à la définition des infractions et à la détermination des sanctions à encourir.

Pour le juge :

Le juge ne peut considérer comme infraction, un fait que la loi ne définit comme telle, quelle que soit par ailleurs son appréciation personnelle sur la valeur morale de l’acte. Nous épousons la position de Raphael Nyabirungu Mwene Nsonga lorsqu’il écrit qu’en l’absence de texte, le suicide, la prostitution ou le mensonge ne sont pas des infractions quel que soit le dégoût qu’ils peuvent inspirer.

La légalité des peines

En effet, il ne peut être infligé de peine plus forte que celle applicable au moment où l’infraction est commise. Cette légalité de peine produit à son tour des conséquences tant pour le juge que pour le législateur. Il y a lieu pour nous de soulever avec César Beccaria que la légalité des délits et celle des peines en commun produisent cette conséquence : « les lois seules peuvent fixer les peines de chaque délit, et

136 Michèle Laure. RASSAT, cité par Raphael NYABIRUNGU MWENE NSONGA, op.cit., 2007, p. 53 ;

que le droit de faire des lois pénales ne peut résider que dans la personne du législateur, qui représente toute la société ».137

Au niveau du législateur

Seul le législateur peut déterminer la nature et le taux de la peine, seules peuvent être appliquées des peines et des mesures déjà édictées par le législateur au moment où l’accusé commet son acte.

Au niveau du Juge

Le juge ne peut prononcer des peines que si le texte n’en prévoit pas. Il ne lui appartient pas, en raisonnant par voie d’analogie, de suppléer au silence de la loi et de prononcer des peines en dehors des cas limitativement prévus par le législateur. Il ne peut prononcer des peines par induction ou présomption ni même sur des motifs d’intérêt général ; il n’a d’attribution que pour appliquer les condamnations déterminées par la loi.138

Il ne peut prononcer une peine supérieure au maximum ni inférieure au minimum, sauf en cas des circonstances aggravantes, des circonstances atténuantes ou des excuses légales.

Il ne peut refuser de prononcer la peine prévue par la loi, sauf évidemment s’il y a cause d’exonération.

La légalité de la procédure

La légalité de la procédure ressort de l’alinéa 2 de l’article 17 de la Constitution du 18 Février 2006, telle que révisée par la Loi n°11/002 du 20 Janvier 2011 portant révision de certains articles de la constitution de la RDC qui dispose : « Nul ne peut être poursuivi, arrêté, détenu ou condamné qu’en vertu de la loi et dans les formes qu’elle prescrit ».

Il revient au législateur de déterminer les organes et les formes du procès. C’est ce qu’écrit César Beccaria dans son traité des délits et

137 Cesar BECCARIA BONESANA, Traité des délits et des peines, §III. Conséquences de ce principe, 1764, traduit de l’Italien par Collin de plancy, 2002, éditions du Boucher, 16, rue Rochebrune, version électronique

138 Raphael NYABIRUNGU MWENE NSONGA, op.cit., 2007, p. 58 ;

des peines : « Il n’appartient qu’aux lois de fixer l’espace de temps que l’on doit employer à la recherche de preuves du délit, et celui qu’on doit accorder à l’accusé pour sa défense. Si le juge avait ce droit, il ferait les fonctions du législateur ».139

En droit Congolais, cette obligation a été notamment réalisée par la promulgation de la loi organique nº13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire d’une part et le code de procédure pénale d’autre part.

En effet, il n’y a pas de juge ou de juridiction sans loi.140

L’absence de celle-ci conduirait aux tribunaux populaires ou aux actes de vandalisme et de lynchage dans nos villages, nos cités et nos rues. Il est du droit de chaque citoyen de connaître à l’avance quels sont ses juges naturels et quelles formes ceux-ci utiliseront en cas de violation supposée de la loi pénale.141

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2 Définition donnée par l’article 62 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001.

3 Auchan Les 4 Temps, La Défense.


Questions Fréquemment Posées

Qu’est-ce que le principe de la légalité des incriminations en droit pénal?

Le principe de la légalité criminelle est sans doute le principe le plus important de droit pénal, car celle-ci est la règle cardinale, la clé devoute du droit criminel.

Pourquoi le principe de la légalité est-il important dans la répression de la cybercriminalité?

Le principe de la légalité des incriminations, peines et procédure se justifie en ce qu’il constitue : une limitation au droit de punir, un rempart contre l’arbitraire du juge et une exigence d’une meilleure politique criminelle.

Quels sont les éléments couverts par le principe de légalité selon le droit positif congolais?

La légalité concerne les incriminations, les sanctions et la procédure répressive.

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