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Comment les meilleures pratiques transforment l’autofiction en 2024?

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🏫 Université Batna 2 - Faculté des Lettres et des Langues Étrangères - Département de Langue et Littérature Françaises
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2016-2017
🎓 Auteur·trice·s
Mebarki Houssem Eddine
Mebarki Houssem Eddine

Les meilleures pratiques en autofiction révèlent une dépersonnalisation surprenante dans l’œuvre de Philippe Forest. Cette étude critique remet en question les conventions autobiographiques traditionnelles, offrant des perspectives innovantes sur la légitimité et la définition de l’autofiction dans la littérature contemporaine.


2-6. Le « Roman du Je » de Philippe FOREST :

« Une nouvelle approche de L’autofiction D’après, Philippe Forest la valeur des textes autobiographiques contemporains doit se mesurer selon un degré de « dépersonnalisation ». Dans ses essais « Le Roman, le Je et Le Roman, le réel » distingue trois artistiques :

  1. D’abord « l’ego-littérature », ou « le Je se présente comme une réalité (biographique, psychologique, sociologique, etc.) dont témoignages, documents, récits de vie expriment l’objectivité antérieur à toute mise en forme par l’écriture »136 il s’agit donc de prendre le « moi » comme objet et de faire du vécu l’origine de toute signification.
  2. Ensuite, l’autofiction qui marque un progrès, car elle présente un courant ou les textes assument la composition fictionnelle dans leur narration à la première personne. Forest juge qu’a part quelques exceptions (Annie Ernaud , Christine Angot ou Hervé Guibert) les auteurs qui représentent cette tendance n’ont pas dépassé le stade d’un « nouveau naturalisme » et qu’il s’agit d’un phénomène spécifique du roman français fin de siècle »137
  3. Enfin, lorsqu’il aborde le troisième niveau artistique qu’il distingue, Forest se sert de l’autofiction pour présenter un nouveau concept qu’il nomme « roman du je » .cette appellation est le calque d’une formule japonaise, le shishosetsu , qui consiste en « une écriture du Je par laquelle le sujet revient en raison d’une expérience du réel comme impossible » 138

En comparaison avec l’autofiction , qui selon Forest croit pouvoir découvrir les origines, l’identité ou la vérité d’un sujet , le « Roman du Je » ,lui traduit un sentiment de perte .et c’est en s’approchant de cette perte qu’il y a possibilité de trouver le réel : l’auteur « se consume », « s’efface », « s’absente » pour laisser le roman répondre a l’appel de l’impossible réel »139

Dans la théorie du « Roman du Je », l’image de soi que toute œuvre autobiographique produit se déconstruit lorsqu’elle cherche à atteindre le réel :

« L’écrivain fantôme n’y considère (dans cette image de soi) le défaut de son reflet dans le miroir, nécessaire de la fiction qu’afin d’y interroger un autre visage que le sien et avec lui, la figure de ce « réel » qui le rappelle a la foi de son désire et donc a une forme pensable d’existence. »140

P. Forest se réfère à P. Lejeune pour expliquer la théorie du « Roman du Je », il se base sur le concept « identité dans l’autobiographie », il insiste sur le fait que l’identité entre auteur, narrateur et personnage ne peut exister :

« Alors même qu’il lui prête son nom, son histoire, les traits les plus singuliers de son visage, l’auteur diffère radicalement du personnage qui le représente au sein de l’espace littéraire. »141

Pour Forest, celui qui raconte sa vie dans une œuvre littéraire la transforme nécessairement en fiction. S’il veut se représente lui-même dans un récit, il doit passer par le faux-semblant d’un personnage :

« Il faudrait dire : « ma vie n’existe qu’a condition d’être déjà « du roman » et, « moi- même », je n’y existe qu’a condition d’y figurer depuis toujours a la façon d’un personnage. »142

P. Forest théoricien du « Roman du Je », la vérité est fiction, car tout acte d’écriture est créateur, même lorsqu’il fait appel a la mémoire, si l’autobiographie classique tente par tous les moyens de faire disparaitre l’écart entre celui qui écrit et celui qui vit, le « roman du Je » , lui ; explore cette impossible réconciliation entre fiction et réel .

Forest explique que, si l’expérience de l’écriture est poussée assez loin, la fiction se tournera vers le réel pour y découvrir que ce dernier n’est jamais donné autrement que sous l’apparence d’une fiction.

En écrivant sa vie, l’individu se dédouble. Celui qui écrit n’est pas celui qui vit :

« alors même qu’il se met lui-même en scène, l’écrivain ne peut ignorer que c’est un double de papier qu’en son nom il délègue dans le théâtre du texte »143

Le problème chez les adeptes de l’ego-littérature selon Forest : cherchent à copier le réel en écrivant un texte réaliste, mais le résultat c’est qu’une falsification du vécu ; le « vécu » n’est pas « l’expérience » d’après le « Roman du Je ».

2-7. Les définitions standards de l’autofiction :

Les définitions que proposent les dictionnaires sont peu explicites et n’apportent pas beaucoup d’éclairage sur le genre :

« Récit mêlant la fiction et la réalité autobiographique »144 telle est la définition donne par le petit robert.

Quant au petit Larousse, il est le seul qui fasse mention d’un « genre » littéraire : « l’autofiction est un genre littéraire qui associe deux types de narrations contradictoires ; c’est un récit fondé, comme l’autobiographie, sur l’identité de l’auteur, du narrateur (et donc du personnage) tout en se réclament de la fiction, principalement du genre romanesque. »145

L’autofiction n’est pas encore un terme très fréquent dans les dictionnaires littéraires. Elle fait à peine son apparition dans les ouvrages de cette première décennie du XXI siècle. Parmi les rares ouvrages qui classent le mot séparément des deux genres qui la composent, il y a le dictionnaire des termes littéraires :

« Variante de l’écriture autobiographique, qui tend à abolir la frontière entre la fiction et la non-fiction: des événements biographiques sont mêlés à des (ou déguisés en) données fictives et vice versa. Le livre de Serge Doubrovsky, Fils (1977), est considéré comme le premier exemple de ce nouveau sous-genre, qui a fait fureur, surtout en France, au cours de la dernière décennie (citons p. ex. la trilogie d’Ho Bianciotti) »146

Outre que cette définition ne permet pas de différencier l’autofiction du roman autobiographique, il est étonnant que l’on réserve une entre particulière au terme « autofiction », alors qu’on en fait une simple « variante de l’écriture autobiographique » .la spécificité du genre n’apparait donc pas clairement

Si le néologisme est difficilement trouvable au sein des autres dictionnaires littéraires, il en va autrement pour le nom de Serge Doubrovsky. On le cite fréquemment en définissant l’autobiographie:

« Sans doute le banc d’essai le plus efficace est-il le roman autobiographique, où l’auteur peut jouer de nouvelles techniques sans s’exposer à l’incrédulité du lecteur, tout en induisant par ailleurs une lecture « autobiographique » de son récit, comme l’a fait Serge Doubrovsky dans Fils (1976) »147

Conclusion :

Toutes les définitions que nous avons proposées pour l’autofiction ont contribué à l’enrichissement de ce concept, et leur contradiction n’est qu’une complémentarité qui ouvre de nouvelles perspectives et différentes possibilités d’analyse pour un nombre non-exhaustif de romans.

Nous précisons que notre présente étude s’inscrit dans la conception Doubroviskienne, ainsi que dans celle de Vincent Colonna et Gérard Genette pour pouvoir mettre en lumière l’originalité de notre roman. Nous nous demanderons alors si l’autofiction selon ces différentes conceptions, peut refléter réellement la personnalité d’Amin Maalouf dans sa globalité, et s’il y fait vraiment appel pour traduire son malaise.

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136 FOREST Philippe, Le Roman, le Je, Nantes, Éditions pleins feux, 2001,coll. « Auteurs en question », p.37.

137 Ibid. P.13.

138 Ibid. P.38.

139 Ibid. P.34.

140 FOREST Philippe, Le Roman, le Je, Nantes ,Éditions pleins feux, 2001,coll. « auteurs en question » P.33.

141 Ibid .p.17.

142 Ibid. P.17.

143 Ibid. P.43.

144 REY ALAIN et JOSETTE REY-Debove , Le Nouveau Petit Robert de la langue française 2008 ,Paris , le robert ,2008 ,p.18.

145 EYENO, Bertrand et Yves Garnier, Le Petit Larousse illustré, Paris, Librairie Larousse, 1999, p.855.

146 VAN GORP, H., D. Delabastita et al., Dictionnaire des termes littéraires, Paris, Honoré Champion éditeur , 2001, p. 54.

147 DEMOUGIN Jacques, Dictionnaire historique, thématique et technique des littératures françaises et étrangères, anciennes et modernes , Paris, Librairie Larousse, 1985, 890 p.125.


Questions Fréquemment Posées

Qu’est-ce que l’autofiction selon Philippe Forest?

L’autofiction est un courant où les textes assument la composition fictionnelle dans leur narration à la première personne.

Comment Philippe Forest distingue-t-il l’ego-littérature de l’autofiction?

Forest définit l’ego-littérature comme une réalité dont témoignent des récits de vie, tandis que l’autofiction marque un progrès en intégrant la fiction dans la narration.

Quelle est la théorie du ‘Roman du Je’ développée par Philippe Forest?

La théorie du ‘Roman du Je’ présente une écriture du Je où l’auteur se consume et s’efface pour laisser le roman répondre à l’appel de l’impossible réel.

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