Les meilleures pratiques d’ajustement au Cameroun révèlent des conséquences sociales inattendues des programmes d’ajustement structurel entre 1987 et 2017. Cette étude met en lumière des transformations profondes dans les comportements des Camerounais, essentielles pour comprendre l’impact durable de ces politiques sur la société.
L’évaluation du programme DSA
Le programme DSA s’érigeait en tant que pilier de réduction des effets pervers de l’ajustement sur la population d’une part, et d’autre part un moyen de participation de la population au processus de développement. L’évaluer revient à mettre en évidence l’ensemble ses réalisations et des entraves liées à son implémentation.
Les réalisations du programme
Les réalisations de la DSA sont peu dans la mesure où l’on dénote une mise en œuvre faible de ce programme. Il faut noter que le mérite de la prise de conscience de l’importance de mesurer, analyser et contrôler la pauvreté par les gouvernements et les bailleurs de fonds ou donateurs lui revient. Elle a porté la préoccupation de la pauvreté à l’échelle internationale, en facilitant la coordination entre les donateurs pour la mobilisation des ressources contre cette dernière. La DSA a aussi facilité la génération d’une très grande participation des groupes vulnérables au processus de développement91.
La DSA a favorisé au Cameroun la mise sur pied sur le plan institutionnel, du Fonds National pour l’Emploi (FNE), créé par le décret n° 90/805 du 27 avril 199092. Le FNE était chargé de cinq principales missions : accroître les possibilités d’emploi ; diffuser les informations aux chercheurs d’emploi ; favoriser l’insertion des jeunes dans les circuits de production ; favoriser la réinsertion des travailleurs licenciés pour des raisons économiques des entreprises des secteurs public et privé ; concevoir, financer et suivre des programmes
ayant trait à la formation sur le tas et à l’apprentissage, la formation formelle, l’autocréation d’emploi93. Il avait pour ce faire la charge de financer des projets d’auto-emploi à concurrence de deux millions de FCFA d’une part, et d’autre part d’apporter un appui aux chômeurs dans l’optique de la création des microentreprises dont la valeur pouvait atteindre vingt millions de
91 Anonyme, « La dimension sociale… », pp.3-4.
92 Claude Abe, « Les pouvoirs publics face à l’emploi au Cameroun (1960-2013) », in David Abouem à Tchoyi et Stéphane Claude M’Bafou (sd), 50 ans de réforme de l’État au Cameroun. Stratégies, bilans et perspectives, Paris, L’Harmattan, 2013, p.147.
93 Joseph-Pierre Timnou, « Le programme « dimension sociale de l’ajustement » au Cameroun : l’exclusion du monde rural », in Georges Courade (sd), Le village camerounais à l’heure de l’ajustement, Paris, Karthala, 1994, p.89.
FCFA94. Il faut rappeler que le FNE est devenu au milieu des années 1990, l’organisme public principal de promotion de l’emploi au Cameroun95. Il était donc primordial pour tout ex- employé, jeune diplômé et chercheur d’emploi de se rapprocher du FNE pour avoir des informations sur les nouvelles offres de formation et des éventuelles formations y afférant, au cas échéant.
En plus du FNE, la DSA a aussi facilité la mise sur pied du Programme de Développement Communautaire (PRODEC) et des Financements d’Investissement de Microréalisations Agricoles Communautaires (FIMAC). Ces deux institutions devaient permettre aux populations agricultrices et celles des zones rurales de contribuer à la réalisation des objectifs de la DSA.
Le PRODEC pour son cas spécifique devait être le moyen d’octroi des dons aux services sociaux et la construction des infrastructures modestes et durables et la mise sur pied des activités génératrices de revenus au niveau communautaire96. À la suite du PRODEC et du FIMAC, il y eut la mise sur pied du Programme Social d’Urgence (PSU).
Créé au cours du premier semestre de l’année 1996, ce programme était chargé de l’assainissement urbain, de la lutte contre le chômage et la limitation des difficultés liées à l’insertion des populations dans le monde de l’emploi97.
Les entraves liées à l’exécution du programme
Comme tout programme conçu par l’homme, la DSA connut plusieurs controverses. La réalisation des objectifs de cette dernière n’était pas chose aisée. L’État du Cameroun en cette période était plongé dans la crise et le programme DSA nécessitait une quantité importante de financement. Ceci étant, l’État du Cameroun dans l’optique de protéger les couches les plus démunies de la population avait dû contenir la hausse du prix du riz à 24 % en février 1994 celle du prix de la farine à 69 % dans
le but d’atténuer les effets de l’inflation98. Cette action devait absorber une quantité importante de financements. Ainsi donc, l’État se retrouvait dans une situation de déficit financier. L’absence de financement ne pouvait donc pas garantir la mise sur pied sinon la réalisation d’un programme pareil. C’est la raison pour laquelle ce dernier subit d’importants retards.
94 Abe, « Les pouvoirs publics… », p.147.
95 Audrey Prisca Ze, « Crise économique et gestion étatique de l’insertion professionnelle des jeunes au Cameroun
: le cas de la région du Centre (1987-2016) », Mémoire de Master en Histoire, Université de Yaoundé I, 2020, p.61.
96 Timnou, « Le programme « dimension sociale… », p.90.
97 Abe, « Les pouvoirs publics… », p.147.
98 Ibid.
Il faut rappeler que le programme DSA a été officiellement lancé en mai 1988, par accord entre le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement), la BAD (Banque Africaine de Développement) et la BM. Pour ce faire, tous les pays d’Afrique subsaharienne qui avaient le souci de prévention des conséquences sociales des PAS devenaient membres de ce programme.
Le Cameroun s’inscrivit dans cette logique. Mais, à cause de la situation trouble des années 199099, certains donateurs ne réalisèrent pas leurs promesses de financements. Le Cameroun fut alors victime de plusieurs interruptions de la part de ces bailleurs de fonds, à l’instar de la CEE (Communauté Économique Européenne), des États-Unis et du Canada, ce qui ne facilita pas le déroulement du programme DSA.
À titre illustratif, jusqu’à la fin 1992, le programme DSA au Cameroun accusa une insuffisance de réalisation de promesses de financements d’environ 50 %100. La DSA au Cameroun a de ce fait, fait face de nombreuses difficultés dans sa mise en œuvre. Par conséquent, elle ne pouvait pas réaliser toutes ses promesses.
En somme, le Cameroun face à l’échec de ses premières mesures de résorption, se trouva dos au mur. Il fallut alors penser une alternative pour ce problème, d’où l’option du FMI. Bien qu’étant retissant au début face aux mesures d’austérité du FMI, le gouvernement camerounais accepta l’appel et fut directement placé sous ajustement structurel.
Il connut alors six PAS dont l’objectif global était le désengagement de l’État de l’activité économique en promouvant le secteur privé. Il s’agit donc de la libéralisation des secteurs économiques, de la privatisation des entreprises et de la dévaluation de la monnaie. Cependant, le PAS camerounais avait une spécificité en ce sens qu’il prévoyait une DSA.
Cette DSA avait pour but de limiter les effets pervers de l’ajustement sur les couches les plus vulnérables de la population et permettre à toutes les couches de participer au processus de développement. Au final, une préoccupation majeure retient l’attention, celle de savoir quel est le coût social de l’ajustement en dépit de la mise sur pied d’un programme DSA ?
99 La situation trouble ici est en fait le vent de démocratisation de l’Est qui vint basculer les tendances, réduisant ainsi le monopole économique des supers grands (États-Unis, Bloc soviétique), ceci avec l’émergence des Nouveaux Pays Industrialisés (NPI). Les bailleurs de fonds traditionnels dans la logique maintenir leur hégémonie économique, devraient réorienter leurs subventions vers des capitalisations.
100 Abena Etoundi, « La planification économique… », p.457.
72
Questions Fréquemment Posées
Quelles sont les réalisations du programme DSA au Cameroun?
Les réalisations de la DSA sont peu dans la mesure où l’on dénote une mise en œuvre faible de ce programme. Cependant, elle a porté la préoccupation de la pauvreté à l’échelle internationale et a facilité la participation des groupes vulnérables au processus de développement.
Quel est le rôle du Fonds National pour l’Emploi (FNE) au Cameroun?
Le FNE était chargé d’accroître les possibilités d’emploi, de diffuser les informations aux chercheurs d’emploi, de favoriser l’insertion des jeunes dans les circuits de production, et de concevoir des programmes de formation et d’auto-emploi.
Quels programmes ont été mis en place en lien avec la DSA?
La DSA a facilité la mise sur pied du Programme de Développement Communautaire (PRODEC) et des Financements d’Investissement de Microréalisations Agricoles Communautaires (FIMAC), ainsi que du Programme Social d’Urgence (PSU).