Accueil / Droit International des Droits de l'Homme / Amnisties et prescriptions pénales en droit international des droits de l'homme / Comment la justice transitionnelle en RCA transforme les victimes en acteurs de réconciliation ?

Comment la justice transitionnelle en RCA transforme les victimes en acteurs de réconciliation ?

Pour citer ce mémoire et accéder à toutes ses pages
🏫 Université Catholique d'Afrique Centrale - Faculté de sciences sociales et de gestion - Académie de la Paix et des droits de l'homme en Afrique centrale
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2020-2021
🎓 Auteur·trice·s
OUMBA BAZOLA Seth Jireh
OUMBA BAZOLA Seth Jireh

La justice transitionnelle en RCA révèle des mécanismes cruciaux pour la réconciliation nationale, notamment à travers l’accord de Khartoum. Cette étude met en lumière l’impact des institutions comme la Commission Justice Vérité, Réparation et Réconciliation sur les victimes et les auteurs de violations des droits humains.


Paragraphe II : L’expérience centrafricaine de la justice transitionnelle

Dans le souci de remettre en place la stabilité et la réconciliation nationale, les différentes parties de la crise centrafricaines ce sont mises d’accord dans l’accord de Khartoum, d’élaborer ou de recourir à un certain nombre de mécanismes. C’est le cas de la Commission Justice Vérité, Réparation et Réconciliation, mais aussi du fond de soutien des victimes.

A- La Commission Justice, Vérité, Réconciliation et Réparation

La CJVRR a été mise en place en RCA pour venir en aide aux victimes des violations et à la société meurtrie par les atrocités pendant la période de l’instabilité. Elle met en lumière la vérité et permet d’accorder des réparations afin de trouver une réconciliation nationale. Elle est donc importante et a fait ses œuvres lors de la période des amnisties en RCA.

Sa valeur est reconnue par le DIDH. C’est ainsi que la Commission Interaméricaine des Droits de l’homme affirme dans un rapport de 1999 que « La valeur des commissions vérité réside dans le fait qu’elles sont créés, non pas avec le postulat qu’il n’y aura pas de procès, mais afin de constituer un pas vers la connaissance de la vérité et, en fin de compte, pour que la primauté de la justice soit garantie121 ».

Toutes les victimes des différends conflits ont le même sentiment de rechercher des réparations sur les violations subi. Ces réparations ne peuvent passer que si les autorités mettent en place des mécanismes permettant à faire triompher la vérité. La vérité qui est un droit pour les victimes est aussi importante pour le droit de mémoire car, la vérité dont il s’agit n’est pas seulement pour les victimes, mais aussi pour leurs descendants et plus généralement pour la société entière.

Dans l’Ensemble des principes actualisés contre l’impunité, les Principes 4, 2 et 5 précisent :

« Indépendamment de toute action en justice, les victimes, ainsi que leurs familles et leurs proches, ont le droit imprescriptible de connaitre la vérité sur les circonstances dans lesquelles ont étés commises les violations et, en cas de décès ou de disparition, le sort qui a été réservé à la victime.» ;

« Les victimes et leurs représentants devraient être habilités à rechercher et à obtenir des informations sur les causes qui ont conduit à leur victimisation et sur les causes et conditions propres aux violations flagrantes du Droit international des droits de l’homme et aux violations graves du Droit international humanitaire, et avoir le droit d’apprendre la vérité sur ces violations » ;

« Chaque peuple a le droit inaliénable de connaitre la vérité sur les événements passés relatif à la perpétration de crimes odieux , ainsi que sur les circonstances et les raisons qui ont conduit, par la violation massive ou systématique des droits de l’homme, à la perpétration de ces crimes. L’exercice plein et effectif du droit à la vérité constitue une protection essentielle contre le renouvellement des violations » ;

« Il appartient aux Etats de prendre les mesures appropriées, y compris les mesures destinées à assurer l’indépendance et le fonctionnement efficace de la justice, pour rendre effectif le droit de savoir. Au titre des mesures destinées à garantir ce droit, les procédures non judiciaires peuvent être menées en complément de l »action des autorités judiciaires. Les sociétés qui ont connu des crimes odieux à grande échelle ou systématiques peuvent avoir intérêt notamment à ce qu’une commission de vérité ou une commission d’enquête soit créée pour établir les circonstances entourant ces violations afin de faire jaillir la vérité et d’empêcher la disparition d’éléments de preuve.».

Apres plusieurs années, on constate que la CJVRR a été effective, mais n’a pas atteint tous ses objectifs puisque d’abord restée un grand moment consultatif, avant de se lancer dans son but de réparation. Ce manquement a entrainé une disparition de certaines preuves, de certains témoins et victimes qui sont finalement morts pour cause de non-assistance. Ce qui pose le problème du fond de soutient des victimes qui, est un élément fondamental pour la mise en place effective d’une Commission vérité.

B- Le fond de soutien des victimes

Le fond de soutien aux victimes est une initiative qui permet aux victimes de bénéficier d’une assistance psychologique, médicale et même parfois matérielle au regard des violations dont ils étaient victimes. Dans le cadre particulier de la RCA, un fond de soutien aux victimes a été créé par la CPI. Ce fond avait pour but de fournir une aide voire réparé dans une certaine mesure les préjudices subis par les victimes et leurs familles.

C’est dans cette perspective d’accompagnement que le Directeur du Conseil du fond au profit des victimes avait déclaré qu’il « est conscient des profondes souffrances des victimes du conflit dans la situation en République centrafricaine, en particulier les victimes de violence sexuelles et sexistes, et prend soigneusement note des nombreuses preuves de la souffrance des victimes dans le contexte de l’affaire Bemba.

Indépendamment de l’issue judiciaire, les victimes dans l’affaire Bemba sont, par définition, des victimes de la situation en RCA. Le fond au profit des victimes souhaite affirmer aux victimes ayant subis un préjudice dans la situation en RCA : Vous n’êtes pas oubliées. Les préjudices que vous avez subis sont reconnus et appellent de tout urgence une réponse significative ».

Il faut reconnaitre par-là que la CPI de manière formelle, puisque mettant en place une institution pour accompagner les victimes des violations des droits de l’homme, reconnait qu’il faut accompagner les victimes puisque les amnisties et les prescriptions pénales ne permettent pas toujours de les assister.

Apres la mise en place de la justice transitionnelle, les victimes dans la plupart des cas, ayant perdu tous leurs biens et ayant été traumatisés, ne réclament que du soutien et de l’accompagnement. C’est ainsi que certains ont été interrogés et ont pu affirmer « Quand nous sommes allés à la CPI, la Cour nous a garanti de faire quelque chose, là il n’y a rien, on va tous mourir, qu’est-ce que la Cour peut faire pour nous ?

Seule notre avocat nous aide. Depuis tout ce temps la CPI ne fait que regarder, elle ne fait que tourner en rond. Je voudrais qu’on me donne de l’argent pour vendre, pour m’occuper de mes enfants, pour me soigner, ou avoir une maison à moi pour que j’y habite avec mes enfants… 122».

Ce témoignage montre à suffisance la nécessité du fond de soutien aux victimes après de graves violations des Droits de l’homme.

Le fond de soutien aux victimes est une forme de réparation des violations des droits des individus. Et dans le contexte centrafricain, il est le fruit de l’accord de Khartoum dont les différentes parties se sont accordé « à prendre des mesures idoines, y compris la mise en place d’un fond fiduciaire, pour garantir la réhabilitation et la réparation due aux victimes ».

Le fond des victimes qui est pour un grand nombre de temps une initiative des institutions internationales, telle est le cas de la CPI actuellement, est très souvent difficilement appliqué comme il se doit, pour la simple raison qu’il ne touche pas toutes les victimes. Une collaboration de l’Etat en reconstruction et un engagement des bourreaux (souvent riches) serait nécessaire pour la réalisation effective de ce droit. Mieux, il faudrait que les Etats, de manière indépendante mettent en place des mécanismes soutenant la justice transitionnelle, permettant aux victimes d’être accompagnée.

Les conditions et le mécanisme sont deux éléments qui nous ont permis de comprendre la garantie extrajudiciaire de la justice transitionnelle, bien que celle-ci soit souvent en bute à des difficultés d’application. Toutefois, que peuvent être des solutions efficaces permettant une bonne garantie des droits des victimes et même des présumés auteurs des infractions ?

________________________

120 Mark Freeman, Necessary Evils : Amnesties and Search for Justice (Cambridge University).

121 Commission Interaméricaine des Droits de l’homme, Rapport n.136/99, Affaire 10.488, Ignacio Ellacuria et al. (Salvador), 22 décembre 1999, paragraphes 229-230. Traduction non officielle.

122 FIDH – Les points de vu des victimes de violences sexuelles en matière de réparation dans l’affaire Bemba devant la CPI en novembre 2017.


Questions Fréquemment Posées

Qu’est-ce que la Commission Justice, Vérité, Réconciliation et Réparation en RCA?

La CJVRR a été mise en place en RCA pour venir en aide aux victimes des violations et à la société meurtrie par les atrocités pendant la période de l’instabilité.

Pourquoi la vérité est-elle importante pour les victimes en RCA?

La vérité est un droit pour les victimes et est aussi importante pour le droit de mémoire, car elle concerne non seulement les victimes, mais aussi leurs descendants et la société entière.

Quels sont les droits des victimes selon les principes contre l’impunité?

Les victimes ont le droit imprescriptible de connaître la vérité sur les circonstances des violations, de rechercher des informations sur les causes de leur victimisation, et chaque peuple a le droit de connaître la vérité sur les événements passés relatifs à la perpétration de crimes odieux.

Rechercher
Télécharger ce mémoire en ligne PDF (gratuit)

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top