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Comment les discours d’Aristide révèlent des implications politiques cruciales ?

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🏫 Université de Yaoundé I - Faculté des Arts, Lettres et Sciences Humaines - Département des Sciences du Langage
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2022
🎓 Auteur·trice·s
Daniel LAMOUR
Daniel LAMOUR

Les implications politiques des discours de Jean-Bertrand Aristide révèlent comment ses stratégies discursives ont façonné le paysage socio-politique haïtien. Cette analyse sémantique met en lumière des relations inattendues entre discours et crises, offrant des perspectives cruciales sur la démocratisation en Haïti.


Crédibilité, émotion, logique

L’Ethos (crédibilité que l’orateur inspire à l’auditoire) : Il s’agit ici des moyens de persuasion résultant de la personnalité de l’orateur. On a tendance à croire les gens que l’on respecte. Un des problèmes centraux lorsqu’on s’exprime en public est d’être précédé d’une réputation et de projeter les signes qui vont rassurer sur notre personne en ce qu’elle prend la parole sur un sujet donné dans un contexte donné.

Ces éléments vont contribuer à gagner ou non l’écoute de l’auditoire. Il s’agit de faire en sorte de devenir une autorité que le sujet sur lequel on s’exprime, tout en incarnant une personne agréable et digne de respect.

Pathos (l’émotion que l’orateur parvient à susciter dans l’auditoire) : Moyens visant à persuader un public en faisant appel aux émotions, à sa sympathie et à son imaginaire. Utiliser le Pathos n’engage pas uniquement l’émotionnel de l’auditoire mais permet aussi au public de s’identifier aux arguments de l’orateur.

La manière la plus commune d’y parvenir est d’utiliser la narration ou de raconter une histoire qui adapte la logique rationnelle en un objet palpable et présent.

Logos (logique et rationalité) : C’est la persuasion par le raisonnement. Il s’agit ici de la clarté du message, la logique du raisonnement tout autant que l’effectivité et la justesse des exemples utilisés. La logique se déploie dans l’argumentation et la réfutation.

L’ethos, le pathos et le logos sont trois preuves de même importance et forment le triptyque de l’art de convaincre. C’est la maîtrise de cet ensemble qui fera de l’orateur un bon artisan de son art : un maître ès de la persuasion57. Ainsi, la finalité du discours politique se tourne toujours vers l’image de son énonciateur, laquelle relève de l’éthos.

Sur la base de la classification réalisée par P. Charaudeau, les types d’éthos les plus récurrents utilisés dans le discours politique sont58 : l’ éthos de crédibilité, Éthos de sérieux, Ethos de vertu, Éthos de compétence, Les éthos d’identification, Éthos de puissance, Éthos de caractère, Éthos d’intelligence, Éthos d’humanité, Éthos de chef.

Il faut signaler que, l’ethos se construit dans la situation de l’énonciation. Il se construit dans le discours et par le discours, donc dans l’utilisation de la parole, au moment même de parler. C’est pourquoi on parle de l’éthos discursif. Comme le signale D. Maingueneau :

« Ce que l’orateur prétend être, il le donne à entendre et à voir : il ne dit pas qu’il est simple et honnête, il le montre à travers sa manière de s’exprimer. L’ethos est ainsi attaché à l’exercice de la parole, au rôle qui correspond à son discours, et non à l’individu « réel », appréhendé indépendamment de sa prestation oratoire59. »

Stratégie discursive

Tout d’abord, la notion de « stratégies discursives » recouvre un champ de phénomènes très vaste : dans toute activité langagière, mettant aux prises un ou plusieurs individus parlants et un système de signes, il est possible de déceler de multiples « stratégies », en se plaçant à des niveaux d’analyse très différents, du syntaxique au socio-pragmatique, en passant par la sémantique, la logique ou la rhétorique.

La notion de stratégie en analyse du discours réfère aux choix possibles du locuteur en situation de communication. C’est que l’acte de langage n’est soumis à̀ aucune fatalité́ qui préfigurerait sa structuration. Il n’y a pas de prêt-à-porter langagier. Chaque énonciation est unique.

Certes la grammaticalité́ et les lois de la communication sont des données contraignantes auxquelles il faut satisfaire pour que l’acte de langage soit valide et compréhensible.

Cependant, ces contraintes conventionnelles sont loin d’avoir un impact sur l’infinité́ de choix possibles que les sujets peuvent faire dans le processus de mise en discours. Ceci dit chaque choix langagier est stratégique par le fait qu’il écarte d’autres choix possibles.

Le but du discours politique est de persuader, influencer, pousser le public à agir en gagnant son adhésion. En ce sens, le locuteur politique doit mettre en place des stratégies discursive pour y parvenir.

Autrement dit, il ne peut pas y avoir de discours politique sans stratégie discursive. Comme le signalent F. Cornilliat et R. Lockwood, dans le colloque international de Saint-Denis et dans l’avant-propos de leur ouvrage : « la rhétorique c’est l’art de la parole, mais elle représente aussi l’art de la personne60 ». En cela, la stratégie discursive a un lien direct avec le charisme du locuteur.

Stratégie phraséologique

Les unités phraséologiques peuvent être mises à disposition du locuteur politique pour augmenter ses possibilités d’attirer l’attention de ses interlocuteurs. C’est principalement l’aspect général des unités phraséologiques et la connaissance qu’en ont les interlocuteurs qui permettent de laisser transparaître une stratégie de rapprochement des entités et de séduction.

Autrement dit, le discours politique est plutôt un terrain propice à l’utilisation d’unités phraséologiques contenant des traits culturels qui permettent aux locuteurs politiques de se rapprocher de la population, par le biais de connaissances communes.

Comme l’affirme P. Charaudeau, « il s’agit d’ « agir sur l’autre » en tenant compte des représentations du monde et des valeurs communes et donc culturelles qui font partie de la société. » (P. Charaudeau, 2002).

Or, les unités phraséologiques possèdent ces caractéristiques essentielles, elles partagent des traits culturels et reposent sur une certaine conventionalité dont l’objectif particulier est de permettre aux interlocuteurs de reconnaître les expressions utilisées et de se reconnaître comme membre d’un groupe linguistique.

C’est à travers le discours politique que les entités discursives fusionnent et partagent les mêmes valeurs communes. Si l’on étudie de près l’objet de la phraséologie, on peut constater qu’il est constitué d’expressions conventionnelles contenant un sens non-compositionnel ou figuré, des particularités structurales et des traits culturels particuliers.

La phraséologie se charge d’étudier tout ce qui est, plus ou moins, figé dans la langue, tout ce qui est, plus ou moins, idiomatique, tout ce qui est, plus ou moins, opaque sémantiquement, et tout ce qui renvoie à la mémoire collective d’une communauté donnée.

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57 Danblon, E. (2013). Quels mots pour convaincre ?. Sciences Humaines, 246, 13-13. https://doi.org/10.3917/sh.246.0013

58 Bernard Lamizet, « Patrick CHARAUDEAU (2005), Le discours politique. Les masques du pouvoir », Communication, Vol. 24/2 | 2006, 188-191.

59 Woerther Frédérique. Aux origines de la notion rhétorique d’èthos. In: Revue des Études Grecques, tome 118, Janvier-juin 2005. pp. 79-116; p.95

60 « La rhétorique est aussi un art de la personne. Nul logos, nul argument, nul mot, ne se présente sans quelqu’un l’.mette pour quelqu’un, sans destinateur ni destinataire. » Cornilliat François et Lockwood Rich Ethos et pathos. Le statut du sujet rhétorique. Actes du colloque international de Saint-Denis (19-21 juin 1997), éd. par François Cornilliat et Richard Lockwood. Paris : Champion, 2000, p. 7.


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les stratégies discursives utilisées par Jean-Bertrand Aristide dans ses discours ?

La notion de « stratégies discursives » recouvre un champ de phénomènes très vaste, où l’on peut déceler de multiples « stratégies » en se plaçant à des niveaux d’analyse très différents, du syntaxique au socio-pragmatique.

Comment l’ethos influence-t-il la crédibilité des discours politiques ?

L’ethos se construit dans la situation de l’énonciation et se construit dans le discours et par le discours, donc dans l’utilisation de la parole, au moment même de parler.

Quels sont les trois éléments clés de la persuasion dans les discours d’Aristide ?

Les trois éléments clés de la persuasion sont l’ethos (crédibilité), le pathos (émotion) et le logos (logique et rationalité).

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