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Quelles sont les implications des programmes d’ajustement au Cameroun ?

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🏫 UNIVERSITÉ DE YAOUNDÉ - CENTRE DE RECHERCHE ET FORMATION DOCTORALE EN SCIENCES HUMAINES, SOCIALES ET ÉDUCATIVES - DÉPARTEMENT D’HISTOIRE
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - Mars 2023
🎓 Auteur·trice·s
Abdougani YOUMENI
Abdougani YOUMENI

Les implications des politiques d’ajustement au Cameroun révèlent des transformations sociales inattendues entre 1987 et 2017. Cette étude met en lumière les effets durables sur l’emploi, la santé et l’éducation, soulignant l’importance cruciale de ces ajustements dans la vie quotidienne des Camerounais.


L’IMPLÉMENTATION DES PAS AU CAMEROUN

L’implémentation des PAS au Cameroun était la mise en œuvre d’un ensemble des mesures d’accompagnement des politiques des institutions de Bretton Woods. Elles sont plurielles et se résument en ces principes : libéralisation, privatisation, dévaluation. Il incombe

33 Ebalé, « Vingt ans d’ajustement… », pp. 384-385.

34 Ibid., pp. 385-386.

35 AMINEPAT, 3C71, Programme d’Ajustement Structurel : Négociation, 90-97, Statuts de la Mission de réhabilitation des entreprises du secteur public et parapublic.

36 Ebalé, « Vingt ans d’ajustement… », p. 385.

dans cette partie de montrer comment la politique d’ajustement a été implémentée au Cameroun depuis le premier accord de confirmation jusqu’au dernier.

La libéralisation de l’économie camerounaise

L’État du Cameroun lança un vaste programme de libéralisation de la vie sociale, économique et politique dans le cadre du PAS à partir de 1990. La libéralisation consiste pour un État de passer d’une économie d’État à une économie de marché. En d’autres termes c’est le transfert de la gestion de l’économie de l’État vers le secteur privé pouvant faciliter la concurrence. Cette partie s’intéresse essentiellement sur la libéralisation agricole et la libéralisation bancaire.

Le secteur agricole

Le secteur de l’agriculture représentait pour le Cameroun l’un des secteurs prioritaires de son économie. Il faut rappeler que ce secteur contribuait à 90 % à l’économie camerounaise37. Sa libéralisation devait alors accroitre la concurrence et assainir l’économie tout en faisant participer considérablement le secteur privé. Il faut dire que l’option de la libéralisation ne fut que la compréhension par l’État du Cameroun du fait que son omniprésence ne pouvait faciliter une meilleure qualité des services.

Ceci dit, il fallait partir d’un actionnariat public pour un actionnariat privé dont le rôle de l’État ne se limite qu’à la facilitation de l’activité du secteur privé. Comme il a été dit plus haut, la libéralisation constituait un des piliers des PAS dont la philosophie était l’abolition des contrôles sur les prix par l’État ; d’où la logique de « la libre détermination des prix en fonction de l’offre et de la demande »38.

Il fallait donc libéraliser les prix à la suite de la libéralisation de l’économie.

En ce qui concerne le domaine agricole, la libéralisation ne fut possible qu’avec la mise en œuvre selon les exigences des institutions de Bretton Woods, d’une Nouvelle Politique Agricole (NPA) en 199039. Elle n’intervint que comme la réponse aux diverses lacunes de l’ancienne politique. En effet, dans le cadre du Libéralisme planifié, Ahmadou Ahidjo mit sur pied une politique agricole dont le but fut la réglementation du secteur agricole de l’État. Suite à la crise économique, elle s’avéra limitée. Inscrite dans la logique du premier PAS, la NPA s’érigea comme une base solide des grandes réformes entreprises dans le cadre de l’ajustement.

37 AMINEPAT, 3C21, Économie : Relance, 1984-1993…, p.1.

38 Abena Etoundi, « La planification économique… », pp.467-468.

39 Médard Tsala Buni, « L’aide internationale au développement du secteur agricole au Cameroun de 1978 à 2013

: Le cas du FIDA et de la FAO », Mémoire de Master en Histoire, Université de Yaoundé I, 2015, p.51.

Elle facilita alors la restructuration de plusieurs filières agricoles40. Cette restructuration porta essentiellement sur la libéralisation des prix d’une part, et d’autre part sur la création d’un espace de gestion de chaque filière dans le but de partager les dépenses et les gains41.

La NPA se voulut plus moderne et fut chargée d’un ensemble d’orientations et d’objectifs. Les orientations de la NPA étaient : la privatisation progressive des activités de développement de l’agriculture, la responsabilisation plus accrue des agriculteurs, la diversification de la production agricole42. Pour les objectifs, c’était : la modernisation de l’appareil de production, la maitrise de la sécurité alimentaire, la promotion et la diversification de la production et des exportations, le développement et la transformation des produits agricoles, la restructuration des principales filières de production43. Il faut donc dire que la NPA avait pour visée de reformer le circuit de production agricole en promouvant la diversité des filières, la modernisation de l’activité agricole et surtout l’accroissement du taux de production.

Les actions de la NPA furent assez diversifiées. L’on note de ce fait, la dissolution de l’ONCPB, la libéralisation complète de la commercialisation et la mise en place d’un système d’information sur les prix à l’exportation et les prix d’achat aux producteurs, et le développement des coopératives et des groupements de production dans les zones de production dans le but de favoriser le regroupement de la production et donner la possibilité de négociation des prix aux producteurs face aux acheteurs44.

Par la suite, il y eut le remboursement des arriérés aux planteurs, qui furent accumulés à partir de l’exercice 1989-1990 d’une part et la création d’une structure de concertation entre les producteurs, les exportateurs, leurs intermédiaires et les banques, connue sous le nom de Conseil Interprofessionnel du Cacao et du Café (CICC) d’autre part45.

La libéralisation agricole s’accentua sur les filières clés de l’économie camerounaise. Concernant la filière cacao, sa libéralisation fut complète en 1994. Pour y parvenir, il fallut l’application d’un ensemble de mesures visant la modernisation de l’appareil de production, la promotion et la diversification de la production et des exportations46. Pour les filières palmier

40 Guy Armand Kenmogne, « Production et commercialisation du maïs dans la région de Bandjoun : Étude historique (1961-2010) », Mémoire de Master en Histoire, Université de Yaoundé I, 2002, p.118.

41 Tsala Buni, « L’aide internationale au… », p.52.

42 Abena Etoundi, « La planification économique… », p.469.

43 Remi Bonguino, « Production et commercialisation du cacao à Bafia 1960-2006, Approche historique », Mémoire de Master en Histoire, Université de Yaoundé I, 2009, p.103.

44 Abena Etoundi, « La planification économique… », p.472.

45 Tsala Buni, « L’aide internationale au… », p.52.

46 Bonguino, « Production et commercialisation… », p.103.

à huile et hévéa, il fallut d’abord mettre un accent sur la négociation d’un contrat avec les unités de production étatiques, dans le but de réduire les coûts de production et l’amélioration de la gestion. Cela induisit la libéralisation des prix et la mise en place d’une fiscalité adaptée. Pour la filière riz, il fallut le recentrage des activités de la SEMRY (Société d’Expansion et de Modernisation de la Riziculture de Yagoua) et la dissolution de la SODERIM (Société de Développement de la Riziculture de

la Plaine de Mbo)47. Pour la filière banane, sa libéralisation a été facilitée par la privatisation de l’OCB (Office Camerounais de la Banane) en février 1991, le désengagement de l’État dans la filière, et l’établissement d’une formule de partenariat entre la CDC et la multinationale américaine Del-Monte48. Cette filière fut entièrement privatisée permettant l’installation des investissements nouveaux, ce qui favorisa l’atteinte de 200 000 t de production en 199749.

Concernant la filière coton, les efforts consentis s’articulèrent autour du paiement des arriérés aux producteurs, de la réduction des coûts de fonctionnement de la SODECOTON et de la libéralisation du prix d’achat aux producteurs50.

Au total, la libéralisation agricole s’axa autour des filières clés de la production agricole camerounaise. Que ce soit le cacao, le café, la banane, l’huile de palme, l’hévéa, le coton, la libéralisation n’échappa pas. La visée de cette opération était de rendre plus concurrentielle l’économie camerounaise et faire participer le secteur privé dans l’activité économique, tout ceci dans le cadre de la NPA.

Le secteur bancaire

Le secteur bancaire a été aussi une des visées de l’ajustement. En effet, la libéralisation de l’économie ne dut épargner aucun domaine d’activité. Ainsi, le processus de libéralisation du secteur bancaire fut déclenché à partir du premier PAS. Il institua une politique monétaire et de crédit qui servit de cadre pour la libéralisation du secteur. Le but de cette politique était de donner la possibilité aux banques de retrouver leur rôle dynamique dans le financement de l’économie. Il faut remarquer que cette action n’était possible que grâce à la stratégie de restructuration de l’ensemble du système bancaire. L’État entendait se désengager de façon

47 Tsala Buni, « L’aide internationale au… », p.53.

48 Alain Ulrich Babagnak, « La libéralisation des filières agricoles au Cameroun : Le cas du secteur bananier de 1987 à 2012 », Mémoire de Master en Histoire, Université de Yaoundé I, 2016, p.86.

49 Tsala Buni, « L’aide internationale au… », p.53.

50 Abena Etoundi, « La planification économique… », p.472.

progressive au bénéfice du privé, libéraliser les conditions de banque et de renforcer les moyens de contrôle ainsi que les sanctions51.

Pour ainsi mener à bien la politique monétaire et de crédit, un ensemble de mesures additionnelles étaient en expérimentation. Il s’agit entre-autre de la prise de dispositions fiscales pour faciliter la constitution des provisions, du procédé d’amélioration des procédures judiciaires, l’encouragement du maintien d’étroites relations financières et techniques entre les banques commerciales et leurs partenaires étrangers, l’accord d’une plus grande liberté et une responsabilité accrue aux banques pour la fixation des taux d’intérêt et des marges, établir un différentiel de taux d’intérêt positif52. Ces mesures additionnelles devraient d’ailleurs augmenter la capacité d’assainissement du secteur bancaire qui se trouvait lui aussi en mauvais état suite à la crise économique.

Il faut noter que la libéralisation du système financier camerounais avait pour objectifs principaux : l’assainissement du budget de l’État, l’harmonisation des conditions de banque et la lutte contre les effets externes de « la mondialisation financière ». C’est dire que la libéralisation bancaire visait l’assainissement et la restructuration du système dans le but de le rendre plus compétitif et de le protéger. Cette action avait d’ailleurs pour finalité la crédibilisation de l’État à l’extérieur, la consolidation de l’épargne nationale, la stimulation des initiatives privées, la promotion des investissements productifs et la restauration des mécanismes de marché financier53.

En raison de la crise, le taux d’endettement connut une hausse donnant ainsi lieu à la faillite de plusieurs banques. Pour pallier ce problème, l’État en acceptant l’option de la libéralisation facilita la mise sur pied d’un ensemble de structures d’accompagne. Ces dernières devaient encadrer et faciliter le processus de libéralisation viable et total. Il s’agit de la Commission Bancaire des États de l’Afrique Centrale (COBAC), la Commission Technique de Privatisation et de Liquidation (CTPL) et la bourse de valeur. Ce processus entraina alors un désengagement progressif de l’État du système bancaire. Cela conduisit l’État à transférer ses actions au secteur privé de l’ordre de 67 % dans les banques commerciales et 33 % dans les entreprises publiques54.

51 Touna Mama, L’économie camerounaise pour…, p.303.

52 Ibid., pp.303-304.

53 Sylvain Koh, « Établissements de crédit et financement de L’économie camerounaise 1962-1999 », Mémoire de Master en Histoire, Université de Yaoundé I, 2007, p.41.

54 Ibid.

Au total la libéralisation de la vie économique s’axa sur presque tous les secteurs de l’économie. La libéralisation agricole, dont toutes les filières étaient concernées, a été possible dès les premières années de l’ajustement par la mise en place de la NPA. La libéralisation bancaire quant à elle n’était que la résultante des mesures prises à partir du premier PAS dans le cadre de la politique monétaire et de crédit. Il convient à la suite de la libéralisation agricole et bancaire de voir comment le processus de désengagement de l’état s’est opéré dans le domaine des entreprises et la monnaie.


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les principales mesures des programmes d’ajustement structurel au Cameroun ?

Les principales mesures des programmes d’ajustement structurel au Cameroun incluent la libéralisation, la privatisation et la dévaluation.

Comment la libéralisation a-t-elle affecté l’économie camerounaise ?

La libéralisation a consisté à passer d’une économie d’État à une économie de marché, facilitant la concurrence et impliquant le secteur privé dans la gestion de l’économie.

Quel était l’objectif de la Nouvelle Politique Agricole mise en œuvre au Cameroun ?

L’objectif de la Nouvelle Politique Agricole était de moderniser l’appareil de production, maîtriser la sécurité alimentaire et promouvoir la diversification de la production agricole.

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