L’impact de la technologie bancaire sur le contentieux des crédits en Algérie révèle des enjeux inattendus, notamment la gestion des créances face à l’augmentation des défauts. Cette étude met en lumière des défis cruciaux, transformant notre compréhension du système bancaire depuis 1990.
3. Les accords de Bâle I
Depuis le début des années 1980, le comité de Bâle commençait à se préoccuper et à prendre très au sérieux la menace que représente la détérioration des fonds propres des principales banques internationales au moment même où les risques de défaut augmentaient, essentiellement le risque pays vis-à-vis des pays émergents à l’instar du moratoire de la dette mexicaine en 1982.
Dans ce contexte du début des années 1980 marqué par une instabilité de l’environnement financier, le comité de Bâle s’est attelé à l’élaboration d’une norme internationale de solvabilité permettant de mieux renforcer le niveau des fonds propres des banques et une plus grande stabilité des systèmes bancaires avec une plus grande convergence des méthodes d’évaluations de ces niveaux.
A l’issue des travaux menés par le comité, et de quelques réunions des gouverneurs du G 10, ces derniers ont approuvé, en juillet 1988, un document intitulé Convergence internationale de la mesure et des normes de fonds propres qui consistait en un système de mesure des fonds propres par le biais d’un rapport de solvabilité plus communément appelé le ratio Cooke52. Le ratio Cooke comprend une norme minimale de fonds propres fixée à 8 % assortie d’un système de pondération des risques du bilan et du hors bilan.
3.1. Le ratio Cooke
Le ratio Cooke définit un calcul précis des fonds propres fixé à 8 % par rapport à l’ensemble des engagements risqués pris par la banque, et qui sont regroupés en deux catégories (tiers) :
Les fonds propres de base (fonds propres d’origine ou tier one ou core capital) recouvrant le capital social, les bénéfices non distribués, fonds pour risques bancaires généraux… ils représentent la partie la plus solide et la plus stable des fonds propres.
Les fonds propres complémentaires ou quasi fonds propres (supplementary capital ou upper et lower tier two) comprenant les réserves occultes, les provisions pour réévaluation, les provisions générales, les obligations convertibles en action, les obligations à durée indéterminée à taux flottant, et les titres de dettes subordonnées à long terme. Ce sont des éléments de moins bonne qualité que les fonds propres de base.
Pour le capital complémentaire, lorsque ce dernier est repris dans les fonds propres, il ne peut dans ce cas dépasser 100 % du montant des fonds propres de base. Les fonds pour risques bancaires généraux peuvent être ajoutés dans les fonds propres mais sans être utilisés pour déterminer la limite du capital complémentaire.
La réglementation impose aussi les éléments à déduire des fonds propres, il s’agit notamment des participations et des emprunts subordonnés détenus dans d’autres banques et établissements financiers si elles sont supérieures à 10 % de leur capital. Dans ce cas, le comité de Bâle cherche à empêcher les banques à contourner leurs obligations de consolidation par un gonflement artificiel des fonds propres par participations croisées.
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52 On l’appelle le ratio Cooke du nom du président de comité de Bâle, Peter Cooke, entre 1977 et 1988, et ancien gouverneur de la Bank of England.
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Au dénominateur du ratio Cooke on retrouve la totalité des éléments d’actifs, plus précisément les crédits consentis, et les éléments du hors bilan de l’établissement. Ces actifs sont pondérés, selon certains critères, comme, par exemple, la nature du crédit accordé, la nature de la contrepartie et la zone géographique de cette dernière. La pondération permet de ne pas retenir certains crédits pour leur montant total mais pour seulement une fraction de ce montant.
Les actifs sur le bilan sont repartis en quatre catégories de risque, on retrouve les actifs pondérés à 0 %, 20 %, 50 %, et à 100 %, alors que les actifs du hors bilan doivent être d’abord convertis en équivalent crédit, puis classifiés dans la catégorie de risque adéquate.
• Ainsi le comité de Bâle a énuméré la nature des actifs selon leur taux de pondération : 0 % pour les encaisses, les créances sur les Etats nationaux de l’OCDE, leurs banques centrales et les créances garanties par eux, ainsi que les créances en monnaie nationale sur les Etats nationaux et banques centrales des autres pays.
• 20 % pour les créances sur – ou garanties par – les institutions internationales, les régions et collectivités locales de l’OCDE, les banques de l’OCDE, et celles des autres pays si elles sont à moins d’un an, ainsi que les valeurs en cours de recouvrement.
• 50 % pour les crédits hypothécaires (intégralement couverts par la valeur de l’actif mis en hypothèque) pour des logements.
• 100 % pour les autres crédits, notamment les créances sur des non-banques, les prises de participations, etc.
D’une manière générale le ratio Cooke est un rapport entre :
au numérateur, le montant des fonds propres de la banque ;
au dénominateur, le montant de l’ensemble de l’actif pondéré, représenté essentiellement par le risque de crédit.
Fonds propres net
Ratio Cooke= > ou = 8 %
Les actifs pondérés (dont les crédits à la clientèle)
La réglementation imposée par le comité de Bâle prévoit aussi dans le souci de protéger les déposants, que lorsque le ratio tombe sous la barre des 8 %, les autorités nationales chargées de la supervision, sont appelées à intervenir en veillant à y remédier. Autrement dit, il peut y avoir un transfert de contrôle de la banque en faveur des autorités de supervision dans le souci de redresser la situation tout en obligeant les actionnaires à recapitaliser l’établissement bancaire.
Par la suite, le dispositif de 1988 a été amendé à plusieurs reprises. En 1991, il a été amendé afin de clarifier la définition des provisions générales ou réserves générales pour créances douteuses pouvant être incluses dans les fonds propres. En avril 1995, le comité a publié un amendement visant à reconnaître les effets de la compensation bilatérale des expositions des banques au risque de crédit sur produits dérivés.
Un amendement officiel fut adopté en 1996 pour s’adapter à l’innovation financière et aux risques qui n’étaient pas couverts dans la configuration initiale, notamment les risques de marchés liés aux positions ouvertes des banques sur des devises, titres de dettes négociés, actions, produits de base et options. L’amendement de 1996 définit le principe d’une immobilisation de capital pour faire face aux risques de pertes liés aux opérations sur les marchés financiers (il définit un tier 3 permettant la couverture des risques de marché, le tier 3 est composé de prêts subordonnés d’une durée minimale de deux ans).
Ce dernier amendement comportait par ailleurs un élément particulièrement important, en ce sens que les banques pouvaient être autorisées, sous réserve du respect de critères quantitatif et qualitatif rigoureux, à utiliser leur modèle interne pour calculer leurs exigences de fonds propres réglementaires au titre des risques de marché. L’amendement de 1996 a aussi intégré certaines garanties hors bilan correspondant à la titrisation, qui laissaient la porte ouverte à un accroissement non maîtrisé du risque de crédit réellement porté par les banques.
3.2 Les limites et points faibles de l’accord
Depuis la finalisation de l’accord en juillet 1988 et sa mise en application à partir du 31 décembre 1992, le ratio Cooke représente, en lui-même, une avancée considérable dans le domaine de la supervision bancaire, et un instrument clair et robuste pouvant garantir la stabilité et la solvabilité de la banque et du système bancaire dans son ensemble.
Toutefois plusieurs doutes et réserves ont été émis par les acteurs financiers et, en premier lieu, les banques qui sont les premières concernées par l’accord.
Pour Armand PUJAL53 les faiblesses structurelles de l’accord de 1988 sont à situer sur plusieurs niveaux.
Il citera en premier lieu la non prise en considération de certains risques encourus par la banque. Les exigences des fonds propres dans le ratio Cooke ne concernaient que la couverture des risques de crédit. En dehors de l’amendement de 1996 sur les risques de marché, aucune allocation en capital n’a été prévue pour les autres formes de risques comme par exemple le risque opérationnel…etc.
En second lieu, le ratio Cooke n’est qu’une estimation fruste et statique du risque de crédit. Le nombre trop limité de catégories de risque associées à un niveau de pondération (0 %, 20 %, 50 %, 100 %) est défini selon des critères institutionnels et non économiques, l’absence de prise en compte de l’évolution de la qualité de signature des contreparties, au cours de la durée de vie des créances.
En troisième lieu, le ratio Cooke n’abordait que très partiellement l’effet de l’utilisation des techniques de réduction des risques telles que les sûretés ou encore la compensation. Enfin, de manière globale, l’Accord de 1988 se limitait à une approche unique et uniforme du risque, sans prise en compte du profil de risque de chaque banque et de sa plus ou moins grande maîtrise à le contrôler.
Arnaud de Servigny54 partage le même avis, quant aux limites de l’accord, d’ailleurs ces limites convergent très fortement avec celles avancées par Armand PUJAL, et qui sont, d’après le premier, mentionnées comme suit :
– Un manque de fondement économique au choix du niveau de 8 % ;
– Une définition de catégories de risque jugées arbitraires et sans rapport direct avec le niveau de risque réel ;
– Une différenciation trop lâche des risques, limitée à quatre catégories de risques ;
– Des mesures trop statiques qui ne sont pas directement reliées à la mesure d’insolvabilité de la banque ;
– Une absence de segmentation des risques de crédit selon le degré de séniorité, le niveau de maturité ;
– Une absence de prise en compte de l’effet positif lié à la diversification ;
– Un développement de l’arbitrage sur le capital, de manière à réduire le niveau de capital réglementaire requis.
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53 Armand PUJAL, De Cooke à Bâle II, revue d’économie financière, n° 73, 4ème trimestre 2003. (http://www.aef.asso.fr/servlets/ServePDF?id=22243)88
54 Arnaud de SERVIGNY, Le risque de crédit : nouveaux enjeux bancaires, Ed. Dunod, Paris, 2003, page 179.
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En effet, l’adoption du ratio Cooke par la majorité des pays, a fini par démontrer les limites conceptuelles et pratiques de l’accord de 1988, et ce, suite à l’évolution sans cesse des techniques et les mutations des systèmes financiers et bancaires.
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Date: 2022-05-20 18:00:00
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4. Le nouvel accord Bâle II
Devant la complexité du monde de la finance et la montée des risques à partir du début des années 1990, le cadre méthodologique institué par les accords de Bâle I, dans le but de se prémunir contre le risque de crédit, s’est vu complètement remis en cause par les banques, qui avaient, en parallèle, développées des techniques de mesure et de couverture du risque plus affinées. C’est dans ce contexte que le Comité de Bâle s’est réuni en décembre 1997 sous la présidence de Tom De Swaan, afin de proposer d’engager des réformes visant à élaborer une nouvelle norme d’adéquation des fonds propres.
4.1. Le processus d’élaboration de la nouvelle réforme
Durant l’été 1998, le Comité de Bâle, sous la présidence de William J. Mc Donough, a élaboré et défini les premières orientations et les contours devant servir de base de travail pour la nouvelle réforme. Ainsi, plusieurs orientations furent prises et explorées, il s’agit, tout d’abord, de la prise en considération de nouvelles approches permettant de mesurer, d’une manière plus pertinente, le risque de crédit, avec notamment le recours aux notations externes55 par le biais d’agences de notations (les agences de ratings) et aussi par l’intermédiaire d’un système de notation interne propre à chaque banque (dénommé IRB, Internal Rating Based).
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55 La notation selon Jeanne-Françoise de Polignac : « est une opinion indépendante et publique sur la qualité de crédit d’une entité ». La notation financière est généralement symbolisée par des lettres « AAA, Aaa… BBB, Baa… » que donnent les agences de notation comme Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch pour exprimer leur opinion sur la qualité d’un émetteur ou d’une émission.
D’une manière générale le but recherché dans la notation financière, c’est la détermination de la qualité de crédit, c’est-à-dire la capacité de faire face à des engagements financiers.
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Néanmoins, il a fallu attendre, jusqu’au 3 juin 1999, pour que le Comité de Bâle publie un document consultatif présentant, à la fois, les deux approches retenues dans le cadre du traitement du risque de crédit (notations internes et externes), mais aussi et surtout la grande nouveauté, du document publié, réside dans la présentation du cadre général de la réforme à savoir les trois piliers (terme employé explicitement dans le texte de l’accord) :
- Pilier 1 : exigences de fonds propres, il a pour objectif de mieux corréler le niveau de capital avec le niveau de risque pris par les banques ;
- Pilier 2 : surveillance prudentielle, elle a pour objectif de permettre une intervention en amont des autorités chargées de la supervision, lorsque le niveau de capital ne permet pas de couvrir suffisamment le risque ;
- Pilier 3 : discipline de marché, qui a pour objectif d’améliorer la circulation de l’information sur le marché financier.
La publication de ces séries de propositions, a poussé le Comité à engager un large processus de consultation dans l’ensemble des pays membres, auquel ont été associées les autorités de contrôle du monde entier, dans la perspective d’améliorer d’une manière substantielle la réforme amorcée.
La réforme initiée par le Comité de Bâle est si complexe qu’elle reflète l’étendue et la complexité du domaine bancaire et de la finance internationale. Cette réforme est destinée, en premier lieu, aux banques actives sur le plan international, et aussi sont concernées par cette réforme les sociétés holdings de banques, les groupes bancaires…etc.
Par rapport à l’accord de 1988, la réforme amorcée par l’instance bâloise vise plusieurs objectifs à savoir :
– Définir un ratio plus sensible aux risques réellement assumés par les banques ;
– Définir un cadre plus complet pour l’appréciation des risques bancaires ;
– Définir un capital réglementaire plus en ligne avec le capital économique ;
– Mettre en place un cadre d’analyse qui se base sur l’évaluation interne des banques ;
– Enrichir le contenu de la communication financière en matière de risques ;
– Etendre son application à toutes les banques ;
– Renforcer le rôle des régulateurs.
A partir de 2001, le Comité de Bâle a entamé un large processus de dialogue et d’expérimentation avec l’ensemble de la profession bancaire, afin de tenir compte de ses réactions et de ses propositions. Ainsi, de nombreux documents furent publiés et soumis à un arbitrage avec l’ensemble de la profession, dans le but d’aboutir à un compromis que ce soit sur les règles d’applications et les supports techniques, plus précisément concernant les approches méthodologiques à suivre en ce qui concerne le traitement du risque de crédit (sur ce point plusieurs consultations ont été menées avec les banques internationales, surtout s’agissant de la méthode de notation interne), le risque opérationnel ou bien les exigences de fonds propres…
Et ce n’est qu’à partir du premier semestre 2004 que l’accord final fut publié sous le titre « convergence internationale de la mesure et des normes de fonds propres », avec comme mesure phare un nouveau ratio de solvabilité dénommé le ratio Mc Donough56, en remplacement du ratio Cooke, et la publication des trois piliers qui représentent, aux yeux du Comité de Bâle, un ensemble indissociable de la nouvelle réforme.
Au terme de la publication du nouvel accord Bâle II, son application s’est faite de manière progressive. En effet, durant le premier semestre 2006, les deux systèmes à savoir le ratio Cooke et le ratio Mc Donough ont co-existé, pour permettre aux banques de s’adapter au nouveau dispositif. Toutefois, il a fallu attendre, jusqu’au 31 décembre 2006, pour que l’application complète du nouveau ratio soit effective. Cependant, même si le dispositif a été conçu pour une application universelle, le Comité reconnaît que, pour les pays de G 10, le renforcement du contrôle bancaire ne passe pas forcement, en priorité, par l’adoption du dispositif.
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56 Du nom du président du Comité de Bâle.
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52 Définition donnée par l’article 62 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001. ↑
53 Armand PUJAL, De Cooke à Bâle II, revue d’économie financière, n° 73, 4ème trimestre 2003. (http://www.aef.asso.fr/servlets/ServePDF?id=22243)88 ↑
54 Arnaud de SERVIGNY, Le risque de crédit : nouveaux enjeux bancaires, Ed. Dunod, Paris, 2003, page 179. ↑
Questions Fréquemment Posées
Qu’est-ce que le ratio Cooke dans le contexte bancaire?
Le ratio Cooke définit un calcul précis des fonds propres fixé à 8 % par rapport à l’ensemble des engagements risqués pris par la banque.
Quels sont les types de fonds propres selon le ratio Cooke?
Les fonds propres se divisent en deux catégories : les fonds propres de base (tier one) et les fonds propres complémentaires (quasi fonds propres).
Comment le comité de Bâle évalue-t-il les actifs des banques?
Les actifs sur le bilan sont répartis en quatre catégories de risque, pondérées à 0 %, 20 %, 50 %, et 100 %, et les actifs du hors bilan doivent être convertis en équivalent crédit.