Comment surmonter les défis des droits communautaires au Nord-Kivu ?

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🏫 Université de Gomadomaine des Sciences Juridiques, Politiques, Administratives, Management et Relations Internationales - Sciences juridiques
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2022-2023
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Quels sont les véritables défis et solutions pour les droits communautaires face à l’exploitation minière au Nord-Kivu ? Cette analyse met en lumière les lacunes de la législation congolaise et propose des mécanismes de protection essentiels pour les communautés locales, avec des implications cruciales pour leur avenir.


SECTION II. LE DROIT APPLICABLE

Les communautés locales ont des droits, au regard de la législation minière de la RDC vis-à- vis des exploitants miniers. Certes, la nouvelle législation minière est suffisamment robuste à ce qui concerne les questions locales. Cependant l’effectivité de ce texte cause encore problème. C’est cette législation que nous allons aborder dans le premier paragraphe avant de visualiser les différents acteurs impliqués.

§1. La législation minière

Le secteur minier congolais est régi par la loi n°18/001 modifiant et complétant la loi n° 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier promulguée en date du 09 mars 2018 et le décret n° 038/2003 du 26 mars 2003 portant règlement minier, tel que modifié et complété par le décret n°18/024 du 08 juin 2018. Le code minier sus-indiqué s’applique aux opérations :

« de recherches, d’exploitation industrielle, semi-industrielle et artisanale … »184 Ainsi donc l’exploitation minière en RDC peut être soit artisanale, soit semi-industrielle ou alors industrielle. Les communautés locales occupent, d’une manière ou d’une autre, une place dans toutes ces catégories d’exploitation, soit d’acteur quand les membres des dîtes communautés sont membres de coopératives minières, soit de parties prenantes notamment lorsqu’elles ont des intérêts sociaux, économiques ou environnementaux à faire valoir.

L’exploitation minière artisanale

Avant de parler des droits des communautés locales lors de l’exploitation artisanale, donnons d’abord les notions générales sur cette catégorie d’exploitation.

Les notions générales sur l’exploitation artisanale

L’exploitation minière est dite artisanale « lorsque les facteurs techniques et économiques qui caractérisent certains gîtes d’or, de diamant ou toute autre substance minérale ne permettent pas d’en assurer une exploitation industrielle, mais permettent une exploitation artisanale, (…) » 185 De tels gîtes sont érigés, dans les limites d’une aire géographique déterminée, en zone d’exploitation artisanale.186 L’exploitation artisanale est celle qui est la plus pratiquée au Nord-Kivu.

L’exploitation minière artisanale se définit comme « toute activité par laquelle une personne physique de nationalité congolaise se livre, dans une zone d’exploitation artisanale délimitée en surface et en profondeur jusqu’à trente mètres au maximum, à extraire et à concentrer des substances minières en utilisant des outils, des méthodes et des procédés non industriels ». 187 L’EMA s’effectue dans des Zones d’Exploitation Artisanale (ZEA). En 2010, les ZEA couvraient 1 % du territoire national.188

Le ministre ayant les mines dans ses attributions a la compétence de d’instituer les zones d’exploitation artisanale. L’arrêté du ministre intervient après avis de l’Organisme spécialisé de recherches, du Gouverneur de province, du Chef de Division provinciale des mines, de l’autorité de l’entité territoriale décentralisée et du Cadastre minier. Un périmètre minier ou de carrières faisant l’objet d’un titre minier ou de carrières en cours de validité ne peut être transformé en zone d’exploitation artisanale.189

La fermeture d’une zone d’exploitation artisanale n’est décidée que « Lorsque les facteurs qui ont justifié son institution ont cessé d’exister ou qu’un nouveau gisement ne relevant pas de l’exploitation artisanale vient à être découvert ». Dans cette hypothèse, sur avis de l’organisme spécialisé de recherches, du Service d’Assistance et d’Encadrement de l’Exploitation minière à Petite échelle, SAEMAPE, en sigle, et du Gouverneur de la province concernée, le ministre ayant les mines dans ses attributions, « procède à la fermeture de la zone d’exploitation artisanale ». Le texte ajoute que « la fermeture d’une zone d’exploitation artisanale est notifiée par le Secrétaire général aux mines à la Division provinciale des mines du ressort, au Cadastre minier et au SAEMAPE. Ce dernier en informe les Coopératives minières ou des produits de carrières agréées, selon le cas, et se charge éventuellement de la relocalisation dans une autre zone d’exploitation artisanale légalement instituée.

Dans ce cas, les coopératives minières ou des produits de carrières agréées sont tenues de libérer la zone d’exploitation artisanale dans les soixante jours à compter de la notification de la décision de fermeture.190

La coopérative minière ou de produits de carrières agréée travaillant dans la zone d’exploitation artisanale concernée dispose d’un droit de préemption pour solliciter un Permis en vue d’une exploitation à petite échelle. Cette coopérative minière ou de produits de carrières, agréée dispose d’un délai de cent quatre-vingts jours, à compter de la notification de fermeture par le Secrétaire général aux mines, pour faire connaître si elle entend faire jouer son droit de préemption.191

Les droits des communautés locales lors de l’exploitation artisanale

En principe, les communautés locales telles que définies par le code minier n’ont de droit que vis-à-vis des compagnies minières, c’est-à-dire lors de l’exploitation industrielle et celle semi-industrielle. Cependant, dès lors que les activités minières artisanales impactent négativement l’environnement autant que les activités minières industrielles et semi-industrielles, les communautés locales jouissent du droit à un environnement sain vis-à-vis des exploitants artisanaux.

De même, le fait pour le droit minier d’interdire aux étrangers de posséder une carte d’exploitant artisanal peut conduire à insinuer la promotion du droit au développement en faveur des communautés locales.

En effet, le législateur congolais reconnaît aux seuls congolais, la possibilité de faire l’exploitation minière artisanale. Certes, tous les congolais peuvent faire l’exploitation artisanale, mais les membres de communautés locales sont les plus présents dans les ZEA pour faire l’EMA. Leur ruée vers l’EMA s’expliquerait par cette exclusivité. L’accession aux activités minières artisanales par les seuls congolais, particulièrement les membres de communautés locales, semble avoir pour finalité : promouvoir la lutte contre la pauvreté dans les zones d’exploitation minières de la RDC en faisant, notamment participer les communautés locales dans l’exploitation minière artisanale.

Ainsi, l’exploitant artisanal doit respecter les normes en matière de sécurité, d’hygiène, d’utilisation de l’eau et de protection de l’environnement qui s’appliquent à son exploitation conformément à la réglementation en vigueur. Il doit indemniser les exploitants agricoles pour tout dommage engendré par son activité.192 Le non-respect de ces obligations peut entraîner le retrait de la carte d’exploitant artisanal par le Chef de Division provinciale des mines ou par son représentant local qui l’a émise après une mise en demeure de trente jours.

La personne à laquelle la carte a été retirée n’est pas éligible pour obtenir une nouvelle carte d’exploitant artisanal pendant trois ans, à moins qu’il complète un stage de formation en technique d’exploitation artisanale appropriée, organisé ou agréé par l’Administration des Mines. En outre, la Division provinciale des mines est tenue de s’assurer que le demandeur d’une carte d’Exploitant artisanal a compris l’intégralité des dispositions contenues dans le Code de conduite de l’Exploitant artisanal repris dans l’Annexe V du Règlement minier.193 A ce titre, en vue d’éviter toute ambiguïté, la Division provinciale du Ministère des Mines est chargée de vulgariser les textes concernés dans les dialectes de la Province.

Les Services techniques spécialisés du Ministère des Mines assurent un encadrement technique aux exploitants artisanaux notamment sur les modalités du respect du Code de conduite environnemental, la sécurité et l’hygiène sur les sites d’extraction minière. Cet encadrement est sanctionné par un test d’évaluation réalisé par les Services techniques spécialisés du ministère des mines et dont les résultats sont transmis pour dispositions au Chef de Division provinciale des mines du ressort.194 Toutefois, l’exploitant dont la carte n’est pas renouvelée peut bénéficier d’un nouvel encadrement dans le but d’obtenir le renouvellement en cas de réussite au test.195

Enfin, dans le souci de protéger l’environnement et ainsi assurer le droit à un environnement sain, chaque exploitant artisanal est tenu de contribuer au fond de réhabilitation institué en vue de financer la réalisation des mesures d’atténuation et de réhabilitation des zones d’exploitation artisanale, le taux de cette contribution est fixé à 10 % du montant fixé pour l’obtention de la carte d’exploitant artisanal.196

192 Code minier, article 112.

193 Règlement minier, article 225.

194 Ibid., article 232.

195 Ibid.

196 Ibid., article 417.

Il ressort de ce qui précède que lors de l’exploitation artisanale, les communautés locales ont droit à un environnement sain, droit à l’eau, droit au développement, droit à l’indemnisation pour occupation du sol pour le besoin d’exploitation artisanale, droit au consentement libre préalable et informé…

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184 Code minier, article 2.

185 Code minier, article 109.

186 Ibid.

190 Ibid., article 110.

191 Ibid., article 111.

192 Code minier, article 112.

193 Règlement minier, article 225.

194 Ibid., article 232.

195 Ibid.

196 Ibid., article 417.


Questions Fréquemment Posées

Quels sont les droits des communautés locales face à l’exploitation minière au Nord-Kivu ?

Les communautés locales ont des droits, au regard de la législation minière de la RDC vis-à-vis des exploitants miniers.

Comment est définie l’exploitation minière artisanale en RDC ?

L’exploitation minière artisanale se définit comme toute activité par laquelle une personne physique de nationalité congolaise se livre, dans une zone d’exploitation artisanale délimitée, à extraire et à concentrer des substances minières en utilisant des outils, des méthodes et des procédés non industriels.

Quelles sont les conditions pour la fermeture d’une zone d’exploitation artisanale ?

La fermeture d’une zone d’exploitation artisanale est décidée lorsque les facteurs qui ont justifié son institution ont cessé d’exister ou qu’un nouveau gisement ne relevant pas de l’exploitation artisanale vient à être découvert.

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