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Défis et solutions des programmes d’ajustement structurel au Cameroun (1987-2017)

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🏫 UNIVERSITÉ DE YAOUNDÉ - CENTRE DE RECHERCHE ET FORMATION DOCTORALE EN SCIENCES HUMAINES, SOCIALES ET ÉDUCATIVES - DÉPARTEMENT D’HISTOIRE
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - Mars 2023
🎓 Auteur·trice·s
Abdougani YOUMENI
Abdougani YOUMENI

Les défis des programmes d’ajustement au Cameroun, entre 1987 et 2017, révèlent des transformations sociales inattendues. Cette étude met en lumière les impacts profonds sur l’emploi, la santé et l’éducation, redéfinissant ainsi notre compréhension des conséquences de ces politiques économiques.


CHAPITRE I : L’ÉCONOMIE CAMEROUNAISE AVANT L’ESSOR DE LA CRISE DE 1987

La mise en valeur du territoire national devint la priorité du jeune État camerounais à partir des années 1960 ; qui passait par une organisation politique, économique, structurelle, et sociale. Cela impliqua l’implémentation d’une politique économique forte. C’est à cet égard que le président Ahidjo se dût donc de penser une politique économique viable.

Elle passait par une idéologie du socialisme africain, combinée d’une logique du capitalisme. Cette politique portait ainsi le nom de libéralisme planifié, socle de l’ascension socioéconomique du pays en cette période. Dès les premières années de sa mise en application, le Cameroun réalisa des performances économiques louables. Mais, la crise économique et financière des années 1980 vint basculer la donne et plongea le pays dans une sorte de « décadence ».

Des mesures nationales furent de ce fait prises pour arriver à bout de la crise. Ce chapitre se donne pour objectif de revenir sur ces trois séquences historiques : l’essor de l’économie camerounaise, la crise économique et les mesures nationales de lutte contre la crise.

LES BASES DE L’ÉCONOMIE CAMEROUNAISE

Cette partie présente de façon factuelle les éléments de la politique économique et qui attestent de l’apogée de l’économie camerounaise. Il s’agit des instruments de la politique économique et les indicateurs de performance.

Les instruments de la politique économique

Pour comprendre la politique du libéralisme planifié, il faut s’intéresser d’une part à la philosophie de cette politique économique et d’autre part à son contenu qui s’axe principalement sur les plans quinquennaux.

La philosophie de la politique économique

Le libéralisme planifié est une politique hybride qui tente de lier les politiques économiques du capitalisme (libéralisme) et du socialisme (planification). Ceci étant, le président Ahidjo déclarait : « Le secteur privé restera pendant longtemps encore leader dans l’industrie et qu’il appartient au gouvernement de concevoir des moyens afin d’atteindre les investissements étrangers1« . Le libéralisme dans la politique économique du Cameroun était particulier. C’est en premier ressort une réglementation des entreprises privées qui a pour but de barrer la route à

1 Mathieu Jérémie Abena Etoundi, « La planification économique au Cameroun : Aperçu historique (1960-2000) », Thèse de Doctorat /Ph.D en Histoire, Université de Yaoundé I, 2008, p.49.

l’impérialisme économique, conséquence de l’application du libéralisme à outrance2. Ce libéralisme à outrance échappe au contrôle de l’État et sombre ce dernier dans une sorte « d’oligarchie économique »3. En second ressort c’est la promotion et l’encouragement de l’initiative privée. Il était cependant une sorte de libre cours à cette initiative dans une logique purement capitaliste. En ce sens, l’homme est au centre des préoccupations libérales et il lui est conférée une participation responsable au challenge du développement.

La planification réside quant à elle sur un ensemble de moyens précis ; d’un côté l’interventionnisme étatique de l’autre, le protectionnisme. La planification a une fonction double, l’une prévisionnelle et l’autre administrative4. Une économie planifiée est donc le gage d’une ascension en ce sens qu’elle est bien pensée, structurée et mise sur pied sous le contrôle de l’État, acteur principal du développement.

Dans la vision de l’interventionnisme étatique, l’État joue un rôle moteur c’est-à-dire est le régulateur des finances publiques et des investissements. À cet effet, il se doit d’encadrer les entreprises du secteur privé. Il peut se permettre de créer un cadre propice dans lequel il doit promouvoir l’économie mixte, pour ainsi faciliter la concurrence5.

Il est une sorte de banque de crédit aux entreprises privées, et stimule l’investissement privé6. Au Cameroun, la matérialisation de cette logique est d’une part la création de la Société Nationale d’Investissement (SNI) en juin 19647, ayant pour mission la mobilisation et l’orientation de l’épargne nationale et de tout autre moyen financier8.

D’autre part la mise sur pied de la Banque Camerounaise de Développement (BCD) en 1960, qui substitut le Crédit Camerounais de mai 1949, avec pour objectif principal l’octroi des crédits pour le développement agricole, industriel et surtout familial. Concernant le protectionnisme l’État avait opté pour une économie plus autonome, avec la mise sur pied d’un ensemble de réglementations pour le commerce extérieur.

C’est cette logique protectionniste qui facilita la création de plusieurs institutions à l’instar de l’Office National de

2 Abena Etoundi, « La planification économique… », p.51.

3 Le concept « Oligarchie économique » est employé ici pour montrer que l’application d’un libéralisme à outrance peut entrainer une sorte de disparité dans l’économie qui donne lieu à une domination de la minorité sur la majorité. En d’autres termes, une économie contrôlée par une minorité de personnes.

4 Henri Chambre, L’économie planifiée, « Collection Que Sais-je ? », Paris, PUF, 1980, p.10.

5 Abena Etoundi, « La planification économique… », p.59.

6 Ibid., p.62.

7 Anonyme, « Qui sommes-nous », http://www.sni.cm/index.php/fr/qui-sommes-nous.html, consulté le 14/04/2019 à 18h10min.

8 Ceci était dans l’optique de faciliter les opérations d’investissement d’intérêt économique et social dans les secteurs agricoles, industriels, commerciaux et surtout financiers, avec une vision d’une société à capital.

Commercialisation des Produits de Base (ONCPB) ayant pour mission la liaison entre le monde extérieur et le paysan camerounais9.

Au total, la politique du libéralisme planifié avait une philosophie double combinant à la fois la pensée libérale et celle planifiée. Elle est donc une véritable philosophie du développement bien pensée dont l’implémentation exige l’emphase sur le secteur privé, contrôlé par l’État en tant que régulateur et promoteur de la vie économique nationale.

Le contenu du libéralisme planifié : les plans quinquennaux

Pour concrétiser sa politique le Cameroun adopta les plans de cinq ans appelés plans quinquennaux, par mimétisme à l’ancienne puissance tutrice, la France10. Les plans quinquennaux, plans à moyen terme, sont des mesures étatiques pour assurer systématiquement la croissance de l’économie sur une période de cinq ans11. Entre 1960 et 1991, le Cameroun adopta six plans quinquennaux. Ces derniers visaient de façon globale l’assainissement de l’économie camerounaise et l’amélioration des conditions sociales. L’on observe de ce fait, deux périodes de la planification sous Ahidjo : la planification fédérale qui était celle de la période la République fédérale du Cameroun (1961-1972), et la planification unitaire, celle de la période de la République unie du Cameroun (1972-1991).

Pendant la planification fédérale, l’État du Cameroun adopta deux plans quinquennaux aux objectifs distincts. Le premier plan quinquennal s’étendit de 1960 à 196512. Appelé « Plan préparatoire », il avait pour objectif global le doublement du revenu par habitant à l’horizon 198013. L’atteinte de ce dernier devait passer par la mise en place des structures économiques et sociales appropriées, l’extension du système coopératif, la création des communautés villageoises et la réduction des disparités régionales14. Le deuxième plan quant à lui couvrit la période allant de 1966

9 Abena Etoundi, « La planification économique… », pp.64-65.

10 Robert Nyom, La crise économique. Essai d’analyse socio-politique, Yaoundé, Atlantic Editions, 2003, p.64.

11 Henri Chambre, L’économie planifiée, « Collection Que Sais-je ? », Paris, PUF, 1980, p.10.

12 Il est à noter ici qu’en 1960 le Cameroun n’était pas encore la République fédérale du Cameroun. On parlait en ce moment de la République du Cameroun qui n’était rien d’autre que l’ex-Cameroun français qui a accédé à l’indépendance le 1er janvier 1960. Mais le concept de planification fédérale est adopté à cause de la naissance de la République fédérale, celle-ci va juste adopter les projets de développement du président Ahidjo et se fondre dans la logique des plans quinquennaux. Voir Touna Mama, L’économie camerounaise, pour un nouveau départ, Yaoundé, Afrédit, 2008, pp.193 et 195.

13 Raymond Ebalé, « Vingt ans d’ajustement structurel au Cameroun (1986-2006) », in Abwa Daniel et al., Regards croisés sur les cinquantenaires du Cameroun indépendant et réunifié, Paris, l’Harmattan, 2012, p.375.

14 Touna Mama, L’économie camerounaise…, pp. 195-196.

à 1971. Il fut à cet effet nettement différent du premier en ce sens qu’il fut l’objectif d’une élaboration plus démocratique, accordant une place majeure à l’agriculture d’où son appellation « Plan paysan »15. Il visait à cet effet le doublement du revenu par tête en vingt ans, la réduction des disparités régionales, la modification des structures dans le but d’assurer une autonomie dans le domaine économique. L’État devait donc mettre sur pied des zones de développement intégrées à l’instar des Zones d’Action Prioritaire Intégrée (ZAPI), et des industries de transformation16. Il devait aussi financer la recherche et les études et réaliser le projet du Transcamerounais17.

Concernant la période de la planification unitaire, le Cameroun connut quatre plans quinquennaux : le troisième plan (1971-1976), le quatrième plan (1976-1981), le cinquième plan (1981-1986) et le sixième plan (1986-1991). En ce qui concerne le troisième plan, il mettait en relief pour la première fois, des priorités dans les régions de l’État unitaire dont la réalisation était impérative.

Il s’agissait des investissements directement productifs et les investissements d’infrastructure18. Il visait la consolidation de l’idéologie politique au travers de la promotion des idéaux de développement autocentré, de justice sociale et d’équilibre régional. Il était de ce fait appelé « Plan de la productivité »19. Parlant du quatrième plan, il était encore appelé « Plan de la maturité » et devait permettre la réalisation effective de l’unité nationale et du développement autocentré.

Il visait à cet égard l’aménagement du territoire, la promotion de l’industrie extractive, du commerce et de la culture20.

Le cinquième pour sa part visait la réalisation effective de l’autosuffisance alimentaire, la redynamisation des structures de productions dans les secteurs agricoles, forestiers, de l’élevage et de la pêche, la réorientation de l’industrialisation du pays par une politique de revalorisation prioritaire des matières premières locales et une promotion d’entreprises hautement compétitives21. Il était appelé « Plan de maîtrise du développement »22 et constitua à cet égard la première phase de l’objectif du développement en l’an 2000. Le sixième plan se situa aussi dans la même logique du

15 Ebalé, « Vingt ans d’ajustement… », p.375.

16 Touna Mama, L’économie camerounaise…, pp.196-197.

17 Le projet du Transcamerounais est cette ligne de chemin de fer qui part de Douala à Ngaoundéré en passant par Yaoundé et Bélabo. Le premier tronçon devait alors être achevé au cours de ce plan.

18 Touna Mama, L’économie camerounaise…, p. 198.

19 Ebalé, « Vingt ans d’ajustement… », p.375.

20 Touna Mama, L’économie camerounaise…, pp. 201-202.

21 Ibid., p.205.

22 Ebalé, « Vingt ans d’ajustement… », p.375.

cinquième. Ses options fondamentales étaient fixées sur le libéralisme communautaire, le développement autocentré et équilibré, la démocratisation et la justice sociale et l’intégration nationale23.

En somme, la politique économique du libéralisme planifié en plus d’être une vision, une philosophie dont la logique était libérale et protectionniste, était un véritable pilier pour l’évolution du Cameroun dans tous les domaines de la vie étatique. Grâce aux plans quinquennaux, le Cameroun réussit à réaliser des performances.


Questions Fréquemment Posées

Quels sont les défis des programmes d’ajustement structurel au Cameroun?

Les défis des programmes d’ajustement structurel au Cameroun incluent des conséquences profondes sur la vie sociale, notamment des modifications des comportements et des habitudes des Camerounais dans divers domaines tels que l’emploi, la santé et l’éducation.

Comment les programmes d’ajustement structurel ont-ils affecté l’économie camerounaise?

Les programmes d’ajustement structurel ont plongé le pays dans une sorte de ‘décadence’ suite à la crise économique et financière des années 1980, nécessitant des mesures nationales pour lutter contre cette crise.

Quelle était la politique économique du Cameroun avant 1987?

Avant 1987, la politique économique du Cameroun était basée sur le libéralisme planifié, combinant des éléments du socialisme africain et du capitalisme, visant à réaliser des performances économiques louables.

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