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Quel est le cadre théorique des ajustements structurels au Cameroun ?

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🏫 UNIVERSITÉ DE YAOUNDÉ - CENTRE DE RECHERCHE ET FORMATION DOCTORALE EN SCIENCES HUMAINES, SOCIALES ET ÉDUCATIVES - DÉPARTEMENT D’HISTOIRE
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - Mars 2023
🎓 Auteur·trice·s
Abdougani YOUMENI
Abdougani YOUMENI

Le cadre théorique des ajustements révèle des conséquences inattendues des programmes d’ajustement structurel au Cameroun entre 1987 et 2017. Cette étude met en lumière les transformations sociales majeures, redéfinissant ainsi notre compréhension des impacts sur l’emploi, la santé et l’éducation dans le pays.


La promotion de l’initiative privée : les GIC et les Start-ups

Le gouvernement camerounais avait déjà mis sur pied des organismes dans le but de résoudre le problème de l’emploi, il s’agit du FNE qui était chargé de cinq principales missions : accroitre les possibilités d’emploi, diffuser les informations aux chercheurs d’emploi, favoriser l’insertion des jeunes dans les circuits de production, favoriser la réinsertion des travailleurs licenciés pour des raisons économiques des entreprises des secteurs public et privé, concevoir, financer et suivre des programmes ayant trait à la formation sur le tas et à l’apprentissage, la formation formelle, l’autocréation d’emploi69.

Du PAJER-U (Programme d’Appui à la Jeunesse Rurale et Urbaine) qui militait pour une conception d’aide aux jeunes en quête d’emploi ou de démarrage d’une activité, du PIAASI (Programme d’Appui aux Acteurs du Secteur Informel)70, pour ne citer que ceux-ci. Il fallait résoudre l’épineux problème du chômage d’insertion qui ne faisait que prendre de l’ampleur dans les grandes métropoles à l’instar de Douala avec un taux de 25,6 % (données de 2004) et Yaoundé avec un taux de 21,5 % (données de 2004)71. Dans cette initiative gouvernementale semble ne pas éradiquer le problème. Beaucoup de jeunes restent dans l’attente d’un recrutement dans la fonction publique, au travers d’un concours à intégration direct ou d’un recrutement spécial, pourtant l’État ne peut plus supporter les charges salariales car l’ajustement structurel lui a permis de perdre son rôle de principal employeur.

L’urgence de mieux canaliser encore les demandeurs d’emplois s’impose.

Dans la logique de la promotion de l’initiative privée, l’État pourrait se doter d’une cellule de communication plus efficiente qu’elle en a l’air. Cette cellule devrait en premier ressort faire une vaste campagne de propagande des initiatives étatiques de soutiens à l’initiative privée qui existent déjà. Il pourrait s’appuyer essentiellement sur le FNE par exemple. Il faut rappeler que le FNE était chargé de cinq principales missions : accroître les possibilités d’emploi ; diffuser les informations aux chercheurs d’emploi ; favoriser l’insertion des jeunes dans les circuits de production ; favoriser la réinsertion des travailleurs licenciés pour des raisons économiques des entreprises des secteurs public et privé ; concevoir, financer et suivre des programmes ayant trait à la formation sur le tas et à l’apprentissage, la formation formelle, l’autocréation d’emploi72.

Le volet promotion de l’autocréation d’emploi peut être donc l’essence de cette politique proposée ici. Il est à noter des initiatives privées allant dans ce sens sont prises par des particuliers à l’instar des Groupes d’Initiative Commune (GIC), qui sont organisations à caractère économique et social des personnes physiques, volontaires, ayant des intérêts communs et réalisant à travers le groupe des activités communes73; et avec l’évolution des technologies de l’information et de la communication, les Start-ups qui sont des jeunes entreprises innovantes avec un fort potentiel de développement, évoluant dans le secteur des nouvelles technologies, souvent sur internet74.

Ces entreprises souffrent d’insuffisances de ressources financières pour bien démarrer leur business plan. Il convient donc à l’État de proposer des financements à ces dernières sous forme de prêts. Au remboursement de la dette, l’État pourrait faire des recettes qui faciliteraient le financement d’autres projets.

Il pourrait donc instituer une Caisse de crédit à initiative privée au FNE qui faciliterait les transactions. Ainsi donc, des emplois sont créés, des recettes sont enregistrées par l’État et le secteur privé peut accroitre son efficience au lieu d’avoir un secteur informel galopant (taux de 82,2 %, en 200175) et mal organisé.

En somme, la période d’ajustement structurel a favorisé l’émergence d’une société aux disparités plurielles. D’un côté il y a cette partie de la société qui a réussi à se créer une brèche dans l’administration publique. Elle peut ainsi s’enrichir facilement par les mécanismes de corruption, de détournement de derniers publics et plus encore le phénomène de fonctionnaires fictifs et celui de la réseaucratie. De l’autre côté il y a une société démunie, enclavée qui en quête de survie se livre des fois à des emplois ne relavant pas de leur formation initiale et d’autre fois est obligée de créer ou de se débrouiller. L’urgence d’un profond changement est signalée. Il convient d’épurer la fonction publique, de redéfinir les choix d’investissement de l’État, de réviser les curricula scolaire et académique, de promouvoir l’initiative privée. Ainsi, l’ajustement structurel pourrait être réajusté et à partir de là, ses effets pervers trouveraient solution et la société camerounaise retrouverait ses lettres de noblesse d’antan.

CONCLUSION GÉNÉRALE

Faire une analyse basée sur « Impact social des Programmes d’Ajustement Structurel au Cameroun (1987-2017)« , était l’objectif central de cette étude. Il convenait d’apporter une réponse à la problématique centrale formulée : quel est le coût social des Programmes d’Ajustement Structurel au Cameroun ? En définitive, il ressort de cette analyse que les PAS ont profondément changé les habitudes et les comportements de la société camerounaise.

À partir d’une méthode à la fois diachronique et synchronique adossée à une approche pluridisciplinaire, cette étude a permis de démontrer que le Cameroun à partir de ses indépendances avait mis sur pied des structures de production fiable et viable. L’organisation du territoire était la priorité du Gouvernement de Yaoundé. Il fallut de ce fait mettre sur pied une politique économique solide, connue sous le vocable de Libéralisme planifié.

Ce libéralisme planifié était en réalité la combinaison des idéologies qui s’affrontaient dans le contexte de la guerre froide, le capitalisme et le communisme. Il était structuré en plan de cinq ans, plans quinquennaux. Le Cameroun connut au total six plans de 1960 à 1986. Il favorisa alors la création des industries de transformation telles que CHOCOCAM, SOFIBEL, SONARA, d’une part et d’autre part favorisa la hiérarchisation des agents de production qui étaient la plupart des agriculteurs.

Les structures telles que le FONADER, l’ONCPB, l’OCB furent les acteurs de cette hiérarchisation. Cette conjugaison des efforts garantit une certaine croissance économique du pays. À partir de 1978 avec l’exploitation pétrolière, le PIB camerounais était en croissance exponentielle. Mais, la crise économique de 1986-87, due à une jonction des facteurs à la fois internes et externes, vint renverser cette tendance.

Elle plongea le pays dans un déséquilibre observable au point de vue économique et social. Il fallait donc résoudre le problème de la crise par tous les moyens possibles. La première catégorie de moyens était la mise sur d’une politique interne de résolution de la crise qualifiée ici d’Ajustement interne. Le problème de la crise étant très profond, l’ajustement interne était faible et ses mesures essuyèrent échec sur échec.

Il fallait donc trouver des solutions autres que celles de l’ajustement interne, d’où le recours aux institutions de Bretton Woods.

Au départ, le Cameroun était dubitatif au sujet de l’acceptation de l’offre d’ajustement structurel. Pour lui, c’était l’expression de la honte pour un État de se soumettre au dictat de Washington et aussi cette politique n’offrait pas de réelles bases de développement pour un État. Mais, la crise allant grandissant ne lui donna aucun autre choix que d’accepter. Il connut alors six PAS dont l’objectif global était le désengagement de l’État dans l’activité économique en promouvant le secteur privé. Il s’agit donc de la libéralisation des secteurs économiques, de la privatisation des entreprises et de la dévaluation de la monnaie.

Cependant, le PAS camerounais avait une spécificité en ce sens qu’il prévoyait une DSA. Cette DSA avait pour but de limiter les effets pervers de l’ajustement sur les couches les plus vulnérables de la population et permettre à toutes les couches de participer au processus de développement. Mais dus à des difficultés dans la mise en œuvre de cette dernière, les PAS eurent un contrecoup sur la population. Cet agir conduisit à la dégradation de plusieurs indicateurs d’ordre social.

Au point de vue social, les PAS ont affecté presque tous les domaines. Pour ce qui est de l’emploi et du salariat, ils prévoyaient que l’État réduise le personnel de son portefeuille. C’est ainsi qu’il procéda à des licenciements, au gel de recrutement, au gel des salaires, à la suppression des avancements et des avantages liés à la fonction publique.

Ce qui fit naître une catégorie de personnes dans la société, les déflatés. Ces déflatés devaient alors trouver des voies et moyens pour s’en sortir, c’est ainsi que certains se reconvertirent à la débrouillardise et d’autres prirent le chemin des revendications. De là, une succession de grèves de la part de ces déflatés fut observée.

Aussi, ces déflatés devaient revoir la consommation de leurs ménages, toiletter leurs dépenses en fonction de leurs gains qui étaient désormais réduits considérablement, d’où le « vivre petit ». Il convenait aussi pour les employés n’ayant pas perdu leurs emplois de se créer des canaux utiles pour la compensation de leurs déficits salariaux.

C’est dans ce contexte que les phénomènes de corruption, de détournement des derniers publics, de fonctionnaires fictifs et de réseaucratie, s’amplifièrent.

Le domaine de la mobilité dans son grand ensemble était concerné. Pour la question des transports, la privatisation de la SOTUC y créa un bouleversement de gestion. Le transport urbain qui était jadis encadré par l’État fut pris d’assaut par les particuliers. Au départ le taxi urbain était le prisé. Mais avec la difficulté de desservir tous les coins et recoins des métropoles, d’autres acteurs entrèrent en jeu, il s’agit des mototaxis et des opep.

Ces activités en plus d’être un support d’aide complémentaire dans la tâche des taxis urbains, elles se sont érigées en tant qu’activités débrouillardes pour les jeunes en quête d’emploi. Pour les migrations, les PAS ont orchestré un ensemble de migrations de retour connues sous le vocable de l’exode urbain. Il consistait pour les citadins qui ont perdu les possibilités de gain de rentrer en zone de campagne ou au village pour trouver des solutions efficaces au problème.

En plus de l’exode urbain, les émigrations prirent aussi de l’ampleur. Jeunes, diplômés des universités, des grandes écoles de formation, des chercheurs d’emploi prirent la route du déplacement externe.

Pour le domaine sanitaire, un contrecoup est observé notamment avec la baisse du personnel soignant dans les établissements hospitaliers, l’augment du coût des soins médicaux. Face à cela la réponse de la population était la reconversion à l’automédication avec notamment l’effervescence de la pharmacie de rue et de la médecine traditionnelle.

Dans le même sillage, le domaine éducatif connut une profonde crise de l’école avec notamment la fin des subventions étatiques telles que les bourses académiques. Dans cet environnement plein de disparités et d’injustice, une profonde restructuration de la société s’impose. Il convient d’assainir la fonction publique, de mieux orienter les choix d’investissement de l’État, de revoir les curricula scolaire et académique, de promouvoir l’initiative privée.

Ainsi, l’ajustement structurel pourrait être réajusté et à partir de là, ses conséquences troubles, cause du malaise social trouveraient solution et la société camerounaise pourrait se remettre sur les rails du développement tel que pensé au lendemain des indépendances.

En définitive, il est capital de mentionner que ce travail, dans son but de présenter la situation chaotique observée dans le secteur social due à l’ajustement n’a nullement eu la prétention d’aborder tous les aspects de ce secteur, encore moins d’analyser toutes les conséquences des PAS au Cameroun. Il s’est circonscrit essentiellement sur des domaines clés de la société tels que la question de l’emploi, de la mobilité, de la santé et de l’éducation.

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69 Joseph-Pierre Timnou, « Le programme « dimension sociale de l’ajustement » au Cameroun : l’exclusion du monde rural », in Georges Courade (sd), Le village camerounais à l’heure de l’ajustement, Paris, Karthala, 1994, p.89.

70 Audrey Prisca Ze, « Crise économique et gestion étatique de l’insertion professionnelle des jeunes au Cameroun : le cas de la région du Centre (1987-2016) », Mémoire de Master en Histoire, Université de Yaoundé I, 2020, p.74.

71 Jules Ngahant et Nicholas Mukama, Le Cameroun face aux défis de la pauvreté et de l’emploi des jeunes : Analyse critique et propositions, Yaoundé, Jeunesse Horizon, 2004, p.7.

72 Timnou, « Le programme « dimension…, p.89.

73 Thierry Benoit Bidias,  » L’union des groupes d’initiative commune des agriculteurs de Bokito (1994-2017) », mémoire de Master en Histoire, Université de Yaoundé I, 2019, p.6.

74 Anonyme, « Qu’est-ce qu’une startup ? Tout ce qu’il faut savoir », https://www.lecoindesentrepreneurs.fr/start- up-definition-particularites/, consulté le 28/08/2022 à 03h30min.

75 Ze, « Crise économique et gestion… », p.67.


Questions Fréquemment Posées

Quel est le rôle du FNE dans la création d’emplois au Cameroun?

Le FNE était chargé de cinq principales missions : accroître les possibilités d’emploi, diffuser les informations aux chercheurs d’emploi, favoriser l’insertion des jeunes dans les circuits de production, favoriser la réinsertion des travailleurs licenciés pour des raisons économiques des entreprises des secteurs public et privé, concevoir, financer et suivre des programmes ayant trait à la formation sur le tas et à l’apprentissage.

Comment les programmes d’ajustement structurel ont-ils affecté le chômage au Cameroun?

Les ajustements structurels ont permis à l’État de perdre son rôle de principal employeur, ce qui a conduit à une augmentation du chômage d’insertion, notamment dans les grandes métropoles comme Douala et Yaoundé.

Quelles initiatives privées ont émergé pour lutter contre le chômage au Cameroun?

Des initiatives privées telles que les Groupes d’Initiative Commune (GIC) et les Start-ups ont émergé, visant à promouvoir l’autocréation d’emploi et à soutenir les jeunes entreprises innovantes.

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