Les applications de l’autofiction révèlent comment Amin Maalouf redéfinit le pacte autobiographique dans ‘Les désorientés’. Cette étude met en lumière la tension entre réalité et fiction, offrant des perspectives nouvelles sur la légitimité de l’autofiction dans la littérature contemporaine.
1-3. Du pacte autobiographique au pacte autofictionnel :
Certains récits de vie ou de soi, présentent quelques points commun non négligeables avec l’autobiographie telle que l’autofiction qui permettrai à chacun de raconter sa vie, dés lors qu’il la dote des atouts de la fiction.
« Les humbles qui n’ont pas droit à l’histoire, ont droit au roman. » 165
Tandis que l’autobiographie serait l’apanage des vies mémorables « autobiographie ? non, c’est un privilège réservé aux importants de ce monde , au soir de leur vie, et dans un beau style. Fiction d’événements et de faits strictement réels ; si l’on veut autofiction , d’avoir confié le langage d’une aventure a l’aventure du langage … »166
Donc l’autofiction pour Serge Doubrovsky est une nouvelle forme de l’autobiographie le mot autofiction désigne donc des œuvres totalement étrangères au projet autobiographique. Surnommée un avatar de l’autobiographie ,un moyen pour résoudre certaines difficultés propres a l’écriture de soi.
« l’autofiction , c’est la fiction que j’ai décidé , en tant qu’écrivain , de me donner a moi- même et par moi-même ; en y incorporant , au sens plein du terme, l’expérience de l’analyse
,non point seulement dans la thématique, mais dans la production du texte » 167
Cela nous amène a poser le problème de la catégorisation de certains récit tel est le cas de
« Les désorientés » de Amin Maalouf rédigé a la premier personne et dont la première couverture indique qu’il s’agit d’un roman , donc d’une fiction mais dont le héros ou le personnage principal au vu de la biographie de l’auteur présente quelque similitudes. Ce qui nous amène d’emblée a une mise en scène de la vie de l’auteur ; donc une fictionnalisation. dans ce cas , l’appellation « pacte autobiographique » ne serait plus prise en considération.
mais nous parlions plutôt de « pacte autofictionnel »
« un récit intime dont un auteur , narrateur et protagoniste partagent la même identité nominale et dont le texte et/ou le péritexte indiquent qu’il s’agit d’une fiction »168
Jacques Lecarme parle d’un pacte autofictionnel qui se doit d’être contradictoire.il est rejoint en cela par Sébastien Hubier qui parle lui de :
165 SERGE Doubrovsky , Autobiographie/Vérité/psychanalyse,1980.p.90.
166 SERGE Doubrovsky , Fils, 1977, prière d’insérer.
167 SERGE Doubrovsky , Autobiographie/Vérité/psychanalyse,1980.p.96.
168 PIERRE-ALEXANDRE SICART , Autobiographie ,Roman, Autofiction (thèse de doctorat,2005)in www.fr.wikipedia.org/wiki/Autofiction.
« contradictions de l’autofiction qui, variante matoise de l’autobiographie , ne serait jamais qu’un genre indécis , hybride , conjointement fictionnel et autoréférentiel. »169
Les deux définitions se caractérisent par la présence dans une même narration de procédés stylistiques , qui font que la fiction porte surtout sur la mise en récit du discours lui-même , et de procédés référentiels ou la réalité est accolée étroitement à l’imagination et ou les souvenirs sont largement affectés par cette dernière, des procédés qu’il s’agira de mettre en évidence et d’éclaircir a partir de l’œuvre de Amin Maalouf.
Nous avons juge qu’il serait judicieux d’énumérer quelques caractéristiques du pacte autofictionnel, ainsi quelques points communs avec le pacte autobiographique. Une démarche indispensable et sine -qua -non puisque la part du réel qui domine dan le genre autobiographique est présente dans le genre qui nous intéresse et plus précisément dans « Les désorientés ».
Les deux genres se rejoignent la définition que donne S. Hubier de l’autobiographie :
« parsemée de minuscules autofictions : mais ces bourgeons se sont pas destinés a éclore »170
La tâche suivante consiste d’appliquer ces mêmes critères dans le récit qui est entre nos mains afin de prouver qu’il s’agirait bel et bien du genre autofictionnel.
Quant a Maurice Couturier part sur le principe selon lequel « le romancier veut toujours se dire , même lorsqu’il raconte une histoire très éloignée de son histoire personnelle ,mais il ne veut pas que cela se sache, ou en tout cas pas trop. »171
M. Couturier fait allusion au lecteur confronté a un texte résultant deux critères opposés, a savoir fiction et référentialité.
L’autofiction se rapproche de ce fait plus du compromis que du pacte dans le sens ou l’écrivain devient « en son texte, lui-même et un autre, le lecteur et le scripteur de sa propre vie. »172
169 SEBASTIEN HUBIER ,Littératures intimes :les expressions du moi , de l’autobiographie a l’autofiction
.2003p.122.
170 Ibid. p.100.
171 MAURICE COUTURIER, La Figure de l’auteur , 1995,p.123.
172 SEBASTIEN HUBIER, Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction
,op.cit.,p.127.
Tandis pour S. Hubier parle d’irruption ou d’une entrée plus que certaine de la figure de l’auteur dans son récit . parfois elle n’est pas identifiée comme telle , impose quelques ambigüités au niveau de la lecture et ralentit quelque peu les identifications que le lecteur n’aurait pas manqué de faire dans d’autre circonstances.
L’une des caractéristiques du pacte autofictionnel concerne les liens de ce genre avec la vérité : cette dernière « n’est jamais qu’une intention et non une réalité » 173.
Cette vérité est entachée par les fantasmes qui jalonnent cette écriture , l’auteur ne cherche pas seulement a se révéler a lui-même et aux autres, mais aussi a tous ses « moi » ce qui nous renvoie au principe de l’autofiction qui est « la fictionnalisation » : ce qui est le cas dans les désorientés
, quand Amin Maalouf énonce clairement sur la quatrième couverture du roman « dans les désorientés, je m’inspire très librement de ma propre jeunesse.je l’ai passée avec des amis qui croyait en un monde meilleur. et même si aucun des personnages de ce livre ne correspond a une personne réelle, aucun n’est entièrement imaginaire .j’ai puise dans mes rêves, dans mes fantasmes, dans mes remords, autant que dans mes souvenirs »174
L’une des caractéristique de l’autofiction c’est qu’elle appartient au genre méta discursif une spécificité qui désigne « les commentaires portant sur la manière même dont il est possible de raconter littérairement ces incidents qui charpentent l’organisation des œuvres et induisent les retournement narratifs les plus significatifs. »175
Cette spécificité est omniprésente dans le roman de Amin Maalouf , elle s’illustre par des réflexions pouvant appartenir tout autant aux narrateur , qu’au personnage principal et qui pourraient renvoyer au processus même de l’écriture autofictionnelle. Des observations qui abordent à l’intérieur même de l’écriture autofictionnelle. Unes des principales caractéristiques de l’écriture autofictionnelle telles que : la confusion entre la réalité et imagination, la fictionnalisation …,etc.
« Je ne sais pas si ces repentirs tardifs ont quelque valeur aux yeux de la religion. A mes yeux
, ils n’en ont aucune . Ni ceux des Romains antiques, ni ceux de mes contemporains. » (p19.)
Malgré les divergences perceptibles et imperceptibles entre les deux pactes ; a-savoir autobiographique et autofictionnel , les deux pactes se rencontrent dans des points communs
173 SEBASTIEN HUBIER, Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction
,op.cit , P.121.
174 MAALOUF Amin, Les désorientés , quatrième du couverture.
175 -SEBASTIEN HUBIER , Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction
,op.cit.,p.128.
qu’il ne faut surtout pas les négliger et les prendre en considération afin d’y arriver a une approche complète de toute œuvre , qu’elle appartienne a tel ou tel genre :
- Les deux genres font partie de la même catégorie celle de l’écriture du moi ; autrement dit la littérature de l’intime dont Georges Gusdorf estime qu’elle repose sur « un usage privé de l’écriture, regroupant tous les cas ou le sujet humain se prend lui-même pour objet d’un texte qu’il écrit »176
- G. Gusdorf attribue au genre autofictionnel les mêmes vertus réparatrices que .p Lejeune réserve au genre autobiographique, puisqu’il qualifie ce dernier de méthode de délivrance et qu’il classe le tout dans la catégorie des écritures du moi.
- l’obligation que ressent l’auteur de plonger dans son passé proche ou lointain pour pouvoir rendre compte de son intériorité.
- au sentiment diffus de tristesse qui accompagne, d’après S, Hubier , toutes les écritures du moi et qui cherchent a « connaitre et expliquer ce qui fait la singularité d’un individu singularité dont la valeur est , étonnamment universelle . »177
La principale caractéristique de l’autofiction selon J. Lecarme est que « l’auteur, narrateur et protagoniste partagent la même identité nominale et dont l’intitulé générique indique qu’il s’agit d’un roman »178 mais il n’exclut pas l’hypothèse selon laquelle le nom propre de l’auteur est masqué par pseudonyme.
V. Colonna parle d’une « homonymie par transformation »179 dans cette catégorie d’homonymie , le nom auctorial joue le rôle d’un nom interprétant et le nom auctorial d’un nom interprète .le lecteur remonte , pour ainsi dire , du personnage a l’auteur en décryptant le nom du premier a la lumière du nom de l’autre ; tout comme, a l’inverse ,l’écrivain avait engendré le nom de son mandataire fictionnel a partir de son propre nom pour ce décryptage . le lecteur peut disposer des clefs suivantes :
– « un prénom » comme le narrateur dans la recherche du temps perdu de Marcel Proust s’appelle que Marcel.
176 -GEORGES GUSDOROF , Les Ecritures du moi, 1990,p.122.
177 -SEBASTIEN HUBIER , Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction
,op.cit.,p.129.
178 -L’Autofiction : un mauvais genre , Autofiction & Cie , SERGE DOUBROVSKY , JACQUES LECARME et PHILIPPE LEJEUNE ,1993,p.227. in www.fabula.org/forum/colloque99/208.php
179 COLONNA Vincent, L’autofiction, essaie sur la fictionnalisation de soi en littérature ,op.cit.,p.55.
- « des initiales ou un monogramme » l’exemple le fameux « k » du Château ou du Procès de FRANTZ KAFKA.
- « un paronyme » l’exemple de LUISA Futoransky quant elle met en scène , dans chinois … chinoiseries et dans De Pe a Pa , une certaine Laura Kaplansky .
- « un anagramme intégral ou partiel » comme dans le nom de Wiltette Collie, personnage de la retraite sentimentale , on reconnait aisément celui ce Colette Willy. Mais dans l’emploie du temps de Michel Butor , le personnage de George William Burton serait peut être plus difficilement identifiable s’il n’était pas romancier.
V. Colonna ne ferme pas cette liste, pour lui elle n’est pas définitive, elle est sans doute pas exhaustive , mais elle indique bien la variété des modalités qui permettent d’engendrer un nom a partir d’un autre.
cette forme d’homonymie est très répandu dans notre corpus , on observera enfin qu’il s’agit d’une forme d’homonymie directe ; nous les lecteurs, nous constatons une relation et dérive immédiatement le nom du personnage du nom de l’auteur . et cette forme d’homonymie nous épargne de recourir a d’autres indications du texte, du péritexte ou d’autres œuvres , elle est la plus simple d’homonymie et la plus perceptible pour nous les lectorats.
ce qui est le cas de les désorientés , le prénom du personnage principale s’appelle « Adam » l’auteur attribue a son héros les deux initiales de son nom , il s’agit d’un travestissement des initiales de l’auteur au début et a la fin de ce prénom « Adam » : nous les lecteurs, nous constatons une relation et dérive immédiatement le nom du personnage du nom de l’auteur :
A(min) M(aalouf) A(da)M.
Considéré comme le père et à l’origines de l’humanité , Un peu, comme si l’auteur voulait remonter aux temps anciens, lorsque son monde existait encore et que la vie y suivait un cours normal, devenu celui d’hier bien avant que tout ne fût emporté par une implacable guerre civile. La réponse est peut-être fournie par l’auteur lui-même quand vers la fin, il se livre à des considérations désabusées sur son prénom : « je porte de mon prénom l’humanité naissante, mais j’appartiens a une humanité qui s’éteint . » (p.484)
« C’est lui qui est au diapason de son temps, et c’est moi qui suis d’une autre époque, prématurément révolue. » ( p.372).
Nous avons posé la question suivante à Amin Maalouf sur le choix du nom de son personnage : « Le personnage d’Adam est-il votre double ? » ,sa réponse était ainsi : « Ce personnage est celui dont je me sens le plus proche, mais ce n’est pas moi. Sa vie ne correspond pas à la mienne, sa famille ne ressemble pas à la mienne, et les aventures qui lui arrivent sont, pour l’essentiel, imaginaires. »
J. Lecarme voit l’avantage de poser avec acuité la problématique de la narration identitaire entre l’auteur et le narrateur .cette diversion permet un certain détachement de l’auteur- homme envers l’auteur-narrateur qui lui permettrait de s’inventer une autre identité que a sienne et d’entrer par la même dans un processus de fictionnalisation, mécanisme incontournable de l’autofiction.
Ensuite , Les désorientes ne peut –être une autobiographie pour trois raisons :
- l’auteur a déjà publie en 2004 « Origines » , et qu’il a catalogue dans l’autobiographie
, dans lequel il explique les origines de son patronyme.
- le roman « Les désorientés » ne peut-être une autobiographie puisque l’œuvre ne répond pas aux critères du genre autobiographique initier et poser par PHILLIPE LEJEUNE . affirme pour qu’il y ait autobiographie il faut qu’il de « l’ auteur , du narrateur et du personnage »180 donc il n’y a pas de pacte autobiographique établi car il n’a y pas identité entre le nom de l’auteur du narrateur et du personnage (narrateur/héros ( Adam) / auteur (Amin Maalouf).
- enfin, L’auteur lui-même déclare lors d’un interview avec Emilie Julia , qu’il ne s’agit pas d’une autobiographie.
« c’est un livre qui parle de ma jeunesse mais indirectement, il n’est pas autobiographique, il a une apparence autobiographique a un contenu autobiographique , je m’explique il a l’apparence parce que il raconte une histoire d’un personnage qui me ressemble un peu mais pas totalement ,et le contenu c’est a dire l’univers dont lequel agrandisse le personnage ressemble a mon univers mais le reste est transformer les personnage ne sont pas exactement les mêmes les événements mise en scène quelques fois maquilles »181
180 LEJEUNE Philippe, Le pacte autobiographique, Paris, Le seuil , 1975., P.15
181 – fichier audio téléchargeable sur site : http://www.canalacademie.com/ida9661-Les-desorientes-un-livre-d- Amin-Maalouf.html.
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165 SERGE Doubrovsky , Autobiographie/Vérité/psychanalyse,1980.p.90. ↑
166 SERGE Doubrovsky , Fils, 1977, prière d’insérer. ↑
167 SERGE Doubrovsky , Autobiographie/Vérité/psychanalyse,1980.p.96. ↑
168 PIERRE-ALEXANDRE SICART , Autobiographie ,Roman, Autofiction (thèse de doctorat,2005)in www.fr.wikipedia.org/wiki/Autofiction. ↑
169 SEBASTIEN HUBIER ,Littératures intimes :les expressions du moi , de l’autobiographie a l’autofiction.2003p.122. ↑
171 MAURICE COUTURIER, La Figure de l’auteur , 1995,p.123. ↑
172 SEBASTIEN HUBIER, Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction,op.cit.,p.127. ↑
173 SEBASTIEN HUBIER, Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction,op.cit , P.121. ↑
174 MAALOUF Amin, Les désorientés , quatrième du couverture. ↑
175 -SEBASTIEN HUBIER , Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction,op.cit.,p.128. ↑
176 GEORGES GUSDOROF , Les Ecritures du moi, 1990,p.122. ↑
177 SEBASTIEN HUBIER , Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction,op.cit.,p.129. ↑
178 -L’Autofiction : un mauvais genre , Autofiction & Cie , SERGE DOUBROVSKY , JACQUES LECARME et PHILIPPE LEJEUNE ,1993,p.227. in www.fabula.org/forum/colloque99/208.php. ↑
179 COLONNA Vincent, L’autofiction, essaie sur la fictionnalisation de soi en littérature ,op.cit.,p.55. ↑
180 LEJEUNE Philippe, Le pacte autobiographique, Paris, Le seuil , 1975., P.15 ↑
181 – fichier audio téléchargeable sur site : http://www.canalacademie.com/ida9661-Les-desorientes-un-livre-d- Amin-Maalouf.html. ↑
Questions Fréquemment Posées
Qu’est-ce que l’autofiction selon Amin Maalouf?
L’autofiction est une nouvelle forme d’autobiographie qui permet à l’auteur de raconter sa vie tout en intégrant des éléments de fiction, remettant en question le pacte autobiographique traditionnel.
Comment le pacte autofictionnel se distingue-t-il du pacte autobiographique?
Le pacte autofictionnel est caractérisé par une narration où l’auteur, le narrateur et le protagoniste partagent la même identité nominale, tandis que le pacte autobiographique se concentre sur des récits de vie strictement réels.
Quels sont les éléments clés de l’autofiction dans ‘Les désorientés’?
Dans ‘Les désorientés’, Amin Maalouf utilise sa propre expérience de jeunesse tout en intégrant une part de fictivité, ce qui illustre la nature hybride de l’autofiction.