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Comment l’analyse de cas transforme notre compréhension de l’autofiction ?

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🏫 Université Batna 2 - Faculté des Lettres et des Langues Étrangères - Département de Langue et Littérature Françaises
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2016-2017
🎓 Auteur·trice·s
Mebarki Houssem Eddine
Mebarki Houssem Eddine

L’analyse de cas en autofiction révèle comment Amin Maalouf, dans ‘Les désorientés’, transforme son expérience personnelle en une fictionnalisation captivante. Cette étude remet en question les conventions du pacte autobiographique, offrant des perspectives nouvelles sur l’hybridité littéraire et la nature du soi.


1-4. Une fictionnalisation de soi :

La fictionnalisation est une dimension de l’autofiction fondée sur le principe d’un moi changeant , et qui offre a l’écrivain l’opportunité de remanier ses expériences en étant lui- même et un autre, ce qui reviendrait à mettre en fiction sa propre vie.

Cette mise en scène de soi se fait automatiquement par une mystification, a travers laquelle l’auteur peut donner paradoxalement une image vraie de lui-même, une vérité qui concerne surtout le regard qu’il pose sur lui-même. La sincérité apparente, deviendrait donc une simple effet de lecture, accentué par l’utilisation de la première personne. Comme L’affirmait Valéry :

« Vérité et volonté de vérité forment ensemble un instable mélange ou fermente une contradiction et d’où ne manque jamais de sortir une production falsifiée. »182

Cette fictionnalisation découle d’un désir d’une individualité nouvelle qui conduit l’auteur a vouloir mettre sa vie en fiction. S. Doubrovsky affirme que l’auteur d’une autofiction devait :

« Pour capter le lecteur rétif, lui refiler sa vie réelle sous les espèces plus prestigieuses d’une existence imaginaire. »183

Pour V. Colonna , toute œuvre est autofictionnelle lorsqu’un auteur s’invente une personnalité et d’une existence 184

« je suis censé méditer , mais j’ai l’esprit vide. Plus tard, je méditerai , je convoquerai mes souvenirs de notre amitié défunte , plus tard je m’efforcerai d’imaginer le Mourad d’avant . Mais la, devant la dépouille , rien. » (p28)

« Avec la mort de Mourad, j’ai eu envie de raconter l’histoire de mes amis, de ma jeunesse, de ce que les temps présents ont fait de nous. » (p136)

Selon P. Lejeune, autre qu’il est. Cette identité imaginaire enclenche ce qui est appelé communément dans toute écriture intime une fictionnalisation, une démarche qui consiste selon V. Colonna a « faire de soi un sujet imaginaire, a raconter une histoire en se mettant directement a contribution (…) en devenant un élément de son invention. »185

C’est le degré de cette fictionnalisation qui permet, selon S. Hubier de décider du degré de littérarité d’une autofiction.

« c’est un livre qui parle de ma jeunesse mais indirectement, il n’est pas autobiographique, il a une apparence autobiographique a un contenu autobiographique , je m’explique il a l’apparence parce que il raconte une histoire d’un personnage qui me ressemble un peu mais pas totalement… »186

L’auteur de l’autofiction fait de la fictionnalisation « une métaphore d’un bonheur a jamais disparu » 187 . le passé enfoui est resurgie par l’écriture et c’est la qu’il puise sa connaissance de lui-même. Un lyrisme fait alors son apparition exprimant la nostalgie le souffre-douleur ressentis par l’auteur au sens ou « l’expression lyrique est d’abord expression de soi à soi sur soi » 188.

Des douleurs et des souffrances qui lui font opter de plonger dans les méandres de l’écriture intime ou de soi. Et donc d’incarner ou transposer sa personnalité dans son œuvre. Cette équivoque constituée par l’association d’une nostalgie et d’une douleur intime résulte à la fois « par le désir de jouir de ses réminiscences et par l’espoir fou d’arrêter l’écoulement du temps. »189

« je suis venu renouer avec le pays de ma jeunesse, mais je ne regarde même le pays, j’y cherche seulement les traces de ma jeunesse. je demeure insensible aux choses et aux personnes que je n’ai pas connues dans ma vie

antérieure. je ne veux rien apprendre, rien réapprendre, rien découvrir. je cherche seulement a retrouver ce qui m’était déjà familier .oui, je cherche les vestiges, les traces, les survivances, tout ce qui est nouveau m’apparait comme une intrusion malvenue dans mon rêve , comme une insulte a ma mémoire et comme une agression . de tout cela , je ne me vante pas , je serai même prêt a reconnaitre qu’il s’agit d’une infirmité .mais c’est ainsi que je vis ce voyage ,des le premier jour . tout ce que je reconnais, je le vois en couleur ; le reste , tout le reste , je le vois en gris pale. » (p378)

A travers ce passage, on voit clairement et a partir de procède de fictionnalisation, que l’auteur cherche les vestiges de son passé. Il veut trouver son trésor perdu, le lyrisme de l’auteur se traduit à travers ces passages plaintifs après des années en exil.

G. Gusdorf s’appuie sur l’importance des rêves et des fantasmes au sein de l’écriture autofictionnelle et que l’auteur ne peut vivre qu’à travers une réinvention de lui-même. « les écritures du moi donnent la parole a la seconde voix, refoulée dans l’ordinaire des jours, en laquelle se libère une mauvaise conscience, le vœu de l’impossible et de l’irréel , de la plénitude refusée. » 190.

Il affirme que cette écriture personnelle conduit a la mise en place d’un symbole qui permet à l’écrivain d’organiser ces mêmes désirs secret au sein de son œuvre

« je n’ai rien a cacher. Ou plutôt si, j’ai cacher , mais pas plus aux autres qu’a moi-même. En l’occurrence, si j’ai toujours évité de parler de la maison de mon enfance , c’est tout simplement parce que je m’efforçais de ne pas y penser. » (p.444)

Lors d’une interview réalisée par EMILIE Julia l’auteur affirme qu’il aurait été très mal à l’aise si ‘il avait parlé directement à la première personne si c’était présenté comme une autobiographie ce qui lui facilite la chose c’est de parler de personnes qui ont des liens avec lui qui ont des similitudes mais qui sont pas lui-même , il ajoute que le personnage Adam a le regard similaire a lui, en même temps son histoire diffère son passe diffère , ils n’ont pas le même âge , il ajoute qu’il est très peu autobiographique et qu’il n’aime pas beaucoup parler de lui-même, il a tendance a être discret.

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182 -PAUL VALERY , Œuvres ,1980,p.555-547, cité par S.HUBIER , Littérature intimes : les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction ,op.cit.,p.36.

183 SERGE Doubrovsky , cité par S.HUBIER, littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction , ,op.cit.,p.124.

184 COLONNA Vincent, L’autofiction, essaie sur la fictionnalisation de soi en littérature ,op.cit.,p.279.

185 COLONNA Vincent, L’autofiction, essaie sur la fictionnalisation de soi en littérature ,op.cit.,p.9.

186 -: http://www.canalacademie.com/ida9661-Les-desorientes-un-livre-d-Amin-Maalouf.html. ,op.cit.

187 – SÉBASTIEN HUBIER , Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction,op.cit.,p.74

188 -GEORGES MOLINIE , Élément de stylistique française ,1991,p.158, cité par SÉBASTIEN HUBIER , Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction ,op.cit.,p.74.

189 GEORGES MAY, L’Autobiographie ,1979, p.74 , cité par SÉBASTIEN HUBIER , Littératures intimes :les expressions du moi, de l’autobiographie a l’autofiction ,op.cit.,p.74.

190 GEORGES GUSDORF, Esthétique et poétique, sur le Roman a la première personne ,op.cit ., p .122.


Questions Fréquemment Posées

Qu’est-ce que la fictionnalisation dans l’autofiction?

La fictionnalisation est une dimension de l’autofiction fondée sur le principe d’un moi changeant, permettant à l’écrivain de remanier ses expériences en étant lui-même et un autre.

Comment Amin Maalouf utilise-t-il sa propre expérience dans ‘Les désorientés’?

Maalouf utilise sa propre expérience de jeunesse tout en intégrant une part de fictivité, remettant en question le pacte autobiographique traditionnel.

Quelle est la relation entre autofiction et nostalgie selon l’article?

L’autofiction est décrite comme une métaphore d’un bonheur à jamais disparu, où le passé enfoui resurgit par l’écriture, exprimant une nostalgie et une douleur intime.

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