Quelles stratégies d’implémentation pour les aménagements maraîchers au Tchad ?

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🏫 Université de N’Djaména - Faculté des Sciences Humaines et Sociales - Département de Géographie/ Français
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2015-2016
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Les stratégies d’implémentation au Tchad révèlent comment les bénéficiaires s’approprient les aménagements maraîchers soutenus par le PAM dans le département du Guéra. Découvrez les clés de la durabilité et de la résilience face aux défis climatiques et socio-économiques. Quelles leçons en tirer pour l’avenir ?


CONCEPTUALISATION

Pour des raisons d’ordre sémantique, et afin de faciliter la compréhension de ce travail, il est important de cerner les contours de la notion d’appropriation, dont celle des actions de développement par les acteurs locaux. En effet, l’appropriation est un mot à connotation polysémique et pluridisciplinaire, se rapportant à de pratiques, à de savoirs, et à de domaines variés.

Définition de la notion d’appropriation

Le Dictionnaire Le Grand Robert définit le mot appropriation en ces termes : « Action de s’approprier quelque chose, de faire de quelque chose sa propriété », […], état de ce qui est adapté à quelque chose… Le même dictionnaire cite les antonymes du mot appropriation dont l’inadaptation, l’abandon, la désappropriation, la renonciation, etc.

L’appropriation est une notion, sujette à diverses applications. Elle apparait dans plusieurs domaines scientifiques pour traiter des sujets aussi variés comme l’appropriation d’un programme pédagogique en Sciences de l’Éducation, l’appropriation des nouvelles technologies de communication en Sciences de Communication, l’appropriation des projets de développement en Gestion des projets, ou encore l’appropriation des territoires en Géographie (ou Aménagement du Territoire), etc. Elle s’identifie aussi à l’appropriation d’un outil de développement comme c’est le cas des Aménagements Communautaires, objet de notre étude. Elle apparait alors comme un ensemble de manifestations et/ou d’actions exprimant l’acquisition et le contrôle, par un individu ou par un groupe de personnes, d’un fait intellectuel ou matériel et de ses modes de fonctionnement.

Appropriation comme acquisition de savoirs

L’appropriation en tant que principe d’individuation, permet à une communauté ou à un groupe de migrer d’un état de connaissances ou de pratiques plus limité vers un autre amélioré et élaboré. Elle permet donc de créer et d’acquérir des savoirs.

Selon POIZAT et GOUDEAUX (2014 p.17), la notion « d’appropriation » est centrale dans l’approche du développement. Ils soutiennent que le développement est conçu comme la transformation des modalités de participation à une pratique sociale, guidée et soutenue par la communauté des pairs, le matériel, les outils, et par toute l’histoire de la construction culturelle de cette pratique. Par exemple, l’appropriation trouve ainsi une place fondamentale dans le champ de la formation professionnelle, tenant compte d’un ensemble de procédés et de processus qui l’y conduisent.

Pour GUIDERDONI-JOURDAIN (2009, pp.15, 18), l’appropriation résulte d’un processus constant d’interactions entre trois dimensions d’analyse (usage-vision-conception) et peut être appréhendée à partir de leur articulation. Étudier l’appropriation soulève trois séries de questions : la première concerne les clefs de compréhension de l’usage, la seconde porte sur la catégorisation des acteurs-utilisateurs et la stylisation de leurs usages, le troisième conduit à placer la dynamique au cœur de l’analyse de l’appropriation. Dans ce même cadre, PROULX (2001, cité par Germain POIZAT, p.7) définit l’appropriation comme « l’intégration créatrice d’éléments significatifs de la culture technique dans la vie quotidienne des usagers et des collectivités. »

Ainsi l’appropriation d’un outil ou d’un projet dépend des préalables relatifs à sa construction et à sa mise en œuvre. Cela peut être la Planification Communautaire Participative, les formations, l’accompagnement, …, qui sont un ensemble de démarches et de stratégies mise en œuvre dans le cadre des activités d’aménagement dans le Guéra – avant, pendant et après les projets – pour susciter chez les bénéficiaires l’engagement, une meilleur gestion et la maîtrise des techniques de travail.

Appropriation comme pouvoir d’action

L’appropriation se traduit objectivement par la maîtrise technique et l’autosuffisance qui exprime la capacité des exploitants à faire fonctionner leur système de production.

Le Conseil canadien de la santé et du bien-être (2001. p.12) définit l’appropriation comme étant un processus par lequel un individu, un groupe ou une communauté arrive à exercer un certain contrôle sur ses conditions de vie. Pour que l’appropriation soit effective, l’individu, le groupe ou la communauté doit posséder les ressources officielles et non officielles qui lui permettent de contrôler son développement.

Il a regroupé en cinq dimensions les facteurs8 constituant, pour le Conseil, autant de conditions de l’appropriation et d’effets de celle-ci. Ces cinq dimensions sont : la vision de l’appropriation et de ses valeurs, l’organisation du territoire, l’utilisation des ressources, le partage des pouvoirs et l’action en réseau. Il considère ainsi l’appropriation de développement comme étant la capacité des populations à coordonner les activités et à se prémunir de moyens et de techniques leur permettant de faire face aux conditions qui rendent difficile l’exercice sur leur territoire.

8 Pour le Conseil canadien du bien-être, ces cinq dimensions ont été retenues parce qu’elles représentent les conditions favorables les plus évidentes dans les écrits et dans les expériences analysées, mais aussi parce qu’elles sont porteuses de changements fondamentaux à long terme. Elles sont interdépendantes dans le développement des communautés et dans l’établissement des rapports efficaces avec l’Etat ainsi qu’avec d’autres partenaires.

COUTURE et ses collègues (2001), dans leur travail, se sont donné la tâche d’expliquer que l’appropriation est un phénomène circonscrit à un pouvoir, à un processus et à une structure. Pour eux, pour s’approprier le développement, une communauté doit premièrement, disposer d’un pouvoir d’action autonome. Ce pouvoir d’action lui permettra : de modifier certaines de ses conditions de vie afin de survivre et/ou d’améliorer son sort, de gérer les services à rendre accessibles à sa population et, d’exercer un contrôle global et continu sur sa vie et sur sa destinée. Deuxièmement, pour qu’il y ait appropriation, une communauté doit réaliser un processus qui la conduit à prendre conscience de ses problèmes et de sa capacité (ou de son incapacité) à les résoudre, à resserrer les liens sociaux de base afin qu’émerge une nouvelle organisation sociale axée sur le partenariat et, à maîtriser de plus en plus les outils collectifs de développement.

Troisièmement, l’appropriation ne peut se faire sans l’existence d’une structure, à l’intérieur de la communauté, qui favorise la participation de ses membres et qui est reconnue par ces derniers et par leur environnement. L’appropriation doit, pour ce faire, être au pouvoir de la maîtrise locale.

Le pouvoir d’action est capital pour conduire plus efficacement et de manière durable un projet de développement. L’appropriation est aussi le fait de détenir de ressources matérielles et financières indispensables qui procurent le pouvoir d’action en apportant l’investissement nécessaire en temps réel.

Appropriation d’aménagements et développement local

L’Aménagement du Territoire est en même temps un domaine d’actions et une discipline scientifique enseignée dans plusieurs unités de formation. Embrassant à la fois les dimensions économiques, sociales, politiques et territoriales, l’aménagement est de nos jours, un outil indispensable de développement, qu’on le considère à l’échelle nationale, régionale ou locale. Il est considéré par les politiques, les collectivités locales et les organismes privés comme l’approche la plus adaptée pour répondre aux préoccupations contemporaines, qu’il s’agisse de Changement Climatique, de la Démocratie Participative ou du Développement Local. Le couple Appropriation-Aménagement est fondamental pour le Développement Local. Toute action destinée à transformer le territoire, doit être l’émanation des populations locales, sinon elle doit du moins, exprimer leurs besoins et gagner leur adhésion. Pour des questions d’adaptation au changement climatique ou de développement local, les habitants et leurs gouvernants ont tendance à rassembler de moyens et à s’unir autour de stratégies de mis en valeur leurs territoires pour de fins agricoles, d’accessibilité, etc. ou purement écologique. Ce qui exprime l’appropriation, d’abord de l’outil qui est l’aménagement du territoire, et puis du modèle qui celui de développement local. C’est ce qui, de nos jours s’impose de plus en plus à la plupart de sociétés d’Afrique.

L’Aménagement du Territoire est, selon BELHEDI (2010, p.115), « l’action de transformer un territoire pour permettre de satisfaire les besoins du groupe social. C’est l’action de restructurer un espace en exploitant les atouts et en limitant les contraintes et les gaspillages par une utilisation rationnelle de l’espace et des ressources, afin d’assurer le bien-être du groupe social et l’équité territoriale. » Sous les auspices des pouvoirs publics, l’Aménagement du Territoire traduit la vision du développement, exprimée dans les politiques de l’Etat, mais il est également une réponse apportée aux aspirations de la population. L’Aménagement du Territoire permet de réaliser les ouvrages de développement ou de mettre en valeur des espaces jusques là improductifs ou difficilement accessibles.

L’Aménagement Communautaire : Il est la résultante d’une volonté locale, admise par consensus par les acteurs, membres d’une communauté qui, cherche par-là à assurer l’équilibre socio-culturel, économique et environnemental, en remédiant au dysfonctionnement ou en exploitant les atouts sur leur terroir. L’Aménagement Maraîcher dans le Guéra est ainsi la valorisation des ouadis et de bas-fonds.

Ce qui permet de valoriser les terres et les eaux de surfaces qui, à son tour rend possible les cultures maraîchères en saison-sèche. L’ensemble des acteurs de développement (population, organismes privés et Etat.) trouve en cela une stratégie efficace de lutte contre les défis dus au changement climatique et encouragent les communautés qui entreprennent des actions allant dans ce sens.

C’est le cas d’Aménagements Maraîchers qui sont l’objet de cette étude. La pertinence de l’aménagement des terroirs locaux en matière de lutte contre l’insécurité alimentaire et du renforcement de la résilience, a amené le PAM à appuyer les communautés du département du Guéra qui sont porteuses de tels projets.

Nous définissons l’Appropriation d’Aménagements Communautaires comme : « Le choix et la capacité des populations à mettre en œuvre de projets d’aménagement à l’échelle de leur terroir et, de pérenniser l’exploitation et la gestion de la manière qui leur produit de résultats satisfaisant de façon durable. » Cela dépend de moyens, de stratégies et de compétences, de la disposition à veiller sur le bon état des ouvrages, de la capacité d’organisation des producteurs ainsi qu’à assurer les charges de fonctionnement, et de l’attention accordée à la conservation (ou à la restauration) de ressources locales.

ABOU KARIM (1995, p.22) définit l’Autonomie de gestion des périmètres maraîchers comme étant l’appropriation par le groupement des producteurs des techniques de gestion à même de permettre la pérennisation de leurs périmètres au cas où l’assistance qui leur est fournie se retirerait. Pour ce faire, les membres du groupement doivent comprendre leurs comptes du groupement et créer des conditions de fonctionnement sain. BARRETEAU (pp.9, 11,23) fait la remarque selon laquelle ‟l’aménagement” est un lieu d’appropriation et d’usage d’une ressource en propriété commune, l’eau, au moyen d’équipements également en propriété commune, station de pompage, canaux, vannes. – Dans toute opération d’aménagement […], la perspective évolue vers la question des incitations à mettre en œuvre en fonction des caractéristiques d’une population donnée pour qu’elles conduisent à des comportements individuels dont l’évolution qui en résulte pour le système est viable.

On aperçoit alors que l’étude d’appropriation, comme celle d’aménagements maraîchers réalisés dans le Guéra, exige de prendre en compte l’analyse de facteurs à la fois procéduraux, organisationnels et technico-physiques. C’est pourquoi, le présent travail vise l’analyse de l’approche participative usitée par les acteurs dans le but de faciliter l’appropriation des avoirs, l’observation méthodique des pratiques sur les périmètres maraîchers et les stratégies des producteurs pour l’exploitation durable des aménagements maraîchers.

GRAPHIQUE N°1 : MODÈLE D’ANALYSE

Obtention de résultats socio-économiques satisfaisants de manière durable

Restauration et gestion rationnelle des ressources locales

Restauration ou maintien de l’équilibre socio-économique et environnemental ; amélioration significative des conditions de vie des populations et des milieux.

Koutte Moussa, 2017

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Intrants

Extrants

Autosuffisance

Pérennisation

Autonomie de gestion

Bonne maîtrise technique

Auto-investissement

Finalité

Impact

Implication et Responsabilisation

Équipement

Professionnalisation

Participation

Empowerment

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