Quelles stratégies innovantes pour l’adaptation agricole au Tchad en 2023 ?

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🏫 UNIVERSITÉ DE DSCHANG - ÉCOLE DOCTORALE - DSCHANG SCHOOL OF ARTS AND SOCIAL SCIENCES
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master recherche - Juillet 2022
🎓 Auteur·trice·s
REOUNODJI ELOGE
REOUNODJI ELOGE

Les stratégies d’adaptation agricole sont cruciales face à la variabilité pluviométrique dans le Département de Mayo Dallah. Cette étude révèle comment les agriculteurs diversifient leurs revenus et modifient leur calendrier pour surmonter les défis climatiques, soulevant ainsi la question : quelles mesures peuvent garantir une adaptation durable ?


PROBLEMATIQUE

Le Mayo Dallah est une zone essentiellement rurale (80%) et dont la principale activité est l’agriculture pluviale, source de moyens de subsistances de la majeure partie de la population. Les activités agricoles sont en grande partie dominées par la culture du sorgho, l’arachide, le pénicillaire, le maïs et le riz, dont les rendements sont en baisses ces dernières décennies en raison de la variabilité climatique et de la mauvaise adaptation des agriculteurs.

Quoique d’autres facteurs non climatiques tels que, les techniques agricoles, le faible niveau d’équipement, le faible apport d’intrants, les semences qui déterminent également les rendements agricoles, c’est la variabilité pluviométrique que les agriculteurs ont pointé du doigt comme étant le principal déterminant de leurs rendements agricoles car elle agit fortement sur l’efficacité d’autres facteurs.

La variabilité pluviométrique est réelle et se manifeste par la fréquence des phénomènes extrêmes que sont les sécheresses et les inondations des cultures qui affecte les besoins en eau pour la croissance des cultures vivrières. Ces différentes situations augmentent la vulnérabilité et entrainent la mauvaise performance des cultures qui se traduit par la diminution de la production agricole, détérioration de la sécurité alimentaire, baisse des revenus des paysans et augmentation de la pauvreté (paysanne). Selon le rapport de la Direction Départementale de la Statistique agricole, les inondations de 2020 ont entrainées des pertes du capital semencier, du lessivage des engrais, de la prolifération des maladies fongiques et un déficit céréalier de 14118 tonnes.

Les faibles rendements se justifient également par des faux départs et des retours tardifs de la pluie qui perturbe le calendrier cultural et rendu difficile la planification des opérations agricoles.

En dépit de ces effets, les producteurs de ladite localité ne se sont pas simplement résignés sur la situation, mais ils développent des stratégies d’adaptation à court, moyen et long termes dans le but de limiter les pertes agricoles, liées aux effets négatifs des variabilités pluviométriques particulièrement, afin de préserver la sécurité alimentaire, mais ces stratégies d’adaptation sont médiocres ou limitées.

Face à cette situation, la présente recherche tente d’établir le lien de cause à effet entre la productivité agricole et la variabilité pluviométrique dans le Mayo Dallah. Autrement dit, les fluctuations de rendements observées se justifient-elles par la variabilité pluviométrique ?

L’idée que nous soutenons dans ce mémoire, est que la variabilité pluviométrique dans le Mayo Dallah est une réalité et se traduit par le glissement des saisons (pluies tardives, de courte durée, pluie précoce) qui rend les conditions de productions de plus en plus difficiles et ceux malgré les stratégies mobilisées par les paysans.

Cette préoccupation s’inscrit dans les Objectifs du Développement Durable, notamment le 13e objectif qui porte sur ‘‘la prise des mesures d’urgences pour lutter contre les changements climatiques et leurs conséquences’’ et le 2e objectif qui vise à éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir une agriculture durable et résiliente.

Il s’inscrit parmi les objectifs de l’Union Géographique Internationale (UGI, 2013) dans le renforcement de la capacité des populations à être résilientes face aux effets des changements climatiques. Elle s’inscrit également dans la vision du Tchad 2030 intitulé « le Tchad que nous voulons », qui vise à assoir une économie plus résiliente au changement climatique.

Ainsi, ce travail adhère les programmes stratégiques nationaux de luttes contre les changements climatiques (PANA-TCHAD, 2010 ; CNLCC, 2017).

QUESTIONS DE RECHERCHE

Question principale

La question principale qui permet d’orienter cette recherche est la suivante : Les stratégies d’adaptations développées par les paysans permettent-elles de répondre aux fluctuations des rendements provoquées par la variabilité pluviométrique dans le Mayo Dallah ?

Questions spécifiques

Pour mieux cerner cette question principale, plusieurs questions spécifiques méritent d’être posées :

  • Quel est l’état des lieux des pratiques agraires dans le Département de Mayo Dallah ?
  • Quelles sont les tendances de l’évolution de la pluviométrique dans le Département de Mayo Dallah ?
  • Quelles sont les effets de cette variation pluviométrique sur les rendements des cultures vivrières ?
  • Quelles sont les stratégies mobilisées par les agriculteurs pour y faire face ?

OBJECTIFS DE LA RECHERCHE

Pour vérifier les hypothèses émises, les objectifs de recherche sont posés. Il s’agit d’un objectif principal détaillé en plusieurs objectifs spécifiques.

Objectif principal

Globalement, cette recherche se propose d’analyser les stratégies d’adaptation des paysans face aux effets de la variabilité pluviométriques sur la production agricole.

Objectifs spécifiques

  • Dresser l’état des lieux des pratiques agraires dans le Département de Mayo Dallah ;
  • Analyser les tendances de l’évolution de la pluviométrique (annuelle ; saisonnière, mensuelle, les anomalies etc…) ;
  • Analyser les effets de la variabilité pluviométrique sur les rendements agricoles ;
  • Répertoriez les stratégies d’adaptations mobilisées par les agriculteurs pour faire face aux effets induits par la variabilité pluviométrique.

HYPOTHESES

Hypothèse principale

Cette recherche qui aborde toutes ces questions se fonde sur l’hypothèse principale suivante : face à la baisse de la production agricole, les paysans du Mayo Dallah développent des stratégies d’adaptation en réponse à la variabilité pluviométrique.

Hypothèses secondaires

  • Les pratiques agraires dans le Département ne garantissent pas une bonne production agricole ;
  • La variabilité pluviométrique dans le Département de Mayo Dallah est marquée par des variations interannuelles, mensuelles et saisonnière des précipitations mais aussi des températures ;
  • La variabilité pluviométrique impacte les productions agricoles et exposent la population à la famine ;
  • Les adaptations mises sur pied par les agriculteurs sont insuffisantes pour atténuer les effets de la variabilité pluviométrique sur les cultures vivrières ;

CADRE CONCEPTUEL ET THEORIQUE

La conduite de l’étude repose sur les concepts clé que voici : variabilité pluviométrique et adaptation des agriculteurs.

Variabilité pluviométrique : Un des éléments intégrateurs de la variabilité climatiques, l’expression ‘‘variabilité pluviométrique’’ a été défini par plusieurs auteurs. Elle est définie comme la modification ou variation significative de la pluviométrie, qu’elle soit naturelle ou due aux facteurs d’origine anthropique (Niasse et al. 2004). Dans la même logique, Yann L’hôte (2000), définit la variabilité pluviométrique comme les variations des précipitations, c’est-à- dire une conséquence de la circulation générale dans laquelle sont décrits les mouvements de l’air à l’intérieur de l’atmosphère terrestre.

Pour Brou (20005), il s’agit de la variation du schéma pluviométrique moyen et l’accentuation des valeurs extrêmes à toutes les échelles temporelles (journalière, décadaire, mensuelle, annuelle et décennales) et spatiales. Au tant que possible, elle est analysé par rapport aux valeurs moyennes ou normales, qui sous-entendent l’idée de fixité du climat.

Selon Gouataine (2018), la variabilité climatique est la fluctuation du climat qui se manifeste par des retards de pluie, des excès et des déficits pluviométriques, des séquences sèches. Elle correspond à la dispersion statistique de la pluie autour de sa valeur moyenne. Dans la même logique, Njoya et al. (1995) entendent par variabilité pluviométrique, une alternance des saisons, c’est-à-dire des caractères erratiques (répartition et/ou variation) de la pluviométrie et des températures.

Le concept désigne dans ce travail, la variabilité pluviométrique au pas de temps mensuel, saisonnier, annuel et décennal. Une analyse de la température sera ajoutée à celle des précipitations car l’association de ces deux paramètres climatiques est indispensable pour comprendre les effets de la variabilité pluviométriques sur les rendements des cultures vivrières.

Tableau 1: Opérationnalisation du concept de variabilité pluviométrique

Opérationnalisation du concept de variabilité pluviométrique
CONCEPTDIMENSIONSCOMPOSANTESINDICATEURS
Echelle mensuelle-moyenne mensuelle des pluies,
– Nombre des mois pluvieux/sec
-Ecart à la moyenne mensuelle des pluies
Echelle saisonnière-variabilité des saisons de cultures,
-variabilité des séquences intra-saisonnières
Variabilité pluviométriqueTemporelleEchelle annuelle et décadaire-moyenne annuelle,
-totaux annuels des précipitations,
-écart annuel à la moyenne annuelle,
– Nombre des années, décennies excédentaires et déficitaires,
-coefficient de variation annuelle
Répartition des pluies-variabilité des saisons de culture,
-fréquence des séquences sèches/humides
-fréquence des inondations
SpatialeEffets sur les activités agricoles-durée de la saison de culture,
-cycle végétatif des cultures,
-Production et rendements des cultures
-fréquence d’envahissement des herbes et ennemies de culture,
-nombre d’hectare des champs détruits
-fréquence des famines et maladies
– Coefficient de variation des rendements

Source : Auteur, 2022

Adaptation : De nombreux auteurs ont avancé différentes définitions de l’adaptation au changement climatique. Pour le GIEC c’est : « l’ajustement des systèmes naturels ou humains en réponse à des stimuli climatiques ou à leurs effets, afin d’atténuer les effets néfastes ou d’exploiter les opportunités bénéfiques ». Ainsi, GIEC (2007) et PNUD (2005) distinguent plusieurs types d’adaptations ; chaque type dépendant des moyens dont disposent les populations :

  • Adaptation anticipative : elle consiste à mettre sur pied des moyens qui s’imposent avant que les impacts ne se fassent sentir dans le but de minimiser les effets néfastes du climat.
  • Adaptation réactive : conçue et mise en œuvre en réponse aux impacts initiaux
  • L’adaptation autonome est l’utilisation des connaissances et des techniques actuelles déjà disponibles pour répondre aux changements climatiques qui se produisent déjà
  • Adaptation planifiée : résulte d’une décision politique délibérée, basée sur une prise de conscience des changements en cours et à venir.

Dans la même logique, Watson et al, (1996), soutiennent que : « L’adaptabilité fait référence à la mesure dans laquelle des ajustements sont possibles dans les pratiques, les processus ou les structures des systèmes aux changements prévus ou réels du climat. L’adaptation peut être spontanée ou planifiée et peut être effectuée en réponse ou en prévision d’un changement de condition.

Pour Smitet al, (2000) : « L’adaptation implique des ajustements pour améliorer la viabilité des activités sociales et économiques et pour réduire leur vulnérabilité au climat, y compris sa variabilité actuelle et les événements extrêmes ainsi que le changement climatique à plus long terme ». Pour Ogouwalé (2006), l’adaptation serait une des solutions qui permettrait à la communauté humaine de réduire les impacts des changements climatiques annoncés.

De manière plus orienté, l’adaptation est selon FAO (2011) et PNUD (2008), c’est une réaction paysanne à travers l’agriculture qui se fait en ajustant les techniques voir les habitudes de production en réponse à la variation du climat afin d’atténuer les dommages causés par ce phénomène.

Il ressort de l’analyse de tous ces auteurs que l’adaptation se réfère à des ajustements dans un système en réponse à un stimulus climatique dont les formes peuvent êtres diverses selon les endroits, les moments et le type d’évènement. C’est ainsi que Ramade (2008), définira les stratégies adaptatives comme une caractéristique propre au type d’adaptation d’une population ou d’une communauté vivant à des conditions environnementales particulières.

Tableau 2: Opérationnalisation du concept adaptation paysanne

Opérationnalisation du concept adaptation paysanne
CONCEPTDIMENSIONSCOMPOSANTESINDICATEURS
Adaptation paysanneAnticipativeSocio- économique/culturelle-nombre d’agriculteur ayant une activité secondaire,
-type d’activité secondaire exercée,
-nombre de paysans ayant ajusté le calendrier,
-nombre de paysan ayant reçus des entraides et assistances sociales
Réactive/AutonomeTraditionnel-nombre d’agriculteurs ayant utilisés les savoirs pour ajuster les changements,
– types de techniques traditionnelles en réponses aux maladies fongiques et à l’envahissement des mauvaises herbes,
Innovantes-nombre d’agriculteurs pratiquant l’irrigation/drainage/maraichage
-nombre de paysans ayant utilisés les engrais, insecticides,
-nombre d’agriculteurs ayant utilisé les variétés à cycle court/longue,
PlanifiéeAppuie des pouvoirs publics-type d’aide reçu,
-nombre de paysans ayant bénéficié des aides de l’Etat,
-nombre de projets réalisés par l’Etat,
-le niveau d’appréciation des aides reçus par l’Etat
(efficacité/quantité/qualité),
ONG et communautés locales– type d’aide reçu des ONG,
-nombre de paysans ou associations villageoises ayant bénéficié des aides des ONG,
-nombre des ONG exerçant,

Source : Auteur, 2022


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les principales cultures affectées par la variabilité pluviométrique dans le Mayo Dallah ?

Les principales cultures affectées par la variabilité pluviométrique dans le Mayo Dallah sont le sorgho, l’arachide, le pénicillaire, le maïs et le riz.

Comment la variabilité pluviométrique impacte-t-elle la sécurité alimentaire au Tchad ?

La variabilité pluviométrique augmente la vulnérabilité des cultures, entraînant une mauvaise performance agricole, une diminution de la production, une détérioration de la sécurité alimentaire et une augmentation de la pauvreté.

Quelles stratégies d’adaptation les agriculteurs du Mayo Dallah ont-ils développées ?

Les agriculteurs du Mayo Dallah ont développé des stratégies d’adaptation à court, moyen et long termes, notamment la diversification des sources de revenus et la modification du calendrier agricole.

Pourquoi les rendements agricoles diminuent-ils dans le Mayo Dallah ?

Les rendements agricoles diminuent dans le Mayo Dallah en raison de la variabilité pluviométrique, des faux départs et des retours tardifs de la pluie, ainsi que de facteurs non climatiques comme le faible niveau d’équipement et le faible apport d’intrants.

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