Quels résultats pour les aménagements maraîchers au Tchad ? Analyse approfondie

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🏫 Université de N’Djaména - Faculté des Sciences Humaines et Sociales - Département de Géographie/ Français
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2015-2016
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Les résultats d’aménagement maraîcher révèlent comment les bénéficiaires au Tchad s’approprient les infrastructures soutenues par le PAM. Découvrez les facteurs de durabilité et de résilience face aux défis climatiques et socio-économiques qui transforment ces aménagements en véritables leviers de développement.


PREMIÈRE PARTIE : APPROCHE THÉORIQUE

CHAPITRE 1 :

CONTEXTE ET PROBLÉMATIQUE DE L’ÉTUDE

Après avoir posé la justification du choix et de l’intérêt de l’étude, il est décrit de manière brève dans ce chapitre le contexte de développement en Afrique et au Tchad, puis la problématique de l’appropriation des actions de développement par les acteurs locaux, avant de finir par la présentation des objectifs et des hypothèses sous-tendant l’étude.

JUSTIFICATION DE CHOIX DU SUJET

Étudiant en Master, c’est pour nous un devoir académique de produire un mémoire à la fin de notre formation. La recherche a été conduite autour du thème, intitulé ‟Appropriation d’aménagements communautaires dans la région sahélienne du Tchad : cas d’aménagements maraîchers appuyés par le PAM dans le département du Guéra”. C’est un thème qui englobe les dimensions socio-économique, territoriale et environnementale – inséparables du point de vue de Développement Durable⃰ – relevant de notre formation en Gestion des Territoires et Développement.

En outre, il permet de mobiliser la technique mixte (qualitative et quantitative) pour sa mise en œuvre. En étudiant ce thème, nous avons cherché à voir dans la pratique comment l’aménagement du territoire, en tant que outil fédérateur d’acteurs, se met au service du développement local participatif⃰ et, est adapté à la lutte contre la pauvreté et le changement climatique.

INTÉRÊT DE L’ÉTUDE

Du point de vue académique, l’étude nous a permis de faire une première expérience dans le domaine de la recherche. Ce fut un grand avantage pour nous d’aller sur le terrain pour appliquer pour la première fois les techniques et les outils méthodologiques de la recherche scientifique. Le thème nous a permis d’observer les pratiques et les interactions qui régissent les différents acteurs sur les sites d’aménagements, ce qui a fortement amélioré notre capacité d’analyse et de conception de sujets relatifs à l’aménagement du territoire

et au développement local durable. Du point de vue socioéconomique, nous espérons que les résultats et les informations que nous avons produites serviront les différents acteurs pour de meilleures prises de décisions dans le cadre de développement territorial⃰. Car la prise en compte ou le recoupage des avis multiples s’avère nécessaire face à la complexité d’enjeux socio-économiques et climatiques actuels et compte tenu de l’importance de la recherche de stratégies et de techniques plus adaptées pour les actions de lutte contre la pauvreté, de valorisation

des agro systèmes et de protection de l’environnement de manière générale.

CONTEXTE

Aide Publique au Développement

Les appuis en termes de projets de développement, tels que ceux que le PAM et d’autres partenaires ont apportés pour le renforcement de la résilience des communautés dans le département du Guéra, rentrent dans la catégorie de l’aide publique au développement qui reste jusqu’à nos jours un sujet à diverses interprétations.

C’est pourquoi, avant de parler des projets territoriaux⃰ qui sont l’objet de notre recherche, nous avons choisi de rappeler brièvement les contours de l’aide au développement et les projets subséquents. En effet, l’aide au développement et les projets qui y découlent suscitent de discussions incessantes et ouvertes en milieu académique que professionnel ; discussions autour des méthodes de sa mise en œuvre et, surtout celles de son impact sur les populations et les milieux.

Outil international, à la fois stratégique et humaniste, l’aide au développement évolue régulièrement en fonction de statu quo. Les acteurs engagés dans son exécution et les méthodes d’interventions, ont eux aussi évolué au fil du temps. Aussi les objectifs poursuivis par l’aide varient d’un lieu à un autre, et d’un moment à un autre.

Le champ de l’aide au développement s’est développé depuis le discours du président américain Truman en 1945 en faveur de la reconstruction de l’Europe d’après la seconde guerre mondiale. Le premier acte marquant a été la création des Institutions de Breton Wood (Banque Mondiale, FMI) à New Hampshire aux USA, (YODA, 2004, p.3). La notion d’aide au développement va d’abord servir d’outil stratégique pour nouer de partenariats multi et bilatéraux entre les États, puis un instrument pour la lutte contre les défis mondiaux.

Pour de motifs humanitaires, l’ONU fut créée dès 1960 pour éviter au monde les pires crises, dont la guerre. Elle va servir de plate-forme mondiale pour la lutte contre les défis planétaires que sont la lutte contre les épidémies, la lutte pour la protection de l’environnement et la pauvreté sous toutes ses formes.

Pour ce faire, des organismes onusiens, de manière spécialisée (PAM, UNESCO, CNUCC, etc.) sont créés pour mieux affronter ces défis. En outre, dès 1970, au nom de la solidarité internationale, les États dits développés du Nord ont pris l’engagement d’apporter 0,7% de leur PIB au développement des pays pauvres du Sud.

Cet engagement conduisit au renforcement des Partenariats Techniques et Financiers (PTF) entre les pays développés et les pays du sud pour combattre la pauvreté.

Devant la persistance de l’extrême pauvreté dans le monde, le Sommet du Millénaire, en 2000, réoriente l’aide au développement vers la réduction de la pauvreté. En effet, malgré des interventions successives, la remarque qui se fait concernant l’Afrique subsaharienne est que

les projets de développement n’ont pas apportés une amélioration significative des conditions de vie des populations pour lesquelles ils prétendent remédier à leur problème d’extrême pauvreté. Pour cette raison, la remise en cause des projets de développements par de nombreux observateurs ne cesse de se faire entendre. Ces derniers insistent et proposent que dans le contexte actuel qui est celui de la résilience des communautés face aux aléas du changement climatique, il faut valoriser les ressources locales et rendre les acteurs locaux aptes de leur gestion rationnelle pour une exploitation durable.

Valorisation des ressources et des territoires locaux

Les acteurs de développement mettent de plus en plus l’accent sur la valorisation de ressources locales dans la lutte contre la pauvreté et pour l’adaptation au changement climatique. Ils reconnaissent aussi la nécessité de l’implication des populations et de renforcement de leurs capacités pour mieux conduire cette lutte. Il s’agit de la restauration des terres dégradées, de la restauration et de la protection de la biocénose, de la maîtrise et de la gestion des eaux, d’habilitation et de la conscientisation des communautés locales pour une

exploitation intelligente et durable. Ceci est aussi du ressort de l’Aménagement du Territoire. Cette branche de la Géographie est incontournable dans les réflexions actuelles sur le Développement Local Participatif et l’Adaptation des populations et de leurs moyens d’existences au Changement Climatique. Pour relever le défi d’éradication de l’extrême pauvreté à l’horizon 2030 (ODD1), gouvernements, populations et partenaires privés travaillent de concert et insistent de plus en plus sur la valorisation du territoire local et le renforcement des capacités des acteurs locaux.

Le sahel reste un des théâtres de cette nouvelle donne à travers des projets d’aménagements et de restauration de facteurs de production.

Persistance de la pauvreté au Tchad

Au Tchad, la plupart des OMD n’ont pas été atteints en 2015. Du coup, le passage vers les ODD renferme autant de défis à relever pour le gouvernement et ses partenaires au développement. En 2015, le Tchad est classé 185e sur 188 selon l’Indice de Développement Humain (IDH) du PNUD (Banque Mondiale, 2016).

Près de la moitié des ménages (46,7%) en 2011 vit en dessous du seuil de pauvreté national (INSEED, 2011). Le nombre de pauvres dans le pays devrait passer de 4,7 millions en 2012 à 6,3 millions en 2019 (Banque Mondiale, 2016). En plus de la chute des cours du pétrole, à compter de 2014, qui a fait croitre le nombre de pauvres, les conséquences des dérèglements climatiques viennent exacerber la situation socio-économique des populations dépendant principalement des productions agricoles.

Problèmes d’insécurité alimentaire au Tchad

Le Sahel tchadien est confronté à des chocs climatiques et environnementaux (inondations, sécheresse, etc.) récurrents qui accentuent la vulnérabilité de la population. Ces chocs surviennent dans un environnement fortement fragilisé par la désertification, la déforestation, une croissance démographique accrue. Ils conduisent à des crises alimentaires cycliques qui affectent des millions de personnes, (ENSA, 2013, p.8), faisant plus de victimes parmi les femmes et les enfants.

En zone Sahélienne, les taux de malnutrition aiguë globale sont élevés, parfois supérieurs au seuil d’urgence de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), qui est supérieur ou égal à 10% (ENSA, 2013, p.10). Les résultats de l’enquête sur la sécurité alimentaire au Tchad, menée par le PAM de mars à avril 2016 (RePER, 2018, p.107), montrent que 45% de la population enquêtée est en insécurité alimentaire dont 9% en insécurité alimentaire sévère.

Ce qui représente environ 2 millions de personnes en insécurité alimentaire dont plus de 400000 affectées par l’insécurité alimentaire sévère.

L’Enquête Nationale de Sécurité Alimentaire (ENSA) d’octobre 2016 montre que 18,5% des ménages tchadiens sont en insécurité alimentaire, dont 1,8% en insécurité alimentaire sévère et 16,7% en situation modérée. Cependant l’insécurité alimentaire affecte davantage les régions du Sahel : Barh El Gazal, Borkou, Kanem, Batha, Guéra, Ennedi. Ces régions ont des proportions de ménages en insécurité alimentaire dépassant 40%. Dans la région du Guéra, la prévalence de l’insécurité alimentaire était dans l’ordre de 30% en 2015, étant néanmoins en dessous de la moyenne nationale qui était de 46%.

En poursuivant l’objectif qui est celui d’éradiquer l’insécurité alimentaire dans le monde (ODD 2), le PAM appuie également les activités de résilience dans le département du Guéra. Il appuie ainsi les activités de réhabilitation de moyens d’existence à travers des pratiques de protection des sols, et celles de création de mares artificielles pour la collecte des eaux de ruissellement qui permettent aux bénéficiaires de faire le maraîchage en saison sèche froide. Il s’agit de l’aménagement des terroirs villageois au bénéfice des communautés.

Appuis du PAM pour la création des avoirs dans le Guéra

Conformément à la politique de renforcement de la résilience pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle adoptée en 2015, le PAM et ses partenaires ont décidé de s’attaquer aux causes profondes de l’insécurité alimentaire. Il prévoit que, ses activités 3A (Assistance Alimentaire pour la création d’Actifs) doivent jouer un rôle très important pour répondre aux besoins alimentaires des familles en difficulté, réduire les risques de catastrophe et améliorer les moyens d’existence. (PAM, 2016, p.23).

De 2015 à 2016, le PAM a mis en œuvre le programme « Investissement Prolongé de Secours et de Redressement ». Ce programme a permis d’appuyer la création et la réhabilitation d’actifs productifs à travers le pays (voire carte n°1, p.8), notamment dans les régions sahélienne et saharienne. Ceci par de projets de Renforcement de la Résilience Communautaire réalisés en coopération avec les partenaires locaux que sont les ONGs locales, les services déconcentrés de l’Etat et les bénéficiaires.

Dans le département du Guéra, le PAM a établi des partenariats avec une série d’ONG. Le partenariat avec l’ONG Moustagbal a permis d’appuyer des projets d’aménagements maraîchers dans les localités de Gamé, d’Amdakour, de Mallah, d’Almé Abiat, de Chawir et de Baro. Le PAM s’est appuyé sur l’ONG Action pour la Protection et la Sauvegarde de l’Environnement (APSE) pour travailler dans les localités de Tchoffio, de Rikhéwé et de Bara.

C’est sur ces activités que nous avons mené notre travail de terrain. En recherchant l’amélioration des conditions de vie des populations, le PAM voudrait que l’ensemble des stratégies qu’il a déployées avant, pendant et après la période de mise en œuvre des projets d’aménagement aboutissent à l’appropriation desdits actifs par les communautés locales.

Il s’attend à ce que les communautés soient capables de poursuivre les activités de production.

CARTE N°1 : COUVERTURE GÉOGRAPHIQUE DES ACTIVITÉS DU PAM EN 2016

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Source : Rapport d’évaluation de l’IPSR 200713, juillet 2016, p.xii

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