Quelles perspectives d’avenir pour la santé des enfants à Bomborokuy ?

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🏫 UNIVERSITE DE OUAGADOUGOU - UNITE DE FORMATION ET DE RECHERCHE EN SCIENCES HUMAINES (UFR/SH) - DEPARTEMENT DE GEOGRAPHIE
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de MAITRISE - 2008-2009
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TRAORE Symphorien
TRAORE Symphorien

Les perspectives d’avenir en santé infantile sont révélées à travers l’analyse des itinéraires thérapeutiques des enfants de moins de 15 ans à Bomborokuy. Découvrez comment la médecine moderne, traditionnelle et l’automédication influencent les choix des parents : quels sont les déterminants clés ?


CHAPITRE 4 :

ANALYSE DE QUELQUES DETERMINANTS DU PREMIER RECOURS DE L’ITINERAIRE THERAPEUTIQUE

Dans ce chapitre, nous mettrons en relation les différentes caractéristiques du malade ou de son entourage avec le choix du premier type de soin utilisé. Nous nous limiterons au premier type de traitement choisi vu le faible nombre des malades ayant atteint un itinéraire thérapeutique à deux ou trois recours.

Nous considérons comme déterminants, les facteurs liés aux caractéristiques du malade ou de son entourage, susceptibles d’influencer ou d’orienter le choix du type de soins approprié pour le traitement de la maladie. Les choix thérapeutiques reposent alors à la fois sur la perception du patient (ou de ses parents) de son malaise et de ses habitudes médicales et sont largement liés à la tendance des populations à utiliser le même produit ou le même service de soins à chaque fois qu’il ressent le même malaise.

Ce chapitre s’articulera autour de quatre sections : la première traite de l’influence des facteurs socio-démographiques sur l’itinéraire thérapeutique ; la seconde, des déterminants institutionnels de l’itinéraire thérapeutique ; la troisième section aborde les aspects socio- économiques de l’itinéraire thérapeutique tandis que la dernière se focalise sur le lien entre les itinéraires thérapeutiques et les caractéristiques de la maladie

1. Influence des facteurs socio-démographiques sur l’itinéraire thérapeutique

Les facteurs socio-démographiques sont d’ordre individuel ou collectif et prédisposent les individus ou les membres du ménage à recourir à un traitement. Ils sont constitués des caractéristiques tels que le niveau d’instruction de la mère, le sexe de l’enfant, son âge et son lien de parenté avec le chef du ménage. L’objectif est d’associer les enfants à leurs parents tout en respectant le fait que le recours choisi pour l’enfant, en cas d’épisode morbide, est le fait du parent ou du chef de ménage.

1. 1. Alternatives thérapeutiques et caractéristiques des parents

Les caractéristiques des parents utilisées ici sont la religion et le niveau d’instruction de la mère.

1. 1. Types de traitement selon la religion du chef de ménage

La religion est considérée comme une variable intervenant dans la dimension culturelle de la population notamment dans la perception des systèmes de soins. La religion peut être, dans une certaine mesure, du fait de son rattachement à une culture donnée, un facteur orientant les fidèles vers le secteur de soins moderne ou traditionnel. En effet, la religion animiste, à travers l’initiation qui se fait au jeune âge favorise l’acquisition des connaissances de ses membres sur les plantes qui sont nécessaires pour le traitement des maladies. Par conséquent ceux-ci utilisent prioritairement l’automédication voir les tradipraticiens qui sont plus proches de leur culture. Il en est de même pour les chrétiens et

les musulmans. Certains tradithérapeutes sont souvent de religion traditionnelle ou musulmane et par ricochet y soignent généralement leurs « patients ». De même, les chrétiens utilisent aussi bien la médecine traditionnelle, la médecine moderne que l’automédication.

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Graphique 4.1: Choix thérapeutique selon la religion du chef de ménage

Source : Enquête de terrain, (2008)

Près de 6 chrétiens sur 10 ont une préférence aux soins modernes. Les animistes ont plus recours à l’automédication (66,7%) qu’aux structures de soins modernes (33,3%). Il convient cependant de noter que la plupart des consultations traditionnelles auprès des tradithérapeutes ou des guérisseurs est l’oeuvre des chrétiens (3,9%). Les musulmans utilisent aussi bien l’automédication (44,2%) que la médecine moderne (46,2%), même si les cas de non traitement de la maladie de l’enfant sont remarquables dans les ménages dont le chef est musulman.

1. 1. 2. Soins thérapeutiques selon le niveau d’instruction de la mère

Du niveau d’instruction de la mère, l’étude révèle que les consultations traditionnelles et les inactions thérapeutiques sont l’apanage des mères analphabètes. Dans le même ordre d’idées, plus de la moitié des mères non instruites privilégient l’auto-traitement des enfants. Néanmoins, 42,7% de ces femmes ont utilisé un service de soins moderne pour le traitement de leurs enfants. Près de 3 mères sur 4 ayant un niveau primaire, de même que celles qui ont atteint un niveau secondaire et plus, se sont rendues dans un centre de soins moderne pour soigner leurs enfants.

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Graphique 4.2 : Choix thérapeutique selon le niveau d’instruction de la mère

Source : Enquête de terrain, (2008)

Soulignons qu’il y a une influence du niveau d’instruction de la mère sur les types de recours choisis malgré le nombre élevé des mères analphabètes. En effet, les résultats de l’étude nous montrent que les mères instruites sont plus enclines à utiliser les structures de soins modernes, ce qui n’est pas le cas des mères sans niveau d’instruction.

Du reste, l’instruction influence le recours aux soins sur le plan culturel. En outre, elle intervient dans la capacité de compréhension de la mère, de diagnostic précoce des cas de maladies et l’aptitude à faire un recours. L’instruction de la mère est un facteur facilitant, l’administration des médicaments prescrits en terme de respect du dosage et de l’intervalle de temps requis.

Aussi la mère instruite se sent plus à l’aise dans les relations soignant- soigné, toute chose qui augmente sa capacité d’écoute, la barrière linguistique n’étant plus de mise. Le niveau d’instruction modifie aussi la perception des mères quant à la représentation de la maladie (étiologie). Lorsqu’une mère connaît les modes de transmission d’une malade, elle change rarement de perception de la maladie.

Cette connaissance est d’autant plus approfondie que la mère a un niveau d’instruction élevé et la rend parfois plus autonome quant au pouvoir de décision.

1. 1. 3. Itinéraires thérapeutiques selon le pouvoir de décision des parents

Les soins à porter aux enfants n’émanent pas souvent d’une décision personnelle d’un des membres de la famille. Toutefois, le pouvoir de décision des mères pour le traitement thérapeutique des enfants est limité. Elles restent souvent dépendantes du point de vue de leurs conjoints ou de leurs parents.

Pour la dernière maladie contractée par leurs enfants, les pères ont choisi à 54,1% les services de soins modernes au détriment des autres types de soins. Par contre, lorsque les mères ont l’opportunité de donner leur point de vue sur la décision du recours, elles préconisent l’automédication (61,8%).

L’automédication est une pratique courante où le rôle des femmes, des mères de famille en particulier, est primordial. L’acquisition des connaissances médicales repose sur une transmission orale. Les filles apprennent de leurs mères, au fur et à mesure de leurs confrontations à des pathologies. Comme dans beaucoup de sociétés, c’est la mère qui prend en charge les problèmes liés à la santé des enfants. Celle-ci est souvent conseillée ou épaulée par les autres femmes de son entourage, selon l’organisation communautaire.

Les autres personnes ont intervenues rarement dans le choix du traitement des enfants. Quatre cas sur sept, dans lesquels elles ont donné leur avis, ont fait l’objet de consultation moderne.

De l’étude, il ressort aussi que trois pères sur cinq ont choisi de n’utiliser aucun recours thérapeutique pour les soins de leurs enfants. La non utilisation des recours thérapeutiques émane à 2,8% des pères contre 5,9 des mères.

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Graphique 4. 3: Choix thérapeutique en fonction du pouvoir de décision

Source : Enquête de terrain, (2008)

Les pères choisissent plus les centres de santé modernes pour soigner les enfants car la prise de décision est liée à la disponibilité de ressources matérielles ou financières qui est généralement l’apanage des pères. Il n’est un secret pour personne qu’en milieu rural les mères n’ont pas de moyens financiers, ni matériels et dépendent le plus souvent de leurs époux qui assument les dépenses du ménage. Il est évident que si ceux-ci refusent pour

manque de ressources, le recours n’aura pas lieu ou d’autres types de traitements alternatifs seront cherchés.

1. 2. Ressources thérapeutiques et caractéristiques de l’enfant

2. 1. Itinéraires thérapeutiques selon le sexe de l’enfant

Au regard des données de l’enquête de terrain, nous notons une légère propension des mères à emmener à 54,1% les garçons vers la consultation moderne contrairement aux filles qui sont soignées par automédication (50%). Pour ce qui est du choix thérapeutique, 50% des filles sont traitées par automédication contre un peu plus de 2/5 par consultation moderne. Par contre, la thérapie des garçons se fait prioritairement par consultation moderne suivie par l’automédication à 40,5%.

Tableau 4. 1 : Répartition des malades selon le type de recours
Type de recours Sexe du MaladeAucun recoursConsultation moderneConsultation traditionnelleAutomé- dicationTotal
FémininN33413876
%3,944,71,350,0100,0
MasculinN24023074
%2,754,12,740,5100,0
TotalN574368150
%3,349,32,045,3100,0

Source : Enquête de terrain, (2008)

1. 2. 2. Itinéraires thérapeutiques selon l’âge de l’enfant

Des résultats de l’enquête de terrain, nous constatons qu’au delà du fait que les enfants de moins de cinq ans soient les plus maladifs, les mères les réfèrent plus aux centres de santé modernes que les plus âgés (5-14ans). En effet, 66,7% des moins d’un an et 51,8% des enfants ayant entre 1 et 4 ans révolus ont été soignés dans un service de soins moderne. Les mères ont tendance à traiter elles-mêmes les enfants de 5-9 ans (57,6%).

Tableau 4. 2 : Age du malade selon le choix du type de traitement
Type de recours Age du MaladeAucun recoursConsultation moderneConsultation traditionnelleAutomé- dicationTotal
< 1 anN110415
%6,766,726,7100,0
1-4 ansN34413785
%3,551,81,243,5100,0
5-9 ansN11211933
%3,036,43,057,6100,0
10-14 ansN81817
%47,15,947,1100,0
TotalN574368150
%3,349,32,045,3100,0

Source : Enquête de terrain, (2008)

Les mères estiment que les enfants de 5-14 ans sont plus « solides » et donc résistent plus aux maladies par rapport aux plus petits. Ainsi, elles peuvent d’abord les traiter à domicile avant de chercher une autre issue de secours en cas d’aggravation ou de complication signe d’un échec thérapeutique.

1. 2. 3. Itinéraires thérapeutiques selon le lien de l’enfant avec le chef de ménage

Ne pas vivre avec ses parents biologiques est considéré, par le milieu médical, comme un facteur de risque pour l’enfant, quant à son état de santé en général et nutritionnel en particulier (MORLEY, 1977 cité par ROGER-PETIT JEAN, 1999)

Les résultats de notre étude révèlent que les parents envoient le plus souvent (49,3%) leurs propres enfants dans un service de soins moderne mais utilisent aussi l’automédication (44,9%). Il n’y a cependant pas de comportement différentiel de recours entre les enfants confiés et les enfants biologiques. En d’autres termes, les mères n’ont pas d’attitudes discriminantes par rapport aux soins qu’elles portent aux enfants, qu’il s’agisse de leurs propres enfants ou des enfants qu’elles accueillent. Il convient de souligner que l’enfant biologique est celui du père et de la mère ou aussi les autres enfants du père qui vivent avec lui car l’étude s’est réalisée en milieu rural.

Ces résultats sont à relativiser du fait de la faiblesse des effectifs des enfants confiés. Toute chose ne permettant pas de mettre véritablement en exergue le traitement des enfants selon leurs liens de parenté avec le ménage dans lequel il vit.

Tableau 4. 3 : Lien de parenté de l’enfant selon le choix du type de traitement
Type de recours Lien parentalARCMCTAMTotal
Enfant biologiqueN568362138
%3,649,32,244,9100,0
Enfant confiéN6612
%50,050,0100,0
TotalN574368150
%3,349,32,045,3100,0

Source : Enquête de terrain, (2008)

Remarques : CM= Consultation moderne CT= Consultation traditionnelle AR= Aucun Recours AM= Automédication

Le traitement « équitable » des enfants par les mères se justifie, d’autant plus qu’en milieu rural, le taux de confiage des enfants est relativement faible. Le phénomène des enfants confiés est plus perceptible en milieu urbain où les enfants sont utilisés pour servir d’aide dans les travaux domestiques et professionnels. Les enfants sont traités en milieu rural de la même manière car selon les mères « un enfant c’est un enfant ».

Une chose est de traiter les enfants sans discrimination, une autre chose est d’avoir accès aux services de soins en tout temps et tout lieu.

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