L’impact du climat sur le paludisme à N’Djamena révèle une dynamique complexe, où seulement 52% de l’incidence est attribuée aux facteurs climatiques. Cette étude met en lumière l’interaction entre les variables environnementales et socio-économiques, essentielle pour comprendre la propagation de la maladie.
CHAPITRE 3 : CARACTERISATION DU CLIMAT
Nous allons présenter dans ce chapitre l’état et le contexte climatique, les régimes et les tendances des différents paramètres du climat de la ville de N’Djaména. L’accent sera mis sur l’analyse de la température, de la pluviométrie et de l’humidité. Ce sont les paramètres climatiques qui paraissent déterminants dans la dynamique de l’infection palustre.
Dispositions climatiques du Tchad
Le Tchad est caractérisé par un climat contrasté et dominé par des aléas relatifs aux différents variables climatiques (inondation, sécheresse, chaleur…). Comme toute la zone intertropicale, la variation et la variabilité des pluies sont les éléments fondamentaux de la caractérisation ainsi que de la délimitation des trames climatiques. Pour la compréhension de ce climat, nous allons rappeler les processus liés à la pluvio-génèse de la zone tropicale de l’Afrique Centrale dans lequel est situé le Tchad. La compréhension du climat, nous allons nous focaliser sur l’analyse de la carte climatique du Tchad (Fig. 6) et notamment sur les isohyètes afin de situer les conditions climatiques de la ville de N’Djaména.
La pluviométrie au Tchad
La disposition des isohyètes nous permet de distinguer six zones bioclimatiques26 du nord vers le sud (Fig. 6) : la zone Saharienne (<100 mm/an) ; la zone Saharo-Sahélienne (100 à 200 mm/an) ; la zone Sahélienne (200 à 600 mm/an) ; la zone Sahélo-Soudanienne (600 à 800 mm/an) ; la zone Soudanienne (800 à 1,200 mm/an) et la zone Guinéenne (>1200 mm/an).
26 ATLAS du Tchad (2013), réalisé par P-SIDRAT (MATUH) pour le MPECI. P17
Fig. 6 : Carte climatique du Tchad
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La ville de N’Djaména se situe entre les isohyètes 600 et 800mm et précisément à la limite de l’isohyète 600 au nord, ce qui la place à cheval entre
le domaine sahélo-soudanien et sahélien. Ce zonage climatique est sujet à des variations très sensibles ces dernières années du fait de la migration inhabituelle des isohyètes qu’il conviendrait de relier à ce qui est communément appelé les changements climatiques. Nous avons défini une fourchette de 30 ans allant de 1991 à 2020 sur laquelle nous allons contextualiser l’ambiance climatique de la ville de N’Djaména. Nous commençons par la présentation de la pluviométrie, l’un des paramètres fondamentaux de l’endémicité du paludisme.
La pluviométrie moyenne tourne autour de 600mm mais les écarts interannuels sont énormes. Tel qu’en 2020, la ville de N’Djaména a, exceptionnellement enregistré 1217,8mm, et la pluie minimale est de 422,1mm recueillie en 1997 (Tableau 3) : ce qui met en évidence la variabilité accentuée que connait le climat tropical sec.
Nous allons analyser la répartition temporelle de la pluviométrie pour comprendre les rythmes, les régimes et leurs implications sur l’évolution du paludisme.
Tableau 3 : Statistiques pluviométriques principales de 1991-2020 de la ville
de N’Djaména
Maximum | Minimum | Moyenne | Ecart-type | |
Pluviométrie | 1217,80 | 422,10 | 603,26 | 147,196 |
Source : Brahim B. A, 2021
Rythmes et régimes pluviométriques de la ville de N’Djaména
Régimes pluviométriques intra annuelle
Le régime pluviométrique annuel se caractérise par son allure unimodal avec le sommet centré autour des mois de juillet et aout. Globalement, les pluies mensuelles sont faibles. Le pic n’excède pas 200mm (cf. fig. 7).
La pluie commence à partir du mois d’avril avec ±30mm, elle augmente en pente douce jusqu’à 50mm en Juin avant de faire un bond en juillet (≈180mm) pour atteindre le pic en Aout, avec plus de 200mm. Puis Les pluies chutent brutalement pour atteindre 100mm en septembre et se terminer avec moins de 25mm en octobre. On n’enregistre pas de pluies en novembre, décembre, janvier, février et mars. La rupture est nette entre la période pluvieuse et la période sèche. C’est l’une des caractéristiques du climat tropical sec27.
27 M. KEMBE (2015), « Climat et ressources en eau dans le bassin sud de la République Centrafricaine » (thèse). Géographie-hydroclimatologie, Université de Bangui. p261
Pour affiner notre étude, nous allons comparer le régime moyen de 1991- 2020 avec 1991, 1995, 1999 ET 2003.
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Analyse comparative de la pluviométrie
Fig 7: Pluviométrie moyenne mensuelle à N’Djaména de 1991 à 2020
250
200
Pluviométrie en mm
150
100
50
0
Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre
Fig. 8 : Moyennes mensuelles de la pluviométrie 1991 Fig. 9 : Moyennes mensuelles de la pluviométrie 1995
300
180
250
150
200
Pluviométrie en mm
120
Pluvimétrie en mm
150
90
100 60
50 30
0 0
Pluie Pluie
Fig. 10: Moyennes mensuelles de la pluviométrie 1999 Fig. 11: Moyennes mensuelles de la pluviométrie 2003
350 350
300 300
250 250
200 200
Pluviométrie en mm
Pluviométrie en mm
150 150
100 100
50 50
0 0
Précipitation Pluie
Source : Brahim B. A, 2021
1991, fig.8, présente une allure bimodale avec 2 sommets. Le premier positionné au mois de mai avec 80mm et le second positionné au mois de juillet avec plus de 280mm. Les 2 premiers pluvieux (avril et mai) sont suivis par un recul pluviométrique en juin. Après le pic de juillet, les pluies chutent brutalement en septembre (60mm). Au-delà de septembre, on enregistre plus de pluie. Le régime pluviométrique de 2010 est en déphasage avec le régime de la période 1991 à 2020.
L’année 1995, présente une allure monomodale avec un seul sommet centré pratiquement sur 3 mois consécutifs, juillet, août et septembre avec des valeurs inférieures à 150mm. Le mois de septembre connait encore une valeur proche de 120mm. La chute s’opère brutalement en octobre, inférieure à 30
mm. D’octobre à mars, on ne recueille aucun abat pluviométrique. Par contre, la figure 7 reçoit encore de la pluie au mois de novembre. Les figures 7 et 9 ont une allure monomodale mais se différencient sur la durée et la quantité de pluie.
L’année 1999 (fig. 10), présente une allure monomodale avec une forme de cloche asymétrique où les pluies commencent en juin (˂20mm) au lieu d’avril comme pour les autres années. C’est une forme atypique aux autres années étudiées. Le pic se situe en juillet avec une valeur supérieure à 300mm, ce qui est inhabituelle. Les pluies commencent à décroitre en pente presque douce en août avec une valeur proche de 200mm, 90mm en septembre, 43mm en octobre et 28mm en novembre. L’année 1999 est en déphasage complet avec les autres années étudiées.
L’année 2003, (fig. 11), présente une allure bimodale avec les pluies qui commencent en mai avec une valeur directement supérieure à 100mm, ce qui se différencie des autres années étudiées. Le mois de mai est suivi d’un recul pluviométrique en juin où les pluies baissent de moitié (49mm). Les pluies recommencent à monter en juillet (122mm) pour atteindre le pic pluviométrique en août (287mm). De 287mm en août, les pluies chutent brutalement à 74mm en septembre et 28 mm en octobre. Les autres mois ne récoltent aucun abat pluviométrique.
De manière globale, on peut retenir que sur l’ensemble des années analysées, on ne retrouve aucune similitude d’allure aussi bien avec la moyenne de 1991 à 2020 que chaque année considérée individuellement. Chaque année à une physionomie particulière qui est différente aussi bien de la moyenne de 1991 à 2020 que des années successives. Les différentes séquences pluviométriques
pluviométriques se caractérisent par leur brutalité ; en 1999, les pluies mensuelles sont passées de 2à mm en juin à plus de 300mm en juillet. Les 80% du cumul pluviométrique annuel sont obtenus en 2 ou trois mois de l’année. Le cumul annuel est déjà faible et ces pluies sont réparties sur une courte période. Cette disposition est une des caractéristiques majeures des climats situés à la lisière du climat sahélien. Elle marque la fragilité de ces climats car il suffit d’un léger dérèglement pour que le cumul pluviométrique annuel soit profondément perturbé et que la vie en société le soit aussi.
Questions Fréquemment Posées
Quel est l’impact du climat sur le paludisme à N’Djamena ?
Les résultats montrent que le climat n’explique que 52% de l’incidence du paludisme, les autres facteurs étant socio-économiques et environnementaux.
Quels paramètres climatiques sont déterminants pour le paludisme à N’Djamena ?
L’accent sera mis sur l’analyse de la température, de la pluviométrie et de l’humidité, qui paraissent déterminants dans la dynamique de l’infection palustre.
Comment se caractérise la pluviométrie à N’Djamena ?
La pluviométrie moyenne tourne autour de 600mm, avec des écarts interannuels importants, allant de 1217,8mm en 2020 à 422,1mm en 1997.