L’analyse des forces et faiblesses de la CEI révèle une gestion du matériel électoral entre 2010 et 2013 marquée par un organigramme fonctionnel, mais également par des lacunes dans le contrôle interne. Des recommandations sont proposées pour optimiser cette gestion et améliorer l’efficacité du système.
Analyse des résultats
Au terme de notre étude, l’analyse des résultats nous a permis d’identifier les forces et les faiblesses de la gestion du matériel par la CEI.
Par ailleurs, à travers cette analyse, nous évoquerons les conséquences associées aux faiblesses et nous formulerons des recommandations et définirons les perspectives de mise en œuvre en vue de l’amélioration de la gestion du matériel électoral.
Forces
La seule force identifiée est l’existence d’un organigramme fonctionnel. L’organigramme est la représentation schématique des liens hiérarchiques et fonctionnels entre les différents postes de travail d’une entreprise.
L’organigramme de la CEI définit clairement les liens hiérarchiques entre le Président, le secrétaire général, en passant par les directeurs et responsables de services, jusqu’aux autres employés. L’avantage d’une telle répartition répond au désir de parer aux éventualités suivantes :
- la surcharge de commandement ;
- les conflits d’appartenance à tel ou tel service ;
- la dualité de commandement ou les conflits de compétence.
Faiblesses du système de gestion du matériel
Les faiblesses identifiées sont les conséquences de l’absence de contrôle interne plus précisément du manque de procédures.
Nous présentons dans le tableau n°15 suivant les faiblesses de contrôle interne de la CEI et les conséquences associées.
Tableau N° 15 : Les Faiblesses du contrôle interne de la CEI et les conséquences associées
Tableau N° 15 : Les Faiblesses du contrôle interne de la CEI et les conséquences associées | |
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Faiblesses | Conséquences |
L’inexistence de procédures (contrôle interne) |
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Les Faiblesses du contrôle interne de la CEI et les conséquences associées (suite)
Faiblesses | Conséquences |
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L’absence d’inventaires permanents |
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L’absence de comptabilité liée à la gestion du matériel et de fiche des immobilisations et des stocks. |
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Le défaut de séparation des fonctions de conditionnement, de livraison et de contrôle. |
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Les Faiblesses du contrôle interne de la CEI et les conséquences associées (fin)
Faiblesses | Conséquences |
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L’absence de centralisation des informations et d’enregistrement des mouvements de biens |
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L’absence d’identification du matériel |
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L’absence de formation et de sensibilisation |
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L’absence d’informatisation |
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L’absence de responsabilité dans la gestion du matériel électoral dans les CEL le jour du scrutin |
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L’absence d’outils de gestion du matériel dans les CEL le jour du scrutin |
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Recommandations aux faiblesses de contrôle interne
Dans cette partie, nous ferons des recommandations correctives des faiblesses de contrôle interne du processus de gestion du matériel de la CEI.
Adaptation des organes de la CEI à la gestion du patrimoine
Dans l’exécution de sa mission, la CEI utilise un volume important de matériels pour chaque cycle électoral (annexe II). L’acquisition du matériel, comme nous l’avons dit plus haut, affecte considérablement la trésorerie de l’institution. Une bonne gestion permettra à la CEI de réduire ses charges. Pour ce faire, la CEI doit se doter d’une direction de gestion du patrimoine, vu le volume important et diversifié de ses composants et aussi le coût de renouvellement du matériel. Cette direction aura en charge la politique de gestion du patrimoine (exploitation et maintenance) qui passe de prime abord par la mise en place d’un contrôle interne.
Mise en place de procédures de gestion et élaboration d’un manuel de procédures
La procédure est la démarche à suivre pour l’exécution et la réalisation des différentes tâches dans une organisation. Elle est contenue dans un document appelé manuel de procédures, document qui décrit de manière concrète et la plus précise possible la procédure de gestion. En plus de son aspect descriptif, le manuel de procédures intègre le contrôle couvrant tous les espaces de risques potentiels et offre ainsi une sécurité dans le dispositif de contrôle interne de l’entreprise.
L’élaboration du draft du manuel de procédures pourra être confiée en premier lieu aux personnels de la CEI, dont certains d’entre eux disposent d’une formation en management des organisations, en audit et contrôle de gestion, avant de le faire adopter au cours d’un atelier supervisé par un cabinet ou un expert en la matière.
Par ailleurs, la CEI pourrait signer une convention de partenariats avec les écoles de commerce d’élites afin d’accueillir des stagiaires dont les thèmes de recherche porteront sur l’élaboration ou l’évaluation du contrôle interne.
Réalisation des inventaires permanents
L’inventaire est la quantification en nombre et en qualité des biens dont dispose l’institution. Elle doit se faire de manière permanente par direction et par CEL. Par conséquent, le suivi des inventaires et l’analyse des écarts entre les stocks théoriques et réels permettront d’expliquer et de corriger ces écarts observés, puis permettre à la CEI d’assurer la pérennité de ses biens.
Mise en place d’une comptabilité liée à la gestion du matériel et tenue de fiches des immobilisations et des stocks
La CEI doit mettre en place une comptabilité du matériel. Sur cette base, des bordereaux ou des fiches de mouvement permettront de faire l’inventaire théorique.
Cette mesure permet de suivre le matériel, de faire les rapprochements entre le stock théorique et le stock réel et d’en analyser les écarts.
Séparation des fonctions de conditionnement, de livraison et de contrôle dans la gestion du matériel
La séparation de ces trois fonctions obéit à l’un des principes fondamentaux de contrôle interne qui est la séparation des fonctions de conservation, de contrôle et d’enregistrement. Le fait que ces trois fonctions soient faites par la même personne favorise le détournement. Il est opportun de dissocier celui qui fait le conditionnement, de celui qui fait la livraison et les deux de celui en charge du contrôle ou du registre des mouvements des biens.
Par ailleurs, il est impérieux d’informer le destinataire final du type, de la qualité et de la quantité des biens à recevoir avant la livraison. Cette disposition permettra au destinataire final de faire un premier contrôle et surtout de réagir immédiatement en cas d’anomalie. Mieux ! La réception du matériel doit faire l’objet d’un procès-verbal de réception du destinataire final et du livreur.
Centralisation des informations et enregistrement des mouvements de biens
Même dans un contexte d’informatisations disparates dans les services et directions, la centralisation devra permettre de savoir en temps réel le volume et la qualité du matériel disponible. Comme nous le recommandons fortement, la centralisation des informations à travers la création d’une direction de gestion du patrimoine est d’une utilité capitale. Elle consistera en un enregistrement exhaustif des mouvements des biens au moyen des bons de livraison et de réception, des rapports de mutation, de destruction, de vol, de mise au rebut, de mise à la réforme. Faut-il ajouter tous les autres documents pouvant justifier l’état du bien, son lieu, son utilisateur et son exploitation.
Les utilisateurs des informations pourront bénéficier de l’exhaustivité et de la fiabilité des données, ainsi que de leurs actualisations.
Identification du matériel
Pour reconnaitre le matériel de fonctionnement parmi tant d’autres et éviter le vol, il est recommandé d’identifier tous les biens de la CEI. Un modèle d’identification est proposé au sous chapitre 2 du chapitre 2, relatif au cadre théorique ‘‘identification et codification du matériel de fonctionnement’’. De ce qui est du matériel électoral, l’identification peut se faire par le fournisseur en confectionnant un modèle distinct de celui du commerce ou en marquant au logo de la CEI.
Formation et sensibilisation
La commission électorale doit prévoir pendant ses séances de formation une sensibilisation et une formation à la gestion du matériel. Cette formation doit être adaptée à chaque niveau de responsabilité (le personnel de la CEI, les membres des commissions électorales locales et les agents des bureaux de votes). Cela montrerait l’importance que la direction nationale accorde à la sauvegarde du matériel. En conséquence, tous les acteurs accorderont du prix à la protection du matériel.
Informatisation de la gestion du matériel
La CEI doit se procurer d’un logiciel de gestion du patrimoine. Ce logiciel permettra d’avoir en temps réel des informations sur la situation du matériel et facilitera le suivi des biens.
Définition des responsabilités dans la gestion des kits électoraux dans les CEL le jour du scrutin
Il est utile de définir les tâches et responsabilités de chaque acteur du processus électoral le jour même du scrutin relativement à la gestion du matériel. Par exemple :
- Une commission de gestion du matériel devra être créée au sein des CEL.
Cette commission composée de trois (3) commissaires et de l’agent technique devra choisir un commissaire pour en être le président.
La commission aura en charge :
- de contrôler le matériel électoral avec chaque président de BV et de contresigner une décharge avec eux avant qu’ils ne se rendent à leur lieu d’affectation ;
- de déterminer l’emplacement (lieu d’entreposage) du matériel à réceptionner sur le site de compilation (de préférence une salle) ;
- de réceptionner et de contrôler le matériel restitué par chaque président de BV et de contresigner une décharge avec celui-ci à la restitution du matériel au lieu de compilation des résultats ;
- de faire l’inventaire théorique (sur la base des décharges) et physique (compter chaque élément) du matériel électoral ;
- de faire un rapport d’inventaire contresigné par tous les membres de la commission.
- d’évaluer les risques de pertes (destruction, vol) liés au convoyage et au stockage du lieu de dépouillement à la CEL et en prendre les mesures pour y palier ;
- de convoyer et stocker le matériel électoral dans la CEL.
Le président de bureau de vote :
Avant de se rendre à son lieu d’affectation, il réceptionne le matériel et le contrôle avec un membre de la commission locale, puis contresigne une décharge avec lui. Lorsqu’il prend possession du matériel, il en devient entièrement responsable jusqu’à la restitution de celui-ci au lieu de compilation des résultats électoraux.
A la restitution du matériel, le président de bureau de vote valide la liste du matériel retourné avec un membre de la commission et contresigne une décharge avec lui.
- L’agent technique
A la réception du matériel, l’agent technique :
- produit un rapport sur la gestion du matériel pendant le processus électoral ;
- sécurise le matériel dans la CEL.
Utilisation des outils de gestion du matériel dans les CEL le jour du scrutin
Les outils de gestion tels que les bons de réception et de livraison, les décharges, les rapports d’inventaire doivent être utilisés pour marquer le passage du matériel d’un acteur électoral à un autre.
- Les décharges
Les décharges permettent de faire d’une part les inventaires théoriques et d’autre part la traçabilité qui situe les responsabilités. Le modèle proposé se trouve en annexe VI.
Ces décharges se présentent comme la mise côte à côte de deux bordereaux de livraison établis en quatre (4) exemplaires comme suit :
- les premiers (blancs) sont remis au président de bureau de vote au moment de la réception et de la restitution du matériel;
- les deuxièmes (oranges), sont conservés par les contrôleurs des présidents de bureau de vote au moment de la livraison aux présidents des BV et de la restitution ceux-ci aux contrôleurs des présidents des BV ;
- les troisièmes (verts) sont remis à l’agent technique pour les nécessités de la CEL ;
- les quatrièmes (bleus) restent dans la souche et sont transmis à la CER pour les besoins de la direction nationale.
- Le rapport d’inventaire
Le rapport d’inventaire se présente comme un procès-verbal où est marqué l’inventaire théorique et physique du matériel et l’explication d’un éventuel écart. Le modèle proposé se trouve en annexe VI.
Il est établi en trois (3) exemplaires comme suit :
- le premier (blanc) est remis au président de la commission ;
- le deuxième (orange), à l’agent technique pour la CEL ;
- le troisième (vert) reste dans la souche et transmis à la CER pour les besoins de la direction nationale.
CONCLUSION DE L’ANALYSE DIAGNOSTIQUE
Au terme de cette partie où nous avons pris connaissance du système de gestion du matériel de la commission électorale indépendante, d’une manière générale, nous avons pu constater après évaluation l’absence d’une procédure de gestion et de supports comptables, le manque de suivi et d’évaluation du matériel. Il faut également ajouter une absence de sensibilisation, de formation et de définitions des tâches et responsabilités dans les commissions électorales locales le jour des élections relativement à la gestion du matériel électoral.
En effet, l’absence de mesures de contrôle ne permet pas une prise de décision correcte et pourrait exposer le matériel à des vols et détournements. Pour palier cela, nous avons proposé une gestion dynamique du matériel basée sur la mise en place d’un contrôle interne formalisé par un manuel de procédure.
CONCLUSION GENERALE
La Commission Electorale Indépendante de Côte d’Ivoire (CEI) est une institution de l’Etat qui régule la vie politique de la nation. L’institution évolue dans un contexte difficile du fait des crises politiques et économiques dont souffre le pays depuis un certain nombre d’années. De ce fait pour financer son activité, en plus du financement apporté par l’Etat, elle a recours aux financements et aides extérieurs.
Comme partout ailleurs, les activités électorales utilisent un volume impressionnant de matériels qui impacte considérablement sa trésorerie. Pour maitriser son patrimoine, l’établissement s’est doté d’une Sous-direction des Moyens Généraux et d’une Sous-direction Logistique et Reprographie qui ont en charge la gestion et l’entretien du matériel. Malgré les efforts soutenus de ces dernières, le volume du matériel après chaque échéance électorale reste très faible.
Alors, nous nous sommes intéressés à cet état de fait à travers notre étude qui a consisté à faire l’Audit de la gestion du matériel électoral de 2010 à 2013 de la Commission Electorale Indépendante de Côte d’Ivoire.
Pour la réalisation de ce travail, nous sommes partis dans un premier temps, de la description du processus de gestion du matériel d’une manière générale. Nous avons à cet effet brièvement présenté le processus d’acquisition d’un bien, de son exploitation jusqu’à sa sortie.
Dans un second temps nous avons présenté le contrôle interne relatif au processus de gestion du matériel par utilisation de la méthode d’audit opérationnel.
Pour terminer, nous nous sommes servis de la démarche théorique d’audit opérationnel pour la réalisation de cette étude. Cette démarche a été retenue comme modèle d’analyse.
Du point de vue pratique, la structure d’accueil a été présentée, suivie de la méthodologie de collecte des données pour la réalisation de notre mission, le tout dans le premier chapitre.
Le deuxième chapitre a été consacré à la présentation et à l’analyse des résultats où nous avons pu constater le manque de contrôle interne et un laxisme dans la gestion du matériel. Nous avons terminé ce chapitre par des recommandations où l’accent a été mis sur la création d’une direction chargée du patrimoine qui aura en charge la mise en place d’un contrôle interne.
En somme une révolution culturelle doit être menée à l’intérieur de l’institution et la gestion du matériel doit prendre toute sa place dans l’organisation.