Les cadres théoriques de la vulnérabilité révèlent comment les familles de Kikula naviguent dans un environnement urbain précaire. Découvrez les concepts clés qui éclairent leur réalité et les actions des Églises de réveil, et posez-vous la question : comment ces dynamiques peuvent-elles transformer l’intervention sociale ?
CHAPITRE I LES CONCEPTS DE BASE, CONNEXE ET CADRES THEORIQUES
Ce premier chapitre pose les fondations conceptuelles et théoriques de notre étude sur la vulnérabilité des familles et les actions sociales des églises de réveil dans la commune de Kikula. Il s’agit de clarifier les notions clés mobilisées dans notre travail, afin de garantir une compréhension rigoureuse et partagée des phénomènes étudiés. Nous commencerons par définir les concepts fondamentaux tels que la vulnérabilité, la famille, l’église et l’action sociale, en les situant dans leur contexte sociologique.
Ensuite, nous explorerons les cadres théoriques qui éclairent notre problématique, en mobilisant les apports de penseurs comme Émile Durkheim, Max Weber, Pierre Bourdieu, Robert Castel et Loïc Wacquant.
Ce chapitre vise à articuler les dimensions conceptuelles et théoriques de notre sujet, en montrant comment la vulnérabilité familiale peut être analysée à travers des grilles de lecture sociologiques, et comment les églises de réveil peuvent être envisagées comme des institutions sociales porteuses de sens et d’action. La complexité des phénomènes sociaux amène les sciences sociales en général et la sociologie en particulier à utiliser un nombre considérable de concepts que P. Rongere1 définit comme une représentation mentale, générale et arbitraire des objets étudiés.
A force d’être utilisé, la plupart des concepts deviennent flous et ambigus. Aussi leur définition devient-elle impérative lorsqu’on s’engage dans une recherche car, comme le note R.K MERTON, une recherche consciente de ses besoins ne peut passer outre à la nécessité de clarifier ses concepts. Car une exigence essentielle de la recherche est que les concepts soient définis avec une clarté suffisante pour lui permettre de progresser.
SECTION 1:
LES CONCEPTS FONDAMENTAUX
LA VULNERABILITE
La vulnérabilité est un concept complexe et multifacette qui se réfère à l’état d’être exposé ou susceptible d’être blessé, affecté ou endommagé. La vulnérabilité est appréhendée comme un état de fragilité et de susceptibilité accrue aux chocs, aux stress et aux difficultés de la vie quotidienne. Elle ne se limite pas à une simple absence de ressources matérielles, mais englobe une complexité de facteurs sociaux, économiques, politiques et culturels qui interagissent pour rendre certains individus ou groupes plus exposés et moins capables de faire face aux aléas.17
La vulnérabilité est rarement un état statique ou uniforme. Elle est contextuelle1, se manifestant différemment selon les lieux, les époques et les groupes sociaux. Ce qui rend une famille vulnérable à Kikula peut différer significativement des facteurs de vulnérabilité observés dans d’autres contextes urbains ou ruraux.
De plus, elle est dynamique2, évoluant au cours du temps en fonction des trajectoires individuelles et des changements sociaux plus larges. Un événement ponctuel (perte d’emploi, maladie) peut précipiter une famille dans une situation de vulnérabilité, tandis que des politiques sociales ou des réseaux de soutien peuvent atténuer cette vulnérabilité.
DIMENSIONS DE LA VULNERABILITE
La vulnérabilité ne se limite pas à un seul aspect ; elle se décline en plusieurs dimensions qui interagissent entre elles. Pour une analyse complète, il est crucial d’examiner les dimensions multiples de la vulnérabilité : sociale, économique, environnementale et institutionnelle. Chaque dimension de la vulnérabilité apporte un éclairage différent sur les facteurs qui rendent un individu ou une communauté plus fragile face aux menaces :
- La dimension économique :
Elle renvoie au manque de ressources financières, à l’insécurité de l’emploi, à la dépendance économique et à l’absence de biens matériels.
Une famille sans revenus stables ou avec des revenus insuffisants pour couvrir ses besoins essentiels est intrinsèquement plus vulnérable3.
- La dimension sociale :
Elle concerne la faiblesse des réseaux sociaux, l’isolement, le manque de soutien familial ou communautaire, et l’exclusion sociale. Un capital social limité peut rendre les individus moins aptes à mobiliser des ressources en cas de besoin4.
- La dimension politique et institutionnelle :
Elle se rapporte à l’absence de droits, à la discrimination, au manque d’accès aux services publics (santé, éducation, justice) et à la marginalisation politique.
Des politiques inéquitables ou une gouvernance défaillante peuvent exacerber la vulnérabilité de certains groupes5.
- La dimension culturelle :
Elle intègre les normes, les valeurs et les pratiques culturelles qui peuvent soit renforcer la résilience, soit accroître la vulnérabilité.
Par exemple, des systèmes de parenté étendus peuvent offrir un soutien important, tandis que des normes de genre inégalitaires peuvent rendre les femmes plus vulnérables à la violence et à la pauvreté6.
- La dimension environnementale :
Dans des contextes comme Likasi, les facteurs environnementaux (pollution, accès à l’eau potable, catastrophes naturelles) peuvent également jouer un rôle crucial dans la vulnérabilité des familles7.
19 En étudiant la vulnérabilité des familles à Kikula, il est donc essentiel d’adopter une approche multidimensionnelle qui tient compte de l’interaction complexe de ces différents facteurs. Comprendre comment ces dimensions se combinent et se renforcent mutuellement permettra d’analyser plus finement les défis auxquels sont confrontées les familles et d’évaluer la pertinence des actions sociales entreprises par les églises de réveil.
Selon Robert Castel : la vulnérabilité se situe dans une zone intermédiaire entre l’intégration et la désaffiliation8. Les individus et les familles vulnérables sont caractérisés par une fragilisation du lien social (notamment l’emploi et les relations sociales) sans pour autant être complètement exclus ou désaffiliés. Cette situation les rend plus susceptibles de basculer dans la désaffiliation face aux aléas de la vie. L’analyse de Castel met en lumière l’importance des structures sociales et des politiques publiques dans la prévention de la vulnérabilité et le soutien aux populations qui y sont confrontées.
Pour Pierre Bourdieu : avec sa théorie des capitaux, offre une autre perspective éclairante. La vulnérabilité peut être comprise comme un déficit cumulatif de différentes formes de capital9 :
- Capital économique : Insuffisance de revenus, manque de patrimoine.
- Capital social : Faiblesse des réseaux de relations utiles, isolement social.
- Capital culturel :
Manque de diplômes, de compétences valorisées, de maîtrise des codes sociaux.
- Capital symbolique :
Dévalorisation sociale, stigmatisation. Selon Bourdieu, les individus et les familles qui cumulent ces déficits de capital sont plus vulnérables car ils disposent de moins de ressources pour faire face aux difficultés et pour se maintenir dans des positions sociales stables.
Le travail de Loïc Wacquant : Il montre comment les processus de ségrégation spatiale et de relégation socio-économique créent des zones de forte concentration de vulnérabilité10. Dans ces contextes, les habitants sont confrontés à un ensemble de désavantages cumulatifs (chômage, violence, manque d’accès aux services publics de qualité) qui les rendent particulièrement vulnérables aux chocs et aux crises.
Bien que notre étude se concentre sur une commune spécifique, les dynamiques de marginalisation urbaine peuvent être pertinentes pour comprendre certains aspects de la vulnérabilité à Kikula.20
En combinant ces perspectives sociologiques, on peut analyser la vulnérabilité des familles à Kikula comme une situation de fragilisation des liens sociaux (Castel), un déficit de différentes formes de capital (Bourdieu), potentiellement exacerbée par des dynamiques de marginalisation urbaine (Wacquant). Les actions sociales des églises de réveil pourraient alors être analysées sous l’angle de leur capacité à renforcer le capital social des familles, à atténuer les effets de la précarité économique et sociale, et potentiellement à agir comme des mécanismes de soutien face aux processus de désaffiliation.21
LA FAMILLE
La famille est une institution fondamentale qui a évolué au fil du temps et selon les cultures. Étymologiquement, le mot famille vient du latin familial qui signifie les gens de la même maison, maisonnée, domesticité, race, ligné, dérivée, lignée, dérivée de famille, serviteur, esclave. Les sociologues pensent que la famille constitue une unité sociale à la fois intégrative et interactive de l’invention et de la formation de la jeunesse, qui finalement fonctionne comme rapport social.22
Selon les sociologues Émile DURKHEIM et Talcott Parsons, ils affirment que le modèle familial dit nucléaire, c’est-à-dire celui du couple vivant avec ses enfants, correspondrait parfaitement aux sociétés modernes, urbanisées et industrialisées et en constituait même un des principaux facteurs d’intégration. Aujourd’hui, ce modèle a volé en éclats. Il n’existe plus de modèle unique de la famille.
La famille peut être monoparentale ou recomposée, constituée d’un couple mixte marié ou non marié ou encore homosexuel, de demi-frères et demi-sœurs de plusieurs lits, d’enfants adoptés ou fabriqués, dont la parenté biologique ne coïncide plus avec la parenté domestique. Même si toutes ces transformations sont intégrées par les individus et même accompagnées par les États providences, la famille dite traditionnelle reste la norme statistiquement parlant.
De toutes les façons, c’est dans la famille que l’enfant construit sa personnalité, c’est de la famille qu’il reçoit le nom qui lui donne une identité dans la société, le nom qui lui ouvre certaines routes.
Au sens large, la famille est un ensemble des personnes ayant un lien de parenté, d’alliance ou d’adoption avec quelqu’un. Au sens restreint et administratif, la famille est l’entité constituée par une personne ou un couple, de ses enfants vivant sous un même toit. Par extension, le terme famille est utilisé pour désigner toutes personnes vivantes sous la protection d’un chef. Au sens figuré, une famille est un groupe de personnes de choses ou d’espèces ayant des similitudes ou matières de croyances, d’idées, de passions, de techniques, de caractéristiques, etc.
FORMES DE FAMILLE
Définir la famille aujourd’hui, c’est reconnaître la diversité de ses formes et l’importance de son rôle social et affectif. Plus que jamais, le concept de famille s’est élargi pour inclure une multitude de structures, reflétant ainsi les changements sociétaux et culturels. La forme des familles est un concept clé en sociologie de la famille ! Il s’agit de la structure, de la composition et des caractéristiques des unités familiales. Les formes familiales ont considérablement évolué au fil du temps et varient selon les cultures et les contextes socio-économiques.
Famille Nucléaire (ou Conjugale) :
Composée d’un couple (marié ou en union libre) et de leurs enfants (biologiques ou adoptés) vivant sous le même toit17. Considérée comme la forme familiale traditionnelle dans de nombreuses sociétés occidentales au 20ème siècle, bien qu’elle soit aujourd’hui moins dominante.
Famille Monoparentale :
Composée d’un seul parent (mère ou père) et de ses enfants vivant sous le même toit18. Cette forme familiale est en augmentation dans de nombreux pays en raison des divorces, des séparations, des décès et des choix de ne pas se marier.
Famille Recomposée (ou Beau-famille) :
Formée par l’union d’un couple dont au moins l’un des partenaires a déjà eu des enfants d’une union précédente19. Peut inclure des enfants vivant à temps plein ou partiel au sein du nouveau foyer, ainsi que des beaux-parents et des demi-frères/sœurs.
Émile DURKHEIM et Talcott Parsons, modèle familial. Cité par SALADIN NGANDU, Résilience de la famille vulnérable face à l’action sociale de l’ONGD VIPATU à Panda, mémoire de licence en sociologie (UNILI), 2023-2024.
Weedon, C. The uses of poststructuralist theory for feminism. Feminist Studies, 14(1), 1988, pp. 33-50.
Adger, W. N. Vulnerability. Global Environmental Change, 16(3), 2006, pp. 268-281.
Famille Étendue :
Comprend, en plus du couple et de leurs enfants, d’autres parents vivant sous le même toit ou dans une proximité géographique étroite (grands-parents, oncles, tantes, cousins, etc.)20. Cette forme familiale est plus courante dans certaines cultures et peut offrir un soutien social et économique important.
Famille Homoparentale :
Composée d’un couple de personnes de même sexe et de leurs enfants (biologiques, adoptés ou issus d’une procréation médicalement assistée)21. La reconnaissance légale et sociale de ces familles est en progression dans de nombreux pays.
Famille sans enfant par choix :
Un couple qui choisit de ne pas avoir d’enfants22. Cette forme familiale est de plus en plus visible et acceptée dans les sociétés contemporaines.
Communautés intentionnelles :
Groupes de personnes non liées par le sang ou le mariage qui choisissent de vivre ensemble et de partager des ressources et des responsabilités parentales.25
Familles d’accueil :
Familles qui prennent temporairement en charge des enfants qui ne peuvent pas vivre avec leurs parents biologiques.26
Il est crucial d’analyser les formes familiales prédominantes dans la commune de Kikula. La vulnérabilité des familles peut varier considérablement en fonction de leur structure. Par exemple :
- Les familles monoparentales peuvent être plus exposées à la précarité économique en raison d’un seul revenu.
Les familles étendues peuvent bénéficier d’un réseau de soutien plus large mais peuvent également faire face à des défis de cohabitation et de partage des ressources.
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2 Définition donnée par l’article 62 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001. ↑
3 Auchan Les 4 Temps, La Défense. ↑
4 Cf. Annexe 1, p.96, lHistorique des Marques de distributeurs, par la Fédération des entreprises du Commerce et de la Distribution. ↑
5 Biographie extraite de distripédie, 20 Aout 2007. ↑
Questions Fréquemment Posées
Qu’est-ce que la vulnérabilité familiale selon l’article?
La vulnérabilité est un concept complexe et multifacette qui se réfère à l’état d’être exposé ou susceptible d’être blessé, affecté ou endommagé, englobant des facteurs sociaux, économiques, politiques et culturels.
Quelles sont les dimensions de la vulnérabilité mentionnées dans l’article?
Les dimensions de la vulnérabilité incluent la dimension économique, sociale, environnementale et institutionnelle, chacune apportant un éclairage différent sur les facteurs de fragilité.
Quel est le rôle des Églises de réveil dans la vulnérabilité des familles à Kikula?
Les Églises de réveil peuvent être envisagées comme des institutions sociales porteuses de sens et d’action, jouant un rôle dans l’atténuation de la vulnérabilité familiale.