Les applications pratiques des aménagements sont révélées à travers l’analyse des maraîchers au Tchad, soutenus par le PAM. Découvrez comment cette étude met en lumière la durabilité et la résilience face aux défis climatiques, et pourquoi l’appropriation locale est cruciale pour le succès des projets.
PROBLÉMATIQUE
En Afrique subsaharienne, la question d’appropriation des actions de développement par les populations locales a toujours demeuré problématique au fil du temps. Elle est sujette à des critiques et à des reformes, mais qui n’ont pas été suivies de changements significatifs sur le bien-être socio-économique des populations. Plusieurs travaux traitant d’appropriation de projets sont arrivés aux conclusions que la plupart des projets n’ont pas atteint leurs objectifs à cause de leur désappropriation par leurs destinataires. Les friches agricoles, les ouvrages délaissés, ou mieux les bricolages, témoignent du manque d’appropriation des interventions par les bénéficiaires.
Échecs des projets en Afrique
Les motifs utilisés pour justifier l’abandon puis l’échec des projets varient entre l’incompatibilité des méthodes d’interventions, l’inadaptation des projets aux réalités locales et aux attentes des populations, la précarité de facteurs de production et/ou le manque de techniques adéquates. De manière générale, le constat était que, une fois les investissements arrivés à terme et que le Partenaire Technique et Financier (PTF) se retire, les impacts ont moins de chance de perdurer, parce que la communauté bénéficiaire ne disposant pas assez de capacités techniques et organisationnelles pour sa pérennisation. Les équipements communautaires réalisés sont de moins en moins mis en valeurs, puis abandonnés, mettant ainsi fin au fonctionnement et à la durabilité des activités entreprises.
Au cours de la décennie 1990, on a assisté à une multiplication de travaux interpellant les partenaires au développement à prendre en compte la participation des bénéficiaires dans leurs outils d’intervention. Pour nombre d’acteurs, la participation permettrait aux bénéficiaires et acteurs locaux de capitaliser les compétences qui les rendront capables à assurer la durabilité des actions de développement.
OUEDRAOGO (1992, p.1), s’appuyant sur les cas des projets de développement dans le milieu rural sahélien, appelle à l’implication et à la responsabilisation des populations bénéficiaires. Selon lui, plusieurs des projets se caractérisent par leur fragilité ou par leur manque de viabilité. Il plaide pour que « la notion d’appropriation soit au cœur de toute problématique pour un développement où les gens resteraient ou redeviendraient « maîtres » de leur destin ».
ROOZE (1995, p.16), après des travaux d’évaluations5 de projets, objectait que : « dès 1980, il était clair que cette approche d’équipement rural était un échec dans 70% des projets. D’où, la proposition d’une nouvelle
5Éric ROOZE, 1995, Évaluation des techniques de lutte antiérosive développées par l’ACIF au Guéra. Étude conduite pour évaluer les techniques CES/DRS dans le Guéra pour la première fois.
stratégie de développement rural participatif. » Ce qui permettrait de relever le défi lié aux conditions socioéconomiques et à l’environnement rural.
Prise en compte de la participation des acteurs locaux
Cette remise en question des impacts des projets conduira à l’ajustement des outils d’intervention, privilégiant la participation des bénéficiaires. Ces outils prendront naissance d’abord dans le cadre macroéconomique. RAFFINOT (2009, p.2), mentionne que « c’est à la fin de la décennie 1990 (année 1999 précisément) que les Institutions de Brettons Wood (IBW) ont affirmé promouvoir désormais l’« ownership » des États en développement, affichant ainsi implicitement une volonté de rompre avec leur pratique antérieure.
[…] ; et que l’appropriation s’est progressivement imposée comme la clé de voûte de la nouvelle architecture de l’aide. » Il ajoute que, « bien que conçue dans un cadre macroéconomique, l’appropriation, ou « ownership », « initialement véhiculé par les IBW, s’est étendue à l’ensemble des organismes publics d’aide au développement.
» Comme le remarque ROY (2006, p.8), « les enjeux de participation et d’appropriation des projets en vue de ‟ la prise en main du développement par les populations locales” deviennent des piliers des stratégies de développement et de lutte contre la pauvreté. » En 2001, le PAM a élaboré un guide intitulé
‟Techniques et outils participatifs’’, dans lequel sont consignées des approches participatives pour travailler en partenariat avec les gouvernements, les organisations non gouvernementales et les populations locales.
Paradoxe autour de la participation
Malgré l’expansion des outils participatifs de mise en œuvre des projets et des programmes de développements, des milliers de personnes, en Afrique, sombrent encore dans la pauvreté, et, de partout, les voix se multiplient, cette fois-ci, pour évoquer l’inefficacité des outils participatifs ou leur inadéquation par rapport aux spécificités locales. Concernant cette inefficacité, CLAVREUL (2005, p.7) estime qu’en Afrique subsaharienne, notamment, de nombreuses organisations apportent leurs appuis au développement des communautés, mais les résultats durables ne sont pas toujours au rendez-vous, parce que ces projets
s’inscrivent peu dans les contextes socio-économiques et culturels locaux et même environnementaux. BOSSOU (2017, p.16) le rejoint dans cette remarque et dira que l’appropriation des résultats ou extrants reste encore un débat presque intact dans les milieux ou instances de gestion des projets. Bien avant lui, MAGRIN (2013, p.2) évoquait « Combien les limites de ces grands projets sont connues depuis longtemps, et que 30 ans n’y ont pas changé grand‐chose malgré les ajustements des modes développementalistes.
»