Rôle des juges non professionnels dans la commission d’indemnisation

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🏫 Université de Ngaoundéré - Faculté des sciences juridiques et politiques - département de droit privé
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - Recherche - 2014 - 2015
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BAMBE DJORBELE
BAMBE DJORBELE

Les juges non professionnels en commission jouent un rôle essentiel dans l’évaluation des demandes d’indemnisation des victimes d’erreurs judiciaires. Cet article clarifie leur statut et leur impact sur la qualification de la commission en tant que juridiction civile spécialisée.


Des juges non professionnels au sein de la commission

  1. Un juge non professionnel est un juge qui exerce une fonction autre que judiciaire et qui est appelé à exercer pendant un certain temps cette fonction1.

Autrement dit, un juge non professionnel n’est pas un magistrat au sens exact du terme2. Celui-ci a été défini comme un juge qui n‘est pas visé par le statut de la magistrature3. Il peut s’agir d’un fonctionnaire quelconque de l’État, d’une autorité traditionnelle ou d’un simple citoyen.

La notion de juge non professionnel n’est pas très connue de l’ordre juridique camerounais. C’est plutôt le terme « assesseur » qui est plus usité4 et renvoie à la même réalité même si la notion d’assesseur est plus large que celle de juge non professionnel5.

L’assesseur est alors le juge (professionnel ou non) siégeant à côté du président d’une juridiction collégiale, avec faculté pendant l’audience, d’inviter les parties à fournir les éclaircissements nécessaires et mission de délibérer, à voix égale, avec les autres membres de la formation de jugement6.

  1. En plus des magistrats évoqués plus haut, la commission comprend plusieurs autres personnes issues de diverses professions en fonction de l’autorité contre qui est dirigée la demande sur laquelle doit statuer celle-ci.

Lorsqu’elle est appelée à statuer sur une demande dirigée contre un magistrat, elle comprend en outre un représentant de l’autorité en charge du contrôle supérieur de l’État ; un représentant de l’administration en charge de la fonction publique ; un représentant de l’administration en charge des finances publiques ; un député désigné par le bureau de l’Assemblée Nationale ; le bâtonnier de l’ordre des avocats.

Par ailleurs, lorsque c’est sur une demande dirigée contre un officier de police judiciaire qu’elle doit statuer, le nombre de son collège est augmenté de deux personnalités représentantes des administrations en charge de la police judiciaire (Sûreté Nationale et Gendarmerie Nationale) à raison d’un représentant par administration.

  1. Ces différentes personnalités, parce qu’elles sont appelées à œuvrer aux côtés des magistrats comme juges ne peuvent être qualifiées, conformément au droit positif camerounais, que d’assesseurs7 qui ne sont pas moins des juges.

D’ailleurs, les assesseurs ne sont pas des personnages étrangers dans la composition des juridictions camerounaises8. Il en est d’abord ainsi parce que la qualification d’assesseurs ne se comprend, en droit écrit, que par rapport à un ou plusieurs magistrats-juges avec qui ils forment la collégialité.

Ensuite, on ne peut avoir d’assesseurs que dans une juridiction collégiale. Enfin, le silence de la loi sur la façon dont ceux-ci doivent s’appeler ne peut amener qu’à une telle conclusion. Une question peut être posée : d’où les membres non magistrats tirent-ils leur qualité de juges ?

  1. On peut dire avec un auteur9 que c’est parce qu’ils sont dans une collégialité constituée en vue de l’accomplissement d’une même mission10, qu’il ne peut y avoir une différence entre les membres qui la composent car, « l’égalité des membres d’un collège est un des éléments essentiels de la collégialité ».

Par ailleurs, il a été reconnu depuis longtemps que le statut ne fait pas le juge et que n’importe qui peut avoir la qualité de juge11. La diversité de leurs fonctions12 ne saurait donc faire obstacle à leur qualité de juge d’autant plus qu’ils ont tous une voix délibérative13.

Il en est évidemment ainsi parce que, comme l’a si bien expliqué un auteur14, « dans les audiences collégiales où ils siégeront, les magistrats non professionnels auront voix délibérative et ils participent à la rédaction des décisions juridictionnelles ». La particularité des juges non professionnels de la commission est qu’ils sont plus nombreux dans la collégialité.

  1. Les critères contenus dans la composition de la commission pouvant amener à croire qu’on est en présence d’une juridiction sont donc clairs. Celle-ci est composée des personnes qui peuvent tous, sans exceptions, avoir la qualité de juges. Ces signes forts sont en outre renforcés par des critères juridictionnels décelables dans la notion même de la collégialité de cette institution.

________________________

1 Pour plus de précision sur cette notion, V. NIVOSE (L.-M.) (S/D), Le juge non professionnel, réflexion sur la fonction de juger, Université Panthéon-Assas Paris II, 2011-2012.

2 V. GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (S/D), Lexique des termes juridiques, op. cit., p. 445.

3 BONNEMAISON (J.-L.), La responsabilité juridictionnelle, op. cit., p. 22, n° 21.

4 V. par exemple le décret n°69-DF-544 du 19 décembre 1969 fixant l’organisation judiciaire et la procédure devant les juridictions traditionnelles du Cameroun Oriental tel que modifié par le décret n°71/DF/607 du 03 décembre 1971 qui dispose en son article 7 alinéa 1er que « le tribunal de premier degré se compose d’un président et de deux assesseurs ayant voix délibérative » et en son article 8 alinéa 1er que « le tribunal coutumier se compose d’un président et de deux assesseurs ayant voix délibérative ». V. également la loi n°92-007 du 14 août 1992 portant code du travail camerounais qui dispose en son article 133 (1) que « les tribunaux statuant en matière sociale se composent : d’un magistrat président ; d’un assesseur employeur et d’un assesseur travailleur… ».

5 Tout juge non professionnel peut être un assesseur alors qu’un assesseur peut être un juge professionnel. V. par exemple l’article 4 (3) de la loi n°2008/015 du 29 décembre 2008 portant organisation judiciaire militaire et fixant des règles de procédure applicables devant les tribunaux militaires qui dispose : « les assesseurs titulaires et les assesseurs suppléants sont, soit des magistrats militaires, soit des magistrats civils, soit des officiers des forces de défense. ».

6 CORNU (G.) (S/D), Vocabulaire juridique, op. cit., p. 90.

7 Il faut remarquer que dans l’organisation juridictionnelle camerounaise, dans toutes les juridictions de droit écrit qui ont un caractère collégial et qui comporte des assesseurs, la présidence est toujours assurée par un magistrat du siège et les assesseurs ne sont que des membres. Cette précision vaut la peine d’autant plus que devant les juridictions de droit traditionnel, il n’en est pas toujours ainsi. Par exemple, le tribunal coutumier ne comporte généralement pas de magistrat. Cf. Art. 8 du décret n°69- DF-544 du 19 décembre 1969 fixant l’organisation judiciaire et la procédure devant les juridictions traditionnelles du Cameroun Oriental tel que modifié par le décret n°71/DF/607 du 03 décembre 1971.

8 Aussi bien les juridictions de droit écrit que celles de droit traditionnel en comportent.

9 COHENDET (M.-A.), « La collégialité gouvernementale », in J.-J. MENURET et C. REIPLINGER (S/D), La collégialité, valeurs et significations en droit public, Bruxelles, Bruylant, 2012, cité par CERDA-GUZMAN (C.), « Principe de collégialité et pouvoir exécutif : la collégialité de l’exécutif est-elle une chimère ? », op. cit., p. 5.

10 La mission de la collégialité de la commission est ici de rendre justice aux victimes d’erreurs judiciaires.

11 [Note manquante dans l’original].

12 [Note manquante dans l’original].

13 [Note manquante dans l’original].

14 [Note manquante dans l’original].

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