Le regroupement du secteur automobile français
5 Regroupement du secteur automobile – l’union fait la force
Bien que bon nombre d’analystes de l’industrie automobile considèrent l’accélération du développement des alliances et accords depuis le dernier quart du XXe siècle comme une tendance, simple phénomène de mode.
Le « Regroupement » des divers acteurs de l’industrie automobile semble pourtant bien constitué. Il est aujourd’hui l’un des facteurs majeurs de la nouvelle donne de la concurrence du secteur automobile mondial.
Cet essor du « phénomène » de regroupement s’explique principalement par trois facteurs :
Les économies d’échelle
La mondialisation de l’industrie automobile stimule sans cesse les constructeurs à réduire leurs coûts pour accroître leur compétitivité. Le « Regroupement » permet de répartir les coûts de production, de développement, de distribution entre les différents acteurs. C’est en partie ce facteur qui explique l’apparition d’accord portant sur l’échange et le co-développement de nouveaux véhicules ou d’organes mécaniques.
Citons en exemple les accords de partage de plates-formes entre Ford et Mazda, Nissan et Renault et la gestion commune de divers services entre GM et Fiat. En ce qui concerne le partage du réseau de distribution entre constructeurs regroupés, l’économie d’échelle s’explique par leur complémentarité géographique de la distribution.
Le partage des risques
La pénétration de nouveaux marchés ou de nouveaux segments est souvent synonyme de risques pour les constructeurs. Les constructeurs s’associent donc afin de partager les risques tant économiques que technologiques, tout en réalisant des économies d’échelle sur les coûts irrécouvrables.
Dans le cadre de l’incertitude technologique, les constructeurs ont tendance à s’associer afin d’organiser, orienter, standardiser et normaliser auprès des divers acteurs de l’industrie automobile les nouvelles technologies. Citons en exemple les accords conclus entre les divers constructeurs du même pôle géographique tels que le MITI au Japon, l’USCAR aux Etats-Unis et EUREKA ou PROMETHEUS en Europe.
Les savoir-faire supplétifs
Les constructeurs se recentrant sur leur cœur d’activité, la conception et l’assemblage de véhicules, les accords entre constructeurs et équipementiers permettent une complémentarité de compétences basée soit sur la relation durable soit sur le transfert de savoir-faire.
Citons en exemple la complémentarité géographique de la fusion Daimler – Chrysler ou la complémentarité productive de l’alliance Renault- Nissan. Pour illustrer les accords favorisant le transfert de savoir – faire, citons les accords entre Maruti et Suzuki, Suzuki et Nissan, GM et Toyota, Ford et Mazda ou encore Rover et Mazda.
Nous nous proposons dans ce chapitre d’étudier et d’illustrer les divers aspects du regroupement entre acteurs de l’industrie automobile. Nous verrons que la notion de regroupement est très large puisqu’elle comprend aussi bien les diverses formes de rachat, de rapprochement que de coopération.
5.1 Les logiques de rachats
Les logiques de rachat s’inscrivent directement dans les stratégies d’économie d’échelle. On estime à 20 % la surcapacité de production des constructeurs. Cette surcapacité entraîne un amortissement des investissements réalisés dans ces unités de production plus long. La maîtrise des coûts et l’optimisation des capacités de production qui en découlent sont donc impératifs pour maintenir la compétitivité et l’avantage technologique d’un constructeur.
La concentration semble répondre à cette attente. En effet, elle permet la suppression de postes tel que le centre de recherche et de développement, doublés par le regroupement et permettant ainsi d’économiser de l’argent en accroissant la compétitivité.
De plus, les usines de production étant mises en commun après concentration, les constructeurs réalisent une économie de gamme et les objectifs de rentabilité des usines d’assemblage sont plus facilement atteints. Enfin, la mise en commun de base technique à plusieurs véhicules permet encore une fois de fortes économies d’échelle.
La concentration de Ford et Mazda a permis à ces deux constructeurs de développer des véhicules autour de plates-formes techniques communes. De plus, Ford commercialise aux Etats-Unis des modèles Mazda sous sa marque et Mazda produit des modèles Ford pour Ford.
En Europe, le groupe Volkswagen a très largement développé cette stratégie de développement commun notamment autour des modèles phares : l’Audi A4, La Skoda Octavia et la Volkswagen Passat, tous développés autour de plates-formes communes et sur la même base technique.
5.1.1 Les quatre types de rachat
Les rachats industriels
les rachats industriels permettent uniquement au constructeur d’envisager de fortes économies d’échelle de production et de recherche et développement. La stratégie de ce type de rachat est principalement l’accroissement de la puissance du constructeur vis- à-vis des autres constructeurs.
Les rachats technologiques
les rachats technologiques permettent l’accès aux constructeurs à des compétences complémentaires trop coûteuses à développer indépendamment. Citons en exemple le rachat de Lotus par Proton et le rachat de l’équipementier Cosworth Technologie par le groupe Volkswagen.
Les rachats d’image
les rachats d’image permettent d’améliorer l’image du constructeur achetant en s’appropriant une marque prestigieuse. Ainsi, Jaguar et Aston Martin furent rachetés par Ford, Bugatti et Lamborghini par le groupe Volkswagen.
Les rachats concurrentiels
les rachats concurrentiels permettent au constructeur d’augmenter ses parts de marché, sa valorisation financière et son statut. Ce type de rachat permet également de stabiliser la concurrence, entraînant le développement du groupe entier.
5.1.2 Des fusions et acquisitions
L’essor et l’accélération des rachats dans l’industrie automobile poussent les experts à estimer le nombre des constructeurs mondiaux à une douzaine d’ici 2010 au lieu d’une trentaine aujourd’hui.
D’après le président de Ford Monde, Alex Tratman, il n’y en aurait bientôt plus que 2 aux Etats- Unis, 2 en Europe et 2 au Japon d’ici dix à quinze ans.
La concentration de l’industrie automobile
États-Unis
Général Motors Corporation | Général Motors Corporation | Ford Motor Company |
Buick
Cadillac Oldsmobile Pontiac Chevrolet Vauxall Opel Holden Isuzu Suzuki |
Transplant Nummi
Géo Saturn Saab Fujy Heavy Subaru Fiat Alfa Romeo Lancia Innocenti |
Lincoln
Mercury Aston Martin Daimler Jaguar Transplant Auto Alliance Mazda Volvo Land Rover |
Europe
BMW Mini Triumph | VolkswagenAudi Seat Trabant Skoda
Lamborghini Bentley Bugatti Cosworth Technologie Rolls Royce |
Daimler Chrysler Benz Mercedes Mercedes Puch Maybach
Smart Jeep Dodge Eagle Plymouth Mitsubishi Motors Transplant Diamon Ned Car AMG Hyundai Kia Asia Motors |
Renault Alpine DaciaNissan Motors Infinity Samsung Motor | FiatLancia
Alfa Romeo Ferrari Maserati |
Peugeot SACitroën
Talbo |
Japon
Toyota | Honda |
Transplant Nummi
Lexus Daihatsu |
Acura |
Corée du Sud
Daewoo |
FSO
Ssangyong |
Source : « Une géographie de l’automobile » ARCHAMBEAU Olivier, éd. PUF, 2001