La situation socio-économique haïtienne

La situation socio-économique haïtienne, Environnement d’Haïti
Haïti : son environnement, sa croissance économique, sa dette extérieure – Deuxième partie

Chapitre III : Environnement socio-économique et international d’Haïti

Ce chapitre nous expose en premier lieu le profil de la République d’Haïti, (une présentation non exhaustive de sa situation économique et sociale) et en second lieu, nous présente certains partenariat et accords internationaux (indispensable à la compréhension de cette étude) signés par les différents gouvernements haïtiens.

3.1. La situation socio-économique haïtienne

La situation de pauvreté en Haïti est un phénomène prédominant depuis environ deux siècles en même temps, les inégalités se sont instituées dans le pays et leur persistance constitue un handicap majeur au changement.
Malgré les nombreuses injections de fonds internationaux, le pays reste aujourd‘hui encore marqué par la pauvreté et les inégalités.

3.1.1. Profil général du pays

Haïti occupe le tiers Ouest de l’ile d’Hispaniola, partagée avec la République Dominicaine. D’une superficie de 27 750 km2, il s’agit du troisième plus grand territoire de la Caraïbe. Haïti est divisé en dix départements géographiques (l’Ouest, le Sud, le Sud-Est, la Grand-Anse, les Nippes, le Nord, le Nord-Ouest, le Nord-Est, le Centre et l’Artibonite), 140 communes et 570 sections communales.
Port-au-Prince est la capitale et les langues officielles sont le créole et le français. Sur le plan politique, Haïti est une république démocratique appliquant le régime muni de trois (3) pouvoirs. La couverture forestière est de moins de 2% selon le PNUD et le FAO (elle était de 92% en 1492).
Son potentiel minier est constitué essentiellement d’or, d’argent et de cuivre et son potentiel non-métallique tout aussi important, est constitué de calcaire marbrier, de carbonate de calcium, et l’exploitation des minéraux non-métalliques représente la principale activité minière du pays.
Sa position stratégique au milieu de la mer des Caraïbes, à proximité des États-Unis, sa population active jeune, ainsi que son riche patrimoine culturel offrent un large éventail de possibilités économiques et géopolitiques. Malgré cela, aujourd’hui, Haïti reste le pays le plus pauvre de l’Amérique Latine et parmi les plus pauvres au monde.

3.1.2. Contexte démographique

Les données démographiques d’Haïti témoignent d’une forte croissance de la population. La population est passée de 3 millions d’habitants en 1950 à un peu plus de 10 millions d’habitants en 2015. Selon les projections démographiques, la population haïtienne atteindra plus de 13 millions en 2030 et probablement plus de 16 millions en 2050. L’aire métropolitaine de Port-au-Prince était estimée à 2,3 millions d’habitants en 2009, soit prêt de 25 % de la population totale du pays.
La migration interne est très importante, et le département de l’Ouest attire 90 % du total des migrants internes parce qu’il concentre l’essentiel des attributs économiques politiques et socio-culturels.
Tableau 3 : Population totale par sexe et population de 18 ans et plus estimés en 2015

MilieuDeux sexesMasculinFéminin18 ans et plus
République d’Haïti10 911 8195 408 4065 503 3546 296 351
VilleUrbain5 247 7042 546 0552 701 6493 020 481
QuartierUrbain419 982209 302210 680228 781
Section ruralesRural5 244 1332 653 1082 591 0253 047 089

Source : IHSI
La population haïtienne, comme celle d’autres pays en développement, est très jeune. Chaque année, plus de 220 000 jeunes viennent s’ajouter à la population en âge de travailler exerçant ainsi une très forte pression sur les services d’éducation pour ceux qui poursuivent leurs études, ou sur le marché du travail pour ceux qui ont ou recherchent une activité économique.
La part des 60 ans et plus ne dépasse pas 7% du total de la population.
En 2013, 41 % de la population ont moins de 18 ans. La proportion des jeunes (15-24 ans) reste également significative (14 %), bien qu’ayant baissé depuis 1990 (18 %). Bien que le taux d’accroissement démographique soit en baisse, la population continuera de s’accroître significativement à moyen terme, notamment car la forte proportion de jeunes arrive à l’étape procréative.
Cette tendance démographique nécessite un accompagnement en politiques publiques pour investir dans la jeunesse, notamment à travers un accès équitable à l’éducation, à la formation professionnelle et à l’emploi.
La situation socio-économique haïtienne

3.1.3. Marché du travail

En 2012, sur l’ensemble du pays, on compte 8 206 000 de personnes en âge de travailler (10 ans et plus) : 1 896 400 dans l’Aire métropolitaine de Port‐au‐Prince, 2 175 300 dans les autres zones urbaines et 4 134 300 en zone rurale. En moyenne, près de six personnes sur dix (56,9%) sont actives (ayant un emploi ou étant chômeur). Si l’on se restreint à la population âgée de 15 ans et plus 6 985 200 personnes sont en âge de travailler.
C’est en milieu rural que les personnes de 10 ans et plus sont les plus engagées sur le marché du travail, avec un taux d’activité de 63%, soit un niveau de plus de dix points supérieur à celui observé dans les zones urbaines.
Le taux de chômage reste très élevé environ 60% de la population active selon les estimations de l’IHSI en 2012, parmi les 4 008 700 personnes exerçant un emploi, l’immense majorité est soit dans l’agriculture (47%) ou dans le secteur informel non‐agricole (45,1%). Les secteurs privé formel (4,5%) et public (3,4%) n’occupent qu’une place très résiduelle (à peine 8% des emplois à eux deux).
C’est évidemment dans les zones rurales que l’agriculture est dominante avec plus des deux tiers des emplois (70,9%). Les petits agriculteurs sont parmi les plus pauvres en raison de la taille de leur exploitation, leur faible niveau de production et de leur méconnaissance des nouvelles techniques de production et de leur très faible accès au crédit, aux actifs et aux intrants.
Haïti fait face au brain drain, autrement appelé fuite de cerveau. Suite à la faible offre d’emploi sur le marché, les haïtiens détenteurs de connaissances et de qualification ont tendance à émigrer en territoires étrangers. Selon le dernier recensement aux Bahamas (juillet 2007), la communauté haïtienne représente plus de 25% de sa population avec plus de 80 000 immigrants.
On constate aussi un flux d’immigrants haïtiens en Amérique latine, au Canada, en France et les Départements d’Outre-Mer sont également un berceau, tous, accueillant un nombre approximatif de 200 000 mais la destination la plus ciblée reste les Etats-Unis puisque ce pays héberge environ un million d’haïtiens.

3.1.4. Exclusion financière

L‘exclusion financière est la situation dans laquelle se trouvent les pauvres et les agents économiques n‘ayant pas accès aux services financiers traditionnels, à savoir l‘accès au crédit, l‘assurance, les transferts et les produits d‘épargne. L‘exclusion financière apparaît alors un élément crucial dans la perpétuation des inégalités économiques.
De ce fait, l‘exclusion financière entretient le cercle de la pauvreté (Kiiru, 2007). En Haïti, l‘exclusion financière semble avoir toujours été toujours très forte. Depuis longtemps, les quelques banques qui opéraient dans le pays n‘étaient présentes que dans les grandes et moyennes villes.
Les petites villes et les campagnes n‘étaient tout simplement pas desservies. Il faut plusieurs de dizaines de kilomètres de route pour un paysan d‘accéder à la banque la plus proche. Le paysan ne sachant souvent ni lire ni écrire, n‘est pas considéré comme un client potentiel des banques haïtiennes.
Celles-ci réclament des garanties hors de la portée des paysans souvent dépourvus de titre de propriété pour leurs lopins de terres et/ou possédant une habitation dont la valeur marchande est quasiment nulle.
De plus, et ceci se pratique jusqu‘à présent, le paysan ne sachant s‘exprimer en français ne peut communiquer avec le personnel bancaire obligé par la hiérarchie de bannir le créole dans le vocabulaire bancaire. Dans un pays comme Haïti, où l‘Etat n‘assure pas le minimum vital à la population, la satisfaction des besoins des individus dépend de l‘investissement privé et individuel.
Dans cette perspective, la satisfaction de la demande financière privée est cruciale. La gravité de cette situation nous amène à l‘inscrire dans le cadre de l‘exclusion financière.

3.1.5. Indicateurs socio-économiques

En 2012, 24,7 % de la population haïtienne, soit 2,5 millions d’habitants, vit dans l’extrême pauvreté, avec moins de 1,25 dollar en parité du pouvoir d’achat (PPA) par jour. L’incidence de pauvreté modérée est de 58,6 %, soit 6,3 millions de personnes ne pouvant satisfaire leurs besoins de base.
Ces taux se basent sur un indicateur de bien-être calculé en utilisant la consommation des ménages.
La situation socio-économique haïtienne - Indicateurs socio-économiques
Selon les données de l’ECVMAS, la pauvreté apparait plus répandue et plus profonde en milieu rural. L’incidence de la pauvreté extrême est en effet de 37,8 % en milieu rural, contre 8,8 % en milieu urbain. Ceci s’explique notamment par le fait que le milieu rural accueille des activités à faible rendement et faibles revenus comme l’agriculture, principalement de subsistance, qui occupe 64 % des actifs ruraux. La vulnérabilité reste très élevée en Haïti.
Tableau 4 : Indice de perception de la corruption en Haïti (2000-2015)

Années2000-200320042005-20062007-200820092010201220132015
Indice de perception de la corruption102215181614221819

Sources : Base de données en ligne de l’Université de Sherbrooke
Pour le Doing Busness, Haïti est le plus mal classé dans la Caraïbe, 177ème sur 189 pays. Sur le plan touristique, selon le dernier classement mondial des compétiteurs des sites touristiques du Forum Economique Mondial, Haïti est 140e sur 140 pays. Le Forum Economique Mondiale (FEM) classe Haïti à la 116 place sur un total de 124 pays dans son rapport intitulé « The Global Energy Architecture Performance Index report 2014 ».
Ce rapport précise qu’Haïti est le seul pays de la région qui fait face à des défis d’accès à l’énergie aussi importante avec environ 30% ayant accès à l’électricité. Ces classements traduisent en clair qu’Haïti est très en retard dans son développement économique par rapport aux autres pays de la région. Haïti fait aussi partie du groupe des pays pauvres très endettés (PPTE).
On aurait tendance, vu de loin, à croire qu’il n’y a que des pauvres en Haïti. Quelle erreur ! D’un côté il y a une bourgeoisie qui vit dans le luxe et de l’autre des bidonvilles d’une misère record. Haïti compte parmi les pays les plus inégalitaires du continent américain. Le coefficient de Gini constitue un moyen de mesurer le niveau d’inégalité en termes de distribution des revenus.
L’indice d’Haïti est le plus élevé dans la région soit 61 depuis 2001. Il est permis d’avancer qu’en général et de façon proportionnelle, on observe moins d’inégalité dans les pays riches que dans les pays pauvres.
De plus, l’Indice de Développement Humain (IDH) un indicateur qui intègre des facteurs tant sociaux (espérance de vie, niveau de formation) qu’économique (revenu national brut per capita) a tendance à être plus élevé dans les pays riches que dans les pays pauvres. En 2013, Haïti est classée 168ème sur 187 pays et figure dans le lot de ceux qui ont un IDH faible. Haïti est à la fois le pays le plus pauvre et le plus inégalitaire du continent américain.
Tableau 5: IDH et quelques indicateurs socio-économiques (2013)

PaysClassementIDHEsperance de vie à la naissanceRNB per capita (Atlas/US courants)
République Dominicaine1020.70073.35 850
Jamaïque960.71575.45 200
Cuba440.81579.26 600
Haïti1680.47162.4810
Brésil790.74474.112 610
Panama650.76577.410 530

Source : Banque mondiale/ PNUD
La situation socio-économique haïtienne
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Ces taux sont basés sur la consommation par habitant et ont été calculés en utilisant les lignes Haïtiennes officielles de pauvreté modérée et extrême de 2012 de 82,2 HTG/jour/habitant (2,42 $ PPA de 2005) et 41,7 HTG/jour/habitant (1,23 $ PPA de 2005), respectivement.
Enquête sur les conditions de vie des ménages après le séisme
Créé et publié par la Transparency International, un indice proche de 100 signifie que le niveau de la corruption est faible, inversement un degré proche de 0 indique la corruption est forte et qu’elle limite la liberté des individus.
Haïti est classé en 3ème position des pays les plus corrompus du monde en 2003. Pour ralentir ce fléau, le gouvernement haïtien en place à l’époque achemina un document de ratification de la convention contre la corruption en juin 2004 devant l’OEA, et en septembre 2004 l’ULCC est officiellement créée avec pour objectif de réduire le niveau de corruption dans les administrations.
Base de données en ligne de l’Université de Sherbrooke disponible à cette adresse : http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMTendanceStatPays?langue=fr&codePays=HTI&codeStat=HFI.CORRUPTION&codeStat2=x
Le classement «Doing Business» créé en 2002 par le groupe de la banque mondiale classe 189 pays par rapport à leur facilité à faire des affaires.Les pays sont classés en fonction de la facilité d’y faire des affaires, de 1 à 189, la première place indiquant le plus haut niveau de facilité.

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