Cadre légal adéquat de protection de la biodiversité du lac

Du cadre légal et institutionnel adéquat de protection de la biodiversité du lac – Chapitre II :

Section 1. Stratégie pour un cadre légal adéquat

§1. Amélioration du cadre réglementaire pour le lac

A. Législation

La législation existante dans un certain nombre de domaines est clairement désuète, inadaptée, insuffisante ou néglige simplement de traiter les questions environnementales relatives au bassin du lac.
Il faut s’assurer que la nouvelle législation et les modifications portant sur les lois existantes soient cohérentes entre elles et en harmonie avec les stratégies et les politiques élaborées pour la gestion intégrée du lac, dans les quatre pays.
En particulier, il faudra veiller à harmoniser les normes et les procédures.

B. Réalisation et mise en application

On ne peut évaluer la suffisance des lois et des statuts, existants ou en projet, qu’en mesurant leur degré d’application dans un contexte social déterminé.
Un supplément d’information est indispensable pour pouvoir porter un jugement sur les compétences des respectives autorités à faire respecter la loi, sur les attitudes des tribunaux et sur les amendes ou les autres sanctions qu’ils déterminent en cas de transgression de la loi.
Ces données guideront à leur tour les objectifs de la politique dans la préparation de la nouvelle législation et des projets d’harmonisation des normes nationales.
L’application et le respect des lois pertinents dans la totalité des États riverains constituent en tant que tel un objectif de la politique. Une coopération interfrontalière sera nécessaire pour assurer l’application de la loi et ceci risque d’impliquer les quatre États dans de nouveaux projets législatifs nationaux.

C. Évaluations d’impact environnemental, consultation préalable, et processus de développement

Les procédures d’accords d’exploitation d’envergure nationale, y compris celles relatives à l’exploitation pétrolière dans le bassin du lac devront être revues et renforcées suivant les besoins.
Quoi qu’il en soit, il faudra que lesdites procédures incorporent des évaluations d’impact et l’examen des questions interfrontalières, et qu’elles stipulent, pour ce faire, la consultation préalable des autorités appropriées de l’État ou des États riverains susceptibles d’être affectés si le projet se réalise.

D. Mécanismes de coordination intersectorielle

Plusieurs organismes de coordination et de politique intersectorielle ont été identifiés dans les quatre pays. Un supplément de données est nécessaire pour évaluer leur efficacité et leur capacité d’extension à la fois verticale et horizontale.
La plupart des organismes identifiés s’en tiennent à un nombre limité de questions telles que l’environnement et ne couvrent pas la gamme des activités humaines qui affectent le lac, allant de la pollution industrielle et de l’exploitation pétrolière aux pêcheries et à la navigation.
Il faudra garantir la coordination intersectorielle à l’échelle nationale si l’on veut parvenir à une coordination intersectorielle internationale.

E. Participation du public au processus légal

Le degré selon lequel les ONG et les particuliers pourront obtenir des données et remettre en question les actions ou les inactions des autorités en matière de formulation et de mise en application des stratégies et des politique destinées à assurer la gestion intégrée du lac, risque d’être un facteur clé de la réussite des dites stratégies et politiques.
On a besoin de plus d’information dans ce domaine.

F. Établissement d’un cadre pour la gestion intégrée du Bassin du Lac

Pour une gestion intégrée du Bassin du lac Tanganyika, plusieurs propositions sont faites mais nous analyserons les plus pertinentes.

a. Implication réelle de tous les détenteurs d’enjeux

Si un nouveau système réglementaire a pour souci de représenter les intérêts du public qui en dépend et d’être reconnu par lui, il est essentiel qu’on donne la chance à tous ceux « intéressés » par la gestion du lac et de son bassin, de participer au modelage du plan stratégique et du régime réglementaire.
Se rangent sous cette appellation : les communautés locales, les autorités locales et régionales, les départements et ministères concernes du gouvernement central, les gouvernements nationaux et les organisations non-gouvernementales de diverses sortes.

b. Intégrations des pratiques rationnelles de gestion des ressources

On devrait tenter autant que possible d’intégrer les méthodes traditionnelles de gestion des ressources dans la structure d’ensemble de gestion.
Ceci, vu sous un angle régulateur offrirait de nombreux et d’importants avantages.

c. Identification des contraintes

Pour être pratique et efficace plutôt qu’utopique, le système réglementaire propose se donnera l’objectif d’identifier les contraintes de bonne heure et d’en tenir compte dans la formulation des recommandations.
Le manque de stabilité politique ; les différences linguistiques et culturelles ; les pénuries de personnel qualifié, de fonctionnaires, de capitaux et de matériel destinés à appliquer la loi et les complications émergeant de l’application de la loi par le système judiciaire sont des candidats réels ou potentiels.

d. Identification des priorités

Compte tenu de l’envergure de la gamme d’activités affectant le lac, il sera nécessaire de parvenir à un consensus sur les problèmes qu’il convient de confronter en priorité afin de pourvoir aux besoins des générations futures.
Les travaux des autres projets contribueront à établir les priorités.

e. Expérience acquise à partir d’autres accords régionaux de coopération

Les quatre pays riverains sont adhérents de plusieurs accords régionaux et d’organisations de coopération comme l’Accord du Zambèze, le CEPGL et le CIFA.
L’expérience acquise du fonctionnement de ces organisations par les quatre pays devrait complètement éclairer la formulation du système de gestion.

§2. Recommandations aux quatre pays riverains

Afin de relever les objectifs à atteindre dans le cadre de l’amélioration de la législation régulant la protection de la diversité biologique du lac Tanganyika, des recommandations sont faites à l’endroit des lacunes rencontrées au sein des législations des quatre pays riverains.
Pour ce faire, le plan d’action stratégique (PAS) de 1998 propose des actions à mener au niveau du cadre réglementaire suivant les priorités afin de lutter efficacement contre les différentes menaces au lac.

A. Lutte contre la pollution

Pour lutter contre les pollutions issue de la ville de Bujumbura (effluents industriels et domestiques, liquides et solides, dépôts sauvages, décharges de Buterere, pollution de la nappe, déversements directs dans le lac), le PAS propose la mise en place d’une réglementation sur les installations susceptibles de polluer (EIE préalables, cahier des charges techniques) ; une réglementation de la commercialisation de produits dangereux pour l’environnement (notamment les piles) ; élaboration des normes pour l’application des textes légaux relatifs aux eaux usées ; une mise en œuvre de Plans d’ Occupation des Sols dans le cadre de schémas d’aménagement ( y compris réglementation sur les sites de cimetières).
La présence de jacinthes d’eau à proximité du lac (risque d’introduction ou d’extension) nécessite une réglementation visant l’élimination de la jacinthe d’eau.
Mais également les engrais et pesticides des cultures industrielles proches du lac (coton, riz, palmier) nécessite une réglementation sur l’importation et la commercialisation des pesticides ; un contrôle de l’application des lois existantes, le contrôle des produits commercialisés et un suivi de la pollution et évaluation de l’impact.
La RDC, quant à elle, pour lutter contre la pollution par les sucreries de Kiliba devrait effectuer une mise à jour de la législation et suivre son contrôle.
S’agissant des pollutions portuaires (Kalemie, Kabimba, Kalunda, Moba), une mise à jour de la réglementation (système combiné d’écotaxes dissuadant les pollutions légales et amendes pénalisant les pollutions illicites) et un renforcement du contrôle devrait être établie.
Des propositions à l’endroit de la Tanzanie, et dans le but de lutter contre l’écoulement d’huiles des quais, sont faite à son égard comme vérifier et examiner les réglementations et les procédures recommandées, et examiner les raisons de la non application des lois.
Et pour le vidange des barges dans le lac, elle devra examiner le niveau d’applicabilité des réglementations concernant le lac Tanganyika et élaborer des procédures appropriées à l’évacuation des déchets.
Et la Zambie, dans l’évacuation des ordures et des déchets solides des bateaux, est recommandée à évaluer l’impact du problème et l’impact sur la biodiversité ; à élaborer des directives et procédures pour l’évacuation ; à réviser les réglementations ; et à vulgariser le programme de suivi environnemental.
Pour le dépôt d’ordures dans le lac et le bassin, y compris la cargaison avariée, elle devra appliquer les réglementations en vigueur.

B. Régulation de la pêche

Le Burundi, se trouve confronté à une pêche excessive en particulier le long du littoral mais aussi les pêcheurs ne respectent pas les périodes de pêche.
Dans le but, de palier à cette situation, il est recommandé au pays d’actualiser et promulguer le projet de loi sur la pêche, ainsi que ses arrêtés d’application ; traduire en kirundi les règlements aux pêcheurs qui n’ont été au banc de l’école et vulgariser la loi en application.
L’utilisation d’instruments inappropriées (filets à mailles fines, moustiquaires, explosifs, poisons, nasses) qui entravent le cycle normal des poissons devra faire l’objet d’une réglementation minutieuse.
Le PAS recommande dans ce sens la révision et la promulgation du projet de loi et des textes d’application (avec introduction de mailles plus réalistes, de l’ordre de 20 mm) ; la traduction de textes de loi et la vulgarisation.
La RDC, en matière d’emploi de seines de plage et pêche au tam-tam, devrait mettre à jour sa législation et renforcer le contrôle ainsi que les capacités de contrôle et d’encadrement.
Et à l’endroit de la pêche dans les zones de frayères sensibles, il est recommandé au pays d’adapter la législation ; de renforcer le contrôle de l’application de la législation (hors aires protégées) ; mise en place d’un système de surveillance des aires protégées.
La législation relative aux prélèvements excessifs de poissons ornementaux devrait être améliorée et renforcée en matière d’octroi de permis (espèces autorisées, quantités, sites de prélèvements) ; inscription des cichlides du lac dans les listes CITES, à l’exception des espèces identifiées comme pouvant supporter des prélèvements.
La Tanzanie, n’applique pas les réglementations locales en vigueur relatives à l’utilisation de filets maillants inappropriés ; et manque de politique de protection des frayages saisonniers.
Elle devra relativement aux cultures d’espèces exotiques dans le bassin hydrographique, vérifier et examiner comment les réglementations s’appliquent aux espèces du bassin hydrographique ; établir des réglementations propres au bassin versant ; et appliquer les réglementations locales.
La Zambie, devra renforcer la capacité locale pour le suivi et l’application de réglementations relatives à la pêche industrielle et parallèlement établir des réglementations locales relatives à la pêche ornementale qui demeure incontrôlée.
C’est notamment le cas de l’utilisation des seines de plages qui ne fait l’objet d’aucune réglementation.

C. Lutte contre la sédimentation

Au Burundi, une évaluation de l’impact du problème et de l’identification plus précise des zones d’érosion générant les risques les plus graves sur la biodiversité du lac devrait être menée à l’encontre des pratiques agricoles inadaptées (y compris les cultures sur les fortes pentes non protégées).
A l’endroit des défrichements de boisements et de formations végétales naturelles (aires protégées), une consolidation de la base juridique des aires protégées ; une actualisation des codes foncier et forestier (en réglementant notamment le commerce des produits forestiers) ; et une harmonisation avec le Code de l’Environnement sont recommandées.
En RDC, une mise à jour de la législation pour réguler le déboisement est nécessaire. Dans les zones où les pratiques agricoles s’avèrent inadaptées et où l’agriculture est pratiquée excessivement, une réglementation et sa vulgarisation sont indispensables.
En Tanzanie, le lac est menacé par la culture de tabac en perpétuelle augmentation sur les berges des rivières, pour ce, l’examen de la réglementation de la culture sur les berges des rivières est indispensable. Et pour le cas des feux de brousse qui n’est pas contrôlé, il faudrait vérifier et examiner la législation existante et celle récemment proposée.
Pour lutter contre la sédimentation, il est recommandé à la Zambie d’examiner la pertinence des réglementations existantes sur les cultures des abords des rivières ; et pour les abus et le déboisement sur les aires protégées (Parcs nationaux et réserves forestières), il serait mieux de favoriser l’application des réglementations actuelles.

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