Le processus d’externalisation : 3 phases et 17 étapes

Le processus d’externalisation : 3 phases et 17 étapes

3) Le processus d’externalisation

Au cours de son étude, Eric Fimbel a identifié les facteurs de succès qui pouvait découler du processus d’externalisation. Ainsi, trois étapes ont été définies autour de trois moments clés à savoir :

  1. Emergence subie ou suscitée des facteurs initialisant la démarche d’externalisation = questionner l’opportunité.
  2. La décision d’externaliser = arbitrer entre attentes, motivations et risques, périmètre, durée…
  3. Abandon opérationnel du fonctionnement internalisé par le basculement vers le fonctionnement externalisé.

Le tableau ci-dessous détaille les dix-sept opérations composant chacune les trois grandes phases suivantes :

  1. Phase pré-décisionnelle,
  2. Phase de mise en œuvre ,
  3. Phase de fonctionnement-exploitation.

Les 3 phases d’externalisation en détail

Phases et Etapes du processus

Phase pré-décisionnelle = 6 étapes

MOMENT-CLE n°1

= Etape 1 : émergence (subie ou suscitée) des facteurs initialisant la démarche d’externalisation

5 étapes (=ET) suivantes :

ET.2 : explicitation de la volonté d’affronter l’alternative
ET.3 : étude multidimensionnelle de l’alternative
ET.3a-étude économique
ET.3b-étude technique
ET.3c-étude humaine et sociale
ET.3d-étude organisationnelle

Phase de mise en œuvre = 5 étapes

MOMENT-CLE n°2

= Etape 4 : décision d’externaliser (attentes et motivations, périmètre, durée, …)

4 étapes suivantes :

ET.5 : appel au marché et choix du (ou des) prestataires

ET.6 : formalisation et contractualisation des engagements

ET.7 : mise en œuvre de la solution = préparation = conduite opérationnelle du projet

ET.7a- mise en œuvre technique

ET.7b- mise en œuvre organisationnelle (communication, formations, préparation des changements, …)

Phase de fonctionnement-exploitation = 6 étapes

MOMENT-CLE n°3

= Etape 8 : basculement et mise en fonction

5 étapes suivantes : ET.9 : exploitation
ET.9a-fonctionnement et utilisations des prestations livrées
ET.9b-gestion du partenariat
ET.9c-liaisons opérationnelles avec le « restant internalisé » ET.10 : mesure et décision
ET.10a- en cours de contrat
ET.10b- en fin de contrat (réversibilité, transférabilité, reconduction, …)
Source : L’Expansion Management Review, « Externalisation : discriminants et facteurs de succès », Eric Fimbel, n°104, mars 2002, pp 60-69.

Des acteurs ciblés par phase

Enfin, les trois catégories d’acteurs qui interviennent au cours de ces étapes sont :

* La direction de l’entreprise qui externalise (directement ou par délégation à un des cadres de l’équipe dirigeante) en tant que Maîtrise d’Ouvrage (MOA).

Cette dernière est chargée de la définition des objectifs et du périmètre de l’opération, de la réorganisation interne induite ainsi que du pilotage du partenariat avec le prestataire.

pilotage du partenariat avec le prestataire

* Les destinataires-utilisateurs des prestations issues du périmètre et/ou de la fonction externalisée (appelés « Public-Cible » – PC). Ce sont les collaborateurs salariés ou clients de l’entreprise.

* Le prestataire (et ses équipes) dans sa mission de Maître d’Oeuvre (MOE).

Il a la charge de préparer, réaliser. Il doit aussi s’assurer de l’efficacité et de l’opérationnabilité de la solution externalisée, dans le cadre d’une maîtrise des moyens et ressources mobilisés.

A chacun de ces moments, la contribution adéquate de tel acteur peut être requise.

Cette adéquation ou inadéquation devra être étudiée en ce qu’elle concourt ou non au succès de l’opération, qu’il s’agisse d’interventions individuelles ou combinées6 entre plusieurs acteurs.

Les critères d’une externalisation réussie

Afin de comprendre mieux comprendre ce que les sondés entendaient par la notion de réussite d’une externalisation, Eric Fimbel leur a demandé de définir ce concept et en a dressé le tableau ci-dessous avec la liste des onze acceptions les plus pertinentes.

Définir et qualifier le succès de l’externalisation

Définitions proposéesOUI (%)Classement
Le contrat a produit les principaux effets7 attendus par l’entreprise cliente77,31
Le contrat a financièrement enrichi les deux partenaires49,62
Le contrat a été renouvelé à échéance entre les mêmes partenaires (reconductibilité)41,83
Le contrat8 est allé à son terme (=initialement prévu) sans dénonciation formelle394
Le contrat a été étendu avant l’échéance initiale (= extension du périmètre initial avant le terme)38,35
Le basculement « internalisation vers externalisation » a été réalisé dans les conditions prédéfinies33,36
Le contrat a été réalisé conformément à l’état de l’art24,17
Aucune pénalité n’a été facturée au prestataire20,68
Le contrat a été renouvelé à échéance mais avec un autre prestataire (= transférabilité)19,99
Le contrat a produit tous les effets attendus par l’entreprise-cliente1710
Le contrat a fait la preuve de sa réversibilité (= ré-internalisation à son terme)1711

Source : L’Expansion Management Review, « Externalisation : discriminants et facteurs de succès », Eric Fimbel, n°104, mars 2002, pp 60-69.

Eric Fimbel et son équipe de chercheurs ont retenu onze acceptions différentes de la notion de succès.

Pour eux, la définition du succès comme étant la plus significative du succès (plus des trois quarts des entreprises interrogées la valide) est « la satisfaction sélective et centrée des attentes de l’entreprise-cliente ».

« Le formalisme contractuel, la réversibilité, la satisfaction exhaustive des attentes ainsi que le respect de toutes les conditions spécifiées « ex ante » du basculement ne sont pas des définitions empiriquement valides du succès… même si elles occupent une place de choix dans un très grande majorité de publications économiques et juridiques ».

Cette définition s’étend également par l’enrichissement mutuel des deux co-contractants.

La célèbre « obligation de résultats à imposer au prestataire» devient donc une nécessité conjointe, partagée.

Des conditions d’échec identifiables ?

On pourrait donc croire qu’il nous faudrait éviter seulement quelques pièges en observant les opérations ayant échouées. Les auteurs ont pu établir la spécificité de la combinaison des facteurs d’échec pour chaque cas. Parmi seize critères étudiés, les seuls résultats communs concernent :

  • * la gestion dynamique de l’étape « 9-b = gestion du partenariat » reconnue comme « non- maîtrisée »,
  • * le non-respect de la qualité des prestations opérationnelles délivrées.

L’analyse faite par les auteurs permet de mettre en exergue que le moment producteur d’échec est celui de la période opérationnelle du fonctionne ment de l’externalisation ainsi que de sa sous-estimation par de nombreux décideurs.

Mais ces deux raisons ne sont pas valides scientifiquement pour justifier une relation de cause à effet avec les facteurs de succès d’une externalisation. Ainsi les échecs en matière d’externalisation sont souvent couplés avec la sous-estimation faite par de nombreux auteurs.

Multiplier les observations pour une meilleure analyse du succès

Au cours de leurs recherches, les auteurs ont sélectionné, mobilisé et analysé 482 publications (livres et articles) anglo-saxonnes et francophones consacrées à l’externalisation. Plus de 60 % d’entre elles sont dédiées à la seule problématique décisionnelle. Les deux autres phases (mise en œuvre et fonctionnement opérationnel) se partageant moins des 40 % restants à elles deux.

Il faut donc étudier le phénomène d’externalisation dans toute son ampleur , de la première à la dix-septième étape, afin d’en dégager scientifiquement les facteurs de succès.

Critères d’externalisation

Les critères conduisant à une externalisation de la part des entreprises et que l’on retrouve soit dans la littérature économique soit dans les colloques spécialisés sont les suivants :

  • Volonté de recentrer l’entreprise sur leurs activités « cœur de métier ».
  • Volonté de transformer des coûts fixes en coûts variables afin de mieux affronter les variations des volumes d’activité et alléger les charges dites « structurelles ». Cela permettrait également de bénéficier d’un « effet d’aubaine » à court terme par une restructuration de son bilan visible par les actionnaires et un effet positif sur sa trésorerie via les cessions d’actifs au prestataire.
  • Réduction de coûts réellement trop élevés de la solution interne par un recours au marché usuellement considéré plus efficient.
  • Suppression des difficultés ou d’incapacités durables à surmonter un problème interne.

De l’impossibilité de quantifier la part psychologique

Simon9 a démontré l’existence d’une rationalité limitée des agents économiques, décideurs compris. En effet, les résultats de l’analyse portant sur 94 externalisations réussies confirment cette donnée : les motivations positives du dirigeant arrivent bien avant les éventuelles insuffisances réelles et mesurées des solutions internalisées.

Enfin, les facteurs plus négatifs (externalisations « sanction » ou « éviction ») font partie des causes très minoritaires.

Ce qui ressort de cette analyse est le fait qu’il existe une corrélation, au moins en partie, entre l’ampleur du succès et la nature et la puissance des attentes des dirigeants10 de l’entreprise qui externalise.

Ainsi, « la problématique centrale du succès d’une externalisation est donc bien en prise directe avec la vision qu’a chaque dirigeant de la rencontre entre, d’une part ses cibles économiques et commerciales, et la « configuration managériale et territoriale » de l’organisation qu’il dirige d’autre part. »

La nature partielle ou totale de l’externalisation a-t-elle un impact ?

Beaucoup de variables peuvent être prises en considération pour analyser le succès d’une externalisation : le caractère international de l’entreprise et de son activité, la présence d’externalisations antérieures réussies, la taille et la nature des activités de la firme, etc.

Cependant, ces critères seuls peuvent- ils cerner les facteurs de réussite ou d’échec, afin de créer un modèle d’externalisation parfaite ? A l’évidence non : par exemple, le fait de devoir faire une externalisation totale ou partielle n’aura pas les mêmes impacts pour la société.

Qu’entend -on par externalisation partielle ? Quelques exemples :

  • * dans une externalisation informatique 11, on externalisera l’exploitation des serveurs centraux, mais pas les développements (analyse/programmation) des logiciels spécifiques ;
  • * dans une externalisation des ressources humaines , on externalisera la paie et la gestion du recrutement, mais ni la formation, ni les négociations collectives ;
  • * dans une externalisation de la fonction logistique , on externalisera le stockage et les expéditions des pièces de rechange auprès des clients, mais pas la livraison des produits neufs.

Ainsi en externalisation partielle, l’entreprise peut conserver non seulement une expertise mais aussi des ressources opérationnelles dans le domaine ou la fonction. Le directeur de cette fonction va donc assurer le management suivant :

  • 1. Suivi du bon fonctionnement de la partie restée internalisée sous la responsabilité opérationnelle du directeur,
  • 2. Co-pilotage du suivi de la partie nouvellement externalisée sous la responsabilité opérationnelle directe du prestataire,
  • 3. Co-pilotage du fonctionnement cohérent et efficient des interfaces entre les deux parties.

Dans le cas d’une externalisation partielle, el responsable reste un membre dirigeant avec des ressources et des actifs internes en responsabilité directe. Son rôle est certes élargi, mais il reste un gestionnaire de ressources internes , comme nombre de ses collègues.

Une restructuration plus extrême : l’externalisation totale

L’externalisation totale est plus radicale et se traduit par la disparition des ressources, actifs et compétences internes associés au domaine. L’entreprise doit disposer d’un responsable en charge de la relation partenariale et contractuelle.

Sa mission sera d’en permettre l’efficience et le succès durables, au travers des leviers que requiert un pilotage relationnel centré sur les résultats , sans prise hiérarchique directe sur les ressources à mobiliser.

Ceci requiert évidemment un profil de manager sensiblement différent que celui nécessaire en situation d’externalisation partielle.

6 C.MIDLER, « Evolution des modèles d’organisation et régulations économiques de la conception », Annales des Mines – Réalités industrielles, février 1997, article dans lequel l’auteur, à partir des travaux de D.A SCHÖN (1983) rappelle que « la pertinence et le réalisme du cahier des charges du projet ne peuvent s’explorer indépendamment de la construction d’une réponse, dans le processus heuristique. »

7 Ces effets peuvent être économiques (compétit ivité accrue, pouvoir de marché…), organisationnels (flexibilité, simplification…), sociaux (gestion de main -d’œuvre…).

8 Contrat : terme employé ici dans une signification étendue = intégralité de l’opération d’externalisation (préparation et réalisation).

9 H.SIMON, “Theories of decision making in economic and behavioral science”, American Economic review, 1959.

10 J.B QUINN & F.G HILMER, “Strategic Outsourcing”, Sloan Management Review, Summer 1994.

11 A.CHA MPENOIS, « Infogérance : externalisation des systèmes d’informatio n », Interéditions, Paris, 1997

Devant la difficulté de l’externalisation, les entreprises désirant s’affranchir de tout ou partie de leurs services sont de plus en plus exigeantes, et forcent les professionnels à s’adapter en offrant des solutions au cas par cas; à proposer au minimum les mêmes services que l’entreprise avant externalisation, quittes à modifier et à recentrer leur corps de métier.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
La 4e Partie Logistique – Fourth Party logistics – Est-elle une solution optimale ?
Université 🏫: Université Paris 1 Panthéon Sorbonne - Master de Logistique
Auteur·trice·s 🎓:
Sonia Justino

Sonia Justino
Année de soutenance 📅: Mémoire de Master Sciences du management - Spécialité Logistique - Mémoire de fin d’études - 2006
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