Les bonnes pratiques de fabrication de médicaments au Canada

C. Les bonnes pratiques de fabrication
Un autre aspect important à retenir est le fait que la fabrication de médicaments au Brésil et au Canada doit aussi respecter les bonnes pratiques de fabrication (BPF) définies par l’Organisation mondiale de la santé (OMS)113 comme « un des éléments de l’assurance de la qualité »114.
Il importe de préciser que l’idée d’imposer des normes minimales au processus de fabrication des médicaments est basée sur la haute probabilité que ceux-ci provoquent des accidents de consommation découlant de défauts de production115. Les BPF visent à éviter des risques pouvant se présenter dans le processus de fabrication, par exemple, la contamination croisée ou par particules, le mauvais étiquetage, etc. En contrôlant davantage la production, on obtiendrait une meilleure qualité des produits pharmaceutiques et que, par conséquent, on assurerait la commercialisation de médicaments efficaces et non nocifs pour la santé publique.
Les BPF proviennent des États-Unis. En 1963, ce pays a proposé certains critères spécifiques pour la fabrication des médicaments, qui sont considérés comme les précurseurs des BPF. Néanmoins, ces règles n’étaient pas obligatoires116. En effet, elles ne faisaient qu’interpréter la responsabilité des pharmaciens et des médecins.
Toutefois, étant donné le développement technologique et scientifique dans le domaine pharmaceutique, ces normes ont été postérieurement modifiées et nommées Current Good Manufacturing Practice117.

113 Ci-après « OMS ».
114 Guide OMS des normes relatives aux bonnes pratiques de fabrication (BPF). Partie 1 : Modes opératoires normalisés et formules originales de fabrication. Site [En ligne]. http://www2.alliance-hpsr.org/vaccines-documents/DocsPDF/www618.pdf (Page consultée le 04 août 2008).
115 En 1941, environ trois-cents personnes ont été tuées ou blessées aux États-Unis après avoir consommé des comprimés de la compagnie Winthrop Chemical, lesquels étaient contaminés par le sédatif phenobarbital; Dans les années cinquante, un fabricant américains qui produisait des vaccins contre la polio n’a pas inactiver complètement le virus, dans un lot des dites vaccins, et par conséquent, environ soixante personnes inoculées ont développé de la poliomyélite, et quatre-vingt-neuf autres membres de leur famille ont contracté la polio. IMMEL, B., A Brief History of the GMPs «The power of storytelling» dans Compliance Leadership Series, p. 2. Site [En ligne]. http://immelresources.com/HistoryofGMPs.pdf (Page consultée le 23 mai 2010). En outre, nous ne pouvons pas oublier l’affaire de la thalidomide, préc., note 5.
116Histórico das Boas práticas de fabricação. Site [En ligne] : http://www.boaspraticasfarmaceuticas.com.br/includes/Histórico%20BPF.aula%20módulo%20III.ENS P.ppt (Page consultée le 4 août 2008).

Le premier brouillon sur les BPF a été rédigé en 1967, à la demande de la 20e Assemblée de l’OMS. Après la révision du texte par le Comité d’experts de l’organisation, le document a été accepté par la 22e Assemblée comme intégrant un Schéma de certification de la qualité des produits pharmaceutiques. Pourtant, ce n’est qu’en 1975 que le texte original des BPF a été adopté. Ce document est constitué des trois sections suivantes118 : i) la gestion de la qualité dans l’industrie pharmaceutique; ii) les bonnes pratiques de production et de contrôle de la qualité ; iii) des directives complémentaires comportant des sections sur les produits pharmaceutiques stériles et les bonnes pratiques de fabrication des principes actifs. Les BPF ont pour mission d’uniformiser, dans la mesure du possible, les critères de qualité des produits pharmaceutiques dans tous les pays. S’agissant toutefois de principes internationaux de nature générale, cela permet à chaque pays de les adapter à leurs réalités économique et sociale.
Les BPF de l’OMS ont donc influencé plusieurs pays, qui ont adopté une législation interne assurant le contrôle de la qualité des produits pharmaceutiques. En Europe, par exemple, l’Angleterre a publié, en 1983, le Guide to good pharmaceutical manufacturing pratice, suivie par la France, qui a promulgué ses bonnes pratiques de fabrication et de production pharmaceutique, en 1985. Cependant, ces documents ont été remplacés, en 1992, par la Directive 356 de la Communauté européenne qui établissant les principes et les lignes directrices des bonnes pratiques de fabrication pour les médicaments à usage humain119. En Asie, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est a adopté, en 1984, la première édition de l’ASEAN, Good manufacturing practices guidelines. En Amérique du Sud, les pays membres du Marché Commun du Sud (Mercosud), dont le Brésil fait partie, ont également adopté les BPF de l’OMS comme référence.
Au Brésil, afin de tenir compte du développement technique, le législateur a adopté les BPF, qui s’harmonisent avec les recommandations de l’OMS. À cet égard la Résolution 134/2001120 contient les deux annexes suivants: i) Annexe I – Règlement Technique des Bonnes pratiques pour la fabrication de médicaments et Annexe II – Classification et critères d’évaluation pour les éléments du guide d’inspection pour les entreprises fabricants des médicaments.
Dans le cadre du présent travail, nous nous attarderons surtout à l’Annexe I. Ce dernier prévoit que les BPF sont applicables au processus complet de fabrication des médicaments, même s’il s’agit de médicaments en voie de développement destinés aux essais cliniques. De plus, tel que le recommande l’OMS, l’ANVISA fournit au fabricant un certificat de bonnes pratiques de fabrication attestant que l’entreprise se conforme aux exigences imposées par les BPF. Ce certificat vise surtout le commerce international des médicaments. L’idée est ainsi de permettre aux consommateurs de savoir que le médicament acheté a été fabriqué selon les règles internationales de la qualité.
En outre, la norme établit que les réclamations relativement aux problèmes de qualité doivent être enregistrées et examinées par le fabricant de manière approfondie. Le fabricant est tenu de maintenir un système efficace pour retirer les produits suspects du marché. L’autorité sanitaire doit être informée lorsqu’une enquête importante121 est mise en marche, ainsi que du retrait d’un produit. Lorsqu’il s’agit d’un médicament d’origine étrangère, il faut également en informer les autorités nationales dans le meilleur délai. Enfin, pour assurer un contrôle constant, les fabricants doivent effectuer annuellement une autoinspection de leurs médicaments, afin d’évaluer s’ils respectent tous les aspects des BPF.

120 ANVISA, Resolução RDC 134/2001.
121 Le règlement n’explique pas ce qu’il considère comme « importante ». Nous sommes cependant d’avis qu’il s’agit d’une enquête basée sur des réclamations importantes des consommateurs ou encore sur des découvertes importantes sur le médicament.

Les BPF ont au Brésil une valeur coercitive, car les fabricants doivent agir en conformité avec ses règles, sous peine de voir leur autorisation de fonctionnement suspendue.
En ce qui a trait au Canada, les BPF sont prévues au Titre 2, partie C, du Règlement sur les aliments et drogues122. Celui-ci interdit la vente et la distribution des médicaments qui n’ont pas été manufacturés, emballés, étiquetés, analysés ou entreposés conformément aux bonnes pratiques de fabrication123 prévues. À l’instar des normes brésiliennes, les BPF canadiennes observent les directives de l’OMS et elles imposent surtout des règles liées à l’hygiène des locaux, des équipements et du personnel. Ces règles se justifient en raison de la vulnérabilité à la contamination à laquelle les médicaments sont exposés. Le fabricant, l’emballeur-étiqueteur, le distributeur et l’importateur sont tenus d’avoir une équipe de contrôle de la qualité, sous la surveillance de professionnels qualifiés. Les BPF canadiennes, tout comme les brésiliennes, imposent l’obligation d’analyser la matière première utilisée pour la production de médicaments, le matériel d’emballage et le produit fini.
De plus, Santé Canada a édicté des lignes directrices sur les BPF124, dans le « but d’appliquer les exigences réglementaires de façon plus uniforme et de permettre à l’industrie réglementée de se conformer plus facilement à ces exigences »125. À l’égard de l’émission du certificat de conformité de conformité aux bonnes pratiques de fabrication, malgré que ni le règlement, ni les lignes directrices des BPF ne le prévoit, il est néanmoins fourni par Santé Canada.

122 Règlement sur les aliments et drogues, préc., note 45.
123 Voir à ce sujet l’article C.02.003, C.R.C., c. 870.
124 Lignes directrices sur les bonnes pratiques de fabrication, Santé Canada, 2002.
125 Lignes directrices sur les bonnes pratiques de fabrication, Introduction.

La lecture des BPF brésiliennes et canadiennes révèle plusieurs ressemblances. Cela est dû au fait qu’elles tirent toutes deux leur source dans les lignes directrices élaborées par l’OMS. Leurs différences sont d’ailleurs négligeables, car les deux textes traitent de même matières semblables. Nous avons cependant constaté que les BPF brésiliennes traitent de certains points plus en détail que les canadiennes. L’auto- inspection126 en constitue un exemple; ainsi tandis que les BPF brésiliennes prévoient toutes les étapes que le fabricant doit suivre afin de réaliser une auto-inspection127, les canadiennes se limitent à lui imposer l’obligation de tenir un programme d’auto- inspection128.

126 L’autoinspection permet au fabricant d’évaluer s’il respecte les BPF sur tous les aspects de la production et du contrôle de la qualité.
127 Resolução RDC 134/2001, préc., note 120, article 9 à 9.4.2.
128 Règlements sur les aliments et drogues, préc., note 45, article C.02.012 (1) b).

Lire le mémoire complet ==> (La responsabilité civile de l’industrie pharmaceutique : le risque de développement)
Étude comparative des droits brésilien et québécois
Mémoire présenté à la Faculté de droit en vue de l’obtention du grade de Maîtrise en droit (LL.M.)
Université de Montréal – Faculté des études supérieures et postdoctorales

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