Des personnes assujetties et non assujetties à la TVA – 2002/38/CE

Des personnes assujetties et non assujetties à la TVA – 2002/38/CE

2 – Le preneur

Pour le bénéfice du régime spécial introduit par la Directive 2002/38/CE du Conseil, le prestataire de services fournis par voie électronique doit réaliser son opération commerciale auprès d’un client non assujetti (A), puisqu’à défaut de ce non assujettissement du preneur, le mécanisme d’autoliquidation de la TVA intervient (B).

A – Des personnes non assujetties

La directive 2002/38/CE du Conseil instaure l’obligation pour bénéficier du régime spécial qu’elle créé, du non assujettissement des personnes désirant l’obtention d’un service fourni par voie électronique.

Cette obligation est accompagnée d’une seconde en corrélation, à savoir la personne non assujettie doit également être établie territorialement dans la communauté européenne.

Pour appréhender ces différentes obligations contenues dans l’article 26 quater de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, définissons successivement le non assujettissement à la TVA, puis la territorialité entendu en droit positif français.

Le preneur a l’obligation d’avoir la qualité de non assujetti pour permettre le bénéfice du régime spécial au prestataire tiers à la Communauté européenne.

Dés lors, il faut entendre par la qualité de non assujetti, une personne qui ne remplit pas les caractéristiques prévues par la loi ainsi que la jurisprudence, permettant de qualifier l’assujetti.

Sont ainsi expressément visés comme tel par l’article 4-4 de la sixième directive8 « les salariés et autres personnes dans la mesure où ils sont liés à leur employeur par un contrat de louage de travail ou par tout autre rapport juridique créant des liens de subordination en ce qui concerne les conditions de travail et de rémunération et la responsabilité de l’employeur ».

Dans un arrêt du 04 octobre 1995 « Dieter Armbreicht »9, la CJCE a précisé la notion d’assujetti en considérant qu’ « un assujetti qui effectue une opération à titre privé n’agit pas en tant qu’assujetti. Par conséquent, une opération effectuée par un assujetti à titre privé ne tombe pas sous le coup de la TVA. Aucune disposition de la directive ne s’oppose d’ailleurs à ce qu’un assujetti qui souhaite conserver une partie d’un bien dans son patrimoine privé puisse l’exclure du système de la TVA ».

Pour ce dernier cas, l’assujetti sera considéré comme un assujetti partiel pour l’application du droit à déduction.

En France l’article 256 A du CGI défini l’assujetti, il dispose notamment a contrario les personnes considérées comme non assujetties à la TVA.

Ceci est le cas pour les salariés et les autres personnes qui sont liées par un contrat de travail, ou par tout autre rapport juridique, celui-ci créant un lien de subordination au sujet des conditions de travail, des modalités de rémunération ou encore sur la responsabilité de l’employeur.

L’exclusion de l’assujettissement de la TVA concerne aussi les représentants de commerce statutaires ou salariés, les travailleurs à domicile10, les présidents des établissements publics, fonctionnaires et les dirigeants de sociétés.

Le preneur a également l’obligation d’être établi territorialement dans la Communauté européenne ; cela reste logique, dans la mesure où un système de TVA européen ne s’applique qu’en présence d’au moins une des parties à la relation commerciale sur son territoire, on imagine mal ce système fiscal s’appliquer dans un Etat tiers à la Communauté européenne, dans une relation marchande entre des acteurs économiques locaux, sans aucuns liens avec la Communauté européenne.

Les critères de territorialité employés, sont ceux établis par l’administration fiscale française, puisqu’ils sont ceux utilisé fréquemment par le juge du for, en cas de litige en France.

La territorialité est utilisé pour délimiter le champ d’application d’impôts, notamment l’impôt sur le revenu, ceci déterminant les personnes imposables ou non.

Utiliser les critères définissant le caractère imposable ou non d’une personne, permet l’établissement de la territorialité de cette personne sur le territoire nationale, ainsi en ce qui nous concerne s’il rempli la seconde obligation déterminée par l’article 26 quater de la sixième directive77/388/CEE du Conseil dans le cadre d’un preneur non assujetti et établi dans la Communauté européenne.

Dés lors, une personne dont le domicile fiscal est situé en France est passible de l’impôt en France, par la même occasion, est susceptible pour une entreprise tierce à la Communauté européenne de bénéficier du régime spécial de la Directive 2002/38/CE du Conseil en cas de fourniture à ce ressortissant français d’une prestation de services fourni par voie électronique.

On comprend l’importance objective de la définition du domicile fiscal11, ainsi dans un premier lieu, une personne est considérée comme ayant en France son domicile fiscal lorsque la personne a son foyer en France.

Le foyer s’entend comme le lieu où la personne ou sa famille, à savoir conjoint et enfants, habite normalement. Ou encore le lieu de la résidence habituelle, sans qu’il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles12.

Dans un deuxième lieu, une personne est considérée comme ayant en France son domicile fiscal lorsqu’elle a son lieu de séjour principal en France.

C’est-à-dire, contrairement au premier critère, on retient ici le lieu de séjour de la personne elle-même, sans s’attacher au lieu de séjour de sa famille.

Ainsi, il suffit qu’une personne ait séjourné en France plus de 183 jours au cours d’une même année pour qu’elle soit réputée avoir eu son séjour principal en France au titre de l’année en cause.

On imagine déjà les difficultés possibles rencontré par le juge en cas de litige concernant la perception de la TVA, puisque en cas de litige sur le versement de la TVA due à l’Etat.

Si la personne de nationalité non Communautaire séjourne principalement en France, contractant des prestations de services par voie électronique et ceci, si dans un même temps, le prestataire ne réalise aucune de ces obligations sur le versement de la TVA due, alors cette personne pourrait être confrontée à la mauvaise surprise de devoir verser à l’Etat le montant de TVA due par son prestataire de services par voie électronique alors même qu’il ne séjourne plus en France.

Dans un troisième lieu, une personne est considérée comme ayant en France son domicile fiscal lorsqu’elle exerce une activité professionnelle en France.

La personne exerçant en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu’elle ne justifie que cette activité y est exercée à titre accessoire.

Dès lors, cette personne serait domiciliée dans l’Etat dans lequel elle exercerait son activité principale, faisant partie territorialement de cet Etat et ne faisant bénéficier au prestataire de services par voie électronique tiers à la Communauté européenne du régime spécial de la Directive 2002/38/CE du Conseil, que dans la mesure où l’activité principale se déroule dans le territoire de la Communauté européenne.

En dernier lieu, une personne est considérée comme ayant en France son domicile fiscal lorsqu’elle a le centre de ses intérêts économiques en France.

Il s’agit ici du lieu où l’intéressé a effectué ses principaux investissements, où il possède le siège de ses affaires, d’où il administre ses biens.

C’est également le lieu où il a le centre de ses activités professionnelles ou d’où il tire la majeure partie de ses revenus.

On observe que les deux premiers critères sont d’ordre personnel, le troisième étant d’ordre professionnel et le quatrième d’ordre économique. Il suffit de répondre à l’un de ces critères pour être domicilié en France.

Le preneur, non assujetti à la TVA, domicilié dans la Communauté européenne, en clair dans notre exemple, un client, personne physique, salarié, habitant la France.

S’il remplit l’ensemble des conditions exigées dans l’article 26 quater de la sixième directive77/388/CEE du Conseil, permettra éventuellement à l’entreprise étrangère, à savoir au prestataire de services fournis par voie électronique, de bénéficier du régime spécial.

En outre, il existe une autre situation juridique n’affectant pas l’application du régime spécial de la Directive 2002/38/CE du Conseil, qu’il est toutefois utile d’analyser.

B – Des personnes assujetties : principe de l’autoliquidation

Le principe pour les opérations entre assujettis (B2B), est la désignation du client assujetti comme redevable de la taxe, qui paie la taxation dans le lieu de consommation, sans que cela impose au fournisseur des obligations fiscales dans l’Etat membre de consommation13, à savoir l’Etat membre dans lequel la prestation des services électroniques est réputée avoir lieu.

Depuis l’article 94 de la loi de finances rectificative pour 2005 (n° 2005-1720 du 30 décembre 2005), qui a modifié le 1 de l’article 283 du code général des impôts.

A compter du 1er septembre 2006, lorsqu’une livraison de biens ou une prestation de services est effectuée par un assujetti non établi en France, la TVA doit être acquittée par l’acquéreur, le destinataire ou le preneur lorsque celui-ci est identifié à la TVA en France.

En application des dispositions du premier alinéa du 1 de l’article 283 du code général des impôts, la TVA exigible au titre d’une livraison de biens ou d’une prestation de services est normalement acquittée par la personne qui réalise l’opération.

Cependant, conformément à l’article 94 de la loi de finances rectificative pour 2005, la taxe devra désormais être acquittée par l’acquéreur, le destinataire ou le preneur lorsque celui-ci est identifié à la TVA en France et que le fournisseur ou le prestataire n’est pas établi en France.

Le champ d’application de ce mécanisme d’autoliquidation concerne l’ensemble des opérations réalisées vers des clients identifiés à la TVA en France, sauf lorsque d’autres dispositions du CGI définissent un redevable différent ou fixent des modalités particulières. Tel est le cas pour les services fournis par voie électronique, opérations déjà soumises à autoliquidation avant le 1er septembre 2006, en application des dispositions du 2 au 2 quinquies de l’article 283 du CGI.

Dés lors, sont concernés par le nouveau dispositif, tous les fournisseurs et prestataires qui ne sont pas établis en France, ainsi que l’ensemble des clients de ces opérateurs, dès lors qu’ils sont identifiés à la TVA en France, en vertu de l’un quelconque des trois alinéas de l’article 286 ter du CGI, et ce, qu’ils soient eux-mêmes établis ou non en France.

Le client redevable de la taxe mentionne sur la ligne « achats de biens ou de prestations de services réalisés auprès d’un assujetti non établi en France14 » de sa déclaration de chiffre d’affaires 3310-CA3 ou 3517, le montant total, hors taxes, de l’opération. La taxe ainsi acquittée est déductible dans les conditions de droit commun (article 271 du CGI).

Lorsque le fournisseur ou le prestataire non établi en France est tenu au dépôt de déclarations de chiffre d’affaires, parce qu’il réalise d’autres opérations au titre desquelles il est redevable de la taxe, des exportations ou des livraisons intracommunautaires exonérées, il doit également mentionner sur la ligne « ventes de biens ou de prestations de services réalisées par un assujetti non établi en France (article 283-1 du CGI) », le montant total hors taxe de ses opérations relevant du mécanisme d’autoliquidation.

Il est admis que la facture relative aux opérations concernées par l’article 94 déjà cité ne fasse pas mention de la TVA exigible. Elle doit cependant faire apparaître distinctement que la TVA est due par le client et mentionner les dispositions de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil (article 21-1-a ou article 283-1 du CGI) justifiant que la taxe ne soit pas collectée par le fournisseur.

L’acquéreur, le destinataire ou le preneur identifié à la TVA en France redevable de la TVA au titre du deuxième alinéa du 1 de l’article 283 du CGI qui n’a pas collecté la TVA sur sa déclaration de chiffre d’affaires peut faire l’objet d’une action en reprise de l’administration portant sur le montant de la taxe dont il est redevable.

Néanmoins, il bénéficie de l’imputation de la taxe déductible afférente à l’opération non déclarée sur la taxe rappelée, dans le cadre de la procédure de rectification.

Lorsque l’opération non déclarée par l’acquéreur, le destinataire ou le preneur identifié à la TVA en France lui ouvre un droit à déduction de la TVA y afférente, le défaut de déclaration de cette opération est sanctionné par l’application de l’amende de 5 % prévue au 4 de l’article 1788 A du CGI.

Afin, de mieux appréhender les différentes situations envisagées dans cette section, voici un tableau récapitulatif :

Lieu d’établissement du client

Lieu d’établissement du prestataire

FranceAutres Etat de l’UEEtat hors de l’UE
AssujettiNon assujettiAssujettiNon assujetti
FranceIINIINI
Autres Etat de l’UEINI
Etat hors de l’UEII(1)
I : Imposable à la TVA française

NI : Non imposable à la TVA

française

(1) Seulement si le service est utilisé en France

Après avoir exposé les différentes natures des deux opérateurs en cause, lors d’une relation commerciale plus spécifiquement lors d’une prestation de services fourni par voie électronique, à savoir le prestataire de services d’une part et le preneur d’autre part, l’interrogation sur la nature des opérations soulève de multiples suppositions à combler.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Contrôle fiscal des entreprises tierces à la Communauté européenne
Université 🏫: Université Paris I Panthéon Sorbonne - U.F.R. 01 Droit Administration Et Secteurs Publics
Auteur·trice·s 🎓:
Julien CARMIER

Julien CARMIER
Année de soutenance 📅: Mémoire – Master Professionnel de Droit de l’Internet Public - 2005/2006
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