Internet, un outil dangereux? Libre expression et Désinformation

Internet : Un outil controversé – Chapitre 2 :
Internet est né en 1969 sous l’impulsion du département américain de la défense. Le réseau, qui s’appelait alors ARPANET, devait assurer les échanges d’informations électroniques entre les centres névralgiques américains dans le contexte de la guerre froide.
Ce réseau devait permettre à la défense américaine de poursuivre ses activités en cas d’attaque nucléaire soviétique. Si l’un ou plusieurs des sites et lignes de connexion venait à être détruit, les messages parviendraient à leur destinataire par des itinéraires alternatifs.
Un grand nombre de centres de recherche, militaires, publics et privés prirent part à ce projet. Il était normal que leurs réseaux internes furent les premiers reliés à Internet. C’est pourquoi, dès sa création, Internet sera un méta-réseau, un réseau de réseaux qui va peu à peu relier la communauté scientifique et universitaire mondiale.
Internet arrive en Europe en 1982. L’année 1984 est une année charnière: Internet perd son caractère militaire.
Les universités, friandes de ce nouveau système de communication font tout ce qu’elles peuvent pour se l’approprier, ainsi le réseau devient public. Depuis la chute du mur de Berlin en 1989, Internet s’est largement ouvert au grand public et à l’exploitation commerciale. World Wide Web apparaît l’année suivante. Sa facilité d’utilisation contribue grandement à populariser les autoroutes de l’information.
Pour certains, Internet n’est qu’un « minitel géant » permettant d’accéder aux mêmes services qu’auparavant pour un coût plus faible.
Internet, formidable outil d’accès à la connaissance n’a cependant pas toujours bonne presse, en effet, cet outil suscite de grandes polémiques tant sur son fonctionnement que sur sa réelle utilité.
2.1. Internet : un outil dangereux?
2.1.1. La mise en accusation
2.1.1.1. La libre expression
« L’Internet représente une menace pour ceux qui savent et qui décident parce qu’il donne accès au savoir autrement que par le cursus hiérarchique » Jacques Attali Extrait du journal libération du 5 mai 2000
Il est vrai que la première qualité d’Internet « la libre expression » constitue son principal défaut ; La structure même du réseau implique la possibilité pour n’importe quel internaute de pouvoir s’exprimer librement sur la toile et de ce fait autorise les excès c’est à dire la mise en ligne d’informations privées, l’émission de jugements de valeurs purement subjectifs, l’expression de fausses informations13 … tout cela sans qu’il puisse y avoir un quelconque contrôle.
Il est vrai que de nombreuses affaires « montées en épingle » ont vu le jour ces dernières années ; ces fausses rumeurs propagées à des fins malveillantes se retrouvent sur le net et de ce fait leur effet néfaste se retrouve décuplé, voire étendu à l’échelle mondiale.
Il est évident que les victimes de ces opérations se sentent vulnérables et que le « droit de réponse » est assez difficile à réclamer. A l’époque des média traditionnels, il suffisait de demander à la revue, la chaîne, … un démenti public, aujourd’hui compte tenu de la complexification des réseaux d’informations il est quasiment impossible (si cela a été conçu dans l‘intention de nuire) de retrouver la source de la rumeur et également difficile de toucher tous les gens qui ont eu connaissance de l’événement à des fins de démenti. Ce type de recherche équivaudrait à retrouver Monsieur X à l’échelle planétaire…
Les groupes de discussion sont également des lieux soumis à fortes controverses, car de nombreux participants voient dans ces groupes de bons moyens de faire leur propre publicité et appauvrissent ainsi les débats de façon fréquente (sauf si la liste dispose d’un modérateur*)14

13 CF partie sur désinformation
14 personne en charge contrôler la conformité des message ave les objectifs, règles et principes de la liste

2.1.1.2. L’explosion de l’e-busines
De même l’Internet en général se retrouve envahit de sites commerciaux payants. Les informations contenues dans la page de garde sont attirantes cependant, dès que l’internaute souhaite consulter les pages décrites, il se retrouve à devoir saisir son numéro de carte bleue. Le principe d’Internet, au départ, était de pouvoir échanger des informations et des idées librement et sans coût supplémentaire que celui de l’abonnement et de la communication, cependant, les marqueteurs ont rapidement réussi à rendre une grande parie des sites référencés aussi pauvre que les services d’un minitel.
Si nous considérons que certains services payants s’avèrent intéressants, une nouvelle barrière s’érige alors : le paiement en ligne. A l’heure ou de nombreuses personnes ont encore peur de régler leurs achats par carte bleue et préfèrent utiliser l’argent liquide (palpable), comment ces dernières peuvent-elles accepter l’idée d’écrire leur numéro de carte bleue sur un écran d’ordinateur, dématérialisant l’échange humain, et faire suffisamment confiance aux machines pour traiter correctement l’opération qu’ils souhaitent effectuer ? Ce type de réalisation relève aujourd’hui de l’irrationnel pour une grande partie de la population française.
2.1.1.3. La surabondance d’informations
Il faut reconnaître que la toile est grande pour ne pas dire immense et que de prime abord, il est facile de s’y perdre. Lors des premières connections, il est très rare de pouvoir trouver l’information recherchée sans y avoir passé quelques heures.
L’étendue du réseau, les milliers de sites disponibles (nombre croissant de façon exponentielle chaque jour), le multiplicité des outils de recherche et leurs fonctionnements variants de l’un à l’autre, font que l’internaute débutant peut se décourager rapidement s’il n’a pas un besoin déterminant de recherche d’informations ou s’il ne se contraint pas à poursuivre ses efforts . On ne peut pas dire que les premières heures de connexions soient rentables, bien au contraire, elles représentent dans la majorité des cas une perte de temps. Une fois que l’internaute a compris les fondamentaux d’usage de l’Internet (mots clefs, structuration des adresses, moteurs et annuaires de recherche, …) il se retrouve avec une multitude de sites dédiés au thème recherché et doit « faire le tri ». S’il passe en revue tous les résultats de sa recherche, l’internaute peut y perdre des heures, et cela sans jamais être sûr de trouver ce qu’il cherche. De nouveau à cette étape, il faut qu’il comprenne les méthodes permettant de faire le tri parmi cette surabondance et le découragement le guète de nouveau.
On passe donc, d’une abondance d’informations, qui constitue la richesse du réseau à une surabondance d’informations qui la rend inexploitable et introuvable.
« si, en effet, Internet, a beaucoup à offrir à qui sait ce qu’il cherche, le même Internet est tout aussi capable de compléter l’abrutissement de ceux et celles qui y naviguent sans boussole ». 15

15 Laurent Laplante extrait de Ignorant par abus d’information.

2.1.1.4. La désinformation
Cette pratique visant à diffuser de fausses informations, leurres, … existe depuis des siècles voire des millénaires, en effet, de tels procédés sont présents dans des écrits de guerre chinois datant de 2000 ans avant JC.
La désinformation peut avoir plusieurs finalités « l’information est le principal outil de guerre économique en servant à la fois d’épée et de bouclier ».16
** La désinformation en tant que bouclier
Une entreprise compétitive au 21e siècle se doit de ne pas laisser transpirer des informations stratégiques la concernant, si elle ne veut pas rapidement perdre sa place sur le marché. Il est impératif de communiquer correctement mais également de protéger son information.
Prenons l’exemple de Sony qui semble avoir une stratégie mal définie car de nombreuses informations contradictoires concernant ses produits circulent un peu partout. Un veilleur se penchant sur cette société ne peut que très difficilement croiser les informations et définir clairement leur stratégie. Ce manque de cohésion informationnel est il le reflet du fonctionnement interne de la structure ou un choix délibéré de désinformation afin de conserver au mieux les secrets stratégiques de la société ?
Il semble qu’en effet, la deuxième solution soit la plus probable, l’abondance d’informations contradictoires émises par la structure rend quasiment impossible l’anticipation de leur stratégie, les veilleurs offensifs perdent énormément de temps à contrôler les informations et de ce fait n’en exploitent que peu.
Ce type de stratégie constitue un usage de l’information non négligeable et pertinent, cependant il faut s’assurer que les clients eux même ne soient pas déroutés par ce manque de cohésion.
** La désinformation en tant qu’épée
Très souvent la désinformation a pour finalité de discréditer des concurrents. Il est très difficile pour le consommateur de connaître le bien fondé d’une accusation ou de rumeurs, cependant quand il y va de la vie d’être humains, le doute qui s’installe fait souvent plus de dégâts que l’information elle même, car il subsiste lui dans le temps.

16 Heidi Toffler article paru dans la revue échanges

Prenons l’exemple de l’affaire Perrier : historique issu d’un article paru dans la revue
Echanges en 1994 « Guerre et contre guerre de l’information économique »
« A la fin de l’année 1989, PERRIER est une société en pleine forme financière.  » Vive activité boursière autour du titre « , 31 000 titres échangés le mercredi 27 décembre, 22 000 le jeudi 28. L’entreprise dégage alors 1,244 milliards de francs de bénéfice pour l’exercice prenant fin au 30 juin 1989 et est la société la plus opéable de France. Mais le week-end qui suivit aurait pu lui coûter la vie.
Suite à l’information transmise aux Etats-Unis par « l’agent », la Food Drug and Administration prévient PERRIER Group of America, le 2 janvier 1990, de la présence de Benzène dans quelques bouteilles. Confirmation le 5 après analyse par un laboratoire de Caroline du Nord. Puis tout s’enchaîne :
Le 12 janvier, pour cause de gestion d’image, PERRIER est contraint de retirer du marché américain 3 millions de caisses d’une valeur de 40 millions de dollars soit 225 millions de francs.
Le 13 janvier, SUNTORY (importateur japonais) retire 10 000 caisses du marché japonais. Déclenchement des ventes du titre à la bourse de Paris qui entraînent une suspension de cotation. Situation qui rejaillit sur son principal actionnaire, EXOR, dont le titre perd 7%.
Le 14 janvier, la RFA stoppe les ventes de PERRIER alors que les tests de vérification ne font que commencer. Depuis le 12 janvier les ventes ont été suspendues aux Etats-Unis, au Canada, au Japon, en Allemagne, en Suisse, au Danemark et à Hong-Kong.
En 3 jours les jeux semblent être faits : PERRIER ne s’en remettra pas, les concurrents se frottent les mains. L’entreprise doit réagir très vite et le fera en se battant sur le même terrain que celui de l’attaque : l’information.
Le 14 janvier, le PDG, Gustave LEVEN, sonne le départ d’une stratégie de contre- information qui s’avérera d’une efficacité fulgurante. Il annonce le retrait mondial de toutes les bouteilles et joue sur la transparence : les tests en interne prouvent que la source n’est pas en cause ; il s’agit d’une erreur humaine que PERRIER assume ; l’entreprise supportera le coût du retrait des 160 millions de bouteilles soit 400 millions de francs (200 millions avant impôt). Cette annonce est relayée par le Professeur Jean François GIRARD, Directeur Général de la Santé :  » la consommation quotidienne d’un demi litre de PERRIER pendant 30 ans n’augmenterait que d’un millionième le risque d’apparition d’un cancer […]. La décision de retrait des eaux PERRIER ne correspond nullement à une mesure d’ordre sanitaire « .
Le 15 janvier à 13 heures, l’action remontait de 6,5%
Le 16 janvier, elle remontait de 6,3%. L’information ouverte par la COB qui soupçonnait des mouvements douteux autour du titre PERRIER est levée.
Ce retournement de situation à l’avantage de PERRIER est si spectaculaire qu’une deuxième vague d’attaques est organisée :
Le 20 février, une athénienne de 36 ans réclame à PERRIER 7,5 millions de francs en dédommagement de l’explosion d’une bouteille qui lui aurait fait perdre un œil. Les faits remontent au 25 août 1986, soit trois ans auparavant.

Le 26 février, on apprend que plusieurs plaintes ont été déposées contre PERRIER en deux semaines. Cinq à six personnes dans le Connecticut et en Pennsylvanie ont, séparément, porté plainte avec demande de portée collective (Class Action).
Ces attaques resteront vaines. Après quelques investissements publicitaires, PERRIER annonçait dès le mois d’août 1990 avoir retrouvé la première place en Grande-Bretagne.
Cet exemple rend compte de la puissance d’une attaque informationnelle, permise par la vitesse de circulation de l’information et l’orchestration des événements. Plus efficace qu’une attaque financière, elle aura coûté à PERRIER plusieurs centaines millions de francs. Il fait également réfléchir sur la nécessité impérieuse de protéger son information et pas seulement celle qui porte sur les orientations stratégiques. Mais plus encore, il montre l’étonnante puissance de frappe de la contre information ».
Cet exemple montre bien à quel point la désinformation est une épée aiguisée,
Perrier a su réagir à temps et correctement à cette attaque, cependant la réussite de la riposte n’est pas toujours un succès : Coca cola a connu récemment le même type de problème et semble ne pas avoir réussi à y faire face de la même façon.
Coca a réussi à regagner la confiance des consommateurs, mais n’a pas désamorcé le processus de désinformation quand il s’est mis en route, au contraire ils l’ont subi comme paralysés et dépassés par les évènements.
Ces pratiques de désinformation ne sont pas uniquement utilisées sur Internet, elles existaient bien avant qu’il fasse son apparition. Cependant l’outil a permis une accélération du phénomène et les sociétés ayant pour habitude de recourir à ce genre de pratique, ont trouvé dans Internet un formidable outil de dénigrement et de désinformation.
Faire circuler une rumeur sur l’Internet est une chose très aisée et la rapidité de diffusion de l’information est déterminante (tant pour la diffusion de la fausse information que pour la réponse à celle ci).
La rapidité des communications et la taille de la communauté internaute en font un outil idéal pour ce type de pratique. De plus le phénomène « écho » est une composante de l’Internet car n’importe qui peut être le relais de l’information et l’internaute peut devenir lui même un des acteurs de l’effondrement d’une société ou d’une entité sans le vouloir.
Lire le mémoire complet ==> (L’intégration d’Internet en tant qu’outil de veille dans une entreprise internationale)
Mémoire de fin d’études – Spécialisation affaires internationales
Ecole Supérieure de Commerce Marseille Provence

Rechercher
Télécharger ce mémoire en ligne PDF (gratuit)

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top