L’architecture des structures et la sécurité en prison

La sécurité par la structure elle-même – Premier paragraphe :
L’architecture d’un établissement pénitentiaire doit prendre en compte un certain nombre de critères, notamment la catégorie de la population pénale qui y sera détenue. Ainsi, une maison centrale sécuritaire comme celle de Saint Maur, a une architecture axée exclusivement sur la sécurité. Néanmoins le facteur de l’ancienneté de l’établissement doit être également pris en compte pour les caractéristiques de l’enceinte périmétrique (A.) ainsi que des bâtiments en eux-mêmes (B.).
A. Les enceintes :
Comme le souligne M. Favard, « ce sont toujours les bons vieux hauts murs de la prison qui constituent la base fondamentale d’une sécurité bien tempérée »14. Dans son rapport, M. Chauvet estime que pour éviter les évasions ainsi que les intrusions d’objets, qui ont pour effet de produire un sentiment d’angoisse chez le personnel et un manque de crédibilité de l’institution, il faut « rétablir la notion d’une enceinte pénitentiaire aussi imperméable que possible»15. L’enceinte périmétrique comporte deux murs, encadrant un chemin de ronde accessible depuis l’entrée unique de l’établissement. Selon les cas, le mur intérieur peut être soit grillagé (par exemple, le centre de détention de Bapaume, où d’ailleurs le grillage est protégé par un câble à choc16, et aussi la maison d’arrêt de Loos), soit en béton (cas du centre de détention de Loos). Celui extérieur est toujours un mur en béton d’une hauteur supérieure au premier. Le problème majeur concernant la visibilité est que bien souvent, les murs sont gris, ce qui ne permet pas au surveillant du mirador, la nuit, de pouvoir distinguer les ombres. Dans certains endroits, l’enceinte peut être constituée par les murs des ateliers, des garages ou encore des bâtiments administratifs.
Le rapport Chauvet préconise que le mur intérieur soit en béton dans sa première partie et grillagé dans sa partie haute, ce qui favoriserait « une meilleure vue et éviterait les ricochets de balles en cas de tir »17. De plus, le fait de mettre du grillage à l’intérieur et non un deuxième mur en béton, permet une ouverture vers l’extérieur pour les détenus, bénéficiant par la même occasion aux surveillants.

14 M. Favard, Prison, 1994, p85, Flamarion.
15 Citation extraite de l’introduction du rapport Chauvet.
16 Le câble à choc est donc disposé sur la clôture intérieure, sa mise en vibration déclenche une alarme.
17 Première partie, 1-a. Les principes communs aux deux types d’enceintes.

Ensuite, le rapport recommande également la mise en place d’un double rouleau de concertina (fil barbelé), sur le haut du mur d’enceinte extérieur.
Le chemin de ronde, c’est-à-dire l’espace qui se situe entre les deux murs d’enceinte, devrait être en macadam souple. Néanmoins dans la pratique, il est généralement en terre, par conséquent en boue, lorsqu’il pleut !
Comme on l’a vu précédemment, l’enceinte périmétrique permet évidemment d’empêcher les détenus de s’évader, mais elle permet aussi d’éviter l’intrusion d’objet. Néanmoins, à ce sujet, des efforts peuvent être faits, étant donné que de nombreux objets, comme des portables, de la drogue ou même des armes, sont tout de même interceptés dans les cours de promenade, les terrains de sport ou le chemin de ronde. A la maison centrale de Saint-maur, la grandeur du chemin de ronde ne permet aucune intrusion.
Mais, malheureusement, cette solution n’est pas réalisable dans tous les établissements puisqu’il faut énormément d’espace. Aussi, elle n’est pas non plus utile pour tous, étant donné que pour certaines prisons, la population pénale n’exige pas un tel degré de sécurité. D’ailleurs, à ce sujet, un projet a été proposé lors de la discussion sur la future loi pénitentiaire18. Il consiste à séparer les détenus selon leur comportement dans des établissements où la sécurité périmétrique y serait proportionnelle. Cela permettrait aux détenus qui ne sont pas dangereux pour l’établissement de vivre une détention moins pénible.
Un autre problème qui se pose également concernant l’enceinte extérieure, est l’emplacement même de l’établissement. En effet, certaines prisons, comme notamment la maison centrale de Poissy, se situent au cœur même de la ville. Par conséquent, il y a plus de risque d’intrusions d’objets et d’aides extérieures pour une évasion. Mais désormais, les établissements pénitentiaires se situent généralement dans des zones non occupées. C’est ce qu’on appelle les prisons « des champs » à l’opposé des anciennes, celles « des villes ». Afin de limiter les rapports avec l’extérieur, un grillage peut être installé à l’extérieur de l’enceinte pénitentiaire, afin que des individus ne s’approchent pas de la prison.
L’enceinte périmétrique est primordiale pour un établissement pénitentiaire. Mais il ne faut pas négliger l’importance des bâtiments (B.), qui sont les premiers remparts contre une tentative d’évasion.
B. Les bâtiments :
Un établissement pénitentiaire se compose de la détention et d’une zone administrative. Cette dernière, pour des raisons de sécurité, est réservée aux personnels pénitentiaires. Seule la détention est prévue pour recevoir les détenus. Elle comporte les bâtiments d’hébergements, les ateliers, les cours de promenade, les salles de sport…
Par mesures de sécurité, toutes ces zones doivent être clairement délimitées et sectorisées. De plus, elles doivent être facilement accessibles en cas de difficulté. Ainsi, un couloir d’intervention doit être prévu et utilisé lors d’incident important. De cette manière, les surveillants peuvent se rendre sur les lieux, sans avoir à passer entre les détenus.
Les murs des bâtiments ainsi que les fenêtres sont évidemment étudiés afin qu’aucun risque d’évasion ne puisse se produire : traitement anti-escalade et anti-grappins, traitement particulier anti-évasion des fenêtres, scellements des huisseries des fenêtres,…19 Néanmoins, il reste à vérifier que tous les établissements en soient dotés.
De plus, certains bâtiments sont sur plusieurs étages, comme les établissements à Loos.
Néanmoins, dans d’autres prisons, les bâtiments ne sont pas visibles de l’extérieur, c’est le cas à la maison centrale de Saint Maur et au centre de détention de Châteauroux. Le problème majeur dans l’architecture résulte du fait que dans la plupart des établissements, les bâtiments n’étaient pas destinés pour accueillir des détenus. Par conséquent, ils ont dû être réaménagés, ce qui a engendré des inconvénients importants. C’est ce qu’a constaté M. Karsenty dans son rapport : « les zones périmétriques présentent des fragilités dans plusieurs établissements (…), il est difficile fréquemment d’assurer une bonne coordination des mouvements »20. C’est le cas pour le centre de détention de Loos, qui était à l’origine une abbaye. Dés lors, le lieu d’hébergement est constitué par un bâtiment21 unique de détention, qui ne permet donc pas la création d’unités de vie. Ce bâtiment étant trop grand et trop haut, les conditions idéales pour la surveillance des détenus ne sont pas optimales.

18 Document de présentation générale de l’avant-projet de loi sur le peine et le service public pénitentiaire.
19 Bureau des études immobilières, La sûreté en milieu pénitentiaire, l’apport du programme 13000 au patrimoine classique, essai de synthèse, septembre 1992, p12.
20 Ministère de la justice, dossier de presse 1990, La sécurité dans les prisons, II, synthèse du rapport de M. Karsenty, p4.

De plus, certains établissements pénitentiaires sont très anciens, ce qui entraîne des conditions de détention lamentables, ainsi que des normes sécuritaires défectueuses. Depuis plus d’une vingtaine d’années, le ministère de la justice s’est engagé dans un effort de rénovation, mais également d’agrandissement de son parc pénitentiaire, sans que malheureusement les prisons anciennes ne ferment. Ainsi, en 1992, les constructions modernes représentaient 50% du parc immobilier pénitentiaire22. La conception traditionnelle des établissements en structure de nef a été remplacée par une volonté d’adapter les structures carcérales aux exigences des détenus. C’est pour cette raison, que le parc immobilier pénitentiaire a subi de nombreuses réformes, notamment celle de la loi de 1987 sur les prisons 13000, permettant une évolution et une modernisation importante. En effet, l’architecture est étudiée afin de correspondre le plus possible aux besoins sécuritaires d’un établissement pénitentiaire. Par exemple, au centre de détention de Bapaume, les bâtiments sont décomposés en petites unités de vie. L’architecture est en forme d’ « étoile ».
Néanmoins, en règle générale, quelques reproches ont été formulés lors notamment du colloque de Montpellier le 17 mars 1997. En effet, il aurait fallu une meilleure connaissance du fonctionnement et des exigences de sécurité. A ce sujet, M. Jean Claude Parriaud, ingénieur général des Ponts et Chaussées, a été chargé de mener une réflexion sur l’architecture des nouveaux établissements. Il critique l’organisation architecturale des établissements du programme 13000. Il propose par conséquent de « différencier l’architecture des structures selon le type de population qu’ils auront à prendre en charge, à améliorer la sûreté des établissements, les conditions de l’exercice professionnel des personnels et les conditions de vie en détention »23. Thèmes qui ont d’ailleurs été repris par l’avant projet de la loi pénitentiaire.

21 Il existe un bâtiment B qui a été construit pour accueillir les détenus en fin de peine, travaillant et ayant de bonnes conditions de réinsertion. Le mode de vie est plus souple étant donné que les détenus ont leur propre clef de cellule et ont une unité de vie.
22 Le problème de la sécurité dans les prisons, Gazette du palais, 1992 (2éme semestre), Denis Périer Daville.
23 Courrier de la Chancellerie, Trimestriel d’information du ministère de la Justice, Patrimoine : l’architecture des futurs établissements pénitentiaires, http://www.justice.gouv.fr/chancell//cc42pat.htm

Evidemment l’architecture ne comprend pas seulement l’enceinte périmétrique et les bâtiments. En effet, on trouve également des postes de sécurité protégés (deuxième paragraphe), qui permettent de gérer les mouvements des détenus, et ainsi de les contrôler, tout en restant protégé.
Lire le mémoire complet ==> (La sécurité en prison)
Mémoire de DEA droit et justice
Ecole doctorale n° 74 – Lille 2

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