Régimes d’exonération de la Taxe Foncière créés par la Loi DTR

Régimes créés par la Loi DTR – Sous-Section 3
1. L’apport de la Loi DTR
Un grand pas a été franchi avec la Loi sur le Développement des Territoires Ruraux du 23 février 2005.237 D’abord, cette loi consacre l’existence politique et surtout juridique des zones humides. D’une politique d’assèchement de ces zones, une véritable politique de reconnaissance et de préservation des zones humides est engagée. Surtout, c’est la première fois que l’intérêt de la protection des zones humides est lié à leurs fonctions.
La fonctionnalité des zones humides est en effet reconnue. Ainsi, ce n’est plus seulement par les composantes milieu, ou espèce que les zones humides sont protégées, mais du fait de leurs fonctions naturelles diverses.
L’association nationale des élus des zones humides a organisé une enquête nationale sur la fiscalité du foncier non bâti à partir de décembre 2002. Cette enquête a joué un rôle important dans l’élaboration de la loi, dans les articles concernant les zones humides. Pour cette enquête, cinq secteurs tests avaient alors été choisis, car représentatifs des espaces concernés, dans le but de regrouper des statistiques quant à la rentabilité des terrains. L’idée finale fut de favoriser la protection des zones humides, en allégeant notamment la fiscalité qui leur était propre et qui pesait sur leur conservation.

237 Loi DTR, précitée.

Cette loi s’inscrit dans une optique plus générale de développement du monde rural. Elle aborde les thèmes du développement économique du monde rural, des espaces périurbains ainsi que de la problématique de l’aménagement foncier, les zones humides étant concernées par ce dernier thème. Les dispositions intéressant les zones humides sont regroupées au chapitre III du titre IV.238 La loi revient sur l’intérêt des zones humides, et précise leur définition et délimitation. Un renforcement des outils traditionnels de protection est aussi prévu.
2. Les exonérations prévues
Par ailleurs, une nouvelle fiscalité des zones humides est mise en place. Ainsi, trois régimes d’exonération de la Taxe Foncière sur les Propriétés Non Bâties sont prévus, tous trois dans le but d’alléger la pression fiscale qui pèse sur les propriétaires d’espaces naturels zones humides pour les inciter à prendre des mesures de protection et de conservation de ces zones. La loi DTR approfondit le mouvement déjà entamé par la suppression de l’exonération de la taxe pour l’assèchement de ces zones (décidée par la Loi de finances pour 1991). Il faut par ailleurs rappeler que seulement la part communale est concernée du fait de la suppression des parts régionales et nationales.
Un nouvel article, article 1395 D, fut inséré au CGI par l’article 137 § I. de la Loi DTR. L’article intitulé « Exonération partielle ou totale de taxe foncière sur les propriétés non bâties dans les zones humides » expose les trois régimes d’exonération de la TFPNB, de 50% et de 100% suivant le type de propriétés concernées. Il stipule que l’exonération concerne « les terrains situés en zones humides gérés dans le respect des règles de préservation de l’avifaune et de non recouvrement des parcelles ».

238 Articles 127 à 139 de la Loi DTR, précitée

Le paragraphe II de ce même article prévoit que l’Etat compensera les communes des pertes subies par l’exonération fixée. La compensation est calculée en multipliant chaque année et pour chaque commune ou Etablissement Public de Coopération Intercommunale239 à fiscalité propre, le montant des bases d’imposition exonérées de l’année précédente par le taux de la taxe foncière de la même année. Pour les communes appartenant à un EPCI sans fiscalité propre, le taux voté par la commune est majoré du taux appliqué au profit de l’EPCI.
Les terrains concernés par cette exonération sont définis par la nomenclature fiscale, datant de l’instruction du 31 décembre 1908.240 Ainsi, différentes catégories sont définies par cette instruction. L’exonération prévue par la Loi DTR vise les catégories 2 et 6, c’est-à-dire les prés, prairies, bruyères, marais ainsi que les terres vaines et vagues (y compris les tourbières naturelles c’est-à-dire non exploitées). Pour les sites Natura 2000, sont ajoutées les catégories 5 et 8, soit les forêts alluviales et ripisylves, les lacs, étangs, mares, marais salants et salines. Ces terrains doivent par ailleurs être dans des zones humides telles que définies à l’article L. 211-1, 1° du code de l’environnement.
Les trois régimes d’exonération définis par la Loi DTR sont les suivants :
a. Exonération de 50% de la TFPNB en dehors des zones protégées ou certaines zones non protégées
Cela concerne les « zones humides » comme définies à l’article L.211-1 du Code de l’environnement. Les catégories 2 et 6 de l’instruction ministérielle de 1908 sont visées.241 Sont exclus de cette exonération les exploitations de tourbes242, les bois et forêts alluviales, lacs et étangs, les mares, les canaux non navigables, les salins, les salines et les marais salants. Ces dernières zones peuvent cependant faire l’objet d’une exonération totale si elles appartiennent à des zones humides d’intérêt environnemental.

239 « EPCI ».
240 Nomenclature définie à l’article 18 de cette instruction.
241 Prés, prairies naturelles et herbages ainsi que les pâturages, landes, pâtis, bruyère, marais, terres vaines et vagues (tourbières y compris).
242 Car assimilées à la catégorie 9 « carrières » de l’instruction de 1908, précitée

b. Exonération de 100% de TFPNB dans les zones protégées
L’exonération est portée à 100% pour les propriétés situées dans des zones naturelles protégées. Les zones humides concernées par cette exonération totale de TFPNB sont les suivantes : zones d’intérêt environnemental particulier, acquises et gérées par le Conservatoire du Littoral, des parcs nationaux, des réserves naturelles nationales ou régionales, des parcs naturels régionaux, inscrites sur la liste départementale des monuments naturels et des sites, où sont présentes des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées protégées (ZNIEFF).243 D’autres catégories ont été définies244 mais touchent moins directement les zones humides.
Un engagement de gestion identique aux zones exonérées de façon partielle est nécessaire suivant les mêmes conditions. Une charte de gestion explicitant les objectifs des espaces protégés doit être respecté.
Les zones concernées sont basées sur une liste dressée par le maire sur proposition de la commission communale des impôts directs245. Si sur une même commune, sont présentes des zones relevant des deux différentes catégories (exonération partielle et totale), le maire est tenu de dresser deux listes séparées.246

243 Chaque catégorie relevant successivement des articles L. 211-3, L.322-1 et suivants, L. 333-1 et suivants, L. 332-1 et suivants, L. 341-1 à 342-1, et L. 411-1 à L. 411-7 du Code de l’environnement.
244 Par l’article 146 de la Loi DTR, précitée, codifié à l’article 1395 E du Code de l’environnement.
245 « CCID ».

c. Exonération à 100% de la TFPNB en zone Natura 2000
Toutes les zones de protection spéciale ou les zones spéciales de conservation sont concernées. La liste ce celles-ci est détenue par le préfet. L’engagement de gestion, nécessaire à l’exonération, se fait par l’intermédiaire d’un contrat Natura 2000 ou via une charte Natura 2000, pour cinq ans. Cette exonération prend place à partir de l’imposition 2006.247
L’exonération Natura 2000 prévaut sur l’exonération concernant les « terrains situés en zones humides ».
3. Les conditions
Les propriétaires doivent souscrire à des engagements de gestion qui ont été précisés par le Décret du 3 avril 2007.248 En outre des conditions de forme telles que les coordonnées du propriétaire, les références cadastrales, les natures des cultures ou encore le plan de situation de la zone concernée,
l’engagement de gestion porte sur la conservation du caractère humide des parcelles ainsi que sur le maintien en nature de prés et prairies naturels, d’herbages, de pâturages, de landes, de marais, de pâtis, de bruyères et de terres vaines et vagues. Certaines mesures en vue de la conservation des zones humides, dont les chartes et documents de gestion ou d’objectifs, doivent être respectées. Chaque engagement de gestion comporte les mesures de conservation à mettre en œuvre.
Des contrôles sont possibles, et l’exonération peut être retirée et le remboursement exigé.

247 Article 1395 E du CGI issu de l’article 146 de la Loi DTR, précitée

La liste des parcelles concernées par les exonérations de TFPNB est établie par le maire249 avant le 1er septembre, transmise à l’administration des impôts et affichée en mairie. Le propriétaire doit, quant à lui, souscrire à l’engagement à l’administration des impôts avant le 1er janvier de la première année au titre de laquelle l’exonération est applicable ou renouvelable. Les exonérations sont renouvelables autant de fois qu’un nouvel engagement est souscrit.

248 Décret n° 2007-511 du 3 avril 2007 pris pour l’application de l’article 1395 D du code général des impôts et relatif aux modalités de l’engagement de gestion prévu par cet article (J.O n° 81 du 5 avril 2007, p. 6443 texte n° 53) ; Codifiée à l’article 310-00 H du CGI.
249 Ou par le préfet dans le cas des sites Natura 2000.

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Mémoire de fin d’études – Diplôme IEP
Université LYON 2 – Institut d’Etudes Politiques de Lyon

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