État des lieux de l’enseignement du français au Laos
Les dispositifs de soutien à l’enseignement du français, Vientiane

1-2.3. Les dispositifs de soutien à l’enseignement du français

Au Laos, les actions de soutien à l’enseignement du français émanent de deux institutions différentes :

  1. le Service de Coopération et d’Action Culturelle (SCAC) et
  2. l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF).

Nous allons donc tout d’abord présenter ces acteurs avant de rentrer dans le détail de leurs actions.

1-2.3.1. Les deux principaux acteurs : le Service de Coopération et d’Action Culturelle et l’Agence Universitaire

L’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) et le Service de coopération française sont les deux principaux acteurs de la diffusion du français au Laos. Pour ce qui est de l’AUF nous la présenterons en détail plus avant dans notre exposé (cf. 1-4.1, p. 34-36).

Le Service de Coopération et d’Action Culturelle (SCAC) dépend de l’Ambassade de France.

Son rôle est de mettre en place des projets de coopération par l’intermédiaire notamment d’un réseau constitué du Centre de Langue Française (CLF), d’experts en coopération et d’une École Française (l’École Hoffet), ainsi que d’autres services français (Agence Française de Développement (AFD), École Française d’Extrême Orient (EFEO), l’Institut de Recherche et de Développement (IRD) et le Centre International pour la Recherche Agronomique et le Développement (CIRAD)).

La coopération française met l’accent sur le développement de l’apprentissage de la langue française et sur le renforcement des actions visant à faire prévaloir la diversité culturelle (incluant les activités en faveur de la protection et de la promotion du patrimoine laotien). Différents moyens sont mobilisés, notamment autour du CLF pour les activités d’apprentissage du français, les activités de diffusion et de promotion de l’écrit avec la médiathèque et les évènements culturels.

En particulier, la France continue son appui à l’expression culturelle laotienne à travers un soutien aux différents médias.

La coopération française souhaite également poursuivre et mieux articuler sa politique d’appui à l’enseignement du français dans le système scolaire et universitaire laotien. Pour cela, elle a mis en place avec l’AUF un projet significatif centré sur la formation des enseignants, l’objectif étant la relève d’une élite francophone.

1-2.3.2. Un projet régional et ses effets au Laos : le volet universitaire de Valofrase

Ce projet intitulé « Valorisation du français en Asie du Sud-est » est novateur par sa dimension régionale puisqu’il réunit les partenaires des trois pays de la zone francophone d’Asie du Sud-Est :

  1. le Cambodge,
  2. le Laos et
  3. le Vietnam.

Il est aussi le premier exemple d’un partenariat bilatéral-multilatéral de cette envergure dans le domaine de la promotion de la langue française.

Il rassemble 8 partenaires :

  1. les ministères de l’éducation des trois pays,
  2. l’OIF,
  3. l’AUF,
  4. la Communauté française de Belgique,
  5. le Québec et
  6. la coopération française.

Son objectif principal est de relancer l’enseignement du français sur une base régionale en renforçant la coopération tripartite pour constituer un pôle de coopération intégré dans la région capable de mener à bien les politiques d’enseignement du français de façon autonome.

Le projet « Valorisation du français en Asie du Sud-Est » est également novateur par son ambition transversale qui vise à mettre en cohérence dans un continuum école-collège lycée-université-emploi les actions variées de l’enseignement du français aussi bien dans les classes bilingues du second degré, qu’à l’université dans les filières universitaires et les filières transversales, dans la section de français de la faculté de droit et de sciences politiques, et dans le département de français de la faculté des lettres de l’Université Nationale du Laos.

Dans le cadre de ce projet par exemple, un appui a été apporté à la mise en place d’une section Langue Etrangère Appliquée (LEA) à la faculté des lettres, mais aussi de sections de français au sein des Écoles Normales Supérieures, notamment par l’élaboration et la mise en œuvre de nouveaux programmes de formation initiale et continue des enseignants de français et en français.

La mise en place de la LV2 dans le secondaire et à l’université est également accompagnée, notamment avec le suivi de la création de nouveaux manuels d’enseignement.

Par ailleurs, le projet aide à l’enrichissement des fonds documentaires et au financement matériel et logistique des locaux servant à l’enseignement, l'(auto)apprentissage, etc.

En mutualisant les efforts réalisés pour la qualité de l’enseignement par les ministères de l’éducation des trois pays concernés et par les coopérations multilatérales et bilatérales, il aide à décloisonner et à mettre en cohérence l’offre de français et les actions de soutien à l’éducation en français en Asie du Sud-Est.

1-2.3.3. Les Classes Bilingues

Le dispositif des classes bilingues a été mis en place à Vientiane par l’Ambassade de France en 1995 et dans les provinces de Luang Prabang, de Champassak et de Savannakhet à l’initiative de l’AUF en 1997.

Il a pour vocation de former en français une partie des futurs cadres des administrations et également du secteur privé dans le domaine économique et technique.

Ce cursus bilingue est proposé à partir de la 3ème année de l’enseignement primaire (qui correspond à notre CE2) jusque dans les classes terminales du lycée.

État des lieux de l’enseignement du français au Laos

Au total, pour l’année scolaire 2008/2009, ce dispositif était constitué de 106 classes (48 dans le primaire, 36 au niveau collège et 22 au niveau lycée) dans 13 établissements répartis sur 4 sites : Vientiane, Luang Prabang, Savannakhet et Paksé.

On dénombre 3 041 élèves dont 209 qui ont obtenu leur baccalauréat en fin d’année scolaire. Les enseignants, conseillers ou assistants pédagogiques sont au nombre de 140.

Le Diplôme d’Études en Langue Française (DELF)13 dit « scolaire » valide dorénavant l’épreuve de français dans le cadre du baccalauréat national pour les candidats issus de ce dispositif et le Ministère de l’Éducation s’engage à poursuivre, dans les conditions qui ont prévalu jusqu’à maintenant, le passage des examens de fin de cycle : traduction en français des épreuves du diplôme national de fin secondaire et traduction en français des épreuves du concours d’entrée à l’université.

Le baccalauréat de ces trois pays, option francophone, fait l’objet d’une validation de l’AUF.

La mise en œuvre de ce projet a été confiée à cette dernière en 1997 : pour inciter les enseignants à y adhérer une subvention a été prévue consistant en un versement d’indemnités.

La gestion des classes bilingues est actuellement en cours d’appropriation par les autorités éducatives laotiennes, la France et l’AUF ne versant plus d’indemnité incitative aux enseignants, ce sont désormais les parents qui la financent en versant une cotisation. On peut donc considérer que ces classes bilingues sont un succès.

13 Diplôme s’appuyant sur le Cadre Européen Commun de Référence pour les langues (CECRL) et délivré par le Centre International d’Études Pédagogiques (CIEP), établissement public des ministères chargés de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur français.

1-2.3.4. Le « Dispositif local de préparation aux études supérieures en français »

Ce dispositif également appelé « Sas » a été mis en place dans le cadre de la coopération universitaire et linguistique entre la France et le Laos lancée en 2001.

Intégré dans l’École des Études Fondamentales, (EEF) c’était en fait une classe préparatoire d’une année permettant de faire accéder les étudiants à un niveau suffisant pour poursuivre des études supérieures en français, en France, au Laos dans des filières francophones, ou dans d’autres pays francophones. Une partie des actions a été déléguée à l’AUF en tant qu’opérateur.

Tout comme l’EEF dont il dépendait, ce dispositif a accueilli en 2007-2008 sa dernière promotion d’étudiants (55 étudiants dont 22 en section Sciences et 33 en section Lettres).

Les étudiants sélectionnés (entre 30 et 40 chaque année) sortaient majoritairement des classes bilingues et suivaient, en plus des cours de français général et de Français sur Objectifs Spécifiques (désormais FOS, cf. note de bas de page 31 p.58), une formation méthodologique (rédaction, synthèse,…) et un enseignement dans les matières scientifiques en français (mathématiques, physique, chimie, biologie).

L’enseignement scientifique était assuré par une équipe de 10 professeurs (2 par matière) ayant suivi une formation d’une année en France à l’Institut National Polytechnique de Lorraine (INPL).

Depuis septembre 2003, 28 étudiants (soit 4 à 6 étudiants chaque année) sortis de cette classe préparatoire ont bénéficié de bourses pour poursuivre leurs études supérieures en France (majoritairement pour la préparation d’un Diplôme Universitaire en vue de l’obtention d’une licence ou d’un diplôme d’ingénieur) généralement à l’université de Saint-Étienne ou à Roanne.

Dans la région, l’Institut de Technologie du Cambodge constituait un autre débouché. Les autres étudiants suivaient, pour la plupart, les enseignements des Filières Universitaires Francophones FUF soutenues par l’AUF ou du département « relations internationales » de la faculté de droit et de sciences politiques soutenu par la coopération française.

1-2.4. État des lieux de l’enseignement du français au Laos

Comme le souligne les conclusions d’un rapport d’enquête commanditée par l’AUF en juin 2007, trois facteurs principaux nuisent à l’efficacité de l’enseignement de la langue française au Laos :

  • Une politique d’enseignement des langues vivantes peu cohérente et très peu suivie;
  • Un manque de ressources humaines adaptées;
  • Et une pénurie de ressources matérielles.

L’offre de l’enseignement du français est très aléatoire et elle ne répond pas à une demande précise, ni de la part des parents, ni de la part des autorités éducatives locales.

Ce sont généralement les directeurs des établissements qui décident seuls de la politique linguistique qui sera adoptée dans leur école. Un directeur francophone ou francophile se battra pour le maintien d’une classe de français dans son établissement (dans laquelle il sera d’ailleurs souvent le seul à enseigner).

Mais en général, surtout à la campagne, les parents choisissent l’école la plus proche de leur domicile, indépendamment de la qualité de l’enseignement dispensé ou des langues enseignées.

L’apprentissage du français est donc complètement conditionné par l’offre qui est faite dans un village ou une zone déterminée. Et on observe à ce sujet une grande disparité à travers le pays.

Par ailleurs, il apparaît que le nombre de professeurs disponibles et leur faible niveau de formation limitent considérablement le développement de l’enseignement du français.

Quant aux parents, même s’ils donnent priorité à l’anglais, ils ne s’opposent aucunement à l’enseignement de la langue française et la preuve en est qu’ils accordent leur préférence aux établissements dispensant un enseignement d’une LV2.

Il faut signaler que les directeurs sont tributaires des enseignants disponibles dans leur zone géographique et de leur manque de mobilité; ces derniers ne souhaitent pas, par exemple, faire plus de 10 km pour rejoindre leur lieu de travail.

Nombre de diplômés du département de français, devenus professeurs titulaires, préfèrent enseigner une autre matière plutôt que d’envisager un déplacement ou un éventuel déménagement !

D’ailleurs, le manque d’enseignants touche non seulement le français mais aussi d’autres matières. Ainsi, le professeur de français affecté à un établissement où le français n’est pas ou plus enseigné, est aussitôt chargé d’enseigner une autre matière.

Leur manque de formation à la pédagogie des langues, leur faible niveau, ainsi que la pénurie de matériel disponible dans les établissements n’incitent pas les directeurs à mettre en place des enseignements de français là où ils n’existent pas.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: Université Paris III – Sorbonne Nouvelle - Ingénierie de formation pour les enseignements de français langue étrangère et des langues
Auteur·trice·s 🎓:
Aurélie CADIER

Aurélie CADIER
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté pour l'obtention du Master 2 professionnel parcours 3 - 2009-2010
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