Maintien et dynamique du réseau Erasmus Européen

Maintien et dynamique du réseau Erasmus Européen

5.2.3 Maintien et dynamique du réseau Erasmus Européen

La mobilité institutionnalisée par le programme Erasmus produit-elle des liens qui perdurent après les départs ? Comment et pour combien de temps sont-ils entretenus ? Notre enquête par questionnaire, permet de répondre à cette question uniquement sur un court terme, mais notre investigation par entretiens et l’observation directe complètent nos analyses sur des liens internationaux multiples, qui, pour un grand nombre, succombent au poids des années et de la distance.

Lorsque nous nous intéressons aux relations inter- nations maintenues au-delà de plusieurs années, nous sommes frappés par des relations distendues, peu régulières, qui sont réactivées seulement au moment de projets de voyages. Concrètement, ne résistent au temps qu’un petit nombre de relations (souvent intra- nationales) et quelques rapports amoureux bi-nationaux. Dans un premier temps nous verrons les régularités statistiques et les indicateurs de tendances centrales, pour dans un second temps spécifier la nature des liens conservés, (à l’aide à la fois des réponses aux questions ouvertes du questionnaire, des entretiens et de l’observation directe).

Les moyens de communication à distance, au retour des étudiants Erasmus dans leurs pays respectifs, attestent immédiatement que les relations sont, dans un premier temps, activement entretenues. On compte de nombreux échanges de courriels, mode de correspondance le plus utilisé. Dans les trois universités, les étudiants Erasmus en font usage à plus de 96%. L’envoi de courriers postaux fait moins l’unanimité, les Turinois ne sont que 17% à s’écrire par voie postale, alors que les Provençaux sont environ 27% et les Bristoliens 20,7%. Par contre les Italiens utilisent plus que les autres le « Chat » (conversation par internet) pour communiquer entre « Ex-Erasmus », (40% d’entre eux en font usage). Le téléphone est également utilisé, principalement pour les communications nationales, car les étudiants Erasmus déclarent avoir surtout maintenu des relations avec des confrères Erasmus de leur propre pays.

Plus de 60% des Provençaux, des Turinois et des Bristoliens, ont des contacts fréquents avec au moins quatre personnes de leur pays d’origine qu’ils ont rencontrées durant leur séjour à l’étranger. Les contacts téléphoniques avec les étudiants Erasmus d’autres pays sont plus rares et moins réguliers.

La majorité des étudiants Erasmus n’a entretenu de relations qu’avec deux ou trois étudiants Erasmus d’autres pays. Même s’ils échangent beaucoup par courriel au début, cette fréquence diminue rapidement avec le temps. Quant aux étudiants du pays d’accueil, 35% à 40% des étudiants Erasmus des trois pays disent n’avoir maintenu aucun lien avec eux. Ceux qui les ont entretenus, évoquent le plus souvent une ou deux personnes seulement.

Tout se passe comme si, dans un premier temps, la mobilité entraînant la mobilité, le désir de voyages s’accroît, voyages qui s’organisent notamment durant les vacances scolaires et qui sont le moteur du maintien des liens. Ce désir, néanmoins refreiné par des impératifs souvent économiques ou temporels inégalement repartis dans la population, fait souvent disparaître avec lui les relations qui sous-tendaient les voyages. Ainsi, immédiatement à leur retour dans leur pays d’origine, existe une volonté quasi-unanime chez l’ensemble des étudiants Erasmus de « repartir »41.

Une envie qui se décline du désir de voyage à la poursuite des études ou la recherche de travail « ailleurs », pour « ne pas revenir en arrière », selon leurs propres expressions. Le séjour Erasmus est ainsi un tremplin vers d’autres mobilités, qui prendront cependant des formes bien différentes suivant les appartenances socio-nationales. Ceci traduit bien la difficulté à réimporter chez soi les ressources sociales liées au statut « d’étranger privilégié », dans un autre pays, (car dégagé de problèmes administratifs et financiers).

L’international permet finalement de « faire valoir », de jouer avec les signes de son rang social. Dans chaque pays, existe un ensemble de critères, de codes permettant de situer socialement une personne : son adresse, ses vêtements, ses attitudes corporelles, sa façon de parler, le lieu de ses études, etc. A l’étranger, on peut jouer sur le flou qui résulte de la diversité nationale des indicateurs sociaux.

Ces possibilités de se distinguer sont un ressort important de l’attrait du séjour Erasmus pour les classes moyennes en ascension. L’identification à un modèle de mobilité est, dans une université massifiée, un moyen de laisser en suspens les problèmes de positionnement social.

Cette évasion sociale est sans doute pour beaucoup dans l’enchantement de la vie à l’étranger et le désir de repartir. D’ailleurs, pour la plupart des étudiants Erasmus cette mobilité s’intensifiera dans la mesure où cette expérience marque une étape vers une pratique migratoire fréquente autour de voyages, à la rencontre du « cercle » d’étudiants Européens ainsi constitué. A l’issue du séjour, les visites aux membres de ce cercle, rentrés dans leurs pays d’origine respectifs et qui les accueillent à leur tour, sont fréquentes.

Certains ex-étudiants Erasmus partent même étudier ou travailler dans une autre région de leur pays d’origine où à l’étranger, comme ceux que nous avons vainement tentés de contacter par téléphone. Repartir pour un second séjour par le programme d’échanges Erasmus n’est pas en principe possible, en conservant le financement de l’UE.

Cependant des possibilités pour des seconds séjours existent dans les trois universités enquêtées. Ils ne sont donc pas rares. A la question : « Avez-vous planifié d’autres voyages ? » à l’issu du séjour Erasmus, plus de 70% des étudiants, quel que soit leur établissement d’origine, ont répondu « oui ». Plus d’un tiers, dans les trois universités, en avait programmé au moins deux (cf. tableau 60a suivant).

41Ce terme a été employé plus de 50 fois dans les entretiens menés, saisis et analysés à l’aide du logiciel d’analyse de textes HYPERBASE.

Tableau 60a : Répartition des étudiants sortants de l’UP, d’UT et l’UB selon le nombre de voyages planifiés, 2004-2005- (en pourcentage)

« Avez-vous planifié d’autres voyages

0= Non

? » UP

27,1

UT

25,2

UB

30,5

Ensemble

28,0

1= Oui72,974,870,572,0
TOTAL100100100100
(N)(155)(127)(82)(364)
= NS
Nombre de voyages planifiés :

0

UP

27,1

UT

25,2

UB

30,5

Ens

27,7

136,137,839,036,8
229,024,420,725,5
3 et plus7,812,68,59,8
TOTAL100100100100
(N)(155)(127)(82)(364)

= 25,1 p < 0, 01

Le tableau se lit ainsi : 27,1% des étudiants sortants de l’Université de Provence en 2004-2005, n’avaient pas planifié de voyage au moment de l’enquête.

Tableau 60b : Voyages planifiés par les étudiants Erasmus sortants de l’Université de Provence, de l’université de Turin et de l’Université de Bristol -2004-2005- (en pourcentage)

UPUTUBEnsemble
*Touristique avec membres
de la famille, conjoint ou amis
rencontrés préalablement……6,311,78,88,7
*Touristique avec conjoint
rencontré en Erasmus…………………4,55,25,34,9
*Touristique,
chez des étudiants du pays d’accueil8,112,615,811,4
*Touristique
avec des étudiants Erasmus51,363,063,158,2
*Stage, poursuite d’études ou travail
à l’étranger27,06,37,015,2
*Autres……………………2,71,101,6
TOTAL100100100100
(N)(111)(95)(57)(263)

= 25,1 p < 0, 01

Source : enquête par questionnaire

Seuls 30,5% des Bristoliens, 27,9% des Provençaux et 25,2% des Turinois disent ne pas avoir concrètement planifié un voyage durant les vacances estivales. Par contre, ils sont environ un quart à en avoir organisé au moins deux. La nature de ces voyages varie cependant selon l’université d’appartenance.

Toutes nationalités confondues, ce sont les voyages touristiques dans d’autres pays (que celui d’accueil ou d’origine) avec des ex- étudiants Erasmus qui sont préférés (comme le montre le tableau n°60b ci-dessus). Néanmoins, les stages et le travail à l’étranger prennent une importance non négligeable chez les Provençaux, avec presque 20% d’entre eux qui énoncent clairement que leur voyage se fera dans le cadre d’une activité rémunérée. Nous pouvons relever plusieurs facteurs explicatifs à cette différence entre Provençaux et Turinois/Bristoliens : l’organisation des études et la composition sociale et disciplinaire de la population étudiante Erasmus dans ces universités.

En France, les formations universitaires s’organisent en deux semestres, avec la dernière session d’examen se terminant toujours avant le mois de juillet. Le « rattrapage » commence au milieu du mois de septembre et pour ceux ayant réussi tous leurs examens, la rentrée universitaire ne se fait jamais avant octobre. Ce qui laisse de longs mois aux étudiants pour pouvoir s’investir dans une activité professionnelle saisonnière ou dans un stage valorisant pour leurs études, notamment pour les étudiants en LEA.

De plus, par rapport à leurs confrères turinois, mais surtout bristoliens, les Erasmus provençaux sont les moins favorisés économiquement, ou du moins les moins aidés par leurs familles. En Italie, les examens se prolongent au mois de juillet, avec même, suivant les disciplines, des examens en fin de mois. La reprise universitaire est également plus précoce, en septembre. Ce qui laisse peu de temps aux étudiants pour travailler. La session de septembre n’a pas le même sens non plus qu’en France.

Il s’agit quelquefois pour des étudiants, de présenter un certain nombre d’examens nouveaux et non pas toujours d’en « re-passer ». En Angleterre, la composition sociale de la population nous permet en grande partie de comprendre ce taux d’activité bas durant l’été. Les étudiants Erasmus britanniques sont en général jeunes et d’origine socio-économique élevée. L’été est également synonyme de retour au sein des familles, puisque, nous l’avons vu, les retours au domicile parental sont peu fréquents durant l’année en Angleterre.

Mais c’est en Italie que les vacances familiales sont les plus diffuses, même si elles concernent toujours moins de 10% des étudiants Erasmus (pourcentage beaucoup plus faible que parmi les étudiants sédentaires).

Les voyages sont donc, dans un premier temps, vecteur de survie des relations nouées lors du séjour Erasmus. Les deux-tiers des relations, selon Ainhoa De Federico42 se poursuivent pendant au moins un an après le séjour. Ainsi Marie nous dit avoir fait « le tour de l’Europe » grâce aux contacts qu’elle a maintenus, mais Polly nous rappelle que les contactes intra-cités résistent mieux au passage du temps:

« Tu gardes beaucoup de contacts, parce qu’après même en étant rentré, on va chez les uns, chez les autres pendant les vacances, même s’ils habitent très loin… On va chez les uns et les autres, on fait le tour de l’Europe, c’est super ! Donc, oui, c’est évident qu’il y a des contacts… par exemple sur dix personnes avec qui on va rester en contact, au bout de un an ou deux, il n’en restera plus que, je ne sais pas, quatre ou cinq.

-Toi, cet été tu es donc allée voir des amis…

Oui, je suis retournée en Italie et puis… Puis j’ai vu d’autres amis Erasmus. J’avais des copines Australiennes, qui sont venues me voir, des amies Italiennes aussi qui sont venues me voir. Et là, je suis repartie en Italie pour les dernières vacances.»

Marie, 23 ans

“L’année prochaine, quand j’aurai de l’argent, j’irai rendre visite à tous mes amis Erasmus.

Donc tu as toujours des contacts avec tes amis Erasmus?

Oh oui, vraiment, on a tous échangé nos adresses emails à la fin de l’année, euh… j’ai les adresses de beaucoup d’amis et je leur ai dit qu’ils pouvaient venir me rendre visite et je suis restée en contact avec environ trois ou quatre d’entre eux. […] Avec Claire (amie Erasmus de Bristol), on avait décidé de vivre ensemble, parce que… on vivait l’une à coté de l’autre au même étage en cité U, et donc on est devenues très amies, pendant que l’on était là-bas.

Polly, 21 ans43

Que se passe-t-il après ? Pour ce qui est des relations inter-nations, elles s’étiolent quelque peu avec les années qui passent. Les contacts intra-nations et surtout intra-cités sont davantage entretenus. Ainsi l’intensité de la diminution des liens s’accentue avec la distance et donne à l’expression « loin des yeux, loin du cœur » toute son acuité.

Les étudiants Erasmus de la même ville se fréquentent régulièrement, mais les contacts avec d’autres Erasmus de leur propre pays diminuent, ainsi que ceux, déjà moins nombreux, avec des Erasmus d’autres pays. Peu nombreuses lors du séjour, les relations d’amitié avec les étudiants du pays d’accueil, sont les moins préservées. Voici ce que nous dit notamment Christina de l’université de Turin deux ans après son séjour Erasmus:

« Maintenant sont passés deux ans, mais l’année passée un gars allemand est venu me rendre visite. Puis, nous les italiens on se voit oui, parce que notamment deux sont de Turin. Donc ces deux, une fille et un gars, je les ai toujours vus, ils sont devenus vraiment des amis. Avec les autres italiens, on se contacte, pas tous, mais quelques uns. Puis par contre avec les étrangers, ce gars qui est venu me rendre visite et un autre

avec qui on échange par e-mails. Il n’y a qu’une fille anglaise avec laquelle on s’écrit, et encore difficilement, pas souvent »

Christina, 24 ans44

42Op. cit De federico

43“Next year when I have some money I shall go visit all my ERASMUS friends.

So you still have contact with your ERASMUS friends?

Oh, yes definitely, we all exchanged email addresses at the end of the year, erm I have the addresses of lots of friends and I have said to them they can come and visit me and I’ve kept in contact with about three or four of them. […] with Claire, we decided to live together, because…. we lived next door to each other in the Halls of residence, and so became very good friends while we were out there.”

Du tableau précédent ressort également que le programme Erasmus, au-delà de sa contribution à la création de liens d’amitié, agit aussi quelquefois sur la formation de couples nationaux ou binationaux. Environ 5% des individus interrogés énoncent que leur prochain voyage se fera avec ou chez leur compagne/compagnon rencontré(e) lors de leur séjour Erasmus. Notre enquête par questionnaire ne nous permet d’observer ce phénomène que de manière indirecte, car aucune question associée directement à ce sujet n’a été posée.

Néanmoins, l’analyse des questions ouvertes et des entretiens nous apprend que la mise en couple lors du séjour Erasmus n’est pas rare. Ceci ne paraît pas surprenant, étant données les caractéristiques sociales communes (et les goûts qui en découlent) de cette population relativement homogène.

Nous sommes ici très souvent en présence de couples homogames, d’un point de vue social et culturel. Cette mise en couple est-elle néanmoins éphémère ou perdure-t-elle dans le temps ? Va-t-elle accroître le nombre de couples binationaux en Europe ? Nous pouvons difficilement apporter une réponse précise à cette question.

Par contre nous pouvons observer de nouvelles formes de « conjugalité solitaire » qui se développent. Forme qui finissent parfois par une cohabitation sous le même toit dans un pays ou dans un autre, en fonction souvent des opportunités d’études ou de travail des partenaires.

Mais les issues de ces relations que nous avons observées sont très variables, de la rupture au mariage, en passant par le concubinage. Il semblerait que, d’être de même nationalité ou de nationalité voisine géographiquement, facilite la durée de la relation (Français(e) du Nord/Anglais(e), Français(e) du sud/Italien(ne) ou Espagnol(e), etc). Cependant chez beaucoup d’étudiants Erasmus, ce sont surtout les opportunités de travail qui déterminent encore les choix de mobilité, comme l’illustre le discours de Luigi, italien de Turin, dont la compagne est française, rencontrée en Angleterre il y a deux ans :

[…]Depuis que je suis parti en Erasmus, j’ai commencé à voyager pas mal, parce que j’ai une copine en France.[…] C’est sûr que l’idée d’aller en Angleterre me plairait, me stimulerait, plutôt pour l’université, pas vraiment pour l’Angleterre.[…]

Ta copine aussi a ce projet d’aller en Angleterre..

Non, non. Ma copine à fait un DESS cette année, l’année prochaine… maintenant elle fait un stage interne au DESS, donc l’année prochaine, elle devrait commencer à travailler, même si elle est en train de penser au fait de continuer à étudier, je ne sais pas.

Mon problème, est celui-ci, ça m’aurait plu aussi d’aller en France, seulement le français, je l’ai appris en écoutant ou par les livres, c’est pour ça que… rien… Aussi parce que les universités françaises, elles ne sont pas vraiment connues pour l’économie, du moins pour l’économie politique.

Il y a beaucoup d’écoles de commerce, qui sont très bien au niveau du MBA, business, administration, privé, mais du point de vue de l’économie politique, certaines, mais, aux niveaux italiens, donc ça ne serait quelque chose qui me pousserait à aller à l’étranger. Donc si je dois me déplacer, j’irai en Angleterre. […]Il y a beaucoup de personnes qui ont fait l’Erasmus. De mon année, quasiment tous mes amis ont fait Erasmus, c’est pas discriminant, peut-être ça peut aider, que moi, je l’ai fait en Angleterre, parce que l’Anglais c’est assez demandé comme langue et il y a peu de places, on est peu a l’avoir fait là.[…]

44« Adesso sono passati 2 anni, pero’ l’anno scorso é venuto a trovarmi un ragazzo tedesco, poi noi Italiani ci vediamo si, anche perché due sono di Torino. Quindi questi 2, una ragazza e un ragazzo, li ho visti sempre, sono diventati proprio degli amici. Con altri italiani anche ci sentiamo, non tutti ma alcuni. Poi invece con gli stranieri, questo ragazzo che mi è venuto a trovare, poi un altro con cui scrivo emails. C’é una sola ragazza inglese con cui ci scriviamo, pero’ difficilmente, non spesso. »

Et ce séjour t’a fait changer tes habitudes, tes façons de faire en Italie ?

Je dirais, à part le fait de rester au téléphone une heure par jour, pas vraiment ! Du point de vue du style de vie, moi comme je me suis comporté en Italie avant, je me suis comporté en Italie après. L’Angleterre, ça ne m’a pas beaucoup changé. J’ai étudié moins, j’ai connu des personnes de toute l’Europe, donc c’était bien… voyage, ça, ça a changé, parce qu’avant je voyageais moins, de cette façon. Parce qu’avant je voyageais ou avec les amis ou.. Voyager seul, je ne l’avais jamais fait, dans le sens prendre un train, aller en France comme ça, je ne l’avais jamais fait

Luigi 22 ans45

Peut-on alors parler de groupes ou de réseaux d’étudiants Erasmus ? Y-a-t-il une certaine force dans ces liens faibles ? En analysant « la substance impersonnelle des groupes durables », Maurice Halbwachs montre comment certains groupes peuvent subsister alors même que les membres se sont éloignés physiquement les uns des autres. « Le groupe n’est pas seulement, ni même surtout un assemblage d’individus […] bien au contraire, ce qui le constitue essentiellement, c’est un intérêt, un ordre d’idées et de préoccupations, qui sans doute se particularisent et reflètent dans une certaine mesure les personnalités de ses membres, mais qui sont cependant assez générales et même impersonnelles pour conserver leur sens et leur portée pour moi, alors même que ces personnalités se transformeraient et que d’autres, semblables il est vrai, mais différentes, leur seraient substituées.

C’est là ce qui représente l’élément stable et permanent du groupe »46. La permanence des liens entre étudiants expatriés atteste-t-elle de l’existence de collectifs, de modes d’appréhension et d’appréciation du monde suffisamment impersonnels pour que les étudiants Erasmus continuent à « penser en commun » alors même qu’ils sont physiquement séparés ? Quels sont les invariants de la condition d’étudiants Erasmus par-delà les modes de vie durant le séjour? Ce qui est constant chez les étudiants Erasmus, semble être une certaine capacité à se mouvoir et une façon réflexive de se percevoir et de se représenter les Autres. En d’autres mots, c’est la compétence migratoire de ces étudiants qui s’enrichit, préalablement construite par des trajectoires sociétales et familiales particulières.

45 Da quandodo sono andato in Erasmus, ho iniziato a viaggiare abbastanza perché ho una ragazza in Francia. […] è ovvio che l’idea di andare in Inghilterra mi piacerebbe, mi stimolerebbe, più che altro per l’università, non tanto per l’Inghilterra.[…]

Anche la tua ragazza a questo progetto di andare in Inghilterra..

No. No. La mia ragazza ha fatto un DESS quest’anno, l’anno prossimo… Adesso fa un stage interno al DESS, quindi l’anno prossimo dovrebbe iniziare a lavorare, anche se sta pensando di continuare a studiare, quindi, non lo so. Il mio problema è questo, mi sarebbe

piaciuto pure andare in Francia, solo che con il francese, che ho imparato ascoltandolo o sui libri, per cui niente… Anche perché le università francesi non sono proprio conosciute per l’economia, al meno non per l’economia politica. Ci sono molte “écoles de commerce” che sono buonissime al livello MBA, business, administration, private, ma del punto di visto del economia politica, alcune, ma, ai livelli italiani, quindi non sarebbe qualcosa che mi spingerebbe ad andare all’estero. Quindi se dovessi muovermi andrei in Inghilterra. […]

E questo soggiorno ha cambiato le tue abitudini, i tuoi modi di fare in Italia?

Direi, a parte di stare al telefono 1 ora al giorno, non eccessivamente! Dal punto dello stile di vita, io come mi sono comportato in Italia prima, mi sono comportato in Italia dopo, l’Inghilterra, non mi ha cambiato un granchè. Ho studiato meno, ho conosciuto persone di tutta l’Europa quindi è stato bello, ma… Viaggio, questo ha cambiato, perché prima viaggiavo di meno, in questa maniera. Perché prima viaggiavo o con gli amici o… viaggiare da solo l’avevo mai fatto nel senso di prendere un treno andare in Francia cosi, non l’avevo mai fatto.

al meno non per l’economia politica. Ci sono molte “écoles de commerce” che sono buonissime al livello MBA, business, administration, private, ma del punto di visto del economia politica, alcune, ma, ai livelli italiani, quindi non sarebbe qualcosa che mi spingerebbe ad andare all’estero. Quindi se dovessi muovermi andrei in Inghilterra. […]

Ceci nous contraint à nous interroger sur les invariants de la condition même d’étranger, de migrant, car l’expérience commune de la mobilité, dans des lieux bien limités qui rapprochent les individus, n’est pas l’apanage unique des étudiants.

Il nous semble, en outre, vain de décrier le fait que les étudiants Erasmus restent majoritairement « entre eux », tant les liens resserrés permettent d’assurer un décodage progressif des mœurs de la société environnante et d’éviter le phénomène de « choc culturel » pour une grande partie des étudiants, qui ne sont pas des transnationaux.

Ce qu’il faut souligner cependant, est que cette agrégation pour d’autres populations est souvent vue comme un signe négatif d’une faible intégration. Pourquoi se pencher uniquement sur « l’intégration » des immigrés et de leurs enfants en Europe, mais jamais sur l’intégration des nouveaux professionnels et étudiants de la mondialisation? Ces inégalités d’attention et de traitements des migrants ne sont-elles pas dues au rôle que joue encore l’école et surtout aujourd’hui l’enseignement supérieur, dans des stratégies de reproduction recomposées ?

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