Pratiques économiques de l’industrie musicale, économie du star-system

Pratiques économiques de l’industrie musicale, économie du star-system

II. Les pratiques économiques de l’industrie musicale

1. L’économie du star-system

La radio est à l’origine de la naissance du star-system, consistant à obtenir des économies d’échelle en développant les ventes d’un petit nombre de titres. Au début des années 30, la vision négative de la radio pour l’industrie du disque est partagée par tous les professionnels du secteur. Mais avec la stratégie de star-system, la radio change de statut.

Afin de maximiser les ventes sur un nombre restreint d’artistes, il est nécessaire d’exposer le plus possible les artistes de manière à capter l’attention du public. Ce nouveau processus promotionnel se met donc en place, la radio va y occuper une place centrale.

Cette nouvelle forme de collaboration entre les radios et les maisons de disques a pour conséquence d’accroître la diversité musicale. Les perspectives de ventes vont stimuler la recherche de nouveaux talents du côté des maisons de disques et la radio permettra de faire connaître au grand public de nouveaux genres musicaux.

Ces premiers effets bénéfiques vont malgré cela se dissiper à mesure que les relations entre maisons de disques et stations de radio vont s’intensifier. En effet, comme nous l’avons étudié dans une première partie, la radio a donné naissance à une pratique de corruption appelée « payola ».

L’économie du star-system incarne le modèle dominant des majors, dans lequel les dépenses en recherche de talents sont sacrifiées au profit de la promotion. Le star-system permet d’atteindre des audiences croissantes, moins grâce à la seule notoriété artistique que par l’effet de notoriété médiatique.

Le star-system consiste ainsi à concentrer la demande sur quelques stars, afin d’accroître les économies d’échelle.77 10% de succès commerciaux suffisent alors à compenser les pertes sur le reste du catalogue. L’archétype de ce modèle est celui des artistes issus des émissions de télé-réalité, marquées par le foisonnement des concours où l’aptitude de certains est souvent remise en cause. Les carrières sont marquées par une culture de la loterie où seuls quelques heureux gagnants peuvent un jour satisfaire leur désir de notoriété.

Ainsi, de nombreux jeunes surestiment leur probabilité de réussite, tentant leur chance dans l’espoir de rejoindre ce star-system. L’absorption médiatique de ces émissions implique le pari difficile de maintenir la capacité d’innovation, tout en imposant des critères de plus en plus stricts.

On rejoint la position des philosophes de l’école de Francfort qui voyaient les concours de circonstances et le hasard comme les vecteurs principaux de la célébrité. Quelques labels conservent toutefois leur indépendance artistique, et doivent leur survie à la fidélité bien trop rare d’un de leurs artistes.

L’entrée dans un palmarès joue un rôle majeur en suscitant un intérêt qui se propage au sein de la masse des consommateurs et la popularité déjà acquise avec de précédents albums est une condition déterminante de la présence et de la persistance dans les hit-parades.

Dans son livre «l’économie du star-system », Françoise Benhamou s’efforce de comprendre pourquoi le vedettariat semble de moins en moins représenter la créativité et la qualité. Les mutations du jeu de miroir de l’offre et de la demande expliquent cette tendance. Il s’agit d’une part des phénomènes d’engouement des marchés mondialisés où les produits proposés sont la plupart du temps des clones de succès récents et d’autre part, la notoriété servant à la promotion des produits.

Il existe cependant un paradoxe: les industries dévoreuses et productrices de stars ont sans cesse besoin de nouveauté, mais elles admettent, non sans méfiance, quelques stars oppositionnelles. Celles-ci ne servent- elles pas seulement d’alibi ? Françoise Benhamou s’interroge sur les insuffisances des politiques culturelles aujourd’hui à l’œuvre. Celles-ci favorisent-elles vraiment la nouveauté ou se nourrissent-elles de la généralisation tous azimuts du star-system ?78

C’est dans ce contexte de mondialisation que les nouvelles pratiques d’écoute peuvent apparaître comme une chance pour les artistes confidentiels auxquels le marché laisse si peu de place. La convergence des marchés devient une réalité. De même qu’une conversation téléphonique peut circuler par le réseau Internet, aujourd’hui, un titre musical s’écoute aussi bien sur une radio hertzienne, sur une webradio, sur un lecteur de CD, sur Internet à partir du disque dur d’un ordinateur, sur un baladeur numérique, ou encore sur un téléphone mobile.

77 Renforçant alors une tendance naturelle de la demande de se concentrer sur un petit nombre de titres, sous l’effet du bouche à oreille et des effets de mode.

78 Françoise Benhamou « L’économie du star-system », éd. Odile Jacob, 29 avril 2002, 367 p.

Le passage de l’industrie du disque à l’ère du numérique n’implique pas la disparition des maisons de disques, mais plutôt une redéfinition de leur modèle économique. La logique du star-system s’effacerait au profit de la recherche et du développement de talents susceptibles de répondre aux attentes du public et dont la promotion serait essentiellement assurée de manière décentralisée, via Internet.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: Université Paul Verlaine Metz – UFR - Science Humaine et Arts
Auteur·trice·s 🎓:
Di Virgilio Marion

Di Virgilio Marion
Année de soutenance 📅: Domaine Sciences des Interactions Humaines mention Esthétique, Arts et Sociologie de la Culture spécialité Industries Culturelles - Mémoire de Master 1 Projets Culturels
Rechercher
Télécharger ce mémoire en ligne PDF (gratuit)

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top