La gestion de savoir : intelligence économique et communauté

Composantes de la gestion de savoir  Intelligence économique

Section 4 :

Les composantes de la gestion de savoir

1- La veille : l’intelligence économique

Introduction

Le besoin permanent de s’informer, de surveiller son environnement et notamment la concurrence, de se comparer aux autres, de connaître les tendances du marché, était traditionnellement et l’est encore satisfait par les études de marché.

Mais les limites de cette technique analysées auparavant, ont favorisé l’apparition d’un nouvel outil de recherche d’information qui est la veille informationnelle.

Cette méthode n’est pas très récente en réalité. Les entreprises pratiquent implicitement cette activité mais généralement d’une manière inappropriée et non organisée. La veille n’a été formellement mise en évidence que récemment puisqu’elle a toujours été informelle.

D’une manière générale, la veille est la faculté que nous avons d’appréhender notre environnement, une sorte d’état orienté vers l’extérieur. Cette « attitude à brancher nos radars» ne se suffit pas à elle même, faute de quoi on risquerait d’assimiler la veille à la simple intuition ou ce qu’on appelle « l’attitude du visionnaire ».

Pour pouvoir donner la bonne information à la bonne personne et au bon moment pour prendre la bonne décision, la veille doit prendre un caractère beaucoup plus rigoureux.

On parle alors de veille ou intelligence stratégique à partir du moment où une organisation met en oeuvre des dispositifs efficaces afin de collecter, traiter et diffuser les informations pertinentes et fiables indispensables à la prise de décisions stratégiques pour renforcer sa compétitivité.

1-1- Définition de la veille

L’intelligence économique

Daniel ROUACH définit l’intelligence économique comme étant « l’ensemble des activités de recherche, de traitement, de diffusion et de protection de l’information utile aux différents acteurs économiques ».

Pour Henri Martre, l’intelligence économique c’est l’information recoupée, traitée, ciblée pour pouvoir éclairer les décisions.

Pour prendre des décisions économiques optimales, il comprendre la réalité dans laquelle elles s’appliquent, comme dans l’impressionnisme, on se des éléments glanés ici et là pour brosser le tableau le plus proche possible de la réalité.

H.LESCA et M.Laurence CARON définissent la veille stratégique comme étant « le processus informationnel par lequel l’entreprise détecte et traite les signaux annonciateurs d’évènements susceptibles d’influer sur sa pérennité. Compte tenu de la nature des informations, Cernées, elle s’apparente au traitement du signal ».

La veille stratégique

D’après H.DOU, la veille stratégique est « l’observation en permanence de l’environnement l’entreprise pour déterminer des signaux de type positif quand le degré de mobilité de l’entreprise reste fort et négatif quand le niveau des menaces sur les activités clés de l’entreprise ; augmente dangereusement. Le but ult ime serait de prévoir les évolutions possibles afin de les anticiper.

F.JAKOBIACK définit la veille comme étant « l’observation et l’analyse de l’environnement scientifique, technique, technologique et économique de l’entreprise pour détecter les menaces et saisir les opportunités de développement ».

Pour conclure, on peut dire que la veille, c’est l’art de repérer, collecter, traiter, stocker des informations et des signaux pertinents qui vont irriguer l’entreprise à tous les niveaux de rentabilité, permettre d’orienter le futur et également de protéger le présent et l’avenir face aux attaques de la concurrence.

En d’autres termes, la veille conduit à transférer des connaissances de l’extérieur vers l’intérieur de l’entreprise.

1-2- Typologie de la veille

La veille stratégique est un terme qui englobe différentes autres formes de veille. En effet, en fonction de ce que l’on souhaite surveiller, il est possible de distinguer différentes autres expressions.

i. La veille technologique

Il s’agit de l’activité mise en œuvre par l’entreprise pour suivre les évolutions susceptibles d’influer sur le devenir de son métier.

Steven C.Wheelwrigt affirme qu’elle est « constituée par l’ensemble des techniques visant à organiser de façon systématique la collecte, l’analyse, la diffusion et l’exploitation des informations techniques utiles à la sauvegarde et à la croissance des entreprises ».

En d’autres termes, elle consiste à savoir écouter et regarder.

Pour repérer toutes les innovations utiles assurant l’aide aux développements techniques indispensables à l’entreprise face à la concurrence mondiale. Son domaine d’observation se limite donc à celui des informations scientifiques et techniques.

A ce niveau, il y a lieu de remarquer que, pour toutes les sociétés ayant une activité à dominante technologique, le brevet constitue la première source d’information pour construire un système de veille technologique.

ii. La veille concurrentielle

Cette appellation regroupe tous les processus de surveillance des concurrents, actuels et potentiels.

Elle permet de pister les démarches actives, actions de développement, déploiement vers d’autres secteurs et domaines d’activité, fausses pistes et leurres destinés à égarer les curieux, intrusions diverses, dépôts de brevets, travaux de recherche, et ceci de la part des concurrents directs et indirects.

Ainsi, comme son nom l’indique, son domaine d’observation est l’univers concurrentiel.

iii. La veille marketing et commerciale

Elle a pour but de collecter, traiter et diffuser des informations sur les produits et les marchés. Elle est donc intimement liée au lancement de nouveaux produits et à la détection de nouveaux marchés; et concerne ainsi l’observation des clients, des fournisseurs, des distributeurs ou des sous-traitants.

iv. La veille sociale et environnementale

Elle concerne tout ce qui gravite autour de l’entreprise et qui n’a pas été pris en compte par les autres formes de veille. Elle est basée plus sur un travail d’intuition et un raisonnement empirique que sur une stricte méthodologie scientifique.

1-3- Le processus de la veille

Il est évident que l’importance croissante prise par l’information de toute nature et de toute provenance dans les décisions de l’entreprise, fait que celle qui sait la maîtriser possède inévitablement un avantage sur les autres.

Mais il ne suffit pas d’accumuler les informations sans suivre une démarche bien précise et organisée.

C’est ainsi que le développement d’une méthode destinée à orienter les axes de la veille commerce d’abord par la définition des besoins de l’entreprise en informations, ensuite la recherche e la collecte des informations requises, suivies d’une phase de traitement des données collectées qu’il faudra enfin diffuser et stocker au sein de l’entreprise.

i. La définition des besoins en information

Toute activité de veille présente le risque d’être submerge par une grande quantité d’informations qui ne sont pas toujours pertinentes.

Ainsi, il est indispensable de cerner les besoins réels en informations en se basant sur une démarche qui se décompose en trois parties essentielles, à savoir :

  1. La réflexion stratégique de la direction de l’entreprise pour définir les objectifs de veille,
  2. Le plan de recherche pour définir les axes de recherche,
  3. Le plan de recherche d’indicateurs pour faire la liste des indicateurs à observer.
ii. La recherche et la collecte des informations

Ayant défini avec précision les besoins spécifiques de la recherche, il s’agit à priori de définir les sources d’information qu’elles soient internes ou externes à l’entreprise.

A ce niveau, il convient de noter que ces sources sont très variées et n’ont pas toutes la même importance pour l’entreprise ; mais le degré d’importance accordé à une source dépend du type de veille adopté.

Il s’agit ens uite d’explorer ces sources et de recueillir les informations jugées pertinentes selon les objectifs fixés auparavant.

iii. Le traitement et l’exploitation de l’information

Les données ainsi collectées doivent subir différents traitements pour aboutir à une information pertinente.

Il s’agit en premier lieu d’apprécier la fiabilité et la pertinente de l’information dont on dispose. Pour cela, le veilleur peut se baser sur différents critères d’évaluation, notamment la contribution de l’information à réduire l’incertitude de l’avenir, à modifier une certaine décision ou les conséquences d’une décision.

Dans une seconde étape, le veilleur aura pour tâche d’interpréter le contenu des informations dont il dispose et d’en tirer une synthèse qui permettrait éventuellement de transformer les données lactées en information pertinente.

En effet, l’interprétation représente un élément très important travail du veilleur qui consiste à essayer de diagnostiquer des événements importants à travers, quelques faits perçus, parfois sans rapport évident entre eux. Une bonne interprétation suppose donc travail préalable d’orientation de la recherche d’informations.

D’autre part, la synthèse, autre phase cruciale dans un processus de veille, consiste à passer d’un ensemble d’informations brutes ou interprétées à un tout cohérent et continu.

iv. La diffusion et le stockage de l’information

Pour qu’une information soit vraiment pertinente, il ne suffit pas qu’elle réponde à un besoin lier, mais elle doit parvenir à la bonne personne et au bon moment. En pratique, l’information de veille a deux types de cibles :

  1. Le spécialiste qui remet à jour en permanence sa perception du monde environnant l’entreprise et qui intègre immédiatement toute l’information jugée pertinente.
  2. L’opérationnel qui intègre immédiatement l’information à l’action en cours, au projet ou au produit en phase de conception.

Il est donc bien évident qu’une diffusion fiable nécessite l’acceptation de l’information par les personnes intéressées, ce qui dépend de la valeur même de l’information, de la réceptivité du receveur et du moment de la diffusion.

Lorsque l’information n’est pas immédiatement utilisée pour prendre des décisions, elle doit être stockée pour pouvoir être utilisée au moment opportun.

Mais le stockage sous n’importe quelle forme ne suffit pas. Il s’agit de faciliter l’accès aux stocks ainsi crées pour que les utilisateurs potentiels puissent y trouver ce qu’ils cherchent.

Toutefois, il ne suffit pas de suivre ces étapes pour réussir une activité de veille; d’autres conditions s’imposent pour rendre efficace la veille en entreprise notamment :

  • Une volonté affirmée de la direction : les dirigeants doivent considérer la veille comme une fonction de management à part entière et s’impliquer personnellement dans sa mise en œuvre.
  • Une bonne communication interne : un mode d’organisation transversal dans lequel le personnel travaille en projet, accroît l’efficacité de la veille.
  • La maîtrise du temps : il faut accepter de consacrer du temps, de réels moyens et un véritable budget à la veille.
  • Un minimum de structure : l’information est mieux valorisée quand l’entreprise dispose d’un encadrement structuré, avec des responsables de fonctions bien identifiés.
  • Un solide esprit d’équipe : si les décideurs ne démontrent pas en permanence aux veilleurs l’utilité de leur travail de collecte, le système tombe rapidement en désuétude.

1-4- Les principaux avantages de la veille

  • Le gain du temps : la veille permet de trouver la bonne information rapidement.
  • Elle permet de faire de bons choix stratégiques et donc d’engager l’entreprise vers des choix pertinents.
  • Elle apporte des données décisives et fiables ce qui permet de faire des prévisions à long terme.
  • Elle permet à l’entreprise de maîtriser son propre patrimoine scientifique et technologique en se situant en permanence vis à vis des concurrents.
  • Elle permet de détecter les opportunités et les menaces du marché et de se protéger contre ces dernières.
  • Elle permet de repérer les bonnes stratégies d’influence dans des milieux difficiles d’accès.
  • Elle élimine tous les facteurs situationnels.
  • Elle ne nécessite pas des coûts élevés.
  • Elle constitue un moteur pour l’innovation dans la mesure où une veille efficace engendre généralement des produits où l’avancée technologique réalisée correspond à l’attente d’un marché de consommateurs donné. Il suffit d’une technologie non détectée ou tardivement découverte par le concurrent pour permettre à l’entreprise d’agir avant les autres.
  • Elle permet de détecter les nouvelles tendances du marché et d’apporter les stratégies appropriées.
Conclusion

La valeur ajoutée de la veille consiste alors à donner des informations valables à la direction des entreprises pour aider à la prise de décisions stratégiques. Le fait d’être sensibilisé à ce domaine devient prioritaire, car être veilleur, c’est être également aux aguets pour se protéger contre les indiscrétions et les prédateurs.

Pour accomplir un travail de veille, on se trouve face à une panoplie de sources et de supports d’informations. Cependant, les supports de recherche traditionnels tels que la conception de grandes bases de données, l’archivage électronique et les bibliographies s’avèrent largement dépassés aujourd’hui en raison de la lenteur des flux d’informations.

Les nouvelles technologies de l’information et de télécommunication (NTIC) proposent aujourd’hui des solutions techniques avancées et ce grâce aux systèmes d’information.

Certes, le système de veille ne présente qu’une composante de la phase de recueil d’information et de génération de connaissances. Un projet de gestion de savoir (knowledge management) nécessite d’autres outils pour assurer le partage et l’échange des connaissances; la création et la diffusion de nouveaux savoirs.

C’est ainsi que se manifeste le rôle crucial des espaces virtuels de collaboration tels que les communautés de pratique et d’intérêt dans la réussite d’une stratégie de savoir. Et c’est sera l’objet de notre recherche dans la suite de la présente section.

2- La communauté de pratique : Tendance émergente

Introduction

Le concept de la communauté de pratique projette de nombreuses perspectives selon le contexte et la finalité de l’apprentissage ou du travail.

Formation d’appoint ou perfectionnement professionnel, initiation à un domaine de connaissances ou apprentissage plus approfondi d’un aspect particulier d’une discipline, travail en ligne et en réseau dans le but de solutionner un problème spécifique, toutes ces activités sociales et éducatives sont, jusqu’à un certain degré, intimement reliées entre elles.

Seuls des points de vue émergents d’un mode de regroupement, choisi pour créer et exploiter l’information, la communication, la coopération et la collaboration en ligne, les départagent en termes d’intentionnalité et de conscience.

Un concept générique, celui de la communauté virtuelle, regroupe au sein d’un même creuset, les formes variées de rassemblement ou de regroupement d’individus exerçant une activité quelconque dans le cyberespace. Selon les conjectures et les conjonctures, cette notion communautaire se voir attribuer différentes appellations : communauté d’intérêt, communauté d’apprentissage, communauté de pratique.

À cet égard, les communautés d’intérêt se créent souvent autour d’un point d’ancrage commun, la communication et l’échange d’informations sur des sujets variés attenant à la vie ou au travail. Le cyberespace en abrite d’innombrables sous de multiples formes.

Les communautés d’apprentissage se confinent plutôt aux actes d’enseigner et d’apprendre en ligne et en réseau. C’est le domaine de l’institutionnel, du scolaire, de la formation et/ou du perfectionnement.

Les communautés de pratique, quant à elles, s’insèrent dans le sillage des pratiques quotidiennes de l’apprentissage et du travail au sein des institutions ou des organisations.

Cette section de notre travail s’intéresse plutôt à l’étude des communautés de pratique vu l’importance qui leur était attribué dans la littérature de l’économie de savoir.

2-1- Définition

« Une communauté de pratique est un groupe organisé de personnes échangeant sur un sujet, un domaine de connaissance particulier. Elle vise à capturer le savoir tacite ou expérientiel par l’utilisation d’un forum virtuel commun de collaboration.

Elles répondent au besoin en gestion des connaissances de faire sortir, de partager, de conserver et d’utiliser adéquatement cette partie intangible du savoir. » (Isabelle C. Linder)

Les communautés de pratique sont des groupes constitués de pairs possédant de l’expertise sur une question donnée ou montrant un fort intérêt pour celle-ci.

Les membres d’une CdP ne travaillent pas nécessairement ensemble au quotidien mais ils approfondissent leurs connaissances d’un sujet en échangeant les uns avec les autres sur une base continue, que ce soit lors des réunions formelles, d’activités sociales ou par l’entremise d’Internet

« Une communauté de pratique ce n’est pas qu’un site Web, une base de donnée et un répertoire de ‘best practices’. C’est un groupe qui interagit, apprend ensemble, construit des relations et à travers cela développe un sentiment d’appartenance et de mutuel engagement.» (Wenger)*

« Les communautés de pratique se définissent sous trois dimensions : les frontières de leur domaine d’application, leur existence sociale en tant que communauté et les outils, le langage, les histoires et documents que les membres de cette communauté partagent et s’échangent ». (Gilles Beauchamp)

2-2- Historique

L’arrivée d’Internet et le développement de nouveaux logiciels et outils technologiques très puissants nous amènent à modifier nos façons de travailler, de nous récréer, de nous éduquer, de chercher de l’information, d’accéder à des services, etc.

Par conséquent, cela suscite de nombreux questionnements et, du même coup, un intérêt renouvelé pour la recherche.

En 1991, deux chercheurs américains, Jane Lave et Étienne Wenger ont défini dans Theory of Communities of Practice, une nouvelle méthode de partage des connaissances imputable aux récentes technologies de l’information et des communications (TIC).

Depuis, les communautés de pratique ont évolué de façon à contribuer efficacement à la gestion des connaissances tacites et explicites.

2-3- Raison d’être des communautés de pratique

Les connaissances tacites sont intangibles et informelles, car elles sont acquises à partir de l’expérience. Il est difficile de les colliger afin de les rendre accessibles et de faciliter leur utilisation par l’ensemble d’une organisation. Les conna issances explicites s’acquièrent, quant à elle, par de la formation formelle organisée et dirigée.

Aussi, il est intéressant de constater que les savoirs tacites correspondent à 70 % de l’avoir d’une organisation, comparativement aux savoirs explicites qui en représentent 30 %, d’où l’intérêt des communautés de pratique. (*)

Par conséquent, la libre circulation des connaissances issues des communautés de pratique crée un nouveau savoir collectif qui favorise l’innovation. Pour les participants des communautés, le partage du savoir mène au perfectionnement le plan professionnel.

Une communauté de pratique est un outil et non pas une fin en soi. Il est stratégique pour une entreprise d’impliquer les gestionnaires à cette réflexion afin de développer la vision qui inspirera la mission et les objectifs de la communauté.

Une communauté de pratique est selon ‘Isabelle Poulin’ plus qu’une équipe de projet, elle est un groupe de travail qui transcende les directions, les projets et la distance géographique. Elle anéantit les silos fonctionnels souvent présents dans les organisations et crée des liens transversaux entre les diverses directions.

Ses effets se situent non seulement au niveau de l’organisation mais également au niveau des individus. En effet, d’un point de vue organisationnel, cette interaction, cette libre circulation du savoir crée un nouveau savoir collectif qui en fin de compte mène à l’innovation, alors qu’au niveau des individus, ce partage du savoir mène au perfectionnement et à l’accroissement personnels.

Toute communauté de pratique représente une forme d’apprentissage dans l’action et cette caractéristique doit guider l’analyse des besoins « Une communauté de pratique est un nœud, un levier à partir du quel est créée une libre circulation de l’information ».

2-4- Objet de communautés de pratique

Le concept de la communauté de pratique projette de nombreuses perspectives selon le contexte et la finalité de l’apprentissage ou du travail.

Formation d’appoint ou perfectionnement professionne l, initiation à un domaine de connaissances ou apprentissage plus approfondi d’un aspect particulier d’une discipline, travail en ligne et en réseau dans le but de solutionner un problème spécifique, toutes ces activités sociales et éducatives sont, jusqu’à un certain degré, intimement reliées entre elles.

Seuls des points de vue émergents d’un mode de regroupement, choisi pour créer et exploiter l’information, la communication, la coopération et la collaboration en ligne, les départagent en termes d’intentionnalité et de conscience.

Composantes de la gestion de savoir: intelligence économique

Consigner l’expérience collective, établir des significations et des sens, les évaluer et se les approprier, de façon individuelle et collective, pour mesurer les dividendes d’une pratique partagée comportent, à l’image de la collaboration, des interactions complexes entre les acteurs eux- mêmes et les facilitateurs lorsqu’ils sont engagés dans le processus.

Ces interactions permettent d’établir mutuellement l’orientation d’une trajectoire communale, d’élaborer, d’énoncer et/ou de planifier des stratégies résolutoires, de proposer et d’appliquer des solutions négociées à des problèmes issus d’une discipline scientifique ou d’un domaine d’application professionnelle.

La pratique se prolonge à travers une mémoire qui la rend à la fois pérenne et transmissible sous la forme d’informations consignées désormais accessibles à d’autres acteurs, d’autres participants, d’autres intervenants, d’autres apprenants, d’autres travailleurs et d’autres facilitateurs.

La collaboration comme l’intention deviennent plus conscientes et elles caractérisent certaines communautés d’apprentissage et certaines communautés de pratique. Ces partenariats présentent des modes de co-gestion de l’information, de co-construction des connaissances, de co-expertise et de co-apprentissage entre les participants.

On y perçoit une forme de transversalité des expériences et de redistribution des savoirs, des savoir- faire, voire de certains savoir – être.

L’ensemble des résultats collectifs devient, par la suite, commémoratif dans la mesure où on les transforme en information – témoignage à nouveau exportable pour d’autres tâches et d’autres fins. Il retourne au creuset d’origine, celui de l’information consignée, classée et indexée.

2-5- Les types de communautés de pratique

Il existe différents types de communautés de pratique, selon le niveau auquel elle concentre les connaissances .Certaines communautés sont informelles. Ces communautés de pratique regroupent généralement des volontaires et des meneurs non officiels.

D’autres sont stratégiques. Ces communautés de pratique ont des buts bien définis et des leaders désignés ; elles doivent aussi respecter les échéances fixées par les commanditaires.

On trouve en outre des centres d’expertise, lesquels, par exemple peuvent être chargés de l’élaboration de contrats et de leur dissémination vers le reste des membres de l’organisation.

2-6- Conditions de succès des CdPs (*)

Il existe différents facteurs de succès d’une communauté de pratique. Au moment du démarrage, les communautés de pratique Ont besoin de structure et de soutien.

Entre autre chose, dans le cas d’une initiative issue de la base de simples employés les dirigeants doivent veiller à ce que le thème traité ait de l’importance pour les membres et l’organisation.

Il faut également faire la démonstration, en se servant d’anecdotes, de données qualitatives ou autres, que la communauté aura un impact sensible.

Autre condition, il faut veiller à ce que la communauté de pratique ait toute la légitimité requise en assurant que les joueurs clés y participent.

Une fois la communauté bien démarrée il faut la soutenir, à ce stade les organisations font souvent des erreurs qui condamnent les communautés de pratique à l’échec à plus ou moins long terme. Par exemple, certaines organisations pèchent en tentant de contrôler les communautés de pratique.

D’autres oublient de former les animateurs de la communauté de pratique convenablement ou de leur donner le soutien logistique dont ils ont besoin.

Au contraire, les organisations doivent maintenir leur appui à la communauté de pratique en l’intégrant à leurs activités courantes ou encore en faisant les alignements nécessaires.

On ne met pas sur pied une communauté de pratique comme on peut le faire pour une équipe de travail ou de projet, en réunissant des ressources humaines, des outils et en leur fixant des objectifs : on ne peut qu’encourager, favoriser le développement de processus et d’échanges entre des acteurs volontaires.

Wenger compare la gestion d’une CdP naissante par l’assistance d’un bébé qu’on le fait apprendre les ABC de la vie : « on peut tuer le bébé en le supervisant de trop près, en exigeant des retombées trop immédiates ou en orientant le développement de cette structure vers des cibles trop étroites ou préétablies ».

Naturellement les CdP ne sont pas laissées totalement libres et sans contraintes et certaines seront soutenues plus que d’autres, notamment lorsqu’elles gèrent des savoirs qui apparaissent plus stratégiques aux décideurs ayant els moyens de les soutenir.

Mais on soutien une CP, on ne la dirige pas !

Même dans les entreprises qui investissent beaucoup dans les CP, ce sont des facilitateurs qui coordonnent les communautés : avant que d’être des experts du domaine, ils agissent en tissant des liens entre les membres de la communauté, des liens qui se réaliseront tout autant de manière privée, en rencontres face à face ou au téléphone que par des événements et activités publiques de la communauté.

Ainsi le développement de la communauté ne repose pas seulement sur l’addition de moments dans un programme public d’activités mais aussi sur la vitalité de ces liens réticulaires entre membres et sous groupes.

On pourrait y voir le reflet, dans les activités de la communauté, de la double nature de la connaissance, tacite et explicite, non ? Autrement dit, il ne suffit pas de mettre en place un site Web, une base de donnée et un journal, ou un colloque biennal… i

Il faut soutenir des échanges plus fins, développer une connaissance des expertises, projets besoins des membres de la communauté.

Extrait des actes de la table ronde organisée par Cerfio : CdP (Novembre 2003) Réal Jacob, Etienne Wenger, D.G. Trembllay, R. McDermott et Michael Fontaine

2-7- Principes de base pour mettre en place des CdP

Sept principes pour «cultiver des communautés» selon Wenger et Jane Lave* :

  • 1. Accompagner la croissance d’une manière organique plutôt que de concevoir un plan détaillé et l’implanter. Les réseaux sociaux personnels et d’affinité dessineront les opportunités premières de développement de la communauté.
  • 2. Ouvrir un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur de la communauté pour éviter que celle-ci se referme sur ces mêmes réseaux sociaux. Tirer parti de l’expérience d’autres CP, se laisser questionner et entrer en dialogue avec les acteurs stratégiques liés au domaine de la CP ou à l’entreprise dans son ensemble.
  • 3. Favoriser différents niveaux de participation : tous les membres de la communauté n’ont pas le même niveau d’engagement et celui-ci peut évoluer dans le temps ou selon les sujets abordés.

L’existence de participants plutôt passifs ou périphériques serait découragée dans les structures traditionnelles d’équipe alors que cette «couche périphérique» est un élément constitutif de cette structure floue qu’est une CP.

Plutôt que de forcer la participation les communautés vivantes vont «construire des bancs» pour ceux qui restent à la périphérie – favorisant les interactions semi- privées et le maintien / renforcement des contacts entre le centre et cette participation périphérique.

Une participation qui est loin d’être passive même si elle ne donne pas lieu à des expressions publiques ou explicites.

  • 4. Développer à la fois des espaces publics et privés au sein de la communauté.

« As we’ve emphasized before, communities are much more than their calendar of events.

The heart of a community is the Web of relationships among community members, and much of the day-to-day occurs in one-an-one exchanges.

Thus, a common mistake in community design is to focus too much on public events. A community coordinator needs to «work» the private space between meetings, dropping in on community members to discuss their current technical problems and linking them with helpful resources, inside or outside the community.

These informal, «back channel» discussions actually help orchestrate the public space and are key to successful meetings.» CCP, p. 58

  • 5. «Focus on value«. Viser la valeur ?

Les communautés de pratique se développent parce qu’elles sont sources d’enrichissement pour l’organisation, pour les équipes où travaillent les membres de la communauté et pour les membres eux- mêmes.

Mais cette source de valeur n’est pas toujours apparente au début d’une CP ou elle évoluera au cours du développement de la communauté : au début les membres valoriseront de se concentrer sur les problèmes techniques rencontrés au quotidien alors qu’avec la croissance, la communauté pourra valoriser de construire un ensemble systématique de savoirs facilement accessibles et de qualité.

En cherchant à se centrer sur la production de valeurs la communauté favorise l’expression par les membres de ce qu’ils retirent de leur participation à la CP. Un élément de suivi qui sera utile au moment d’obtenir du support de la part de l’entreprise ou l’établissement.

  • 6. Rassembler le confort du familier et la stimulation de l’innovation et l’imprévu.

Les CP doivent être des endroits «neutres» où la pression de la production n’a pas sa place, où l’on peut arriver sans prévenir, poser des questions naïves ou encore donner des réponses sans craindre d’être harnaché à la mise en oeuvre de ces réponses ! Combiner stimulation et familiarité peut se faire en organisant des activités autour d’opinions divergentes, ou de projets controversés…

La communauté vibrante réussit à maintenir un programme régulier d’activités entrecoupé d’événements.

  • 7. Avoir du rythme. Une communa uté «vibrante» trouvera son rythme fait de rencontres, d’activités sur le site Web, de déjeuners thématiques et de rencontres semi- privées…

Un tempo qui ne doit ni essouffler les membres ni les ennuyer. Un mélange de forums d’échanges et de projets de construction d’outils favorisant à la fois l’établissement de relations interpersonnelles et la participation aux activités communautaires. Un rythme qui évoluera avec la maturation de la communauté.

2-6- Impact des CdP sur l’organisation

Reconnaître l’importance des communautés de pratique, c’est accepter que le partage des connaissances soit un processus de négociation permanente qui repose sur la participation, l’engagement de tous les membres.

Cette reconnaissance implique une transformation fondamentale de nos organisations. Wenger explique : « Le Taylorisme repose sur l’idée que le savoir appartient aux managers et la mise en œuvre aux employés »*.

Or reconnaître les CdP c’est d’accepter que le savoir appartienne aux praticiens et aux employés. Il faut donc les interconnecter. Ce sont eux qui sont dans la meilleure position pour gérer le savoir.

Fait à noter, si l’organisation pourra modeler les communautés de pratique, ces dernières pourront aussi modeler l’organisation. Ainsi, certaines communautés de pratique amènent les entreprises à collaborer avec des entités situées à l’extérieur de leur frontière. Ce genre de comportement peut ensuite se généraliser.

En conclusion, et comme l’a dit Davenport :

« L’intelligence humaine dépend de connexions neuronales. L’intelligence organisationnelle, quant à elle dépend de connexions interpersonnelles. Les communautés de pratique permettent de construire ce genre de connexions »*.

Section 5 :

Implications du Knowledge Management sur l’organisation

5- 1- Changement organisationnel

Le changement organisationnel ou ce qu’on appelle la transformation organisationnel et le processus par le quel une organisation change de structure, de culture, de rites, de mode de gestion et de relations (internes et externes).

La principale implication d’un projet de gestion de connaissances est la transformation de la structure en organisation en réseau.

En fait, les structures traditionnelles (fonctionnelles par exemple) ne facilitent pas l’implantation d’un tel projet et ne favorisent pas la création des communautés de pratique et les espaces virtuels de collaboration.

L’idée des organisations en réseau repose sur la mise en cause de la hiérarchie et sur le principe de collaboration entre les membres de l’organisation dans un but de partage de connaissances et de synergies des idées et des efforts.

Implications du Knowledge Management KM sur l’organisation

Dans son ouvrage intitulé ‘Leading Change’, John P. Kotter (professeur à la Harvard Business School), propose une démarche de changement en 8 étapes, inspirée des expériences des grandes entreprises :

  1. Créer un sentiment d’urgence
  2. Former une coalition puissante;
  3. Développer une vision;
  4. Communiquer la vision;
  5. Lever les obstacles au changement
  6. Démontrer des résultats à court terme
  7. Bâtir sur les premiers résultats pour accélérer le changement
  8. Ancrer les nouvelles pratiques dans la culture d’entreprise

5-2- Le coaching

La notion de responsables hiérarchiques ne disparaît pas complètement avec la transformation organisationnell; les managers doivent se transformer en guides, en entraîneurs (dans le sens d’entraîneur d’une équipe, suivant le sens du mot anglais ‘coach’) qui doivent créer les conditions favorables pour que le jeu collectif conduise au résultat souhaité pour l’ensemble des acteurs (motivation des salariés).

« Le coaching est une forme de management qui tente d’apprendre aux salariés à apprendre par eux-mêmes plutôt que leur inculquer un savoir extérieur. Cette forme complète les quatre autres attitudes rencontrées habituellement : ordonner, persuader, partager ou déléguer. »*

La Direction Générale doit privilégier les actions qui sont sources d’apprentissage, celles qui mobilisent des savoirs multiples pour créer de la valeur : les projets et les processus.

Le développement de la «logique compétence» modifie également les évolutions de carrière : l’entreprise doit accepter de payer le prix de ces acquisitions de ces compétences métier, en terme de salaires et également en terme de mobilité.

Dans son livre «Le guide du coaching», J. Whitmore reprend un exemple montrant que le pourcentage de savoir réellement retenu par rapport à l’information transmise passe de 10% (après un délai de 3 mois) à 65% lorsque cette transmission passe d’une simple transmission verbale à l’accompagnement de cette transmission par des démonstrations et surtout complétée par une expérimentation.

5-3- Proactivité et réactivité

Les concepts de proactivité et de proactivité visent à établir chez l’entreprise une vision clairvoyante de ce qui passe à travers le temps, tant qu’au niveau de l’environnement interne qu’externe.

Par définition, la proactivité caractérise un phénomène » qui s’exerce d’amont en aval dans le temps » (Larousse). Elle se réfère à une progression continue et directe, prohibant tout aller- retour.

La réactivité relève résolument de l’évaluation : « elle se réfère à l’aptitude à manifester quelque opposition ou approbation » (Larousse). La réactivité est lié donc à la capacité d’une organisation à réagir face aux changement.

La proactivité et la réactivité sont deux composantes qui permettent l’anticipation du futur et des mutations de l’environnement. Les entreprises doivent adopter ces concepts pour une meilleure maîtrise du marché, et ce notamment à l’aide d’une gestion approprié de son capital intellectuel.

Conclusion

La gestion des savoirs s’inscrit dans la réalité de l’entreprise : la connaissance est un enjeu économique majeur de demain. Créer, capitaliser et partager son capital de connaissances est une préoccupation de base de toute organisation performante.

Mais gérer son capital savoir ne consiste pas seulement à diffuser les informations par la mise en place de nouvelles technologies.

C’est un programme à long terme qui part d’une volonté stratégique, qui passe par une bonne analyse de la nature même du savoir et du savoir- faire de l’entreprise, et qui aboutit à la mise en place d’outils variés et adaptés.

C’est ainsi que la connaissance prend une place nouvelle dans l’entreprise. L’entreprise n’est plus seulement une boîte noire destinée à transformer des matières premières et de l’information en produit ayant une valeur de marché.

Elle est une organisation «apprenante » qui crée de la connaissance en interne, source de nouvelle richesse qui lui assure une place prépondérante dans le monde économique.

Le management moderne se doit donc de prendre en compte cette nouvelle fonction de production dans sa stratégie d’entreprise.

Cette nécessité du «Knowledge Management» est d’autant plus cruciale que les entreprises sont confrontées à ce qu’on appelle «l’économie de la variété » : globalisation de la concurrence, modification des critères de compétitivité, accélération de l’innovation, renouvellement des modes d’organisation, processus de production évolutifs et réactifs, extension de l’espace des productions possibles.

Elles ont donc besoin pour y répondre d’une gestion saine de leur capital connaissance qui assure une meilleure maîtrise de la complexité de l’environnement, et fournit un facteur de stabilité interne.

Cette maîtrise et cette stabilité peuvent s’établir lorsque l’implantation d’un projet de KM se complète par l’adoption par l’entreprise d’une stratégie fondée sur l’innovation et sur l’exploitation de ses compétences organisationnelles dans la recherche et développement.

En fait, la gestion des connaissances risque d’être sans intérêt si elle ne s’inscrit pas dans une logique de croissance et de développement.

Cette logique se manifeste par le processus d’innovation de produit et de procédés qui aboutisse à une optimisation de la satisfaction du consommateur; La satisfaction du consommateur étant aujourd’hui la préoccupation essentielle des entreprises modernes qui maîtrise mieux le marché.

L’innovation s’avère aujourd’hui une puissante source de compétitivité, elle est un objectif stratégique pour les entreprises qui veulent conquérir des marchés, elle est même une stratégie à part entière.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Gestion des connaissances et Innovation
Université 🏫: Institut des Hautes Etudes Commerciales – Carthage
Auteur·trice·s 🎓:

Année de soutenance 📅: Projet de fin d’études - 2003/04
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