La microfinance face au défi de l’adaptation

3.2 – La microfinance face au défi de l’adaptation 

A nouvelle population cible, nouvelle mission ?

Avec la migration, des communautés ont pu, comme à Totolapa, augmenter considérablement ses richesses. Ainsi, s’adresser à des communautés transnationales correspond-il toujours au projet social de l’IMF qui est de s’adresser à des communautés rurales marginalisées ?

Les deux communautés étudiées présentent des taux de migration très différents. A San Agustín Loxicha, l’IMF touche les familles paysannes nécessiteuses de solutions de crédit, alors qu’à Totolapa, l’agence ne trouve sa justification que dans l’épargne. Même si dans les communautés transnationales des inégalités subsistent et que les besoins sont constants, à Totolapa, la majorité semble se passer des services financiers de la Microbanque.

Pourtant, les communautés transnationales sont le reflet de problèmes économiques plus profond. Certes la migration augmente considérablement le niveau des familles, mais celui-ci repose sur un équilibre fragile. Pour la microfinance, les migrants constituent une population nouvelle avec des besoins nouveaux.

Dans cette configuration, l’IMF se retrouve devant la nécessité de « réinventer » ses services et sa mission. Une piste serait de privilégier l’étude de la question de l’accompagnement des migrants confrontés aux problématiques de l’investissement productif.

Quel soutien l’IMF peut-elle apporter ?

Un soutien financier avec des solutions de crédit novatrices, une aide « entrepreneuriale », de gestion, de planification… Il serait question d’axer la recherche sur les anciens migrants, leur « démarche entrepreneuriale », leurs besoins… Ensuite, se poserait la question de la possible adaptation de l’IMF, en termes d’innovation sociale et financière, face aux besoins des migrants.

La microfinance face au défi de l’adaptation

La microfinance face au défi de l’adaptation

Entre « bonne » gouvernance et adaptabilité

L’étude de la gouvernance parait un élément central pour s’assurer de la cohésion du projet. En effet, une gouvernance adaptée assure non seulement des services adaptés aux besoins des populations cibles mais également une meilleure intégration de l’IMF au sein de la communauté.

Pourtant, cette « bonne » gouvernance ne peut se résumer à une application de règles standardisées, au contraire elle est le reflet d’une adaptation à la diversité des populations. Cette diversité se traduit autant en termes de pratiques financières ou de ressources économiques locales que de liens sociaux et communautaires…

Pour « réussir » cette adaptation, la connaissance des populations en est une condition essentielle. Par « connaissance », on entend le processus de compréhension qui permet d’englober la complexité des phénomènes sociaux en ayant une « rationalité multidimensionnelle » (Sardan, 1995, p.195).

Pourtant, la connaissance ne garantit pas à elle seule, la réussite d’un projet. En effet, cette connaissance ne peut prévoir l’appropriation, les réactions, les dérives propres à chaque projet.

« Une profusion telle de variables se dégage, que les stratégies effectives ne peuvent être prédites, du fait de la diversité des logiques propres aux multiples catégories d’acteurs qui se confrontent autour d’une opération de développement, de la diversité des enjeux, et de la diversité des systèmes de contraintes locaux. » (ibid, p.196)

Conscient de ces phénomènes d’appropriation, le défi se situe au niveau de l’organisme de microfinance qui, en tant qu’acteur exogène, est soumis à ces mécanismes. Mieux les appréhender permet de réajuster le positionnement de l’IMF afin d’être en cohérence avec la population.

L’expérience permise dans le cadre de cette enquête a été révélatrice de l’importance et de l’intérêt de produire de telles connaissances sur les populations et sur les formes d’appropriations à l’œuvre dans chaque projet. Au niveau de la recherche, on ne peut qu’espérer que ces études se multiplieront et donneront aux agents de terrain de nouveaux outils de compréhension et d’action.

Table des matières
Sommaire
Introduction générale
I.Cadre, acteur et objectif de l’enquête anthropologique
1.La migration mexicaine aux Etats-Unis : une problématique en évolution
1.1Le migrant : du travailleur illégal à l’acteur de développement
1.2Les transferts de fonds des migrants : un enjeu pour la microfinance
2.L’Amucss, commanditaire de l’étude : contours et stratégies
2.1Evolution de l’Amucss comme acteur clé de la Microfinance au Mexique
Origine de l’Amucss
Stratégies d’un acteur multiple
2.2L’Amucss se place dans l’arène « remesas et développement »
3.Objectif de l’enquête
II. Du travail de terrain au mémoire de recherche appliquée
1. Conditions générales de l’enquête
2. Des données empiriques à la problématique du mémoire
2.1 Les communautés transnationales : un concept pour des réalités contrastées
2.2 La microfinance : diversité de modalités de mises en œuvre, diversité de populations et diversité des mécanismes d’appropriation
3.Problématique et plan du mémoire
Résumé des principaux résultats
Carte du Mexique
Analyse des données comparatives
I.Contexte économique et social de chaque communauté
1.San Agustín Loxicha, Oaxaca
1.1Présentation des caractéristiques socio géographiques
1.2Renouveau d’un village marqué par des années de conflit
Les origines du conflit
L’éclatement du conflit armé ou l’affrontement avec les autorités gouvernementales
Une lente et longue sortie du conflit
Répercussions sociales et politiques du conflit
1.3Le café : une agriculture résistante mais en péril
2.Totolapa, Guerrero
2.1Présentation des caractéristiques socio géographiques
2.2L’évolution du secteur agricole
Dans les années 1960 : une agriculture principalement vivrière et apparition de cultures illicites
Les années 1970/1980
2.3 La migration devient le pilier de l’économie locale
Une économie en crise : un terreau pour la migration
Une économie locale indissociable de la migration
II.Deux trajectoires migratoires dépendantes de l’environnement local
1.Le parcours du migrant
1.1Le contexte de « sortie » du migrant
Un besoin d’argent
L’influence des anciens migrants
1.2Portraits et projets des migrants
Une variété de profils à San Agustín Loxicha
Une migration assimilée aux cycles de vie à Totolapa
1.3Influence et importance du réseau migratoire
San Agustín Loxicha : un migrant isolé
Totolapa : un migrant intégré
Pourquoi ces différences ?
2.Les impacts de la migration pour la famille : entre aide et dépendance
2.1Les remesas : une ressource essentielle pour le quotidien
La consommation de base
L’habitat
2.2Les jeunes face à l’éducation et la migration
San Agustín Loxicha : le pari de l’éducation
Totolapa : une migration qui détourne de l’éducation
2.3Intégration des revenus de la migration au sein de l’économie locale
A San Agustín Loxicha : une aide mesurée et une dépendance contrôlée
A Totolapa : une économie maintenue par l’argent des migrants
-Une inflation sur l’habitat et la main d’œuvre
-Apparition de nouvelles inégalités
III.L’IMF face à des formes d’appropriations différentes
1.La gouvernance des IMF en question
1.1Politique sociale générale des IMF du réseau de l’Amucss
Principes directeurs des Microbanques rurales
1.2San Agustín Loxicha : une gouvernance en cohérence avec le projet de l’IMF
Présentation de la Microbanque et de ses activités
Mise en perspective de l’implantation de l’IMF : une position claire et assumée
1.3Totolapa : un processus d’intégration « forcé »
Historique du contexte financier et du cadre d’implantation de l’IMF
Epargne et réception d’argent : une attention « passive » de l’IMF auprès de la population
2.L’influence des réseaux informels sur les IMF
2.1A San Agustín Loxicha, la variété des pratiques et des acteurs facilite l’intégration de l’IMF
Une pratique d’emprunt dépendant de l’activité agricole
La variété des acteurs informels du crédit témoigne des stratégies de la population
2.2A Totolapa, les migrants sont les principaux acteurs du réseau informel
Rôle différencié de l’IMF suivant le taux d’émigration
L’IMF formalise l’épargne et participe à la bancarisation des remesas
Conclusion et perspectives
I.Migration, microfinance et développement : quelles perspectives d’alliance ?
1.Migration et développement local : paradoxe des discours et des pratiques
1.1L’hypocrisie d’un modèle de développement basé sur les remesas : le cas du Mexique
1.2Discours et position de l’Amucss dans l’arène « Remesas et développement »
2.Reflet des pratiques sur le terrain : des pistes pour le débat « remesas et développement »
2.1Projet et fonction du migrant : un acte individuel
Migrer un projet individuel
La fonction d’assurance des migrants
2.2Les Remesas ne se destinent pas à l’investissement
2.3Les contraintes financières imposées à la microfinance comme limites au rôle de l’IMF
La contestable retombée de la bancarisation des remesas
Le court terme, vision privilégiée et contrainte de l’IMF
3.Vers des ouvertures de recherches et d’actions
3.1Comprendre la globalité de la migration
L’importance du versant social de la migration
Pays d’origine, Pays d’accueil : problèmes différents, solutions communes ?
3.2La microfinance face au défi de l’adaptation
A nouvelle population cible, nouvelle mission ?
Entre « bonne » gouvernance et adaptabilité
Bibliographie
La microfinance face au défi de l’adaptation
Bibliographie

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