Le diagnostic du risque d’exploitation (risque économique)
Chapitre 2 : Les stratégies pour la gestion du risque
Section 1 : Le diagnostic des risques
A- Le diagnostic du risque d’exploitation (risque économique)
Le risque d’exploitation désigne le risque lié à l’incertitude des rendements d’exploitation, il dépend essentiellement de la variation des charges entre charges fixes et charges variables.
La variation entre coûts fixes, coûts variables et le bénéfice est mise en évidence par l’analyse du point mort qui constitue un outil financier important.
Cette analyse nous mènera par la suite au concept fondamental du levier d’exploitation.
I- Analyse du point mort
Le point mort, dit aussi seuil de rentabilité, correspond à un chiffre d’affaire pour lequel l’entreprise ne réalise ni perte ni bénéfice.
1- Calcul du point mort
A ce point, le chiffre d’affaire est égal à la somme des coûts fixes et coûts variables.
On note :
– Chiffre d’affaire critique (C A c) c’est-à-dire le chiffre d’affaire correspondant ou point mort.
Cac = F + V
- F : coûts fixes
- V : coûts variables
Cette relation peut s’écrire de la façon suivante :
Cac =F + V/Cac.Cac
D’où
Cac = F + V
- F = Cac – V
- Cac *F = Cac (Cac – V)
- Cac = Cac * F / (Cac – V)
F
Alors Cac = _________________________
1 – V / Cac
V/ Cac : correspond à la parts des coûts variables dans le chiffre d’affaire.
2- La formule du point mort
- Hypothèses de formule
- Les charges fixes
- Les charges variables ou coûts variables
- Marge sur coûts variables
Soit un magasin dont l’activité et le négoce des vestes, le propriétaire du Magasin achète ses vestes au prix de 30 DH l’unité. Le prix de vente unitaire.
De ces vestes est de 80 DH. La marge commerciale qui est égale à la marge sur coûts variables puisque l’entreprise revend ses vestes en l’état, est de 80-30=50 par veste .les charges fixes de ce magasin sont les suivantes mensuellement :
Loyer : 2000
Salaire de la vendeuse (charges sociales comprises) : 3500,
Impôts et taxes (sauf TVA) : 3500,
- Electricité : 300,
- Téléphone : 300,
- Entretien : 200,
- Frais divers : 1500,
Total des charges fixes : 11300,
Si au cours du mois, une seule veste est vendue le propriétaire du magasin aura encaissé 80 DH et dépense 11300 + 30. Il aura donc enregistré une perte de 11330 – 80 = 11250 DH. Si deux vestes sont vendues. La perte ne sera plus que de 11300 (-) 2*50 = 11200.
Il est donc nécessaire que le propriétaire du magasin vende au minimum un nombre de veste suffisant pour courir les 11300 DH de frais fixes.
Le point mort qui correspond à ce minimum est de 11300 / 50 = 226 vestes.
Le chiffre d’affaire point mort sera 226 * 80 = 18080 DH
Charges montant produits montant
Charges fixes 11300 ventes 226*80 18080
Charges variables 226*30 6780
TOTAL 18080 TOTAL 18080
Le compte d’exploitation du magasin se présente comme suit :
Le magasin en vendant 160 vestes n’a réalisé ni bénéfice, ni perte ; le total de ses charges est égal au total de ses produits ; on dira qu’il a atteint son seuil de rentabilité.
En posant comme hypothèse que m F est la marge commerciale ou marge sur coûts variables unitaire, que les charges fixes CF et x le nombre d’articles permettant d’atteindre le point mort, on écrira que :
m.x = CF
x = CF / m
11300 / 50 = 226 vestes
Soit (P) le prix de vente, le chiffre d’affaires point mort est égal à Px.
Donc en terme de nombre d’unité, le magasin doit vendre x = 160 articles pour qu’il ne réalise ni perte ni bénéfice, et plus le magasin commercialise plus de 160 articles plus il va s’éloigne de la zone de perte et donc du risque.
Si l’analyse s’effectue en terme de chiffres d’affaires, le magasin doit vendre 226 * 80 soit 18080 pour qu’il couvre toutes les charges.
Coûts fixe
Chiffre d’affaire correspondant au point mort = _______________________
(1-cout variable) / Cac
3- Limites et intérêts du point mort
L’analyse du point mort souffre de certaines limites :
- Elle suppose une demande illimitée, à un prix fixe, ainsi que des rendements d’échelle constants.
- La production est égale aux ventes, ce qui suppose qu’il n’y ait ni stock initial, ni stock final ou que le SF est égal au stock initial en volume et en valeur ;
- L’entreprise ne fabrique qu’un seul produit ;
- Les coûts variables sont directement liés au volume de la production (hypothèse qui ignore la loi de rendements croissants et décroissants).
- Le but envisagé est à court terme et il n’y a pas de modification de structure de production.
- Malgré ces limites, le calcul du point mort présente des avantages :
- Il donne une indication sur le niveau minimal de l’activité nécessaire pour l’entreprise de dégager des bénéfices et de s’éloigner de la zone de risque.
- C’est un instrument d’aide à la décision.
- Il explique l’écart entre la prévision et la réalisation.
- Il indique dans quelles mesures une baisse de bénéfices est dues à une baisse des ventes, une augmentation des coûts fixes ou des coûts variables.
Alors que l’analyse du point mort indique graphiquement les effets d’un changement des ventes sur les profits, le degré du levier d’exploitation mesure algébriquement l’importance de ce changement.
II- Le levier d’exploitation
1- Notion du levier d’exploitation
Le levier d’exploitation mesure l’accroissement relatif du résultat d’exploitation qui résulte d’un accroissement relatif de la production.
Il traduit le risque économique qui dépend de la nature de l’activité de l’entreprise.
L’analyse de l’effet de levier d’exploitation permet d’établir un lien entre la variation du résultat d’exploitation et la variation du niveau d’activité. En conséquence, il a pour objectif d’évaluer la sensibilité du résultat d’exploitation à une variation du niveau d’activité.
2- Le coefficient du levier d’exploitation
La relation entre la variation de la production et la variation du résultat d’exploitation est exprimée par le coefficient du levier d’exploitation (CLE)
Δ RE / RE
Coefficient du levier d’exploitation (CLE) = ________________
ΔQ / Q
Le coefficient du levier d’exploitation mesure l’élasticité du résultat d’exploitation (RE), relativement au niveau d’activité (Q). L’élasticité se mesure en rapportant la variation relative du résultat d’exploitation, soit ΔRE/ RE, à la variation relative du niveau d’activité. ΔQ/Q.
Si à partir d’un niveau de production Q donné une entreprise accroît son résultat d’exploitation de 40%, lorsque sa production progresse de 20%, le coefficient de levier d’exploitation est de : CLE = 40% / 20% = 2%
En d’autre terme cela signifie qu’un accroissement de 1% de production entraîne une augmentation de 2% du résultat d’exploitation (avant charges et produit financier).
3- Relation entre le coefficient du levier d’exploitation, les coûts fixes et les coûts variable et le chiffre d’affaire
Le coefficient du levier d’exploitation ne peut s’exprimer différemment en remplaçant le résultat d’exploitation par sa valeur dans la relation précédente.
Pour un niveau Q de production, le résultat d’exploitation s’écrit :
RE = Q (P – V) – F
Ou : – RE : résultat d’exploitation
- Q : quantité vendue
- P : prix de vente unitaire
- V : coûts variables
- F : coûts fixe
Comme les coûts fixe sont constant, la variation du résultat d’exploitation est égale à :
ΔRE = ΔQ (P – V)
L’accroissement relatif s’écrit :
ΔRE / RE = ΔQ (P – V) – F
En remplaçant ΔRE / RE par sa valeur dans (1) on obtient :
CLE : ΔQ (P – V) / Q (P – V) – F / ΔQ / Q
Ou :
CLE = Q (P – V) / Q (P – V) – F
En remplaçant (Q. P) par le CA (chiffre d’affaire), et (Q .V) par VT coûts variable total, on obtient :
CLE : CA – VT / CA – VT – F
Cette formulation montre que pour un niveau de production donnée, le coefficient de levier d’exploitation est d’autant plus élevé que les charges fixes sont importantes.
Donc :
Si une entreprise à un coefficient de levier d’exploitation élevé, des changements faibles des ventes auront des conséquences importantes sur le résultat d’exploitation qui peut progresser très sensiblement, dans le cas d’une variation des ventes mais qui, au contraire, peut décliner de façons importante, s’il y a baisse de ventes.
D’une façon générale, il n’est pas bon pour une entreprise de se trouver trop prés de son point mort car c’est une situation extrêmement risquée. Pour diminuer les risques résultant d’un levier d’exploitation élevé, certaines firmes sont amenées à diminuer leurs coûts fixes : recourir à la sous-traitance, désinvestir.
D’après un mémoire sous le thème « le risque et décision de financement ». édition 2002, p 87
En résument, les fluctuations du résultat d’exploitation qui traduisent le risque économique de l’entreprise dépendant de trois paramètres :
- Le chiffre d’affaire
- La structure des charges
- L’approximation du point mort part rapport au niveau de production effectif.
- Cette notion du levier d’exploitation est importante pour l’entreprise non seulement pour l’apprécier sur le plan économique, mais aussi pour choisir les moyens de financer sa croissance, comme en va le voir avec l’analyse du levier financier.