Le Figaro : violences émeutières, réactions politiques et suites judiciaires

B. Le Figaro : violences émeutières, réactions politiques et suites judiciaires très suivies
Dans les pages du Figaro, les émeutes de l’automne 2005 ont occupé un espace comparable à celui consacré par Le Monde. Un peu plus de 200 articles et une trentaine de tribunes ont été publiés sur le sujet, soit sensiblement le même nombre d’écrits pour les deux quotidiens. Leur réactivité face aux premiers incidents est également comparable. Le Figaro mentionne également en une les premières violences à Clichy-sous-Bois dès l’édition du 29 et 30 octobre315. Et cet encadré, qui ne constitue que quelques lignes, intitulé « Clichy-sous-Bois après les émeutes », augure une série de plus d’une quinzaine de une sur les événements. En effet, dès le 31 octobre, les événements constituent la une principale du journal (« Violences urbaines : la banlieue parisienne sous le choc ») et il en sera ainsi jusqu’au 10 novembre. Les événements font également l’objet d’un traitement abondant en terme d’espace et d’articles.
Dès les premiers jours de novembre, c’est une page complète qui leur est entièrement consacrée et l’édition du 5 et 6 novembre consacre même trois pages entières de sa rubrique « Société » aux événements. Le record est atteint le 8 novembre, date à laquelle le journal dédie cinq pages à ce qu’il appelle « la crise des banlieues » et près de 15 articles. Cette appellation « la crise des banlieues » sera d’ailleurs l’objet d’un nom de rubrique spécifique que le quotidien crée début novembre pour rassembler l’ensemble des articles traitant du sujet. A la mi-novembre, le traitement se fait moins dense et moins régulier. Ainsi les événements disparaissent complètement de la première page du quotidien et les articles se font moins nombreux dès le 16 novembre.

315 Dans l’édition du 29 et 30 octobre, les premiers incidents ne sont mentionnés en une que dans un titre dans le sommaire de une, intitulé « Essentiel ».

a. Des récits d’actes émeutiers développés
Tout au long de la période, c’est-à-dire du 29 octobre316 au 30 novembre, Le Figaro porte une attention soutenue aux épisodes de violences émeutières. Si la couverture des nuits de violences est plus intense aux débuts des incidents et s’atténue au fil des jours, avec l’arrivée de papiers d’analyse, de reportages plus généraux sur l’insécurité, sur les causes et les solutions de la crise par exemple, Le Figaro fait régulièrement et jusqu’à l’accalmie, le rapport des nuits d’émeutes, des villes touchées, des dégâts provoqués. Aussi, cette classe relative aux violences émeutières, représente 23% du corpus, ce qui est sensiblement supérieur à la majorité des quotidiens de notre corpus317.
Pour ce qui est du contenu du traitement de ces violences émeutières, il est globalement identique aux autres journaux. Le Figaro évoque les incendies et plus particulièrement les incendies de voitures. Cela paraît logique au vu du nombre de véhicules qui ont été incendiés durant les émeutes (près de 10 000). Il fait également référence aux jets de cocktails Molotov et de projectiles ainsi qu’aux échanges de tirs entre jeunes (qui tirent à balles réelles) et forces de l’ordre (qui tirent des grenades lacrymogènes). Les affrontements avec la police, sont par ailleurs mentionnés, tout comme les agressions envers les pompiers. Et comme c’est le cas dans la totalité des corpus, le caractère violent des affrontements est mis en évidence. Les blessés, principalement du côté des forces de l’ordre et des pompiers, sont également évoqués, comme en atteste cet extrait : « Caillassages, jets de cocktails Molotov et désormais tirs à balles réelles : lors de leurs interventions des derniers jours, les hommes de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) ont essuyé des attaques toujours plus violentes. Ainsi, mercredi soir, deux soldats du feu ont été légèrement blessés par des jets de projectiles en Seine-Saint-Denis tandis que la veille, un autre avait dû être hospitalisé à Nanterre (Hauts- de-Seine) après avoir été aveuglé par le contenu d’un cocktail Molotov. »318

316 Date à laquelle Le Figaro fait mention pour la première fois des incidents à Clichy-sous-Bois.
317 En effet, seul Le Progrès fait un traitement encore plus important des violences émeutières. Cette classe représente 49% du corpus du quotidien régional. Pour les autres journaux cette classe représente en moyenne 15% de leurs corpus.

Le Figaro porte également, tout comme Le Monde, une attention particulière au travail et aux interventions des forces de l’ordre et de sécurité. En atteste la forte représentation dans cette classe des termes de « policier », « gendarme », « CRS » ou encore « pompier »319 mais surtout certains articles, comme celui du 5 novembre titré « Chronique policière d’une nuit d’affrontements »320. Cet article relate, sur la base d’une note de synthèse de la Direction départementale de la sécurité publique de Seine-Saint-Denis, la nuit et les interventions des 500 policiers et gendarmes mobilisés dans le département, « qui ont vécu l’une des nuits les plus chaudes depuis le début des émeutes »321 selon les auteurs de l’article.
b. Des comparutions d’émeutiers qui servent à évoquer « l’expérience de vie quotidienne » dans les quartiers difficiles
En parallèle des récits d’affrontements, Le Figaro consacre également beaucoup d’articles aux comparutions des émeutiers. Et ce traitement judiciaire, qui constitue à lui tout seul une classe – chose que l’on ne retrouve dans aucun autre corpus –, représente près de 17% des u.c.e classées. Aussi retrouve-t-on dans cette classe des termes qui se rapportent à la justice comme « tribunal », « Parquet » et « avocat »322 ou encore aux peines encourues par les prévenus, comme « prison », « ferme » ou « sursis »323. La couverture de ces comparutions est également l’occasion pour le quotidien de dresser un profil des émeutiers et d’évoquer leur « expérience de vie quotidienne »324, celle de leur famille et des habitants des quartiers sensibles. Le Figaro s’appuie donc sur les témoignages des jeunes lors des procès, sur les évocations du passé et de la vie des prévenus lors des audiences. Les relations et les situations familiales sont maintes fois mentionnées comme l’atteste la présence dans cette classe de termes relatifs à la famille comme « mère », « père », « frère » ou encore « sœur »325, ainsi que ce court extrait : « Sylla nie toute participation. Il était dehors car, explique-t-il, il allait récupérer chez sa sœur une béquille dont il se sert depuis une mauvaise chute. A grands traits, le tribunal dresse son portrait. Chez son père, chauffeur de car, et sa mère, au chômage, il vit avec neuf de ses douze frères et sœurs. Côté scolarité, le parcours est banal. »326. Mais c’est surtout l’idée de peur qui est abondamment évoquée. Que ce soit la peur des habitants des quartiers concernés, pour leur sécurité et pour leurs biens, ou la peur des jeunes émeutiers et de leur famille de l’issue du procès.

318 « La colère gronde chez les sapeurs-pompiers », 04/11/2005, Le Figaro, Cyrille Louis.
319 policier : 74 occurrences pour un khi de 102 ; gendarme : khi2 de 55 ; CRS : khi2 de 30 ; pompier : khi2 de 111 et 41 occurrences.
320 « Chronique policière d’une nuit d’affrontements », 05/11/2005, Le Figaro, Patrice Brunat et Christophe Cornevin
321 Ibid.
322 tribunal : khi2 de 101 (le plus élevé de la classe) ; Parquet : khi2 de 43 ; avocat : khi2 de 40.
323 prison : khi2 de 50 ; ferme : khi2 de 37 ; sursis : khi2 de 27.
324 Expression empruntée à Laurent Muchielli dans Mucchielli Laurent, « Les émeutes de novembre 2005 : les raisons d
e la colère » art. cit., p. 24

Et sur cette spécificité du Figaro qui a, bien plus que les autres quotidiens, axé son traitement sur les suites judiciaires des émeutes, les explications et les avis des journalistes rencontrés sont partagés. Pour Claire Bommelaer, journaliste au service « Politique » du quotidien, cela s’explique par un souci de satisfaire le lectorat du journal, principalement de droite, en demande de ce type d’information :
« Je pense que ça c’est typiquement quelque chose qui intéresse l’électorat de droite. C’est-à- dire bon finalement, quelles suites on donne à tout ça et pas seulement… Il y avait les annonces du plan de Villepin, ça c’est une sorte de suite et puis ensuite, les voitures brûlées, combien ? quoi ? qu’est-ce qu’on a fait ? et est-ce qu’on les a punis ? Bon ben ça, c’est typique Figaro. »327
Pour Cyrille Louis, journaliste au service « Société » du quotidien, c’est plus dans un souci de compréhension des émeutiers que ce traitement judiciaire a été abordé :
« Pourquoi on a fait des papiers là-dessus ? c’est parce que ça nous permettait de voir qui étaient ces jeunes qui avaient jeté des cailloux, des cocktails Molotov sur les policiers, sur les pompiers, de les entendre parler, de les entendre s’expliquer, se justifier. Donc moi je pense que c’était une très bonne idée de suivre ces audiences, ces comparutions immédiates. Enfin voilà quoi, parce qu’on pourrait nous dire que « ouais, Le Figaro il veut montrer qu’il y a une répression », mais franchement ça je suis certain que si on l’a fait c’est pas pour valoriser l’action répressive du gouvernement, c’était parce que ça nous donnait accès à des gens qu’on avait vu qu’en ombre chinoise jusqu’à présent. »328

325 raconter : khi2 de 87 ; famille : khi2 de 47 ; mère : khi2 de 91 ; père : khi2 de 86 ; frère : khi2 de 58 ; sœur : khi2 de 45.
326 « A Bobigny les prévenus défilent devant le tribunal », 08/11/2005, Le Figaro, Angélique Négroni.
327 Entretien Claire Bommelaer, Le Figaro, journaliste politique, 08/07/2008.
328 Entretien Cyrille Louis, Le Figaro, journaliste société, 09/07/2008.

c. Réactions et gestion politiques au cœur du traitement
Si Le Figaro accorde une grande attention aux violences émeutières et à leurs suites judiciaires, les réactions politiques et les mesures prises par le gouvernement sont au cœur de son traitement. En effet, alors que le 1er novembre est annoncé en une que « les émeutes de Clichy-sous-Bois se sont décalées hier sur le terrain politique »329 en évoquant les critiques du Parti socialiste adressées au gouvernement, c’est exactement ce qu’opère le quotidien dans ses pages. En effet, si dans les premiers jours, les articles sont consacrés aux premiers incidents et à la mort suspecte des deux adolescents dans le transformateur, Le Figaro oriente rapidement son traitement sur le terrain politique. Critiques et réactions politiques, « guerre des chefs »330 au sommet de l’État, instauration du couvre-feu, projet de loi sur l’égalité des chances, mesure contre les étrangers impliqués dans les émeutes, projets de remaniement de la loi sur l’immigration… les sujets sont divers et nourrissent considérablement les pages du quotidien. Aussi, la dimension politique est fortement présente dans le corpus du Figaro. Elle représente près de 31% des u.c.e classées et se répartit en deux classes.
La première, qui représente à elle seule 25% des u.c.e classées, correspond aux acteurs politiques intervenus lors des émeutes et cités dans le quotidien. Sont donc présents Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin mais contrairement aux autres journaux, le ministre de l’Intérieur n’est pas beaucoup plus cité que son premier ministre (seulement 115 occurrences pour N. Sarkozy contre 109 pour D. De Villepin)331. Plus classiquement, on retrouve également Jacques Chirac, Azouz Begag et dans une moindre mesure Jean-Marie Le Pen et François Hollande332. Comme pour Le Monde, on note donc une forte présence de personnalités membres du gouvernement, a fortiori de droite. Cette prédominance se remarque également dans le fait que les termes « ministre » et « gouvernement », tout comme ceux de « Matignon » et d’ « Élysée » sont beaucoup plus présents, et que la gauche est peu évoquée. En effet, les termes « opposition », « communiste » et « Verts » sont présents et associés à la classe, mais que dans une faible proportion333.

329 « Le PS critique la méthode Sarkozy », 01/11/2005, Le Figaro, Une.
330 « Quand la guerre des «quartiers» ravive la guerre des chefs », 03/11/2005, Le Figaro, Paul-Henri du Limbert.
331 Le khi2 de Nicolas Sarkozy (200) est même inférieur à celui de Dominique de Villepin (216).
332 Jacques Chirac : 57 occurrences pour un khi2 de 111 ; Azouz Begag : 23 occurrences pour un khi2 de 69 ; Jean-Marie Le Pen : 13 occurrences pour un khi2 de 27 ; François Hollande : seulement 7 occurrences pour un khi2 de 16.
333 ministre : 179 occurrences pour un khi2 de 246 (le plus élevé de la classe) ; gouvernement : 80 occurrences pour un khi2 de 105 ; Matignon : khi2 de 40 ; Élysée : khi2 de 39 ; gauche : 34 occurrences pour un khi2 de 84 ; opposition : khi2 de 8 ; communiste : khi2 de 22 ; Verts : khi2 de 11.

La seconde classe qui constitue ce traitement politique et qui représente seulement 6%, porte sur les actions menées par les sources institutionnelles, sur les mesures prises par le gouvernement pour enrayer la crise. Et si l’instauration de l’état d’urgence et les mesures qui en découlent sont abondamment évoquées, c’est d’avantage encore la mesure voulue par Nicolas Sarkozy, d’expulser les étrangers impliqués dans les violences urbaines qui est mentionnée334. Ainsi de nombreux articles sont consacrés à ces mesures ainsi qu’aux critiques et débats qu’elles suscitent.
Cette prédominance du traitement politique ainsi que la forme que ce traitement prend, dénote une forte tendance du Figaro à traiter les événements « émeutes de 2005 » au travers des réactions et des actions des sources institutionnelles.
Et là encore, la justification et l’explication de cet angle de traitement des événements sont discordantes entre les deux journalistes auprès desquels nous avons réalisé des entretiens. Si pour Claire Bommelaer, journaliste politique, ce choix s’explique par l’identité du Figaro, journal politique :
« Ben on est un journal politique. Donc on est pas TF1 qui fait du fait-divers et de l’image. On est un grand journal à connotation politique donc ça m’étonne pas qu’on ait beaucoup parlé des hommes politiques, de leur action, et tout ça. »335
Pour Cyrille Louis, cela correspond à une sorte de soutien aux actions gouvernementales :
« Moi je pense que ça correspond à une tentative de produire un discours journalistique qui soit pas trop embarrassant pour le gouvernement. Je pense que quand on en vient à faire ça on sort un petit peu de notre rôle mais bon, moi je ne suis pas directeur de la rédaction du Figaro. C’est vraiment pas le même métier, journaliste de base et directeur de la rédaction d’un journal comme Le Figaro. Mais je pense que c’est pas une bonne chose. »336
Leur vision de cette prévalence du traitement politique est donc totalement différente. Cela peut notamment s’expliquer par la différence de leur statut : C. Bommelaer est journaliste politique, C. Louis journaliste société donc le traitement politique apparaît comme naturel à l’un et pas à l’autre. Cela peut probablement s’expliquer aussi par leurs préférences politiques : C. Bommelaer se situe plutôt à droite de l’échiquier politique et C. Louis plutôt à gauche337, donc l’attention portée aux membres du gouvernement de l’époque peut apparaître comme déplacée et
partisane, à l’un et pas forcément à l’autre.

334 loi : khi2 de 231 (le plus élevé de la classe) ; urgent : khi2 de 174 ; couvre-feu : khi2 de 39 ; expulser : khi2 de 213 ; expulsion : khi2 de 154 ; étranger : khi2 de 209 ; séjour : khi2 de 105.
335 Entretien Claire Bommelaer , 08/07/2008.
336 Entretien Cyrille Louis, 09/07/2008.

d. Des thèmes de l’immigration et de l’intégration par ailleurs traités
Comme nous l’avons vu précédemment, certaines mesures prises par le gouvernement à la suite des émeutes ont été particulièrement traitées dans les pages du Figaro. C’est le cas des mesures qui visaient à l’expulsion des étrangers impliqués dans les violences urbaines, mais pas seulement. En effet, les événements ont provoqué un débat sur une possible réforme des conditions d’immigration en France et notamment du regroupement familial, dont le quotidien s’est également fait écho. Ainsi, les questions d’immigration mais aussi d’intégration sont présentes dans le discours du Figaro. Elles constituent même une classe – un peu moins développée par rapport à d’autres aspects étudiés précédemment – mais qui représente tout de même 14% du corpus et à laquelle sont attachés des termes comme « immigrer » et ses dérivés, « français », « France » « modèle d’intégration », « communauté », « intégrer », « regroupement familial », ou encore « étranger »338. Cela s’explique par la présence de plusieurs articles consacrés aux mesures citées précédemment, qui apparaissent principalement à la mi-novembre. Ainsi le 15 novembre, Le Figaro consacre quasiment une page à ces questions que l’on retrouve dans la rubrique « La crise des banlieues ». La dimension identitaire et ethnique est également présente dans les pages du Figaro. Un article en particulier est à souligner, celui intitulé « Davantage de Noirs chez les émeutiers »339. Le Figaro est un des seuls quotidiens à mettre en avant cet aspect du profil des émeutiers, à l’instar – nous l’avons vu dans l’introduction – d’Hugues Lagrange, par ailleurs cité dans l’article. Aussi, des termes comme « noir » et « africain » mais aussi « maghrébin », « marocain », « Algérie » et ses dérivés tels qu’algérien(s) ou algérienne(s) ou encore « origine » et « issus » sont présents dans la classe340.

337 A la question « Sur une échelle de 1 à 7, qui va de l’extrême gauche à l’extrême droite, où vous situez -vous politiquement ? », Claire Bommelaer se situe au centre-droit (3e et 4e rang en partant de la droite) alors que Cyrille Louis se situe plus à gauche (3e rang en partant de la gauche). Cela se traduit également dans leur vote au premier tour des élections présidentielles de 2007 : la première déclare avoir voté Française Bayrou (UDF) ; le second avoir voté Ségolène Royal (PS).
338 immigrer : khi2 de 173, le plus élevé de la classe et 54 occurrences ; français : khi2 de 170 et 65 occurrences ; France : khi2 de 124 et 70 occurrences ; modèle d’intégration : khi2 de 116 et 28 occurrences ; communauté : khi2 de 111 et 30 occurrences ; intégrer : khi2 de 82 et 27 occurrences ; regroupement familial : khi2 de 39 et 14 occurrences ; étranger : khi2 de 12 et 20 occurrences.
339 « Davantage de Noirs chez les émeutiers », 11/11/2005, Le Figaro, Cécilia Gabizon.
340 noir : khi2 de 17 et 11 occurrences ; africain : khi2 de 15 ; maghrébin : khi2 de 27 ; marocain : khi2 de 26 ; Algérie : khi2 de 15; origine : khi2 de 24 ; issu : khi2 de 14 ; ethnique : khi2 de 29.

Le type de discours que peut tenir Le Figaro sur ces questions-là peut être illustré par l’extrait d’un éditorial signé Alain Brézet : « Et si, plutôt que de jouer au petit jeu des “républicains” contre les “communautaristes”, nos dirigeants politiques commençaient par attaquer le problème à la racine ? Ce sont bien les conséquences d’une politique d’immigration sans contrôle que la France subit aujourd’hui. En ouvrant, en 1974, les vannes de l’immigration familiale qu’ils ont ensuite laissée se transformer en immigration d’ayants droit (allocations familiales, RMI, AME), les gouvernements successifs ont créé les conditions de la saturation des mécanismes d’intégration. »341.
Et si ces questions sont abordées un peu plus directement que dans Le Monde, – comme lors d’éditoriaux – il reste tout de même que souvent, ces propos sont le fait d’intervenants extérieurs.
e. Éducation et emploi : des problèmes abordés
Si les questions d’immigration et d’intégration des minorités dans la société française sont principalement abordées au travers des réformes et des mesures annoncées par le gouvernement, il paraît en être de même pour les difficultés en matière d’emploi et d’éducation que peuvent connaître les quartiers touchés par les émeutes. En effet, c’est principalement au travers de la présentation des mesures du projet de loi pour l’égalité des chances que Le Figaro aborde ces questions. Dès le 4 novembre, certains maires abordent la question du chômage, de l’emploi et de la formation dans l’article « Face à la crise, les propositions des maires de droite et de gauche »342, mais ce n’est véritablement qu’à partir du 8 novembre, lendemain de l’intervention télévisée du Premier ministre et de l’annonce d’un certain nombre de mesures en faveur de l’éducation et de l’emploi notamment, que ces sujets sont traités. Pour autant, ce thème ne constitue pas un pilier du discours du Figaro. En effet, cette classe ne représente que 14% du corpus et comme nous venons de le voir ce thème n’est pas véritablement “investigué” par le quotidien mais prend plutôt la forme d’une présentation et d’une discussion des mesures gouvernementales. Aussi, retrouve-t-on logiquement en tête, le terme « apprentissage » qui fait référence au projet d’autoriser l’entrée en apprentissage à 14 ans au lieu de 16 ans, suivie plus classiquement par « formation », « emploi », « entreprise », « scolaire » ou encore « éducation »343. Les problèmes de logement ainsi que celui du manque de ressources des associations sont également présents dans cette classe. Ils font pareillement référence à des mesures annoncées par le gouvernement, à savoir la restauration des subventions accordées aux associations et l’accélération de la rénovation urbaine.

341 « Banlieues : vingt-cinq ans après », 04/11/2005, Le Figaro, Alexis Brézet.
342 « Face à la crise, les propositions des maires de droite et de gauche », 04/11/2005, Le Figaro, Nicolas Barotte, Claire Bommelaer, Rodolphe Geisler et Judith Waintraub.

Si le traitement et le discours du Monde et du Figaro ne sont pas en tous points similaires – nous l’avons vu – il ressort tout de même quelques similitudes. Tout d’abord, la prépondérance du traitement politique et plus particulièrement du traitement des réactions et mesures gouvernementales. En effet, ces deux quotidiens ont une tendance manifeste à porter leur attention sur le pendant politique de ces émeutes, c’est-à-dire sur leur gestion par le monde politique, leurs répercussions sur la classe politique ou encore les réactions politiques qu’elles suscitent. Ensuite, une attention portée aux questions d’intégration et d’immigration, même si elles sont généralement abordées par l’intermédiaire de tiers. Et enfin, un traitement peu conséquent des problèmes structurels que peuvent connaître ces quartiers ou de la vie quotidienne de leurs habitants. Si ces thèmes ne sont pas totalement absents des pages des deux quotidiens, notamment en ce qui concerne les problèmes d’emploi et d’éducation, ils ne constituent pas le cœur de leur traitement. Aussi, ils se distinguent fortement de Libération et de l’Humanité, qui loin de se défaire totalement du pen
dant politique des émeutes décrit plus haut, marquent leur différence en privilégiant un traitement que l’on pourrait qualifier de plus social ou tout du moins de plus sociétal, axé principalement sur l’investigation des conditions de vie dans les banlieues françaises et des problèmes économiques et sociaux que ces quartiers peuvent connaître.
Lire le mémoire complet ==> Les émeutes de l’automne 2005 dans les médias : étude comparée du traitement de cinq quotidiens français
Mémoire de recherche de Master 2 de Science politique
Institut d’Etudes Politiques de Lyon

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