Les salaires et le coût de la vie à Drummondville

2.3 Les salaires et le coût de la vie

Si le chômage est moins important à Drummondville que dans d’autres centres urbains de la province, il faut souligner que la majorité de la population active drummondvilloise travaille dans les industries textiles de coton et de soie artificielle.

Or, dans ces secteurs, même avec une augmentation presque constante des revenus – pour les hommes!- durant les années 1930, les salaires « semblent tout juste suffire pour subvenir aux besoins essentiels fixés pour une famille de cinq personnes43. » En 1935, le salaire mensuel d’un travailleur d’usine est de 60 à 80!$44.

Cinq ans plus tard, le revenu annuel moyen est de 983!$, ce qui correspond à un salaire de 18,90!$ par semaine45. La faible rémunération des ouvriers du textile va d’ailleurs donner lieu à trois grèves, dont deux à l’usine Celanese, en 1933 et 1940, et une à la manufacture Dominion Textile en 1937.

42 « Une liste complète des ouvrières qui désirent avoir du travail aux usines », loc. cit.

43 Avec le fort taux de croissance démographique que connaît la cité, « plusieurs » familles compteraient plus de trois enfants. Micheline Martin, op. cit., p. 98-100.

44 « Une autre année s’achève », La Parole, 26 décembre 1935, 10, 35, p. 2.

45 Drummondville se classe alors au cinquième rang de la province, derrière Montréal, Québec, Trois- Rivières et Sherbrooke, pour le nombre de ses employés d’usine et le montant des salaires. « Les ouvriers de Drummondville sont les mieux payés », La Parole, 11 avril 1940, 14, 47, p.1.

Si les faibles salaires ouvriers46 sont déjà fort contraignants, les montants gagnés par les chômeurs grâce aux travaux publics sont encore plus bas. En effet, les hommes embauchés pour les divers travaux de chômage sont payés au cours des années 1930 entre 0,30!$ et 0,40!$/heure, entre sept et douze heures par jour selon les saisons et seulement trois jours par semaine – pour donner du travail au plus grand nombre d’individus.

À l’hiver 1930-1931, lorsque le maire décide d’augmenter le salaire des employés municipaux de 0,35!$ à 0,40!$/heure, l’échevin Adélard Bernard fait remarquer que 8,40!$ par semaine – sept heures par jour pendant trois jours!- est encore «!insuffisant pour permettre le soutien d’une famille47. »

Pour ce qui est des bénéficiaires de secours directs, les allocations qui leur sont accordées sont rarement indiquées dans les procès-verbaux du conseil de ville. Néanmoins, les deux familles48 pour lesquelles le secrétaire précise cette donnée reçoivent toutes deux 20!$ par mois.

À ce montant s’ajoutent, dans certains cas, 4 à 10!$ par mois pour le paiement du loyer – en moyenne 10!$49!-, ce qui fait un total de 24 à 30!$ par mois, lorsque la municipalité assume le loyer. En accordant aux bénéficiaires de secours un montant inférieur à ce que rapporte la participation à des travaux publics, les autorités locales souhaitent inciter les chômeurs à se chercher de l’ouvrage.

46 À noter que les femmes gagnent jusqu’à 0,15$/heure de moins que les hommes. Micheline Martin, op. cit., p. 94.

47 « Environ quatre-vingts hommes sont employés actuellement à la construction des égouts », La Parole, 18 décembre 1930, 5, 38, p. 4.

48 Procès-verbaux du conseil municipal de Drummondville, séances du 8 septembre 1938 et du 31 octobre 1940.

49 Contrairement au montant des secours directs, ce type de donnée est fourni, dans les procès-verbaux, pour la majorité des individus qui font une demande de paiement de loyer.

Sachant approximativement ce que gagnent les chômeurs et les ouvriers de Drummondville, attardons-nous brièvement aux dépenses de base auxquelles chacun d’entre eux est confronté. D’abord, il faut compter mensuellement 2!$ pour l’éclairage et entre 6 et 8!$ pour le chauffage50. À cela s’ajoute le coût de la nourriture, des vêtements et du loyer. À Drummondville, le coût des logements ouvriers s’élève au maximum à 20!$ par mois, puis à 22!$ à partir de 193651.

Ce montant équivaut à plus du quart du budget d’un travailleur d’usine et à la presque totalité de ce que reçoit mensuellement un bénéficiaire de secours. À ce propos, le rédacteur du journal local écrit, en 1935: «!Chez nous, la plupart des locataires doivent déjà payer des loyers beaucoup trop onéreux pour leurs revenus. La corporation ne doit pas donner le mauvais exemple52.!» Les débats sur l’augmentation des loyers des logements ouvriers seront très vifs et de longue durée à Drummondville. Nous y reviendrons au cinquième chapitre.

50 « Les secours directs », La Parole, 22 décembre 1932, 7, 39, p. 5.

51 « Augmentation des logements ouvriers », La Parole, 26 mars 1936, 10, 48, p.1.

52 « Les logements ouvriers », La Parole, 10 janvier 1935, 9, 38, p. 1.

Ainsi, pour les ouvriers, et plus encore pour les chômeurs, le coût de la vie est élevé en temps de crise. Voyons maintenant à quelles catégories socioprofessionnelles appartiennent les chômeurs – puisqu’ils sont par définition des personnes aptes au travail mais sans emploi!-, ainsi que le mode d’occupation de ces individus. Nous énumérerons ensuite certaines revendications émises par des groupes de chômeurs durant la première moitié de la décennie 1930.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Les élites locales et les mesures d’aide aux chômeurs durant la crise des années 1930 à Drummondville
Université 🏫: Mémoire présenté à l’université du Québec à Trois-Rivières comme exigence partielle de la maîtrise en études québécoises
Auteur·trice·s 🎓:
MAUDE ROUX-PRATTE

MAUDE ROUX-PRATTE
Année de soutenance 📅:
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