Le recouvrement de la rémunération équitable, pluralités d’agents

Le recouvrement de la rémunération équitable, pluralités d’agents

2/ Le recouvrement de la rémunération équitable

Pluralités d’agents. La SPRE est seule habilitée pour fixer le montant de la rémunération versée par les diffuseurs dont font partie les chaînes de télévision, en déterminant pour chacun d’eux un taux d’utilisation confidentiel. Ce monopole s’achève dès lors que la phase de liquidation est close et qu’il s’agit de recouvrir la créance auprès des utilisateurs.

Pendant longtemps, la SPRE a délégué le recouvrement de la licence légale à la SACEM, celle-ci est encore aujourd’hui chargée de la perception de la rémunération équitable auprès des discothèques et des lieux sonorisés. La SPRE effectue le recouvrement auprès des autres diffuseurs. Le total des sommes collectées est ensuite ventilé entre les associés.

Montant total des perceptions. Pour l’année 2001, le total des encaissements de la SPRE, tout utilisateur confondu, s’élève à 51,38 millions d’euros (soit une augmentation d’environ 14 % par rapport à l’année précédente, la chute des encaissements auprès des radios publiques et généralistes entamée depuis 1999 étant compensée par l’accroissement des sommes perçues auprès des radios locales privées).

Pour le secteur télévisuel, le montant des encaissements se maintient depuis 1997, il est de 3,19 millions d’euros pour l’année 2001, soit 6 % du montant total des encaissements.

Provenance des sommes perçues par la SPRE pour l’année 2001

Provenance des s ommes perçues par la SPRE pour l'année 2001

Répartition. La SPEDIDAM, l’ADAMI et le SCPA reçoivent, pour chaque catégorie d’intervenants qu’elles représentent, les sommes perçues par la SPRE mais également celles payées au titre de la copie privée. Les sociétés d’artistes-interprètes et de producteurs sont ensuite chargés de reverser aux titulaires de droits voisins, les rémunérations qui leurs sont dues.

La SPRE étant une société de perception et de répartition de droits, elle est normalement tenue d’appliquer l’article L. 321-9 du Code de la propriété intellectuelle qui prévoit que les sociétés de gestion collective réserve une portion des sommes qu’elles collectent à des actions d’aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à des actions de formation des artistes.

Dans la pratique, la SPRE n’opère qu’une seule déduction sur le montant des sommes qu’elle collecte afin de couvrir ses frais de gestion. La retenue au profit des actions de soutien envisagée par l’article L. 321-9 du Code est effectuée par les sociétés et syndicats d’intervenants (en sus de leurs frais de gestion).

La rémunération équitable ainsi que le produits des taxes sur les supports vierges (rémunération pour copie privée1) est donc distribués de la manière suivante par les sociétés d’intervenants :

  •  les sommes réparties et payées : le titulaire du droit à rémunération a été identifié et est adhérent à la société de répartition ;
  •  les sommes réparties et non payées : le titulaire du droit à rémunération a été identifié mais n’est pas adhérent à la société de répartition ;
  •  les sommes non réparties : le titulaire n’a pas pu être identifié. Ces sommes deviennent indisponibles au bout d’un délai de 5 ans2 ;
  •  les sommes irrépartissables qui ne peuvent être réparties en raison de la nationalité de leur bénéficiaire ou du lieu de la première fixation du phonogramme.

Le total des sommes réparties et non payées, non réparties et irrépartissables est affecté à la création en vertu de l’article L. 321-9 du Code. Jusque en 2000, la loi prévoyait que seul 50 % du total des sommes prélevées au titre de la licence légale et 25 % de celles prélevées au titre de la rémunération pour copie privée étaient reversées à l’aide à la création, les SPRD utilisant les montants restants pour couvrir leurs frais de gestion.

Entre 1987 et 2001, près de 300 millions d’euros ont été utilisés dans le cadre de l’aide à la création soit vraisemblablement près de 457 millions d’euros qui n’ont pas été répartis à leur légitime ayants-droit3.

Le montant annuel des sommes utilisées au titre des aides à la création4 a augmenté à partir de 2001, du fait de la nouvelle rédaction de l’article L. 321-9 qui supprime le plafond de 50 % pour les « sommes perçues en application des articles L. 122-10, L. 132-20-1, L. 214-1, L. 217-2 et L. 311-1 et qui n’ont pas pu être réparties […] » et qui sont dorénavant affectées dans leur totalité à ces aides.

1 Cette rémunération est assise sur le prix de vente des supports, ses modalités de liquidation et de recouvrement sont déterminées par une Commission ad hoc (art. L.311-1 et suiv., art. R. 311-1 et suiv. CPI). Son montant est, en euros par heure d’enregistrement, de 0,29 pour les cassettes audio, de 0,43 pour les cassettes VHS, de 0,56 pour les Minidics et les CD-R audio, et de 0,33 pour les CD-R data, ce qui représentait pour l’année 2001 un total de 128,21 millions d’euros.

2 Passé ce délai, ces sommes sont affectées à l’aide à la création, néanmoins, elles ne sont prescrites qu’à compter de la dixième année de la date de mise à disposition.

3 C’est l’estimation du montant total des sommes réparties mais non payées, non réparties et irrépartissables avancé par A. Bertrand. Pour la seule année 1997, le rapport Mariani-Ducray évalue à 154,4 millions de francs (23,54 millions d’euros) le montant des sommes allouées à l’aide à la création par l’ensemble des SPRD.

4 Pour la seule année 1997, le rapport Mariani-Ducray évalue à 154,4 millions de francs (23,54 millions d’euros) le montant des sommes allouées à l’aide à la création par l’ensemble des SPRD dont 27 % provenaient de l’ADAMI et 12,8 % provenaient de la SPEDIDAM.

Nonobstant l’opacité qui préside à la gestion et l’attribution des aides à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à la formation des artistes1, les critiques unanimes de la doctrine portent davantage sur le principe même d’une telle utilisation.

En effet il ne s’agit plus, pour les titulaires du droit d’accepter qu’un faible pourcentage des redevances soit affecté à l’intérêt collectif immédiat ; c’est le législateur lui-même qui impose cette affectation pour une proportion importante, ce qui remettrait en cause le caractère individualiste du droit de la propriété littéraire et artistique2.

Nous verrons en outre que ce système de répartition prive volontairement certains intervenants de la rémunération à laquelle l’utilisation de leur phonogramme leur donne droit.

1 « L’usage qui a été fait de ces fonds très importants est très mauvais… On achète des immeubles, on fait de la politique immobilière, on finance des congrès syndicaux, éventuellement aussi des congrès politiques… Bref, on finance un tas de choses qui n’ont rien avoir avec ce domaine. D’autres dérives ont été relevées. Les fonds ont ainsi été affectés à des dépenses de fonctionnement des sociétés de gestion, alors que ce n’est pas fait pour cela, ou a des actions sans rapport avec les objectifs définis par la loi. De surcroît, il n’y a pas du tout de transparence dans le contrôle de l’emploi de ces fonds » Intervention du sénateur M. Charrasse, JO Débats, Sénat, séance du 21 mai 2001, p. 2588.

2 V. LUCAS (A.) et LUCAS (H.-J.), Traité de la propriété littéraire et artistique, Litec, Paris, 2e éd., 2001, qui s’interrogent sur la conformité de ces dispositions avec la Convention de Berne (à propos de la rémunération pour copie privée).

Egalement, plus cinglant : « Que penserait-on si un mécanisme analogue était mis en place dans d’autres domaines, puisque ce mécanisme consiste à prélever sur la rémunération due aux auteurs et aux artistes, c’est à dire sur leur salaire, des sommes pour financer des actions d’intérêt général – l’aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant, à la formation des artistes, etc… – actions qui devraient en principe être à la charge de la collectivité publique.

Moi j’attends que l’on m’explique ce qui se passerait si désormais l’on demandait aux chercheurs d’affecter une partie de leur salaire au financement de la recherche. Parce qu’on en est là ! » Intervention du sénateur M. Charasse ; réf. citées.

3/ Conclusion : la SPRE, clef de voûte du système de licence légale communication directe dans un lieu public

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