Définition et origine d’une crise : Qu’est-ce qu’une crise ?

I) Crise et Internet: deux phénomènes en pleine évolution
A) l’évolution des crises
1) Définition et origine d’une crise
a) Qu’est-ce qu’une crise ?
Pour Patrick Lagadec2, une crise est « une situation où de multiples organisations, aux prises avec des problèmes critiques, soumises à de fortes pressions externes, d’âpres tensions internes, se trouvent brutalement et pour une longue période, sur le devant de la scène, projetées les unes contre les autres…le tout dans une société de communication de masse, c’est-à-dire en direct avec l’assurance de faire la « une » des informations radiodiffusées, télévisées, écrites sur une longue période. »
Pour Thierry Libaert3, « la crise est un événement inattendu, mettant en péril la réputation et le fonctionnement d’une organisation ».
Même anticipée, la crise étonnera et surprendra toujours. L’événement déclencheur peut avoir été anticipé ou prévu, mais ce sont les conséquences qui sont les plus dangereuses (en terme de ventes, d’image, de confiance etc.). De la rapidité de réaction de l’entreprise, de sa réaction vis à vis de l’accident et des victimes, dépendra la montée en intensité de la crise.
La crise est donc un événement multi facettes, dont l’association et l’engrenage avec d’autres événements peuvent se montrer destructeurs.
Par conséquent, deux expressions majeures entrent dans la définition d’une crise : « événement inattendu » et « conséquences imprévisibles ».
Voici un exemple de typologie de crises4 :

Type de criseCatégorie
Economique
– EconomiqueDifficultés économiques,
– FinancièreOPA, effondrement boursier
– SocialeGrèves, conflits
Technique
– TechniqueDéfaillance de produit
– SanitaireSuspicion ou intoxication
– AccidentExplosion, naufrage, pollution
Politique
– PolitiqueCorruption
– RéglementaireImposition d’une nouvelle réglementation
Ethique
Action non acceptable socialement (fraude, scandale…)
Criminelle
– « Agression » criminelleSabotage, espionnage industriel
– Dissémination d’informationsRumeurs, contrefaçon, espionnage
Catastrophes naturelles
Inondation, tremblement de terre, incendie

Ces typologies ne sont pas fixes, certaines peuvent être croisées. Par exemple, dans le cas d’un virus informatique, on retrouve à la fois une crise de type technique et criminelle. Qu’elles soient de type économique, technique ou politique, toutes les crises peuvent trouver un écho sur Internet. Il n’y a pas de discrimination. Cependant, il est nécessaire de préciser que certains secteurs, comme le secteur financier ou boursier, sont plus exposés car ils peuvent faire l’objet de rumeurs ou de désinformation dans le but de déstabiliser une entreprise et voir le cours de son action chuter. Les enjeux sont donc importants. D’autres, comme le secteur environnemental, par le biais des associations et organisations, s’appuie beaucoup sur le réseau pour s’organiser et faire passer leur message.
On peut également ajouter que, lors de crises techniques, notamment celles directement liées à un produit, et plus particulièrement dans certains secteurs (par exemple, le secteur alimentaire), les entreprises peuvent être victimes de rumeurs, de critiques, qui peuvent ternir, sur un très long terme, leur image, et la confiance qu’on leur accordait ; la sécurité alimentaire et la qualité étant devenues des sujets sensibles dans notre société.
Nous allons maintenant étudier les différentes origines de crises.
b) L’apparition d’une crise : différentes origines
Une origine Interne
Les crises d’origine interne sont celles qui frappent le plus fréquemment une entreprise, car elles touchent directement « le cœur ». Mais ce sont pourtant celles qui sont le moins médiatisées.
Il peut s’agir d’une crise d’adaptation. Des événements extérieurs peuvent lui imposer des restructurations déstabilisantes, suite par exemple à un rachat par un autre groupe, à des fusions, à des ventes de parties de l’entreprise par les administrateurs etc. Toutefois, ce type de crise ne peut pas être du fait essentiel de l’entreprise.
Ce peut être également une crise d’organisation. La notion d’organisation comprend à la fois la structure et le management de l’entreprise. Des indicateurs spécifiques peuvent détecter les entreprises vulnérables :
Excès de centralisation du pouvoir, circuits relationnels de l’entreprise irrationnels, système d’information interne insuffisant, problèmes liés à la transmission du pouvoir etc.
La crise de cohérence est une crise qui peut porter atteinte à la culture qui sert de cadre de référence, et elle peut donc peut porter également atteinte aux actions. Cette crise n’est perceptible qu’au bout de quelques années, du fait de l’accumulation de dysfonctionnements, d’habitudes néfastes prises et inchangées etc. Le fait que chaque unité de l’entreprise tende à privilégier ses propres objectifs et ses propres relations, le cloisonnement, l’inaccessibilité de certaines informations, la carence en communication etc. peuvent être source d’incohérence.
Un autre type de crise d’origine interne peut venir de ses propres employés. Il s’agit de la crise de motivation. Elle peut revêtir deux formes :
– la rupture du contrat psychologique tacite avec l’entreprise5
– le basculement du système de pertinence des individus6
Une origine externe
Il arrive parfois que l’entreprise subisse des événements extérieurs à son détriment. Ces événements imprévisibles peuvent générer une crise dans la mesure où ils détruisent une partie de l’identité, des structures de l’entreprise altérant ainsi l’image de l’entreprise auprès des consommateurs. Si l’entreprise n’est que victime de cette crise, elle se doit de communiquer sur son état face à cette crise. C’est dans ce cas que l’on peut estimer la réactivité d’une entreprise en matière de communication : répondre vite et bien face à l’imprévu.
En matière d’événements extérieurs, on peut citer les agressions criminelles (sabotage, attentats, terrorisme, espionnage industriel…), les catastrophes naturelles (incendies, inondations…), l’apparition d’un produit de substitution, le boycott, etc.
Les intempéries climatiques sont les principaux facteurs de crise pour certaines entreprises, comme par exemple la SNCF. En 2002, malgré la prévision de température très basses en hiver dans certaines régions, des trains se sont retrouvés bloqués pendant plusieurs jours à cause de la neige et des caténaires gelés. L’inertie de la SNCF était flagrante, dans la mesure où Météo France avait lancé un bulletin d’alerte. La SNCF, quant à elle, a largement expliqué que les températures étaient tellement basses et les conditions tellement mauvaises que tout le dispositif prévu en pareille circonstance était inefficace.
Nous pouvons également donner l’exemple de la société Cofiroute. En janvier 2003, près de 15 000 automobilistes se sont retrouvés bloqués pendant 24h, au niveau du péage de Saint- Arnoult. Les fortes chutes de neige et le retour de vacances ont provoqué une paralysie totale de la circulation. Les moyens déployés par la préfecture ainsi que l’arrivée des pompiers et gendarmes n’ont pas calmé la colère des automobilistes (en majorité des familles avec enfants et personnes âgées).

5 Les relations avec les autres, l’image que le salarié a de lui, les projets qu’il cherche à réaliser, lui permettent de construire son identité. La crise qui survient entraîne une rupture de ce contrat.
6 Ensemble des préoccupations formant le système de pertinence. La vision de ces préoccupations est orientée vers l’avenir et la progression. En temps de crise, ces préoccupations n’ont plus de signification.

Le cas particuliers des rumeurs et légendes urbaines
Ces sources de crises sont plus difficiles à affronter car soit elles sont créées de toutes pièces (c’est le cas des rumeurs), soit elles appartiennent à un imaginaire collectif (ce sont les légendes urbaines). Dans les deux cas, elles font appel à des éléments subjectifs, à la psychologie des gens, à des domaines ambigus et instables, comme les mythes, les légendes, l’imaginaire etc.
Les rumeurs prennent les dirigeants au dépourvu, car elles n’ont pas d’origines identifiées. Partant de l’adage disant qu’« il n’y a pas de fumée sans feu », le public accorde souvent un semblant de vérité à des propos où des faits qui n’ont aucune raison, en fin de compte, d’être suspects.
On peut citer comme exemple, la mésaventure d’un commerçant en Martinique, accusé à tort, d’avoir mis de la chair humaine dans ses pâtés salés (sorte de petits pâtés en croûte). L’affaire, jugée en 1981, mit au grand jour l’origine de la rumeur : elle émanait d’un traiteur concurrent, moins bien placé sur le marché.
On n’oubliera pas non plus la rumeur, qui a couru pendant plusieurs mois, et qui supposait qu’Isabelle Adjani était atteinte du sida. Cette dernière a été obligée, de venir au journal de 20H sur TF1, pour démentir et montrer qu’elle était en parfaite santé.
Les légendes urbaines sont des récits incontrôlables sur un événement, qui se propagent oralement dans un groupe, et dont l’auteur est anonyme. Elles se déforment au fil des relais et leur contenu s’appauvrit. Les légendes urbaines, peuvent se transmettre de génération en génération et ont pour but d’effrayer les populations. Elles contiennent une part de superstition et de paranoïa et se nourrissent de la crédulité des gens.
Même les sociétés les plus respectées ne sont pas à l’abri de ces sources de crises7 :
Le logo de la société Procter et Gamble et le satan
Le logo de la société Procter et Gamble, au début des années 80, a fait l’objet d’une de ces légendes : l’arrangement des étoiles formerait le nombre 666 ; elle serait donc affiliée à une église au culte satanique, et une large part des profits réalisés irait à l’église de satan.

7 Mémoire La communication de crise : le cas TotalFinaElf, 2002

Ce logo, qui fut la cible de cette « légende » date de 1851, à l’époque où la société n’était connue que pour ses bougies. Il ne représente pas Satan, mais 13 étoiles qui rappellent les 13 colonies fondatrices et une lune qui sourit (« man-in-the-moon ») Coca cola n’a pas non plus été épargnée :
Logo de cocacola : pas de Mahomet, pas de Mecque
Le logo original, crée en 1886, retourné et légèrement modifié, signifierait en arabe : pas de Mahomet, pas de Mecque. La firme a été accusée d’anti-islamisme, puisqu’il suffirait de regarder à l’envers dans une glace pour voir apparaître le message… Cette légende a pris racine en Arabie Saoudite en 2000. Les conséquences ont été dramatiques pour l’entreprise, notamment en Egypte, où des boycotts ont été organisés. Ses ventes ont chuté de 15 %.
Le secteur Aéronautique, et plus particulièrement la société Airbus, a très souvent été victime de rumeurs et de désinformations :
En décembre 1986, une petite sud-africaine de 9 ans, est restée coincée _ heure sur le siège des toilettes d’un A300 des South Africa Airways. L’incident était dû à une valve défectueuse, et la différence de pression provoquée par cet accident technique a littéralement « collé » la petite fille sur le siège. Radios, télévisions, presse écrite ont rivalisé de schémas et de croquis pour expliquer cet accident « spectaculaire ». Il n’en n’a pas fallu plus pour que se forme la légende d’Airbus, « l’avion, dont les toilettes aspirent les passagers au risque de les cracher dans l’espace ». Terrifiant…
Les rumeurs et légendes sont des éléments à surveiller de près, car les conséquences peuvent être très négatives, soit sur l’image de l’entreprise, au sens large, soit en terme de perte de chiffres d’affaires.
Lire le mémoire complet ==> (Internet et la communication de crise: Internet est-il un accélérateur de crise ?)
Mémoire de fin d’études
Groupe ESA-Paris – Master Communication et Marketing

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