Facteurs du montage financier, Architecture et niveau d’endettement

Facteurs du montage financier, Architecture et niveau d’endettement

3. Facteurs propres au montage financier. Architecture et niveau d’endettement

a) La dette mezzanine comme facteur de réussite du montage

L’utilisation de ce type de financement trouve son origine dans le fait qu’une opération de LBO se heurte fréquemment à deux groupes d’intérêts contradictoires. D’un côté ceux des investisseurs en fonds propres qui cherchent à maximiser la rentabilité de leurs apports en utilisant un effet de levier maximal. De l’autre, ceux des prêteurs dont la principale préoccupation réside dans le remboursement de leurs concours.

Les prêteurs mezzanine ou mezzaners sont par définition subordonnés aux banquiers seniors. La subordination se vérifie en premier lieu au titre des paiements, tant en capital qu’en intérêts car les mezzaners ne peuvent être payés et remboursés qu’après le désintéressement des banquiers seniors.

La subordination est ensuite caractérisée par des garanties de second rang, les garanties accordées au groupe cible étant consenties en priorité au groupe cible. C’est cette caractéristique qui juridiquement leur confère le statut de quasi-fonds propres et de quasi-dette sur le plan financier.

Si comme dans la majorité des cas, ce n’est qu’au véhicule d’acquisition que les banquiers seniors et les mezzaners versent les sommes prêtées, la subordination de la dette repose uniquement sur les techniques de subordination conventionnelles.

Ces techniques sont variées. Elles peuvent faire appel au régime de la stipulation pour autrui, aux conventions sur le rang et, plus généralement, à la liberté des conventions avec des clauses de « turn over » ou de « claw back66 » aux termes desquelles les mezzaners s’engagent à verser aux banquiers seniors toutes les sommes perçues par eux tant que les banquiers seniors n’auront pas été totalement remboursés, que ce soit en capital ou en intérêts.

66 Dans la clause de « clawback » tout paiement reçu à tort par le mezzaneur doit être reversée au préteur senior.

Dans certains cas, la subordination conventionnelle est renforcée par une subordination structurelle, c’est à dire l’introduction d’un échelon supplémentaire entre les mezzaners et les holdings d’acquisition (newco).

Dans ce cas de figure, les banquiers seniors continuent de prêter à la newco tandis que les mezzaners prêtent, eux, à une société ad hoc dite « top company » ou « Topco » qui détient la totalité du véhicule d’acquisition. En cas défaut les mezzaners ne peuvent exercer de recours que contre la « Topco » qui à son tour ne dispose que des droits d’actionnaires contre la « newco ».

La subordination structurelle éloigne donc encore d’avantage les droits des mezzaners des actifs de la cible.

Le modèle anglo saxon de la dette mezzanine a été aisément transposée en droit français grâce aux techniques de subordination conventionnelle. La France souffre néanmoins d’un handicap par rapport à l’environnement anglo saxon où il est plus aisé de mettre en place des garanties sur les cibles au profit des mezzaners.

L’intérêt majeur de ce type de financement réside dans le fait qu’il permet de concilier des intérêts divergents (un conflit d’agence au sens de la théorie financière) entre les acteurs du financement du LBO. En effet, par son caractère subordonné, la présence d’une « mezzanine » tend à sécuriser l’issue du remboursement de l’ensemble des tranches de la dette senior. Par son aspect peu dilutif, ce type de financement n’affecte que marginalement la rentabilité des capitaux engagés par les investisseurs.

L’existence d’une dette mezzanine constitue donc un élément de souplesse et de sécurité qui tend à constituer une garantie à la réussite des opérations. Ce type de financement ne peut cependant être réservé qu’aux opérations les plus significatives en terme de montant.

b) Répartition du niveau des dettes et des fonds propres

Dans le cas d’un LMBO, les repreneurs-managers ne disposent que de ressources limitées. Ainsi le capital du holding est souvent d’autant plus faible que la participation des managers est importante.

L’intervention d’un investisseur professionnel à souvent pour effet de diluer immédiatement et radicalement toute intervention du management. Pour pallier cette difficulté on pratique une dissociation entre le capital et le pouvoir en émettant des actions sans droit de vote que seuls souscrivent les investisseurs financiers.

Il est en effet, primordial que les managers détiennent la majorité des droits de vote pour la direction de la société cible, c’est pourquoi ils se font consentir des actions à droits de vote double. Cet aspect est surtout imputable aux plus petites opérations ou la volonté de reprise et de maîtrise d’œuvre de la part du management est la plus affirmée.

Les salariés disposent de la majorité absolue des deux tiers du capital dans près de 40% des opérations de reprise. Ils se passent même d’investisseurs financiers dans 23% des cas. Il s’agit alors d’opérations de taille réduite., plus d’un LMBO sur deux En revanche fait l’objet d’ une participation importante des partenaires financiers (supérieure à 34%).

Les financiers orientent leur intervention en vue d’atteindre un effet de levier financier maximum.. Cette rentabilité est naturellement d’autant plus importante que la dotation en capital du holding est limitée. Cet effet de levier est néanmoins conditionné par la capacité bénéficiaire de la cible. Pour un banquier, un LBO constitue donc un « financement d’acquisition de sociétés dans lequel la charge de la dette d’acquisition repose principalement sur la profitabilité dégagée par la cible via des remontées de dividendes.

La bonne fin d’un LBO/LMBO, tant pour les investisseurs que pour les prêteurs et les managers dépend donc du respect de l’équilibre entre trois éléments:

  •  le prix d’acquisition de la cible
  •  la capacité de remboursement de la cible
  •  Le montant des fonds propres apportés par les repreneurs et les financiers, compte tenu des ressources des uns et des exigences de rentabilité des autres.

Le financement de l’acquisition va se faire au moyen des dividendes versés pendant trois à dix ans. Il convient donc d’équilibrer l’opération entre les fonds propres et les fonds d’emprunt. Plus ces derniers seront importants, plus les remboursements seront élevés obligeant de ce fait la société rachetée à verser des dividendes substantiels pendant plusieurs années.

Il est donc important de prévoir de n’affecter aux dividendes de la société rachetée qu’une fraction de ces profits pour éviter, d’une part de ne pouvoir faire face aux remboursements du holding dans les années difficiles et d’autre part, de vider la société rachetée de toute substance. On estime (mais ce ratio est seulement indicatif), que la distribution ne doit pas excéder 50 % des profits de la société rachetée.

Cependant, il convient de noter qu’il s’agit encore d’un problème à examiner lors de chaque opération; en effet, il est certain que les besoins de financement sont fort différents suivant les secteurs d’activité; on peut ainsi estimer que ce ratio de 50 % n’est pas envisageable dans le cas, par exemple, d’une société de haute technologie nécessitant la mise en oeuvre d’un programme d’investissement lourd et continu; on risque dans de tels cas de se retrouver face à une situation particulièrement dangereuse :

ƒ Soit l’entreprise rachetée n’effectue pas les investissements nécessaires à son développement économique ultérieur et ce, afin de servir le maximum de dividendes à sa société holding; dans cette hypothèse il y aura un risque de voir péricliter à terme la société rachetée;

ƒ Soit l’entreprise rachetée effectue les investissements nécessaires mais, dans ce cas, le risque de ne pas pouvoir mener à bien l’opération de rachat se profile : ses bénéfices étant amenuisés, la société holding bénéficiera de moins de dividendes et les remboursements seront moindres.

En revanche, plus les fonds d’emprunt sont importants par rapport aux capitaux propres, plus la rentabilité de l’opération sera élevée grâce à l’effet de levier.

c) Répartition dette et quasi-dette. Une dette mezzanine pour faciliter et sécuriser les deals.

Le financement bancaire du LBO est l’objet d’une « hiérarchisation » notamment pour les deals les plus importants initiées dans le cadre d’opérations faisant intervenir des fonds d’investissement professionnels.

La répartition de la dette se répartit entre la dette classique, dite « dette senior » d’une part, la dette subordonnée dite « dette mezzanine d’autre part. La dette mezzanine est parfois qualifiée de quasi-fonds propres. Elle sécurise la dette mais par les caractéristiques qui lui sont propres réduit le TRI des fonds propres.

La dette senior revêt des caractéristiques qui tend à la rapprocher de la dette classique d’acquisition d’actifs. Généralement accordée par des banques commerciales, de plus en plus spécialisées67 quand il s’agit d’opérations d’envergure internationale ou tout au moins européenne. La marge dépasse rarement 1,5 ou 2 points par rapport au taux court terme de référence68.

Le financement mezzanine est appréhendé comme un financement complémentaire ayant pour but de consolider la structure et l’équilibre du deal certaines banques l’assimilent au fonds propres (celles ci font alors la distinction entre les « fonds propres durs » et les « fonds propres et quasi-fonds propres »).

Elle est subordonnée, donc remboursable, après remboursement intégral du capital et des intérêts de la dette senior. Les intérêts perçus sont capitalisés. Les investisseurs en mezzanine ou mezzaners encourent un risque plus important que les autres prêteurs.

Ils exigent naturellement une rentabilité plus forte. Les spread peuvent atteindre 5 à 10 points par rapport au taux du marché. Il est Par ailleurs adjoint à la mezzanine un « equity kicker », c’est à dire une rémunération additionnelle et conditionnelle sous forme de plus value sur capital disponible à la fin du remboursement.

Cette plus value est le plus souvent assurée par l’exercice d’OBSA au terme du financement. Cette technique est souvent jugée satisfaisante car peu dilutive, elle conditionne le niveau de rémunération à des conditions prédéterminées d’atteinte de niveau de performance et en ce sens constitue donc un facteur de sécurisation et de réussite du montage dans son ensemble, même si les taux en vigueur peuvent apparemment être estimés prohibitifs au premier abord..

La dette mezzanine peut également constituer un facteur d’amélioration de la rentabilité des fonds propres et donc du TRI des investisseurs car elle permet de plus faiblement doter le holding d’acquisition en fonds propres.

Une opération capitalisée à 40 et un endettement de 100 aura une rentabilité moins forte qu’un deal où le holding est capitalisé à 20 et accompagnée d’une mezzanine de 20 et d’une dette de 60.

67 la Royal Bank of Scotland est la banque européenne la plus active. En France, sa part de marché est de loin la plus importante devant les banques domestiques françaises.

68 La plupart des dettes seniors sont délivrées sur base Euribor, les covenants de l’acte de prêt contraignant souvent les emprunteurs à souscrire une couverture de taux de 50 à 75% du montant de la dette, pour une durée de 3 à 6 ans.

L’effet de levier est plus fort dans le deuxième cas, cependant comme nous l’avons vu plus haut, l’exploitation la société cible n’est pas altérée d’un excès de ponction de ses cash flow libres dans la mesure ou elle ne fait que capitaliser les intérêts de la mezzanine.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: CNAM PARIS DESS Finance d'Entreprise - Chaire de Finance du Professeur Denis DUBOIS - Spécialisation Finance d'entreprise
Auteur·trice·s 🎓:
Virginie PHAM

Virginie PHAM
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté pour l'obtention du DESS Finance d'entreprise - 2001-2030
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