Comparaison épistémologique entre les modèles issus des sciences de la vie et les modèles de valorisation d’actions

Institut catholique des hautes études commerciales
Haute Ecole Groupe ICHEC – ISC Saint Louis – ISFSC

ichec

Enseignement supérieur de type long de niveau universitaire

Mémoire présenté pour l’obtention du grade de Master en sciences commercialesComparaison épistémologique entre les modèles issus des sciences de la vie et les modèles de valorisation d'actionsComparaison épistémologique entre les modèles issus des sciences de la vie et les modèles de valorisation d’actions

Par
Emmanuel de Coninck

Promoteur :
Monsieur Francis Vaguener

Année académique
2007 – 2008

Boulevard Brand Whitlock 2 – 1150 Bruxelles

Remerciements :

– A mon épouse qui m’a soutenu pendant ces années passées à l’Ichec
– A monsieur Vaguener pour ses excellents conseils et ses cours qui m’ont fait aimer les statistiques.

Introduction générale :

Ce mémoire a pour but de suivre l’évolution des méthodes d’évaluation d’actions en parallèle avec l’évolution des sciences.

En effet, les économistes ont toujours eu besoin de chiffrer la valeur de celles-ci.

On remarque que les modèles d’évaluation suivent l’évolution de la modélisation scientifique au fur et à mesure des nouvelles découvertes tant du point de vue scientifique que du point de vue mathématique.

L’évaluation de la valeur d’une entreprise est une nécessité constante, notamment lors de toute une série d’événements un achat, une vente, ou la réalisation emprunts, etc.

A tout moment, plusieurs intervenants économiques tels que un banquier, un investisseur ou un actionnaire souhaiteraient connaître la valeur de l’entreprise avec la plus grande précision possible afin d’envisager une décision d’investissement, la réalisation d’un emprunt, une cession ou une acquisition d’actions, etc.

On se rend bien compte que les méthodologies, qui permettent de chiffrer la valeur des entreprises, ont une importance capitale et influencent directement les décisions des intervenants et les montants qu’ils décideront d’engager.

La motivation de ce mémoire est essentiellement la recherche d’un parallélisme entre la physique et la finance. L’idée centrale est la bonne compréhension des modèles de valorisation d’une entreprise.

D’emblée, les réponses semblent évidentes.

Néanmoins la valeur d’une entreprise n’est pas uniquement déterminée par la valeur de ses actifs ou de ses fonds propres, elle est aussi déterminée par son potentiel de croissance, la valeur de son portefeuille de clients, le marché dans lequel elle se situe, la perception qu’en ont les investisseurs, les clients, les agences de notations et les interactions qu’elle a avec le monde en général.

Il faut ajouter que la valeur d’une société, étant donné la multiplicité de ses composants, est une variable aléatoire.

Le risque que cette entreprise véhicule est une des composantes essentielles de sa valeur. La notion de solvabilité qui en découle, devient, de nos jours, prépondérante.

Diagnostic du risque financier : solvabilité et liquidité

Les méthodes d’évaluation ont évolué de manière significative, versant de méthodes parfaitement déterministes vers des méthodes prospectives et probabilistes.

Nous serions tentés de dire que la finance a calqué son évolution «scientifique» sur la reine des sciences qu’est la physique.

Grâce à une comparaison épistémologique, nous allons illustrer que les méthodes financières et leur perception sont incontestablement inspirées des sciences de la nature comme la physique, la biologie, la météorologie, etc. ainsi que des courants de pensée qui ont présidés aux modélisations scientifiques.

L’économiste ou le financier ont toujours poursuivit l’objectif d’atteindre la précision du physicien.

Table des matières

Introduction générale
Avant-propos méthodologique
1° Partie : De la nécessité des modèles de valorisation
1.1. Introduction
1.2. Mécanismes des dernières crises boursières
1.2.1. Krach de 1987.
1.2.2. Bulle internet de 2000.
1.2.3. La crise des Subprimes en 2008
1.3. Bâle II
1.4. L’importance des modèles de valorisation
2° Partie : Une approche épistémologique
2.1. Introduction
2.2. Définition de l’épistémologie
2.3. Principes
2.3.1. Ce qui peut être considéré comme science.
2.3.2. Hiérarchie des sciences.
2.3.3. Le raisonnement.
2.3.4. Le concept de modèle du point de vue épistémologique
2.3.5. Méthodes de validation des théories scientifiques
2.4. Les courants de pensée
2.4.1. Le rationalisme
2.4.2. L’empirisme
2.4.3. Le positivisme
2.4.4. Le réalisme
3° Partie : Les méthodes d’évaluation déterministes
3.1. Introduction
3.2. Exemple de déterminisme en physique nucléaire.
3.3. Méthodes déterministes d’évaluation d’actions.
3.3.1. Modélisation par une méthode comptable et actuarielle
3.4. Décodage épistémologique
3.5. La nécessité de trouver des nouveaux modèles.
4° Partie : Mécanique quantique et mouvement brownien
4.1. Introduction
4.1.1. Principe d’incertitude de Heisenberg
4.1.2. Le chat de Schrödinger
4.1.3. Le rôle de l’observateur et l’impossibilité d’un modèle prédictif certain de valorisation d’actions.
4.1.4. Le fonctionnement du hasard : les distributions de probabilité.
4.2. Exemple de théorie de mécanique quantique : l’effet tunnel
4.3. Construction d’un modèle de valorisation d’action sur base du mouvement brownien.
4.3.1. Qu’est-ce que le mouvement brownien?
4.3.2. Caractéristiques du mouvement brownien.
4.3.3. Comparaison des données réelles avec les caractéristiques du mouvement brownien.
4.3.3.1. Choix des données
4.3.3.2. Définition de la distribution de probabilité pour les données utilisées.
4.3.3.3. Réduction des données
4.3.3.4. Vérification de l’indépendance des variations de cours.
4.3.4. Modélisation d’un cours de bourse grâce au mouvement brownien.
4.3.4.1. Générer des nombres aléatoires répartis selon une distribution donnée.
4.3.4.2. Description du modèle
4.3.4.3. Utilisation du modèle
4.3.4.4. Efficience des marchés
4.3.4.5. Remarques par rapport aux figures de l’analyse technique traditionnelle.
4.4. Décodage épistémologique.
4.5. La nécessité de trouver des nouveaux modèles
5° Partie : Théorie du chaos
5.1. Introduction
5.1.1. Qu’est-ce que la théorie du chaos?
5.1.2. L’effet papillon.
5.1.3. Les attracteurs étranges.
5.1.4. Les fractales.
5.2. Bases théoriques de la théorie du chaos
5.2.1. La dimension fractale ou dimension de Hausdorff.
5.2.2. L’exposant de Lyapunov.
5.2.3. Les bifurcations de Feigenbaum
5.3. Théorie du chaos et marchés financiers
5.3.1. Les cours de bourses comme objet fractal.
5.3.2. Les cours de bourses et l’équation logistique.
5.3.3. Recherche d’attracteurs.
5.3.4. Difficultés pour détecter un chaos sous-jacent.
5.3.5. Les enjeux de l’identification d’un chaos sous-jacent dans les marchés financiers.
5.3.6. Des pistes pour de nouveaux modèles.
5.4. Décodage épistémologique sur la théorie du chaos
Conclusion générale

Avant-propos méthodologique :

A l’heure actuelle, il n’existe aucune méthode fiable qui nous permette d’évaluer avec exactitude la valeur que prendra une action dans le futur et il n’en existera probablement jamais.

On ne tentera donc pas de démontrer mathématiquement qu’une méthode est meilleure qu’une autre mais plutôt de dresser un catalogue non exhaustif des méthodes qui ont été inspirées par la recherche scientifique.

L’économie étant une science humaine, on ne pourra jamais revendiquer des résultats d’une précision mathématique.

Ceci nous a amené à décoder le parallélisme entre les modèles scientifiques et les modèles économiques à travers l’épistémologie.

En effet, pour bien comprendre les points communs qu’on les deux démarches, il faut comprendre à quel point les méthodologies scientifiques, comme la méthodologie de la physique, et les méthodologies économistes sont semblables et à quel point les évolutions de la modélisation scientifique sont intimement liées aux évolutions de la modélisation économique.

Or ces ressemblances n’apparaissent que si on regarde les méthodologies qui sont appliquées à ces modélisations et la meilleure façon d’y arriver est bien d’analyser ces méthodes à travers l’épistémologie.

En effet, pour pouvoir analyser les démarches de diverses sciences, il faut pouvoir les comparer et pour ce faire, il faudra passer par un dénominateur commun.

Nous allons donc essayer de reconstruire le dialogue entre réalité et modèle qui a présidé à l’élaboration des modèles de valorisation d’actions et des modèles des sciences de la nature comme la physique, la biologie, la météorologie ou la mécanique quantique.

Ensuite, nous décoderons ces démarches à travers l’épistémologie pour montrer à quel point les deux réflexions sont intimement liées.

La grande différence entre une science humaine comme l’économie et une science dure comme la physique est qu’en économie, il n’est pas possible d’organiser des expériences reproductibles.

Contrairement à la physique, il n’est pas possible de prouver un fait empiriquement par des expériences renouvelables ayant toujours le même résultat.

En économie, on valide souvent les modèles a posteriori, c’est à dire à des données réelles mais passées.

L’économie, et en particulier les marchés financiers ont ça d’intéressant qu’il existe des milliers de mesures qui sont enregistrées depuis des dizaines d’années et que nous avons à notre disposition.

Dans notre étude, nous utiliserons principalement des données de cours de bourse pour appuyer nos développements.

Notre démarche vise surtout à améliorer la compréhension des méthodes qui sont à notre disposition pour comprendre et modéliser l’économie.

Jusqu’à présent, il n’existe pas de modèles prédictifs certains de valorisation d’actions et c’est un peu le graal inaccessible des sciences économiques.

On peut se douter que bon nombre d’économistes sont très attentifs à tous les développements de nouveaux modèles dans les autres sciences afin de trouver l’un ou l’autre modèle qui pourrait être adaptés à l’économie.

Ces modélisations impliquent directement des potentialités financières très importantes.

Il n’est pas impensable que les économistes soient plus perméables aux nouvelles théories scientifiques dans lesquelles ils peuvent puiser leur inspiration que leurs collègues physiciens, chimistes ou biologistes qui se cantonnent trop souvent à leur branche.

Au niveau des sources de données disponibles, comme je l’ai indiqué ci-dessus, nous ne pouvons travailler que sur base de données existantes et non sur des données que nous pouvons produire nous même par des expériences.

Dès lors, nous utiliserons des cours de bourse de valeurs phares des indices CAC40, BEL20 et AEX25 sur une période suffisamment longue pour pouvoir couvrir plusieurs crises boursières.

Ceci devrait être un nombre de données suffisamment grand pour pouvoir être confronté à nos modèles.

Avant de nous lancer dans le vif du sujet, il me semblait important de faire quelques réflexions au sujet des concepts que nous allons utiliser dans ce mémoire.

Concept d’action :

Définition : «Une action est un titre de propriété qui correspond à une partie d’une entreprise «1

Précisons, pour éviter tout abus de langage, qu’évaluer la valeur d’une action ou d’une entreprise est la même chose dans la mesure où il suffit de diviser la valeur de l’entreprise par le nombre d’actions émises pour connaître la valeur d’une action.

1 ComprendrelaBourse.com, Définition d’une action, 2008, url : http://www.comprendrelabourse.com/Marche_Action/Typologie/actions.htm, page consultée le 17/07/08

Dans notre étude, nous allons nous limiter intentionnellement aux actions comme instruments financiers et analyser principalement des sociétés cotées en bourse car cela nous permettra d’avoir l’historique des prix des actions pour ces sociétés.

Si nous pouvons aussi nous intéresser à des entreprises non cotées, nous n’avons aucun moyen de connaître l’historique de leur valeur sur un marché.

Concept de modèle :

Lorsque nous avons à décrire un phénomène scientifique ou économique, nous recourons la plupart du temps à un modèle mathématique. Celui-ci est une construction nous permettant de rendre compte le mieux possible du comportement d’un phénomène observé.

Cependant, le modèle ne pourra jamais refléter exactement toute la complexité d’un phénomène, le modèle mathématique la simplifiera.

Un modèle mathématique n’est jamais qu’une construction mentale qu’on essaye de superposer à la réalité de la nature. Dans ce sens, il ne faudra jamais oublier que le modèle n’est pas la réalité mais n’en est que le reflet.

Un bon modèle mathématique permet de faire des prévisions sur ce qui pourra être observé. Le modèle sera d’autant meilleur si des phénomènes non encore observés peuvent être expliqués par celui-ci.

Comme ce fût le cas de la théorie de la relativité d’Einstein dont certaines implications ne purent être confirmées que des dizaines d’années plus tard.

Il nous semblait assez important de signaler ce point car en économie nous sommes dans une science humaine, c’est à dire soumise au bon vouloir des Hommes.

Les concepts que nous allons développer restent des modèles dont la fiabilité par rapport à la réalité dépendra de l’activité humaine.

C’est ainsi que ces modèles ont évolués dans le temps pour s’adapter à l’évolution de l’activité économique et que les modèles utilisés hier ne sont pas toujours valables aujourd’hui. Ceci nous amène à nous intéresser au concept du temps.

Concept de temps :

sciences de la vieDans le sujet qui nous intéresse, le temps a un importance particulière.

En effet, nous pouvons nous contenter de valoriser une entreprise par une méthode comptable à un moment donné et nous arrêter là.

Cependant, la notion de valeur est elle-même conditionnée par le temps, c’est la raison des calculs actuariels : une valeur X au temps t n’est pas égale à une valeur X au temps t+1.

De plus, la validité des modèles est limitée dans le temps du fait de l’évolution constante du monde économique. En général, on se rend compte qu’ils ne sont plus valides lors des grandes crises économiques.

C’est souvent à la suite de ces crises que de nouveaux modèles font leur apparition, tenant compte des nouvelles données économiques.

Concept de valeur :

La notion de valeur peut avoir plusieurs facettes. En effet, on peut parler de valeur affective, de valeur intrinsèque, de valeur d’usage, etc.

On peut avoir tendance à séparer la notion de valeur de celle du prix où le prix serait le montant sur lequel tombent d’accord les parties pour effectuer l’échange de propriété.

Ce montant n’est pas nécessairement celui attendu par le vendeur ou l’acheteur mais plutôt un compromis entre les attentes des deux parties.

Cette nuance est à souligner dans notre étude car on peut très bien déterminer la valeur d’une action d’une entreprise mais cette valeur ne correspondra pas forcément au prix de cette action.

Pour une entreprise cotée en bourse, le prix est fixé par les échanges sur le marché selon la loi de l’offre et la demande, alors que la valeur de cette action pourra être différente.

Dans notre étude, nous allons plutôt nous attacher à déterminer la valeur d’une action plutôt que son prix sur les marchés. Ce qui nous amène à préciser les différences entre l’analyse fondamentale et l’analyse technique.

Différence entre analyse technique et analyse fondamentale

Lorsque l’on s’intéresse à la valeur d’une entreprise cotée en bourse, il y a deux approches possibles : l’analyse fondamentale et l’analyse technique.

L’analyse fondamentale consiste à définir de façon la plus précise et la plus fouillée la valeur d’une entreprise à un moment donné.

Pour se faire, on analyse et on redresse les comptes, les bilans, la structure de l’entreprise, le marché dans lequel elle se situe, la situation économique générale. Bref, tous les paramètres qui peuvent nous aider à fixer un prix.

L’analyse technique consiste à analyser le comportement des marchés grâce à divers indicateurs pour anticiper les fluctuations des prix des instruments financiers.

Même si les deux analyses semblent différer dans leur concept, le but est le même : évaluer le prix d’un instrument financier. Et bien que les optiques d’évaluation soient différentes, il existe des ponts entre les deux approches.

Considérons :

  • Vm : la valeur d’une action sur le marché
  • Vf : la valeur d’une action mesurée par l’analyse fondamentale.

Il suffit de regarder le cours d’une action pour voir que Vm varie constamment, alors que Vf serait moins variable dans le temps. On peut donc en déduire qu’il existe une sorte de bruit blanc Bf du marché qui affecterait la valeur Vf de telle façon que :

Vm = Vf +Bf

L’analyse fondamentale va s’occuper de définir Vf, alors que l’analyse technique va chercher à anticiper Bf. Mais pour connaître Vm, ils doivent chacun tenir compte l’un de l’autre :

  • L’analyste technique doit connaître Vf pour avoir une idée du prix de base et évaluer le prix d’une action comme étant sur ou sous-cotée.
  • L’analyste fondamental doit pouvoir évaluer Bf et définir une tendance à terme qu’on pourra actualiser et intégrer dans la valeur totale de l’action.

Cependant, il existe une différence essentielle entre les deux approches. L’analyse fondamentale est atemporelle. On analyse l’entreprise à un temps t et on fixe une valeur pour ce temps t.

Alors que l’analyse technique est entièrement tournée vers le facteur temps et ne fixe pas de valeur mais indique à quel moment et pour quelle valeur il est intéressant d’acheter ou de vendre une action.

Au cours de ce travail, nous allons nous intéresser principalement à l’analyse fondamentale, à définir une valeur plutôt qu’à définir un moment.

Cependant, nous serons aussi amener à nous tourner vers l’analyse technique pour quelques points particuliers lorsque nous ferons intervenir le facteur temps dans nos analyses.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: Institut catholique des hautes études commerciales - Haute Ecole Groupe ICHEC - ISC Saint Louis - ISFSC - Enseignement supérieur de type long de niveau universitaire
Auteur·trice·s 🎓:
Emmanuel de Coninck

Emmanuel de Coninck
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté pour l’obtention du grade de Master en sciences commerciales 2007-2008
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