Facteurs socio-économiques du surpoids chez les jeunes au canada

Facteurs socio-économiques du surpoids chez les jeunes au canada

2.2 Facteurs familiaux

2.2.1 Les facteurs socio-économiques

L’éducation est souvent invoquée comme déterminant. Leiter (1999) affirme que selon des recherches du Canada heart health surveys, faites auprès d’adultes, 47 % des hommes qui ont seulement une éducation primaire ou secondaire non-complétée sont obèses ou en surplus de poids (ce chiffre est de 38 % chez les femmes). En revanche, seulement 26 % des hommes qui ont au moins un degré universitaire le serait (19 % pour les femmes).

Dans cette enquête, on constate également que plus le niveau de scolarité est élevé et plus le temps consacré à l’activité physique sous forme de loisir va augmenter. Dans notre recherche, l’échantillon que nous allons observer est constitué d’enfants et d’adolescents de 6 à 17 ans, donc nous ne pourrons pas comparer leur niveau d’éducation à cause du jeune âge. Par contre, nous utiliserons le plus haut niveau de scolarité dans le ménage comme déterminant.

En effet, des parents ayant eu une haute scolarité peuvent prioriser certains comportements et étant donné que ceux-ci ont une influence sur les choix de leurs enfants (particulièrement en bas âge) cette variable est importante.

Tableau 2.6

Taux de poids normal, embonpoint et obésité, selon le plus haut niveau de scolarité dans le ménage, population à domicile de 2 à 17 ans, Canada, 2004

Taux de poids normal, embonpoint et obésité, selon le plus haut niveau de scolarité dans le ménage, population à domicile de 2 à 17 ans, Canada, 2004

Source : ESCC

Nos chiffres affirment que les taux combinés d’embonpoint et d’obésité diminuent progressivement à mesure que le plus haut niveau de scolarité dans le ménage augmente. En effet, cette combinaison passe de 36,8 % pour les ménages où le plus haut diplôme obtenu est inférieur à un diplôme d’études secondaires à 28,1 % chez les ménages où le plus haut diplôme obtenu est un diplôme d’études postsecondaires.

Ces résultats étaient tous significatifs au seuil de 1 % lorsqu’on les compare par rapport aux ménages où le plus haut niveau de scolarité était un diplôme d’études postsecondaires. Ces résultats sont similaires à ceux de Shields (2005).

Le revenu familial est un autre déterminant qui devra être pris en considération. Voici les résultats auxquels nous arrivons :

Tableau 2.7

Taux de poids normal, embonpoint et obésité, selon le niveau de revenu du ménage, population à domicile de 2 à 17 ans, Canada, 2004

Taux de poids normal, embonpoint et obésité, selon le niveau de revenu du ménage, population à domicile de 2 à 17 ans, Canada, 2004

Source : ESCC

Nous constatons ici que la classe de revenu la plus élevée possède des caractéristiques très différentes, les gens en faisant partie étant significativement moins obèses. C’est dans ce groupe où l’on retrouve le plus haut taux de gens ayant un poids normal (74,06 %) et le plus petit taux d’obésité (7,25 %).

En revanche c’est dans les ménages où le niveau de revenu est moyen-bas où le taux de gens ayant un poids normal est le plus bas (66,92%) et où le taux d’obésité est le plus élevé (12,62%). Il semble que la tendance générale de ce tableau est que le pourcentage d’individus ayant un poids normal augmente avec le revenu, avec l’exception des gens faisant parti du groupe ayant le revenu le plus bas. Nous avons deux hypothèses pour expliquer ce dernier phénomène.

Premièrement, il serait possible que les enfants des ménages au revenu inférieur aient moins accès à la technologie qui peut porter à engraisser (voiture, jeux vidéos, ordinateurs etc.). Deuxièmement, il est également probable que les ménages les plus pauvres souffrent de malnutrition, ce qui limite l’éclosion de l’obésité.

Pour épauler ce lien, regardons les résultats au tableau 2.8 de la page suivante, obtenus suite à l’étude du statut de sécurité alimentaire du ménage. Cette variable a été construite en se basant sur les résultats d’une série de 18 questions portant sur les habitudes alimentaires des ménages et indiquant si le ménage avait été capable de se permettre financièrement, d’avoir accès à toute la nourriture voulue et nécessaire dans les derniers 12 mois.

Tableau 2.8

Taux de poids normal, embonpoint et obésité, selon le statut de sécurité alimentaire, population à domicile de 2 à 17 ans, Canada, 2004

Taux de poids normal, embonpoint et obésité, selon le statut de sécurité alimentaire, population à domicile de 2 à 17 ans, Canada, 2004

Source : ESCC

Ici nous constatons que les ménages sécurisés, qui ne manquent de rien au plan alimentaire affichent le plus bas taux d’obésité en moyenne (9,37 %). En revanche, les ménages inquiets au plan alimentaire, c’est-à-dire ceux où il y a eu une anxiété par rapport au fait de manquer de nourriture et qui ont dû faire le compromis de couper sur la qualité de la nourriture en choisissant les aliments les moins dispendieux sont ceux qui affichaient le plus haut taux d’obésité (14,29 %).

Les ménages où des membres ont connu la sensation de faim due à un manque de nourriture arrivaient au second rang pour le niveau d’obésité (11,17 %).

Pour expliquer ces résultats globalement, comme nous le verrons au chapitre 3, nous croyons que ceci s’explique par le fait que les gens ayant un revenu plus élevé (ménage sécurisé au plan alimentaire) ont davantage les moyens financiers pour se permettre une diète plus saine et moins dense en énergie qui est également plus dispendieuse.

En revanche les individus appartenant à un milieu socio-économique défavorisé dans les pays industrialisés seront davantage à risque d’engraisser. Ce groupe regrouperait surtout les ménages inquiets au plan alimentaire.

Le fait que les gens faisant partie du niveau de revenu le plus bas ne soient pas significativement plus obèses s’expliquerait par la malnutrition. En effet, les gens faisant partie de la catégorie de revenu de ménage inférieure gagnaient moins de 10 000 $ par année s’ils étaient entre 1 et 4 personnes dans le ménage et moins de 15 000 $ s’ils étaient 5 personnes ou plus, ce qui est très peu.

Étant donné que nous parlons ici de ménages ayant au moins un enfant (dont comptant au moins 2 individus), un tel revenu est donc très bas. Les ménages inquiets au plan alimentaire, où il y a eu privation se trouveraient sans doute concentrés dans l’échelon économique inférieur.

Baril (1993) prétend que dans les familles à faibles revenus, on retrouve souvent des enfants trop maigres ou trop gros. La mauvaise alimentation et le constat que les produits les moins chers sont rarement les meilleurs pour la santé en seraient à l’origine.

Selon cet auteur, l’enquête Nutrition Canada réalisée dans les années 70 indiquait que les enfants de familles à faibles revenus mangeaient davantage de gras, de sucre, de pain, de céréales, de pommes de terre et moins de fruits et de produits laitiers que les enfants de familles à revenus moyens ou supérieurs. De plus, d’après Shields (2005), un faible statut socioéconomique aurait une forte corrélation sur l’obésité chez les adultes.

La même relation serait observée chez les enfants, mais l’association n’était pas aussi forte.

Un autre déterminant serait le travail à temps plein des deux membres du couple ou du parent monoparental. Dans notre base de données, il n’existe pas de variable pouvant nous dire si le ou les parents de l’enfant travaillent à temps plein. C’est pour cette raison que nous avons utilisé la variable de situation familiale. En effet, cette variable nous permet de définir si l’enfant habite avec ses deux parents, un seul parent ou à un autre endroit (par exemple en famille d’accueil).

Tableau 2.9

Taux de poids normal, embonpoint et obésité, selon la situation familiale de l’enfant, population à domicile de 2 à 17 ans, Canada, 2004

Taux de poids normal, embonpoint et obésité, selon la situation familiale de l’enfant, population à domicile de 2 à 17 ans, Canada, 2004

Source : ESCC

Ici nous constatons que les enfants vivant avec un parent monoparental sont plus susceptibles d’être obèses que ceux demeurant avec leurs deux parents. Ceci peut s’expliquer par le fait que le parent monoparental dispose de moins de temps pour cuisiner de la nourriture saine à son enfant, mais il y a également une raison économique qui explique ce phénomène. En effet, un ménage composé d’un seul parent va être généralement moins riche qu’un ménage composé de deux parents.

Nous pouvons résumer la pensée de Chou et al. (2004) en disant que l’obésité a commencé à prendre de l’ampleur chez les enfants au fil des 30 dernières années, avec la croissance du taux de participation et du nombre d’heures travaillées des femmes sur le marché du travail.

Cette baisse du temps à la maison serait associée selon lui, avec une augmentation de la consommation de fast-food dans les restaurants, de la demande de repas-minutes riches en calorie et de nourriture prête à manger dans les distributrices ou à l’épicerie étant donné que ce type de nourriture demande un temps minimal de préparation. Le temps des mères pour cuisiner des aliments sains à leurs enfants serait donc réduit à cause du travail.

Pour condenser la pensée de Côté (2008), les aliments déjà prêts du commerce sont plus gras et plus raffinés afin de donner un meilleur goût pour attirer le client, mais cela a également le désavantage d’être plus calorique ce qui favorise la prise de poids.

Ces aliments sont souvent servis en portions généreuses, ce qui donne l’impression autant à l’enfant qu’à l’adulte d’en avoir davantage pour leur argent. Selon French (2003), la taille des portions des aliments a augmenté constamment au cours des 20 dernières années. Par exemple, en 1950, le format régulier de bouteilles individuelles de Coca-Cola était de 6,5 onces.

Dans les années 70, ce format est passé à 12 onces et finalement au début des années 2000, à 20 onces. Il en est de même pour presque tous les aliments de fast-food, que ce soit les sacs de chips, les barres de chocolat, la grosseur des sandwichs ou les portions de frites chez McDonald’s. Ce même constat est aussi vrai pour les aliments qui ne sont pas du fast-food. Par exemple, il y a 20 ans, un bagel ordinaire avait un diamètre de 7,5 cm et contenait 140 calories, maintenant un bagel a un diamètre de 15 cm et contient 250 calories en moyenne.

D’après Côté (2008), ces aliments sont faciles à manger, s’avalant sans y penser, sans ustensile, en faisant une autre activité (par exemple en regardant la télévision ou en jouant à l’ordinateur). Puisque ces mets sont riches en gras et en sucres simples, les sucres sont vite absorbés. Ces aliments sont vite digérés ce qui cause un retour rapide de la sensation de faim.

Côté (2008) affirme que les résultats d’études sur le contrôle de l’appétit suggèrent qu’une consommation accrue d’aliments faibles en fibres et riches en hydrates de carbone simples (sucreries, biscuits, boissons gazeuses, céréales à déjeuner sucrées, muffins) favorisent le retour plus rapide de la sensation de faim. Cela pourrait expliquer l’augmentation de la consommation d’énergie et du taux d’obésité au cours des dernières années.

Les garçons souffrent davantage de l’embonpoint et de l’obésité que les filles. En effet comme le démontre nos résultats, les filles étaient significativement (seuil de 1 %) moins obèses que les garçons.

Tableau 2.10

Taux de poids normal, embonpoint et obésité selon le sexe, population à domicile de 2 à 17 ans, Canada, 2004

Poids normalGarçons 68,98 %Filles 71,59 %
Embonpoint20,46 %19,51 %
Obèse10,56 %8,9 %
Total100 %100 %
Source : ESCC

Nous constatons également que cette différence dans le seuil d’obésité se creuse avec l’âge. En effet, la différence entre les sexes s’accentue au fil des années étant non-significative dans la petite enfance et devenant progressivement plus élevée avec les années. Ici-bas, voici nos résultats selon le groupe d’âge observés chez les garçons (tableau 2.11) et chez les filles (tableau 2.12).

Tableau 2.11

Taux de poids normal, embonpoint et obésité selon le groupe d’âge chez les garçons, population à domicile de 4 à 17 ans, Canada, 2004

Taux de poids normal, embonpoint et obésité selon le groupe d’âge chez les garçons, population à domicile de 4 à 17 ans, Canada, 2004

Source : ESCC

Tableau 2.12

Taux de poids normal, embonpoint et obésité selon le groupe d’âge chez les filles, population à domicile de 4 à 17 ans, Canada, 2004

Taux de poids normal, embonpoint et obésité selon le groupe d’âge chez les filles, population à domicile de 4 à 17 ans, Canada, 2004

Source : ESCC

En effet selon nos données, 75,9 % des garçons de 4 à 8 ans avaient un poids normal, par rapport à 74,2 % des filles. En revanche, 65,5 % des garçons de 9 à 17 ans se trouvaient dans la fourchette de poids normal par rapport à 70,3 % des filles.

Nos résultats pourraient s’expliquer par le fait que les hommes semblent moins sensibilisés à la problématique du poids que les femmes, car rien ne laisse présager que les hommes soient métaboliquement portés à gagner plus de poids.

Au contraire, les femmes auraient plus de difficulté à perdre de poids que les hommes, car elles ont un métabolisme plus lent que ceux-ci à cause de leur moins grande masse musculaire, comme mentionné en 2.1.4. En support à la théorie de la sensibilisation, une enquête réalisée en 1999 indiquait que « 25 % des hommes essayaient de perdre du poids vs 40 % des femmes. Chez les individus ayant un IMC égal ou supérieur à 30, 46 % des hommes faisaient des efforts pour perdre du poids, contrairement à 64 % des femmes. » (Leiter, 1999, p. 2) Les femmes sont donc plus sensibles à leur poids et plus susceptible d’essayer d’en perdre.

Les résultats de Shields (2005) affirment également que le taux d’obésité chez les garçons est supérieur à celui des filles, bien que l’augmentation de l’obésité chez les enfants au cours des 25 dernières années a touché les deux sexes.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
La situation de l’obésité juvénile au Canada
Université 🏫: Université du Québec à Montréal UQAM
Auteur·trice·s 🎓:
Jules Dessureault

Jules Dessureault
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté comme exigence partielle de la maîtrise en économique - 2010
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